Avant de faire son retour dans le Chaudron demain après-midi, l'attaquant brestois Kévin Mayi nous a livré ses impressions.
Tu n’as pas touché un ballon le week-end dernier lors de ton retour en L1. Qu’est-ce qui s’est passé Kévin ?
(Rires) Je suis en effet entré en jeu à un moment assez tardif, à la 95e minute, sachant que Toulouse avait égalisé à la toute fin du temps réglementaire. Je me suis dit « pourvu qu’elle sorte en touche, pourvu qu’elle sorte en touche, que j’ai au moins un ballon. » Mais bon, quand je suis rentré il ne restait même pas quarante secondes de jeu dans le temps additionnel. Je n’ai pas eu le temps de toucher un ballon, j’ai juste eu le temps de courir dans le vide ! (rires)
Tu t’en amuses aujourd’hui mais sur le moment ça ne t’a pas frustré ?
C’est bien sûr un peu frustrant. A choisir, j’aurais préféré rentrer à l’heure de jeu, c’est une évidence. Mais ce n’est pas le joueur qui décide à quel moment il veut rentrer, ça ne marche pas comme ça. Bon, ça fait partie du truc, il faut l’accepter. Parfois t’as des joueurs qui jouent 90 minutes et ne marquent pas, parfois y’en a qui ont juste besoin de quelques minutes voire quelques secondes pour scorer. Chacun a son rôle. Je préfère faire partie des quatorze joueurs impliqués plutôt que de ne pas rentrer du tout.
La saison dernière, en Ligue 2 avec Jean-Marc Furlan, t'as été plus souvent remplaçant que titulaire. Tu souhaites rester à Brest avec le risque de rester en rade ou t’envisages de partir à la fin du mercato estival si un club de L2 te garantit plus de temps de jeu ?
Il y a déjà trois clubs de L2 qui se sont manifestés et me garantissaient un temps de jeu conséquent. Enfin, on ne dit plus trop ça dans le football, on te dit qu’on compte sur toi quand on te recrute. Mais on ne dit pas « tu es sûr de jouer » sauf si su t’appelles Neymar ce qui n’est pas mon cas ! (rires) J’ai eu des sollicitations de clubs qui jouent la montée : l’un est actuellement en milieu de tableau, les deux autres sont présentement dans le top cinq…
Mais je suis parti pour rester à Brest car j’ai confiance en mes capacités. L’année passée, ça fait partie d’un groupe d’avoir des joueurs qui ont des rôles différents. Je faisais des rentrées à chaque match. J’ai quand même été 13 fois titulaire en comptant les coupes. Ce qui s’est passé, c’est que je me suis fait mal à un moment donné, et on a enchaîné une série de sept victoires. La dynamique a pris, le train est passé. Je suis quand même parvenu à entrer dans le groupe. Je suis entré en jeu 17 fois la saison dernière en L2. J’avais commencé la saison titulaire mais la donne a changé après ma blessure. On se demande pourquoi on titulariserait un joueur alors que l’équipe a carburé en son absence. Je peux comprendre le point de vue du coach, il n’y a pas de problème avec ça.
J’ai l’intention de rester à Brest et de saisir les opportunités de temps de jeu qui se présenteront. Je pense qu’on a la capacité de faire une bonne saison mais ce ne sera pas comme la saison passée. Je te l’annonce, on ne survolera pas le championnat de Ligue 1 ! (rires) On a conscience qu’on ne joue pas dans la même division que la saison passée. Je pense que le coach sera tout le temps amené à faire des choix différents quand il y aura des moments difficiles. Et il y en aura, ce qui est tout à fait normal pour un promu comme nous.
Olivier Dall’Oglio compte sur toi malgré les recrutements de Samuel Grandsir et Irvin Cardona, sachant qu’un excentré droit pourrait aussi vous rejoindre en fin de mercato ?
Quand j’ai parlé avec le coach en début de saison, il m’a dit qu’il comptait sur moi, que j’aurai ma chance si je joue avec mes qualités. Il m’a dit qu’il était même surpris de voir que je n’avais pas assez joué la saison passée. Je pense qu’il a sincèrement confiance en mes capacités. Je pense aussi qu’à un moment donné, dans le football, il faut apporter de la concurrence. C’est normal, surtout dans des effectifs de Ligue 1. Par rapport à d’autres effectifs, nous à Brest, on n’est pas assez. Il suffit qu’un joueur comme « Charbo » se blesse pour qu’on se retrouve en difficulté. Il faut avoir plusieurs cartouches, ce n’est pas un problème, il y a toujours eu ça dans le football.
Il donne quoi ce Cardona ? Il a claqué 6 pions en 20 matches la saison dernière avec le Cercles de Bruges, ton ancien coéquipier Idriss Saadi en a déjà mis 2 en 3 matches dans le même club.
Je ne peux pas trop te parler de lui car je ne l’ai pas vraiment vu à l’œuvre. Il a un peu mal, je ne sais pas du tout s’il jouera contre Sainté. Cet après-midi on était au repos, peut-être que demain il sera à l’entraînement [ndp2 : entretien réalisé vendredi soir].
Comment décrirais-tu ton entraîneur ? Comment le comparerais-tu à tes anciens coaches Galette, Laurey et à Furlan ?
Ce serait prématuré de faire des comparaisons. Cela ne fait qu’un mois et demi que je travaille sous les ordres d’Olivier Dall’Oglio. Je pense que c’est quelqu’un de très rigoureux, il est assez exigeant. On bosse beaucoup en termes d’intensité. Je dirais que c’est très structuré et organisé. Le groupe apprécie ses méthodes de travail, ses entraînements sont attractifs. C’est difficile de juger un coach car c’est un métier très difficile. A mon sens on ne peut le juger que lorsqu’il y a des défaites, c’est dans les difficulté, dans la capacité à les surmonter qu’on peut se faire une idée plus précise. Quand tout est rose et que c’est facile, même toi tu peux nous coacher !
Avec moi vous seriez quand même mal barrés…
Ouais, bon, peut-être pas avec toi José mais t’as compris l’idée ! (rires)
La dernière fois que Dall'Oglio est venu à GG il en a pris trois. La dernière fois que Brest est venu à Santé, il en a pris quatre... C’est quoi le tarif pour dimanche ? Vous allez en prendre trois ou quatre ?
On va en mettre trois ! (rires) Non, je plaisante. Honnêtement, on sait que ça va être compliqué. En toute transparence, on n’a pas les mêmes moyens que Sainté. On n’a pas les mêmes ambitions que l’ASSE, c’est une évidence. Mais dans la quête du maintien, nous on a besoin de points. On va essayer d’aller chercher le max de points qu’on peut. Si c’est un, c’est un et c’est déjà bien. Si c’est trois je pense que ce sera une bonne surprise. En tout cas, on ne va pas arriver à Geoffroy défaitistes, pas du tout !
Brest n’a jamais gagné dans le Chaudron. Crois-tu en l’exploit ? T’as la foi du charbonnier ?
Oui, j’ai la foi de Gaëtan ! (rires) Bien sûr que je crois en l’exploit. Les Verts sont des adversaires de haut niveau, qui restent dans la bonne dynamique de la saison passée, mais ils auront peut-être un relâchement. Sainté est un grand club, qui retrouve cette saison la Coupe d’Europe et j’en suis le premier ravi. Mais on ne va pas au Parc des Princes non plus dimanche ! Je pense qu’il y a vraiment moyen d’arracher un point.
Vous venez à GG pour jouer ou pour bétonner ?
On vient à GG pour jouer. Ce n’est pas comme lorsque j’étais venu avec le Gazelec il y a quatre ans. A l’époque on était obligé de bricoler, c’était la première fois de son histoire que ce club jouait dans l’élite. C’était déjà un sacré exploit que le Gaz entraîné à l’époque par Thierry Laurey ait réussi deux montées successives. A Brest, on a une équipe joueuse depuis ce qui s’est mis en place avec le coach Furlan. Ce n’est pas notre point fort de bétonner ! (rires) Si on veut bétonner, on va plus déjouer qu’autre chose. Je pense qu’on va proposer du jeu tout au long de la saison. Olivier Dall’Oglio a une philosophie de jeu qui ressemble assez à celle de Jean-Marc Furlan. De ce que j’ai vu, mais je peux me tromper, j’ai l’impression qu’il prône un style un tout petit peu plus direct mais tout en produisant du jeu. Ce n’est pas « je ne balance que des longs ballons, j’envoie les mecs au charbon et sur un malentendu on va conclure »
Quels sont les principaux atouts de ton équipe ?
Je ne vais quand même pas tout te dévoiler ! (rires) On a un groupe homogène, qui essaye de s’appuyer sur la dynamique de la montée. On est solidaire, chaque joueur se bat pour les autres. C’est important. On a le meilleur buteur de la dernière saison de L2, Gaëtan Charbonnier a fini juste devant le Messin Habib Diallo grâce à ses 27 buts. C’est un atout. Je trouve aussi qu’on a un milieu de terrain assez performant et agressif.
Quels sont les faiblesses de ton équipe, les lacunes à exploiter dimanche ?
On n’en a pas, tu ne m'auras pas ! (rires) On est assez solide, ça s’est vu dans notre premier match, on a aussi des arguments derrière. Maintenant, on n'a joué qu'un match de L1, à domicile et contre Toulouse. Dans le contenu c'était intéressant. Vu la physionomie et le scénario du match, le nul est un peu décevant. Quoi qu'il en soit, il serait bien évidemment hâtif de tirer des conclusions au bout d'une seule journée. Dimanche ce sera dans un autre stade, contre un autre adversaire. Chaque match a sa vérité.
Peux-tu nous dire quelques mots sur Haris Belkebla, neveu de l'ancien Vert Youssef ?
C’est un milieu de terrain assez agressif, qui a beaucoup de poumons. Il a un gros coffre, il court beaucoup.
Comme Yoann ?
(Rires) Yoann court. Forcément, même s’il a quatre ans de plus, il est dans la pleine force de l’âge ! Pour en revenir à Haris, il est en constante progression, techniquement c’est pas mal.
Il a été exclu de la sélection algérienne juste avant la CAN pour avoir montré ses fesses. Comment t'expliques ce geste ? Depuis qu'il est dans le Finistère, il a abusé des Galettes de Pont-Aven ?
Nous on n’en parle pas, ça ne sert à rien de revenir là-dessus.
Quel regard portes-tu sur l’équipe stéphanoise et sur le mercato des Verts ?
Sainté alignera encore une belle équipe cette saison. Les Verts ont un effectif complet, je pense qu’ils restent sur la dynamique de la saison passée. Contre Dijon je les ai trouvés bons même si je pense que ce n’était pas le meilleur match.
Je te garantis pourtant que c’était leur meilleur match de cette saison de L1 !
(Rires) Blague à part, les Verts ont quand même gagné, ça veut bien dire que cette équipe est costaude. Des cadres que j’ai eu le plaisir de côtoyer à Sainté ont montré lors de la première journée qu’il faudra encore compter sur eux cette saison. Loïc est toujours là. Quel joueur ! Loïc, c’est la classe. Steph aussi, c’est exceptionnel. Les années passent et c’est toujours du très haut niveau. Avec Ruffier dans les buts, c’est comme si t’avais un autre poteau dans la cage. Que dis-je un poteau, un mur ! Il fait partie du terrain à Saint-Etienne, c’est évident ! J’ai noté également que Romain avait marqué un but tout en subtilité.
Il a bénéficié d’une passe de Wahbi Khazri, un joueur vraiment intéressant dans les déplacements. Récemment, j’ai appris qu’il n’avait que 28 ans. J’avais l’impression qu’il avait encore plus d’expérience que ça. Je le trouve très bon. Sainté a une belle équipe, il n’y a rien à dire. Un bon groupe, dans lequel figure un autre joueur que j’ai apprécié à Sainté : Jessy Moulin. C’est un mec que j’adore, je respecte la carrière qu’il a faite, il a bon état d’esprit, apporte de la bonne humeur alors qu’il ne joue pas. C’est appréciable d’avoir un mec comme ça dans un groupe.
J’ai remarqué aussi qu’il y a plusieurs vainqueurs de la Gambardella qui font partie de l’effectif. En tant que joueur formé au club, ça me fait plaisir, je trouve ça cool. Nous on n’a pas réussi à la gagner. Je suis content qu’ils aient réussi à remporter cette finale, ce qu’on n’a pas réussi à faire à l’époque. Apparemment deux d’entre eux, William Saliba et Wesley Fofana, sont forfaits pour dimanche. Le premier est blessé aux adducteurs, j’ai connu ça, c’est terrible. Je souhaite un prompt rétablissement à William. C’est un excellent joueur, je suis content qu’il ait signé à Arsenal. Ça me rappelle un peu le parcours de Kurt.
Tu es franco-gabonais comme Denis Bouanga. Aimerais-tu jouer à ses côtés avec les Panthères ?
Si l’opportunité se présente, oui ! J’ai déjà eu quelques approches de la Fédération Gabonaise de Football mais il n’y a rien eu de concret. Il faut dire qu’il y a de très bons joueurs dans cette sélection, pas seulement comme à une époque des joueurs de D2 ou évoluant dans des championnats un peu moins cotés. Il y désormais pas mal d’internationaux gabonais qui jouent en Ligue 1 ou en Premier League. Si je suis performant en club, j’aurai peut-être ma chance.
Denis Bouanga, t’en penses quoi ?
C’est un bon joueur, ça va. De toute façon, franchement, tu vas me poser des questions… Pour moi, tous les joueurs qui évoluent en Ligue 1, y’en a aucun que je vais débiner. Ce n’est pas une question de talent, c’est juste une question de compréhension. A Saint-Etienne, j’ai vu que Loïs Diony a été un peu critiqué. Mais il a joué en Ligue 1, il a fait une grosse saison avec Dijon, il a survolé la Ligue 2. Il y aura toujours des critiques mais c’est un bon joueur. Après, peut-être qu’il n’allait pas avec le jeu de Sainté.
Ton avis sur Harold Moukoudi, que tu as croisé sur les terrains de L2 avec Brest contre Le Havre ?
Il m’a fait forte impression. Il est très costaud et propre, rien à dire. Il faisait partie des meilleurs défenseurs de L2. Je pense que c’est une bonne recrue. Je suis son parcours car je n’ai pas seulement des origines gabonaises, j’ai aussi des origines camerounaises comme lui [ndp2 : Harold Moukoudi s’est dit ouvert à la sélection camerounaise dans une interview accordée à Onze Mondial en décembre dernier].
Si t’étais recruteur stéphanois, quel joueur actuel de l’effectif brestois tenterais-tu de débaucher ?
C’est une question piège, ça ! (rires) Je dirais peut-être Haris Belkebla. Il continue de progresser et à mon avis il peut encore franchir des paliers, il n’a que 25 ans. C’est un joueur qui mouille le maillot, il plairait au public stéphanois et rentrerait dans l’équipe sans problème. C’est un pur numéro six.
Si t’étais recruteur brestois, quel joueur actuel de l’effectif stéphanois tenterais-tu de débaucher ?
Je prendrais d’office Loïc que je mettrais bien sûr capitaine ! (rires) Mais que ce ne soit pas mal interprété, on a déjà de bons défenseurs et en plus c’est mes potes. On n’a pas besoin de William Saliba du coup. Je prendrais aussi Wahbi Khazri que j’aime beaucoup.
Ça t’inspire quoi de retrouver un Chaudron à moitié plein et sans kop nord ?
Ah je ne savais pas que le kop nord était suspendu pour ce match. C’est dommage mais je suis sûr qu’il y aura malgré tout une belle ambiance. Ce sera forcément un moment particulier pour moi de revenir dans ce stade qui m’a vu grandir. C’est Saint-Etienne, quoi ! L’émotion va monter quand je vais refouler cette pelouse en avant-match et a fortiori pendant la rencontre si j’ai l’occasion de jouer. Même si le Chaudron ne fera pas le plein pour ce match, je sais qu’ici 20 000 spectateurs peuvent faire du bruit pour 40 000. La réputation du Chaudron n’est plus à faire. Toutes proportions gardées, le club dont je défends aujourd’hui les couleurs peut aussi compter sur un public fervent. J’ai été agréablement surpris en arrivant à Brest, c’est vraiment un club où ils aiment beaucoup le foot. Le Stade Brestois me fait penser à cet égard à l’ASSE mais en maquette car ce n’est pas la même dimension de club.
Avant ton précédent retour à GG, à l'époque où tu jouais avec le Gaz, tu nous avais dit pour rigoler que tu reviendrais avec un fusil. Force est de constater que tu n'avais pas réussi à faire parler la poudre. Tu viendras avec quoi cette fois ? T'as trouvé des munitions dans ton arsenal à Brest ?
Le coup du fusil, c’était bien sûr du second degré, j’ai toujours été reconnaissant envers l’ASSE et c’est un club que j’apprécie toujours. Je tiens à le rappeler car à l'époque ceux qui n'ont retenu que cette formule sans lire l'interview pouvaient croire que j'étais très énervé envers Sainté, que j'avais envie de tuer tout le monde ! (rires) Je ne sais pas si je vais passer à l’Arsenal avant le match pour trouver des munitions. Ce que je sais par contre, c’est que je vais revenir à Sainté avec détermination, surtout si je suis amené à jouer. J’aimerais montrer aux Verts que je suis toujours un bon joueur et que c’est aussi grâce à eux.
Merci de ne pas aller trop loin dans ta démonstration Kévin ! Mon Colonel, tu peux nous promettre que tu te tiendras à (pascal) carreau ce dimanche ?
Ah, je ne peux faire aucune promesse ! (rires) Par contre, si je suis amené à marquer contre Sainté, je n’irai pas trop loin dans la démonstration comme tu dis. Je ne célèbrerai pas ce but, une joie trop démonstrative serait malvenue.
Ton seul but marqué en pro avec les Verts marqué, en Coupe de France à Caen suite à une tête de Kurt Zouma, ça reste ta plus grand joie de footballeur ?
Ça reste un très bon moment car c’est le seul but que j’ai marqué avec les pros à l’ASSE. Mais j’ai connu d’autres grands moments à Sainté. Pour moi la plus grande joie c’est la demi-finale de Coupe de la Ligue remportée contre Lille au terme d'une longue séance de tirs au but riche en émotions. J’avais transformé je crois le quatrième penalty en prenant à contrepied Steeve Elana. L’envahissement du terrain par les supporters stéphanois à la fin du match, la fierté de les emmener au Stade de France, ça m'a donné des frissons ! Je n'oublierai jamais ces moments-là.
Merci à Kévin pour sa disponibilité