La mémoire d'Adrien
29/12/2016
Contrôleur à la STAS (Société des Transports de l'Agglomération Stéphanoise), Adrien Ponsard n'a rien oublié de ses vertes années, comme l'atteste son entretien paru aujourd'hui dans la Pravda. Extraits.
"J'ai vu mon destin basculer en 1998 un samedi après-midi, au détour d'un banal match d'avant-saison que je disputais avec Le Puy, alors en CFA2, contre les Verts. Je suis témoin de mariage à 14h00, je marque un but à Jérôme Alonzo à 16h00, on perd 2-1, je retourne faire la noce. Je découvre un message de Robert Nouzaret sur mon répondeur le lendemain, et le lundi je signe un contrat pro d'un an dans le club que je supporte depuis tout petit ! J'ai démissionné de mon emploi précaire à la bibliothèque du Puy et j'ai vu mon salaire mensuel passer de 1829 à 7622 brut euros mensuels en prolongeant de trois ans dès décembre.
Je rentre face à Guingamp au moment où Jean-Pierre Papin sort en me glissant un mot sympa. Une semaine après, je remplace Christophe Robert à Troyes. Il me tape dans la main en me disant : "tu vas marquer." Et j'égalise sur mon premier ballon. Le 4 septembre je suis titulaire dans le Chaudron et j'ouvre vite le score devant Niort. T'es personne, et d'un coup t'es sur une autre planète. Tout le monde scande ton nom, t'envie ou s'identifie à toi, le p'tits gars de Firminy. Quand cette notoriété te tombe soudain sur le coin de la figure, tu prends la grosse tête.
A mon arrivée à la STAS, il y a dix ans, je n'ai pas été spécialement bien accueilli. Au regard de mon passé de footballeur, mes collègues pensaient que j'avais été pistonné. Ce n'était pas le cas, j'ai passé tous les entretiens pour être embauché. Les gens me faisaient des queues de poisson pour me montrer des drapeaux des Verts ou poser dans la lunette arrière avec un maillot floqué à mon nom. Une mamie a traversé tout le bus pour me demander un autographe alors que je conduisais. Mais la solitude du chauffeur de bus m'a vite pesé. J'avais besoin de me retrouver dans une équipe, désormais je suis contrôleur.
L'argent que j'avais mis de côté est parti dans mon divorce. La plupart de mes anciens coéquipiers sont également obligés de travailler. L'autre jour, j'ai contrôlé le petit Fred Mendy, avec qui j'ai joué. Il m'a reconnu de suite et m'a demandé si la STAS embauchait. Quand je suis tombé sur Bayal à sa sortie du tramway en ville, je n'ai pas nourri de sentiment de frustration ou d'humiliation. Lui, il était en règle. Ce n'est pas comme Allan Saint-Maximin. Je l'ai verbalisé. Quant à Kurt Zouma, ça n'a pas été sans mal car il s'est montré arrogant. Si les gens viennent désormais plus vers moi pour m'insulter que parce qu'ils m'ont reconnu, je ne suis pas déçu de ma vie d'aujourd'hui. Car avant, j'ai vécu un conte de fées, une parenthèse enchantée."
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