Comme d'habitude, il n'y a pas eu de vainqueur dans le match opposant l'ASSE au Stade Rennais, la tactique collective stéphanoise n'ayant pas pris le dessus sur les individualités adverses.


Si on regarde les matchs déroulés après la fin du mercato et le déplacement particulier à Paris, on peut croire que le staff stéphanois a son équipe-type. Celle qui a démarré contre Caen, Monaco ou à Lille, un 4-2-3-1 avec la paire M'Vila-Selnaes au milieu, Cabella en "10", Khazri avant-centre, Salibur ailier - pour l'autre côté, le choix étant fait entre Hamouma, Diony ou KMP en fonction des disponibilités et besoins défensifs. Et pourtant, dès qu'un élément-clé est suspendu (Khazri à Toulouse, Selnaes contre Rennes), l'ASSE change de visage tactique, avec un milieu à trois : M'Vila accompagné de Diousse à sa gauche et un offensif (KMP, resp. Cabella) à sa droite.

Les deux périodes contre Rennes reflètent ces deux visages de l'ASSE : innovation tactique en première, disposition classique en deuxième. Et si on voit le manque d'automatismes avant la pause et l'impossibilité de se créer des occasions après, on comprend mieux le dilemme de Jean-Louis Gasset. Qui semble quand-même avoir retrouvé la raison après cette expérience inconcluante : Khazri doit jouer avant-centre (et on suppose Cabella en "10"). Mais en attendant les futures échéances des l'ASSE qui confirmeront ou pas cette approche, regardons de plus près les deux périodes de l'ASSE contre Rennes.

 

Première période

En absence de Selnaes, suspendu, le staff stéphanois a décidé d'utiliser un système tactique en 4-3-3... un peu spécial. Tout d'abord, il diffère des 4-3-3 classiques dans l'animation offensive, les deux relayeurs (Diousse et Cabella) s'excentrant et les deux ailiers (Khazri et Salibur) repiquant dans l'axe :


Avec la montée des latéraux, cette animation offensive a créé des paires de joueurs de couloir assez inédites, comme nous le verrons plus bas. Mais ce système a été différent aussi dans la disposition défensive : un 4-3-3 se transforme normalement en bloc 4-1-4-1 - ou éventuellement en 4-3-2-1. Sauf que pour les Verts, le bloc a été en 4-4-2 :


Sur cette image, Beric et Salibur ont inversé leurs positions, mais le bloc stéphanois est resté bien en place, avec Cabella et l'avant-centre du moment en train d'empêcher la construction dans le milieu adverse.

Mais si on revient à l'animation offensive, elle devient plus claire avec un exemple, comme cette action à la 25e, quand Diousse récupère un ballon sur le côté gauche et joue en arrière avec Kolodziejczak :



On peut parler d'un triangle pointe basse au milieu pour les Verts, excentré à gauche. Le jeu change de côté via Perrin, jusqu'à Debuchy, et deux milieux axiaux y vont pour construire l'attaque :


La ligne des milieux rennais est haute et elle contient les Stéphanois, les empêchant de ressortir proprement. Après des combinaisons dans un petit périmètre, malgré le pressing, Perrin arrive à casser cette ligne avec une passe qui trouve Khazri, excentré à droite. Le contrôle est approximatif et finalement un long ballon est envoyé sur Beric, qui perd le duel, mais qui obtient une touche :


La remise en jeu 30 secondes plus tard permet aux Stéphanois d'échanger plusieurs passes dans cette partie du terrain avant que Cabella, sans solutions, décide de revenir balle au pied en arrière...


... et de jouer avec Subotic, qui écarte le jeu de l'autre côté. Diousse, milieu axial, est collé à la ligne de touche et Kolo combine avec lui :


Cette paire stéphanoise dans le couloir gauche (Kolo-Diousse) a son équivalent à droite (Debuchy-Cabella), les deux ailiers habituels étant plus axiaux. Diousse joue en arrière avec Subotic, avant de repiquer dans l'axe...


... et Cabella fait la même chose, ce qui resserre le bloc adverse. Le triangle pointe basse des Verts est de nouveau formé, en dehors du bloc rennais. La position de Khazri et Salibur tient les latéraux adverses loin des côtés, et Debuchy et Kolo sont libres. C'est le dernier qui est trouvé et son centre trouve Beric :


L'avant-centre de l'ASSE remet de la poitrine pour Salibur, mais ce dernier n'arrive pas à frapper proprement.



Cet animation offensive, avec les duos Kolo-Diousse et Debuchy-Cabella sur les côtés a été utilisée des nombreuses fois en 1MT. Comme un autre exemple, voici l'image qui précède la grosse occasion de Khazri à la 42e :


Le placement des Verts est très explicite: ils ont complètement abandonné l'axe du terrain au milieu, mais ils ont placé trois joueurs sur les deux défenseurs centraux adverses. Et quand M'Vila trouve Diousse, un décalage est créé dans l'axe et Khazri est trouvé... mais le gardien adverse réussit à dévier le tir sur le poteau.
 
 
 

Deuxième période

 
Un double changement de joueurs intervient à la pause, avec William Saliba à la place de Subotic et Loïs Diony à celle de Beric. Mais le changement plus important a été tactique : Cabella est monté d'un cran, Diousse est passé à la droite de M'Vila et l'ASSE a évolué en 4-2-3-1. Les 4 de devant ont beaucoup interchangé, mais Khazri a été principalement avant-centre et Diony ailier gauche. 
 
A titre d'exemple, une action qui part de Ruffier un peu après l'heure de jeu :


William Saliba, Diousse, M'Vila, les Verts préparent leur attaque devant un bloc en 4-4-2. Cabella se trouve initialement entre les lignes, mais il décroche...


... pour recevoir le ballon et lancer Kolo dans le couloir gauche. Le latéral rejoue avec Cabella, qui perd le ballon. Heureusement M'Vila le récupère et c'est de nouveau Ruffier qui relance :


Perrin joue avec M'Vila, qui cherche une solution. Cabella se trouve de nouveau entre les lignes et les attaquants coordonnent leurs appels :


Diony décroche et Cabella prend sa place à l'aile, Salibur se place aussi dans l'axe entre les lignes - cette zone n'est plus du tout désertée comme en 1MT. M'Vila joue avec Kolo, qui prolonge jusqu'à son "ailier". Le jeu continue dans un petit périmètre à gauche...


... ce qui a le don de bien attirer tout le bloc adverse de ce côté. Les 4 offensifs stéphanois s'y trouvent tous, Cabella combine avec Salibur, qui donne à Kolo, qui centre, mais le ballon est repoussé jusqu'à M'Vila. Et après encore un échange de passes...


... le changement de côté est enfin effectué, Debuchy se trouvant bien sûr tout seul. Malheureusement le milieu latéral adverse a bien suivi et le décalage n'est pas exploitable. Comme toute l'équipe était de l'autre côté, Debuchy se trouve tout seul. Finalement Khazri vient l'aider...


... mais il n'y a pas d'autres Stéphanois aux alentours - Diousse est resté derrière, dans l'axe. Sans autres solutions, le jeu est de nouveau envoyé en arrière et une nouvelle attaque doit être construite :


Tout le monde reprend sa place, Cabella entre les lignes, dans l'axe, les trois offensifs dans la défense, les latéraux plus haut, bref, un 4-2-3-1 classique. Et côté rennais, c'est pareil, le bloc 4-4-2 se reforme rapidement (même si le milieu gauche met du temps à revenir dans sa ligne). Après plusieurs échanges de passe dans la défense, sans solutions, Perrin envoie un long ballon sur Diony et la possession est perdue.


 

Conclusions

 
On est fin octobre et l'ASSE se cherche toujours tactiquement. Il est toujours difficile de trouver l'équilibre entre la création d'automatismes et l'innovation tactique pour que l'adversaire ne sache pas à quoi s'attendre. Et lors de ce match contre Rennes, les Verts ont essayé les deux, sans réussite. C'était une triste prestation et aucun des deux visages montrés avant et après la pause n'a été vraiment convaincant. Il faut maintenant espérer que le staff tire les bonnes conclusions et que bientôt on verra une équipe stéphanoise qui maîtrise réellement son sujet, avec un jeu collectif huilé et efficace.