Avant de retrouver son club formateur mardi prochain au stade de la Libération, l'attaquant boulonnais Stephen Vincent a accepté de répondre à quelques questions.
Quand on s'amuse à "googler" Stephen Vincent, le premier mot proposé par le moteur de recherches est "benet". C'est bête non ?
Oui, c'est bête ! (rires) Je crois qu'il y a un autre Stephen Vincent qui s'appelait Benet.
En effet, Stephen Vincent Bénet est un auteur américain qui a remporté le Prix Pulitzer en 1929 pour son poème narratif sur la guerre de Sécession, "John Brown’s Body".
Ah OK, c'est à cause de lui alors ! (rires)
Ton coéquipier Viviani nous avait dit que ses parents l'avaient prénommé Jody car ils aimaient bien le pilote de Ferrari Jody Scheckter, sacré champion du monde de Formule 1 en 1979. Est-ce en l'honneur de l'écrivain que tes darons ont choisi le prénom Stephen ?
Ecoute, c'est une bonne question, il faudrait que je leur demande ! A la base mon père voulait m'appeler Maxence comme lui, mais ma mère a mis le holà, elle ne voulait pas avoir deux Maxence à la maison. Je crois que c'est ma grand-mère paternelle qui a eu l'idée de ce prénom "Stephen". Mais je ne sais pas si elle pensait à un Stephen en particulier !
Es-tu le fils caché de Maurice Vincent ou de Francky Vincent ?
Je ne sais pas ! (rires) Je ne pense pas être le fils de Maurice Vincent (rires). Par contre, avec mon père, on a déjà croisé Francky Vincent au marché antillais de Saint-Denis. Mais il ne m'a pas reconnu, il ne doit pas être de la famille.
Si Tabanou te défie balle au pied mardi prochain, tu le laisses passer en lui disant "Vas-y Francky, c'est bon" ?
Non, c'est une fois que je l'aurais passé que je lui dirais "Francky c'est bon, allez au revoir" ! (rires) C'est un bon joueur mais je ne le laisserai pas passer.
Tu es d'origine martiniquaise comme Kévin Théophile-Catherine, que tu risques de te coltiner mardi. Que penses-tu de ce joueur ?
J'ai comme lui un père martiniquais, et comme lui j'ai des attaches en Bretagne. Ma mère est de Tintiniac, dans l'Ile-et-Vilaine. J'aime bien ce défenseur. Il est costaud, il connaît bien la Ligue 1. Il a percé à Rennes, ensuite il est parti découvrir la Premier League. Il fait du bien à Sainté. Maintenant, je pense qu'il peut y avoir quand même un peu d'espace dans son dos, hein ! (rires)
Nicolas Marin nous a dit qu'il sera forfait pour ce match de Coupe de France. Toi aussi, t'as prévu de te blesser pour ne pas nuire à ton ancien club ?
Oui, d'ailleurs en ce moment je suis blessé ! J'espère être apte pour ce match mais je ne suis pas sûr d'être rétabli. Peut-être que c'est le destin, peut-être que c'est pour laisser la voie libre à Sainté ! (rires) Plus sérieusement, j'espère être là mais c'est pas gagné… En fait j'avais bien démarré la saison, mais je me suis fait une petite déchirure. J'ai ensuite repris un peu trop tôt, j'avais mal fait la réathlétisation donc ça a re-pété derrière. J'ai repris il y a quatre semaines. J'ai fait mon premier match, il y dix jours, contre Avranches mais entretemps je n'avais pas joué avec la réserve. Comme il y avait quelques pépins au niveau de l'effectif, ma reprise a été un peu précipitée. Débuter par quatre-vingt minutes de jeu, ça ne m'a pas vraiment aidé. Du coup j'ai eu une petite pointe, un décollement aponévrotique. Ce n'est pas méchant mais ça risque de me contraindre à déclarer forfait contre Sainté. Disons que c'est du 50-50. Le maximum que je puisse espérer, c'est d'être dans le groupe. Ensuite, ça ne veut pas dire pour autant que je serai amené à jouer.
Les supporters boulonnais se sont rués sur la billetterie dès que les places pour le quart de finale ont été mises en vente. Selon Nord-Eclair, un dénommé Mathieu est le premier à être arrivé au stade de la Libération mardi, cinq heures avant l’ouverture des guichets. Plus loin dans l'article, il est dit qu'un certain Sylvain est le premier à avoir décroché le précieux sésame. Il ne se serait pas fait "niquer" le Mathieu en question ?
Je ne sais pas ce qui s'est passé avec ce Mathieu, il n'a pas eu de bol ! J'espère qu'il a eu son billet quand même ! (rires)
Ce Sylvain qui lui a grillé la politesse, c'est ton frère ?
En fait ça ne m'étonnerait pas, on le surnommait TGV ! Mon frère viendra seulement si je joue. Sinon je pense qu'il restera tranquillou à la maison à Paris.
C'est pour suivre Sylvain que t'as rejoint Sainté ?
Exactement ! A la base, je devais signer à l'INF Clairefontaine mais mes parents ont préféré que je rejoigne mon grand frère au centre de formation de l'ASSE. Ils trouvaient ça mieux qu'on soit ensemble à Sainté. On a passé cinq ans là-bas.
A quel moment as-tu tapé dans l'œil des recruteurs stéphanois ?
Quand j'avais 12 ans, lors d'un match contre Drancy. Je jouais à l'époque à Villemomble avec mon frère car j'étais surclassé. Georges Claire, qui était à l'époque recruteur pour l'ASSE dans la région parisienne, est venu voir mes parents à l'issue de la rencontre. Du coup on a pu passer un essai de quatre ou cinq jours à l'ASSE en même temps que Hatem Ben Arfa et un autre joueur qui n'a pas percé, Jonathan Tokplé. Je me souviens que les installations nous avaient impressionnés. J'ai intégré le centre de formation de l'ASSE en 1999 à douze ans et demi. Avec le recul, je me dis que c'est super jeune. De nos jours, à cet âge-là, on fait signer des accords de non sollicitation, on attend que les jeunes soient un peu plus âgés pour les intégrer. Je pense que l'ASSE ne m'aurait pas pris à cet âge s'il n'y avait pas eu mon frère, de deux ans mon aîné.
Quels souvenirs gardes-tu de tes huit ans au centre de formation ?
Je garde de supers souvenirs, j'ai vraiment passé de très bonnes années. Je ne dirais pas les meilleures car aujourd'hui je suis papa et je passe aussi de bons moments. Mais l'ASSE m'a marqué à vie, j'ai rencontré des personnes merveilleuses. Sainté c'est toute mon adolescence, c'est aussi la ville où j'ai eu mon fils.
D'un point de vue sportif, as-tu gardé en mémoire des moments forts ?
Oui, j'ai connu pas mal d'émotions avec les équipes de jeunes de l'ASSE et de l'équipe de France. J'ai fait une finale de championnat de France avec les U15 de la génération 85 des Loïc Perrin, Samy Houri et compagnie. On perd en finale contre Clairefontaine. J'ai le souvenir aussi d'une demi-finale avec Sainté qu'on a perdu contre Strasbourg. Eric Mouloungui nous avait fait mal, il avait fait un triplé.
Quels joueurs t'ont le plus marqué humainement et footballistiquement ?
Le joueur qui m'a le plus impressionné, sur tous les plans, c'est Bafé ! J'ai vraiment été frappé par sa force de caractère, dans tout ce qu'il entreprenait. Que ce soit dans ses négociations de contrat, dans le travail qu'il faisait au quotidien. Il avait déjà une détermination incroyable. Il faisait partie de ce très bon cru 85 : outre Bafé, il y avait Samy Houri, Idriss Ech Chergui, Loïc Perrin… Moi je faisais partie des 86 surclassés avec Mouhamadou Dabo, Alexandre Barthe. On avait une belle génération !
As-tu gardé le contact avec des anciens coéquipiers stéphanois ?
J'ai surtout gardé contact avec Samy Houri. On s'entendait déjà très bien, et notre premier prêt commun à Raon L'Etape a consolidé notre amitié. On est resté très proches. Je suis également resté en relation avec Idriss Ech Chergui. Avec les autres c'est plus occasionnel, c'est plutôt sur facebook.
Contrairement à toi, Loïc Perrin n'a pas été international chez les jeunes. Quand tu jouais à ses côtés dans les équipes de jeunes, tu le voyais déjà en haut de l'affiche ?
Loïc a quand même fait des sélections pré-France. Mais contrairement aux autres noms cités, il a connu une progression non pas spectaculaire mais discrète, linéaire. Il a toujours été bon dans les catégories de jeunes, mais il progressait chaque année à son rythme, sans que tout le monde fasse gaffe à lui. Mais à un moment donné, il a atteint un niveau qui nous a tous interpellés. On s'est dit "putain mais Loïc il est vraiment devenu très bon !" Je regarde parfois les matches de Sainté, je trouve qu'aujourd'hui c'est le meilleur. C'est le joueur "plus" de Saint-Etienne. Il a malheureusement été freiné par des blessures au début de sa carrière mais il a quand même atteint le niveau international. Quand je jouais à ses côtés en jeunes, je misais davantage sur Bafé et Samy que sur lui pour signer pro. Mais quand j'ai vu le niveau qu'il avait atteint en réserve, je me suis dit qu'il pouvait prétendre à faire une belle carrière en pro.
Loïc a une image de gendre idéal mais il doit bien avoir quelques défauts voire quelques casseroles, non ? Toi qui l'as très longtemps côtoyé, aurais-tu une anecdote amusante à nous raconter à son sujet ?
Honnêtement, c'est un vrai bon mec, je ne lui connais pas de casseroles. Attends, laisse-moi réfléchir quand même… Non, j'ai beau chercher, je ne vois pas ! Après, il aime bien faire l'accent stéphanois. Il en joue parfois, il aime l'exagérer un peu. Moi j'aime bien ! (rires)
Tu as signé pro dans ton club formateur mais tu n'as pas joué le moindre match officiel avec l'équipe pro. Qu'est-ce qui t'a manqué pour t'imposer au plus haut niveau ?
Je suis tombé dans une période où il y avait quand même beaucoup de monde devant moi. Il faut le reconnaître, la concurrence était élevée. C'est Frédéric Antonetti qui m'a fait signer pro, mais il est parti peu de temps après. Je pense que les changements d'entraîneurs ne m'ont pas aidé. Après Anto il y a eu Baup, puis Hasek, Roussey… Quand un nouvel entraîneur débarque, je ne dirai pas que ce sont les jeunes qui en pâtissent mais presque. Maintenant, je me dis que si j'avais été au-dessus du lot, j'aurais pu percer. Il faut être lucide, je pense qu'il m'a manqué aussi un petit truc. J'avais l'impression d'être prêt mentalement et techniquement, il m'a peut-être manqué un peu de physique.
Depuis ton départ de Sainté, es-tu resté un fan des Verts ?
L'ASSE est toujours mon club de cœur car j'y ai quand même passé de belles années ! J'aurais préféré qu'il y ait un autre dénouement avec mon club formateur, mais je ne crache pas la pierre sur Sainté (sic) Je ne reste pas amer par rapport à tout ça. Mais je n'irai pas jusqu'à dire que je suis fan des Verts au point de regarder tous leurs matches. Je suis parisien dans l'âme, je viens de Neuilly-sur-Marne donc je suis quand même pour Paris. Mais j'ai beaucoup apprécié quand les Verts ont gagné la Coupe de la Ligue, j'étais très heureux pour eux.
Que t'inspire le parcours des Verts cette saison ?
Je trouve que les Verts ont une très grosse solidité, c'est ce qui m'impressionne le plus chez eux. Van Wolfswinkel n'est pas mal devant, même si j'ai l'impression que par rapport au ratio occasions/buts marqués, il pourrait peut-être s'améliorer. Moi je trouve que Ricky a du potentiel, à peaufiner certainement... Sainté, a une équipe solide qui me plaît, même si, au niveau du jeu, c'est un peu moins fluide.
Quels joueurs stéphanois apprécies-tu particulièrement ?
J'aime beaucoup Romain Hamouma, je trouve qu'il est un peu sous-coté par rapport à tout ce qu'il fait. J'aime bien aussi Max Gradel, il fait du bon boulot. Mais la valeur plus, c'est Loïc Perrin. Stéphane Ruffier aussi, c'est un monstre, un roc.
Comment décrirais-tu ton équipe de Boulogne ?
J'ai fait pas mal de saisons en National, que ce soit avec Raon L'Etape, le Paris FC ou Rouen. Je connais bien ce championnat, souvent on y trouve des équipes costauds, solides, qui misent sur le physique. Nous, contrairement à tout ça, on est une équipe joueuse. C'est un peu un paradoxe. Pour monter de National en Ligue 2, on dit qu'il faut avoir une équipe costaud, un grand devant qui marque des buts. Nous, on a des petits gabarits qui jouent assez bien au ballon, et on arrive plus ou moins à s'en sortir. C'est le style de jeu du coach, c'est sa philosophie.
Les anciens Verts du Red Star tenaient un peu les mêmes propos sur leur équipe avant leur huitième de finale à Jean-Bouin.
C'est vrai. Lorsqu'on a joué contre eux, on avait fait un très bon match mais on avait perdu 2-0. On avait eu la possession du ballon mais j'avais constaté que c'était une équipe joueuse, atypique elle aussi par rapport aux autres formations du National.
Quelles sont les individualités dont les Verts devront particulièrement se méfier mardi prochain ? Tu peux tout nous dire, de toute façon la Blache a supervisé vos derniers matches !
Ah, oui, Alain Blachon, je le connais, il m'avait pas mal soutenu quand j'étais à Sainté, c'est un bon mec. Mais il ne faut pas que je dévoile trop de choses sur mon équipe quand même ! (rires) Je ne veux pas non plus faire de jaloux en citant des noms. On n'a pas d'individualités hors norme, on est avant tout un groupe, un collectif.
Malgré sa supériorité numérique Saint-Etienne a eu un mal fou à éliminer le Red Star. Si les attaquants stéphanois peinent encore à trouver les filets au stade de la Libération, feras-tu parler le Pierrick Cros qui sommeille en toi ?
(Rires) J'ai eu de la peine pour lui, car tout comme moi, c'est son club formateur. Le but contre son camp, c'est malheureux, c'est le destin qui veut ça. Moi ce que je veux, c'est être sur le terrain mardi. Je fais tout pour et après on verra.
Si tu n'as pas l'occasion de nous mettre un petit csc, pourrais-tu demander à Jody Viviani de se trouer ?
Ce serait plus facile pour lui ! (rires) Logiquement il devrait être titulaire contre Sainté. Il joue aussi bien en championnat qu'en Coupe, comme Stéphane Ruffier. Pour les Verts, la Coupe de France est un objectif. Pour nous, ce n'est pas un objectif, mais depuis le début on veut aller le plus loin possible, c'est pour cela que le coach a mis l'équipe type, dès notre entrée en lice. Mardi ce sera un bon match à vivre, on sent qu'il y a un gros engouement en ville autour de ce match.
Une septième Coupe de France pour Sainté et une montée en L2 pour Boulogne, tu signes ?
Je signe de suite !
Merci à Stephen pour sa disponibilité et à Stéphanois pour la retranscription.