ASSE 3-1 MHSC
Les Verts ont pris des risques : ils ont gagné avec la manière.
Le pari tactique de Galtier : c’est peut-être le fait le plus évoqué pour expliquer le match de dimanche. Difficile de l’occulter en effet. Mais avant une séance de tableau noir un peu poussée, revenons sur le match.
LE MATCH
L’adversaire a bien été analysé : Montpellier est pris par surprise et complètement déstabilisé. L’entame stéphanoise est réussie : dès la première minute, un corner de Tannane n’est pas loin d’être repris par Dylan Saint-Louis (prémonitoire), et sur le cafouillage qui suit Clément aurait pu catapulter le ballon dans les filets. Face au 343 stéphanois, le 442 losange montpelliérain est étouffé. Les Verts dominent sans partage et se procurent deux autres occasions très franches si bien qu’autour de la 20’ Frédéric Hantz réorganise drastiquement son équipe. Deux images valent mieux qu’une dissertation :
Le losange montpelliérain n'est pas visible car c'est Boudebouz, la pointe avancée, qui sort pour faire le pressing, les deux attaquants bloquant l'entrejeu stéphanois - situation anticipée et assumée par les Verts, nous le verrons ci-dessous.
En bas à gauche, manquent le latéral droit montpelliérain et Dylan Saint-Louis. S'il était visible, il serait dans la même position que Malcuit (tout en haut) : tout seul le long de la ligne. On comprend pourquoi les décalages sont faciles à créer.
Maintenant, voici la situation après réorganisation montpelliéraine :
Malgré l'image un peu floue, on voit bien qu'aucun joueur stéphanois ne bénéficie dorénavant d'un boulevard.
Et là, c’est le drame : sur une action apparemment anodine, et pour sa première incursion dans le camp stéphanois, Montpellier marque (23’). Si la réorganisation tactique des visiteurs n’est pour rien dans le but, elle réussit en revanche à rendre les stéphanois inoffensifs. Le 442 a en effet pour principale vertu d’assurer un quadrillage optimal du terrain. Quand il s’agit de défendre, difficile d’être plus efficace.
Qu’est-ce qui sauve alors les stéphanois ? Une plus grande maîtrise technique et collective, un mental au top, et un retour des vestiaires totalement réussi. Les deux premiers buts ne sont que le résultat de solutions classiques face à un bloc équipe bâti autour de deux lignes de quatre : le premier par la mise en défaut de sa capacité à coulisser (cf infra) ; le second par l’obtention d’un coup de pied arrêté dangereux sur un point de fixation latéral.
A l’avance au tableau d’affichage dès la 50', les Verts gèrent en patrons. Il faut dire que les héraultais à présent souffrent de la rigidité offensive du 442 et n’espèrent guère que sur quelques accélérations de Boudebouz. Montpellier est obligé de se découvrir et de prendre des risques : les courants d’air vont se multiplier jusqu’au but final de Beric, prise dans le dos particulièrement cruelle pour la défense languedocienne. On pourra regretter qu’il ait fallu attendre la 85’ pour tuer le match, alors que l’écart aurait pu être fait bien plus tôt ; mais enfin, la victoire est belle !
TABLEAU NOIR
Le 343 n’est pas une formation courante, même si elle n’est pas inédite dans le Forez - au point de supplanter pour de bon le 352 expérimenté ici ou là ces dernières saisons (rappelez-vous ce coup réussi à Gerland au printemps 2014, face à un autre 442 losange).
Pour autant, le 343 observé contre Montpellier est visiblement le résultat d’une réflexion en profondeur sur le système depuis plus d’un an. En effet, les faiblesses révélées pour sa première utilisation contre Guingamp en mai 2015 ont été traitées.
Premièrement la faiblesse de l’entrejeu est prise en compte : la paire Clément/Lemoine est déchargée de l’essentiel de la construction. Le jeu passera soit par des décrochages d’attaquants dans l’axe, soit par l’utilisation du surnombre sur les ailes. Pour autant, Clément et Lemoine ne se contentent pas de regarder si la pelouse est belle : ils sont plus que jamais disponibles pour intervenir en cas d’interception adverse, et tuer dans l’œuf toute situation de contre. Cependant, après le passage de Montpellier en 442, les cartes seront rebattues : à 2 contre 2, Lemoine et Clément vont prendre le dessus et prendre plus de latitude dans le jeu.
Deuxièmement le repli défensif s’organise sur deux étages pour faciliter la récupération :
- d’abord, un trident d’attaquants disposé de manière à empêcher toute relance courte aisée et ainsi obliger l’adversaire à allonger :
- puis un bloc très compact de 7 – donc en surnombre – pour récupérer la belle bleue :
En fin de match seulement, après le troisième but, on observera une défense plus classique en 541 (deux des trois attaquants venant boucher les ailes).
Troisièmement, l’utilisation de la largeur est optimisée autour de deux pivots axiaux, schématiquement un par moitié de terrain. Ces deux joueurs – Nolan Roux dans le camp adverse, Loïc Perrin dans le camp stéphanois – se sont ainsi énormément rendus disponibles en soutien pour réaliser de très propres changements de côté.
L’égalisation vient d’ailleurs à la suite d’une phase de préparation marquée par une double utilisation de Perrin en une poignée de secondes : une fois à droite pour Malcuit et faire bouger le bloc héraultais ; et une fois à gauche pour DSL et profiter du décalage créé :
Enfin, les fondamentaux mis en lumière par le passé ont été respectés :
- Les pistons, DSL et Malcuit, ont été à la hauteur – la mauvaise prestation de Polomat à Reims en janvier avait fait boîter toute l’équipe,
- Le pressing, et donc la condition physique, ont été sans faille – tous deux indispensables pour tenir le choc dans une telle configuration, souvenez-vous de Paris à la même époque.
Loin d’être une improvisation géniale face à un adversaire donné, le recours au 343 apparait comme une corde supplémentaire intéressante ajoutée à l’arc Vert.