C'est ainsi que Claude Puel caractérise l'état d'esprit de ses joueurs après leur nouvelle défaite, à Montpellier : la septième en huit matchs...
En conférence de presse d'après-match, le coach stéphanois estime que son équipe aurait mérité plus qu'un match nul : "ç’aurait été bien de prendre un point ici car il y avait largement la place. J’aurais été déçu avec un match nul, imaginez ce que je ressens en repartant d’ici avec une défaite". Et il a raison, les Verts se sont procurés beaucoup plus d'occasions franches que leurs adversaires du jour. Mais ils ont de nouveau été très inefficaces dans les deux surfaces de réparation : "on a pris un but sur leur première occasion de la rencontre. Derrière, on a eu les opportunités pour revenir. (...) Quand on ne met pas nos occasions au fond et qu’on plie sur la première occasion de l’adversaire, c’est qu’on accuse le coup".
Enfin, c'est surtout en 1MT que les Stéphanois se sont procurés des grosses occasions, pas en 2MT, en supériorité numérique. En voici quelques exemples.
Enfin, c'est surtout en 1MT que les Stéphanois se sont procurés des grosses occasions, pas en 2MT, en supériorité numérique. En voici quelques exemples.
Du jeu rapide dans le dos de la défense
Les Verts ont démarré ce match dans un système similaire à celui de Montpellier, basé sur une défense à 3/5, avec la première apparition en Ligue 1 de Maçon, au poste de piston droit :
Mais si leurs adversaires jouaient avec un milieu offensif derrière deux avant-centres (3-4-1-2), les Stéphanois alignaient trois offensifs mobiles (3-4-3), avec un seul avant-centre, Diony. Les deux systèmes ne sont pas identiques, mais en plus ils ont été animés différemment par les deux équipes.
Côté ASSE, le plan de jeu a été assez facile à lire : jouer dans le dos de la défense adverse, haute et lente, avec Boudebouz en rampe de lancement principale et Diony ou Bouanga en attaquant qui prend la profondeur. Plusieurs grosses occasions ont été ainsi créées, comme par exemple à la 19e, quand Maçon joue une touche avec Boudebouz :
La défense adverse est placée haut sur le terrain, avec Diony et Bouanga à surveiller. Boudebouz et Maçon échangent des passes une fois, puis une deuxième fois...
... et Diony fait un appel en profondeur. Toute la défense le suit et recule, ce qui permet à Bouanga, resté un peu en arrière, de recevoir tranquillement le ballon de Boudebouz. Il attend le soutien de Trauco, parti de loin...
... mais arrivé lancé dans la surface, où il efface un défenseur avant de tirer dans le gardien, ratant ainsi son face-à-face.
Un autre exemple intervient à la 35e minute, quand Ruffier joue long une remise à 6 mètres :
Les Verts sont très disciplinés, en 3-4-3, avec Diony qui va au duel aérien. Le ballon arrive dans les pieds de Boudebouz et comme la défense adverse est très toujours haute et lente...
... sa passe lobée pour Bouanga permet à ce dernier de se présenter seul face au gardien montpelliérain. Qui sauve encore les siens.
Trois minutes plus tard, Ruffier joue à la main avec Cabaye, pendant que le bloc adverse est présent dans la moitié stéphanoise :
Cabaye prolonge jusqu'à Boudebouz, qui efface un adversaire, mais pas un deuxième, et le ballon est perdu. L'animation offensive de Montpellier passe dans les couloirs, dans cet exemple à droite :
Le ballon parvient jusqu'au piston droit, qui prolonge sur le même côté vers un des deux avant-centres, qui voit son centre facilement capté par Ruffier. Qui joue de nouveau à la main avec Cabaye...
... et cette fois-ci, le ballon ne passe pas par Boudebouz, c'est le milieu stéphanois qui se charge de joue long. A destination de Diony...
... qui élimine parfaitement son défenseur avec une feinte de corps et sprinte vers la surface adverse. Il lève la tête et sert Bouanga, qui arrive lancé après avoir déposé à la course le latéral montpelliérain. Qui commet une faute juste à l'entrée de la surface en position de dernier défenseur.
Les Verts se retrouvent en supériorité numérique, mais leur animation offensive reste basée sur des appels en profondeur. Comme en toute fin de la 1MT, quand Aholou repousse de la tête un coup franc adverse :
Le ballon arrive dans les pieds de Boudebouz, qui le garde et attend l'appel en profondeur. Diony se trouve initialement à peu près à la même hauteur, mais fait l'effort nécessaire :
Il est bien trouvé par la passe de Boudebouz et arrive jusqu'à l'entrée de la surface. Bouanga, parti derrière lui, sprinte pour lui proposer une solution...
... et reçoit un ballon parfait sur les 16 mètres. Un mauvais contrôle et un nouveau face-à-face raté par les Stéphanois, décidément pas en réussite offensivement...
A quoi bon utiliser plusieurs défenseurs centraux ?
Rater des occasions, ça arrive. Mais quand on combine ceci avec des approximations défensives, il est très difficile d'obtenir un résultat. L'animation offensive de Montpellier passait principalement par les côtés, avec des centres à destination des deux avant-centres. Et malgré le nombre important de défenseurs sur le terrain (3 ou 5, selon), l'ASSE a eu du mal à gérer ce genre de situation. Par exemple, à la 25e, le bloc stéphanois est en place :
Un 5-2-3, mais le milieux Cabaye-Aholou ne sert pas à grande chose, les 3 milieux adverses ne sont pas placés dans l'axe. Le jeu part de la gauche, du milieu offensif, et relayé par un autre, arrive au piston droit. Qui s'appuie sur le 3e milieu axial, qui le lance dans le couloir droit. Comme les 5 autres Verts ont été contournés par ce jeu, c'est aux 5 défenseurs de gérer l'attaque adverse. Saliba sort sur un milieu, Trauco sur le piston, mais les deux sont trop loin et le une-deux fonctionne bien, le latéral montpelliérain se trouve donc en position de centre...
... poursuivi par 2 défenseurs. Il en reste 3 pour couvrir les deux avant-centres, il n'y a pas de déséquilibre dans la surface...
... en théorie. Parce qu'en pratique, Perrin serre bien son attaquant, mais Fofana et Maçon ne vont pas du tout au marquage de l'autre, qui marque de la tête, complètement seul dans la surface.
Ce n'est pas seulement sur l'action du but que le placement des défenseurs stéphanois a été approximatif. Par exemple, à la 31e, Trauco essaie une relance, mais sa passe est interceptée par un milieu adverse :
Le piston droit fait un appel dans son couloir, les Verts sont en supériorité numérique dans l'axe avec les 3 défenseurs centraux et les deux milieux pour surveiller les 3 offensifs de Montpellier. Le milieu axial monte avec le ballon et ne décale pas son latéral, mais cherche une autre solution de passe. Il faut bien remarquer le positionnement de ses coéquipiers sur cette image : si les deux autres milieux ne bougent quasiment pas...
... les deux attaquants font des appels croisés, qui perturbent complètement la défense stéphanoise ! Les quatre défenseurs coulissent tous vers leur gauche, amenés par l'appel du piston et de l'avant-centre parti du côté opposé. Et personne ne suit l'autre attaquant, qui se place dans le dos de la défense, où il est trouvé par le centre - heureusement que Ruffier repousse sa reprise de volée.
Plus fermé en deuxième période
Des nombreux face-à-face ratés par les offensifs, du positionnement approximatif de la part des défensifs - la tâche des Verts devient compliquée dans cette situation. Mais paradoxalement, le tournant du match a été le carton rouge pris par les Montpelliérains avant la pause. En 2MT, leur tactique a été de défendre dans un 4-4-1 très bas et très compact. Ce qui a rendu impossible le plan de jeu initial des Stéphanois, qui ne pouvaient plus se projeter vite dans le dos de la défense. L'ASSE a don dû faire le jeu, passant de 48% de possession en première période, à 65% en deuxième... et n'ayant quasiment plus aucune grosse occasion ! A l'exception de cette attaque à la 68e, quand Perrin récupère un ballon dégagé par la défense...
... avant de monter un peu, balle au pied. Boudebouz est excentré à droite, Aholou se trouve juste derrière la ligne des milieux...
... et comme la passe de Perrin trouve le premier et le une-deux fonctionne parfaitement, le meneur de jeu stéphanois se retrouve décalé dans le couloir droit. Les appels dans la surface sont bons :
Bouanga au premier poteau, Diony en retrait et Honorat au deuxième. C'est le deuxième qui est recherché par le centre, mais sa reprise de volée est captée par le gardien. C'était son dernier ballon, il est sorti ensuite, un de très nombreux changements tactiques en 2MT de la part des Verts, résumés par la suite.
L'ASSE a joué toute la 1MT en 3-4-3, avec Bouanga et Boudebouz en soutien de Diony, avant-centre. Dès le retour des vestiaires, le système a changé :
4-2-3-1, avec Boudebouz en soutien de Diony et avec Maçon monté d'un cran, de piston à ailier droit, pendant que Bouanga est resté à gauche.
6 minutes plus tard, changement poste-pour-poste tout à fait normal, Honorat est entré à la place de Maçon :
Mais Honorat n'a joué que 19 minutes à ce poste, Edmilson est entré à la place de Diony, en avant-centre :
Du poste-pour-poste, mais avec un repositionnement tactique : Bouanga est passé en 2e avant-centre, Honorat ailier gauche et Boudebouz s'est retrouvé excentré à droite. Un 4-2-4 qui a duré... 8 minutes, parce qu'après Abi est entré à la place de Trauco. Les Verts se retrouvent de nouveau avec une défense à 3 centraux, un système 3-4-1-2 avec deux pistons très offensifs, qui le transforment en (3-)2-3-2 :
Honorat est maintenant piston droit (son 3e poste en 40 minutes), Edmilson piston gauche (2e poste en 20 minutes), Boudebouz de nouveau axial et Bouanga maintenu avant-centre (3 ballons touchés à ce poste en 20 minutes, contre... 47 avant).
Conclusions
Le plan de jeu initial de l'ASSE a été bien choisi. Les Verts ont très bien exploité le point faible de la défense adverse, haute et lente. Mais ils n'ont pas concrétisé leurs grosses occasions et ce plan a été complètement ruiné par les erreurs de placement des défenseurs. Le match a été bien plus compliqué en 2MT, contre un adversaire différent, regroupé en défense en infériorité numérique. Il est toujours plus difficile de se créer des occasions dans ce contexte, surtout quand la confiance manque. Et les changements tactiques incessants n'ont pas aidé, les Stéphanois n'ont pas su s'adapter, trouver le point faible et appuyer dessus. Avec une nouvelle défaite au compteur, ils peuvent clairement nourrir des regrets. Et le chantier reste le même que depuis plusieurs semaines déjà : il faut retrouver de l'efficacité dans les deux surfaces...