Revenant dans la Pravda du jour sur la blessure à l'oeil dont il a été victime lors du dernier derby, le Stadium Manager de l'ASSE Samuel Rustem regrette que l'attitude du gardien des vilains ait mis le feu aux poudres.

"En rayant dans la semaine "Saint-Etienne" sur son maillot du centenaire de la Coupe de France floqué du nom de tous ses vaiqueurs, Anthony Lopes avait rendu le contexte encore plus tendu. Alors, quand j'ai vu le gardien de l'OL traverser le terrain pour aller saluer ses supporters au coup de sifflet final, j'ai senti une zone dangereuse de vulnérabilité. Il ne devait pas aller plus loin. Mais il y allait. J'ai donc décidé de l'arrêter, sans excès de zèle. Je me suis approché de lui et je lui ai dit : "S'il vous plait, Monsieur Lopes, il faut rentrer au vestiaire. S'il vous plait." Mais c'était trop tard...

J'ai pris un projectile depuis la droite de la tribune Henri Point. Le type devrait jouer dans l'équipe de baseball des Yankees de New-York car il m'a touché à plus de trente mètres. J'avais le visage en sang. Pour éviter d'effrayer les gens et parce que je n'avais pas le droit de gâcher la fête alors qu'on venait de gagner, j'ai masqué ma blessure avec la main. J'avais, dans le désordre, trois priorités : l'intérêt du club, mon oeil, et ma femme enceinte. Je ne voulais pas qu'on l'appelle pour ne pas l'inquiéter.

Ma femme Zepure est venue me visiter le deuxième de mes cinq jours d'hospitalisation. Prise par l'émotion de me voir dans cet état, elle s'est mise à perdre les eaux dans la chambre. Elle a été ausitôt transférée au service pédiatrie et a donné naissance avec un mois d'avance à notre petite Elise. J'ai assisté à l'accouchement dans un fauteuil roulant et sous perfusion.

Le lendemain j'ai subi une trabéculotomie, une opération visant à sauver mon oeil droit. J'ai aujourd'hui l'assurance de ne pas l'avoir perdu. Mais je n'ai toujours pas retrouvé la vue, et mon oeil valide a perdu de son acuité en raison d'un phénomène de compensation. Mais je n'ai pas envie de passer pour une victime, celle de Geoffroy-Guichard. C'est la première fois qu'on parle de moi, et c'est en négatif. J'ai juste été un professionnel qui a fait son travail en protégeant un joueur. Lopes a d'ailleurs joué en Coupe d'Europe derrière.

Anthony Lopes n'a pas pris de mes nouvelles, seul le stadium manager de l'OL l'a fait. Mais que Lopes m'appelle, ce n'est pas ça qui va me guérir. Là où j'ai les boules, c'est que ce crime restera impuni. On ne pourra pas identifier le pauvre gars sans cerveau qui m'a fait ça. Le système de vidéosurveillance du Chaudron n'est pas aux normes, les images sont inexploitables. Ma plainte et celle déposée par le club n'ont que peu de chance d'aboutir.

Dimanche dernier j'ai fait mon retour à Geoffroy-Guichard. Il a coïncidé avec ce huis clos interrompu par des ultras. Mon premier réflexe, ça a été d'aller discuter avec les supporters, qui ne sont pas tous des voyous ni des idiots. Sans me poser des questions. Je suis là pour protéger l'institution. Je suis retourné au combat, pas contre eux, mais contre moi-même. Je voualsi me prouver que je pouvais revenir dans un stade."