Avant le "catholico" de mercredi soir, l'évêque de Saint-Etienne Dominique Lebrun s'est confessé à Poteaux Carrés.


Monseigneur, saviez-vous qu’on a déjà interviewé un Pape ?

(Surpris) Ah non, ça je l’ignorais !

C’était Pape Sarr, qui a joué il y a dix ans au moment des Alex-Aloisio.

Ah d’accord ! (rires)

C’est pour nous un honneur de pouvoir questionner désormais un évêque ! Dans un entretien accordé à La Croix en octobre 2010, vous avez déclaré que vous vous rendez très régulièrement à Geoffroy-Guichard. Qu'est ce qui vous attire dans le Chaudron ? C'est le temple du football, l'aspect pélérinage qu'il revêt aux yeux de ses fidèles éloignés ?

Pour moi, Geoffroy-Guichard, c’est tout d’abord un lieu de vie. J’ai toujours été plus ou moins proche du football. Je l’ai pratiqué, j’ai pratiqué l’arbitrage. C’est pour moi un lieu de vie et d’expérience humaine importante. Je suis aujourd’hui au service de la population qui habite la Loire, et pour moi c’est un lieu un peu mythique.

Vous avez joué au football dans quel contexte ? Dans quel club ?

Pour l’anecdote, j’ai joué plutôt « demi-droit » comme on disait à l’époque. C’était à Villemomble Sport, qui a un moment fait quelques petites choses en Coupe de France. C’est un club de la banlieue parisienne, j’y ai joué jusqu’en cadet. Ensuite en cadet j’ai joué à l’Etoile sportive du Racing.

L'Eglise et le Stade ne sont-ils pas les deux seuls endroits où des inconnus se tombent dans les bras et s'embrassent ?

C’est fort probable. Seulement, ce ne sont pas des inconnus totalement parce qu’ils savent que l’autre partage leur passion. Il y a déjà en fait une connivence pas forcément explicite qui s’explicite par le fait même de se rejoindre dans le même endroit.

Appréciez-vous particulièrement la communion des joueurs avec le public après un but marqué ?

J’apprécie surtout le spectacle. Le mot communion, évidemment, a une connotation forte pour moi ! (rires) La grande différence que je vois entre ce qui se passe à l’Eglise et ce qui se passe dans un stade, c’est qu’on est davantage dans une dimension de spectacle lorsque l’on est au stade.

Vous ne réagissez pas comme un supporter qui va de façon un petit peu chauvine pousser son équipe de cœur ?

Comme j’ai été arbitre, j’ai appris - d’une certaine manière comme d’une deuxième nature – à avoir une lecture au second degré de ce qui se passe, à avoir du recul pour pouvoir discerner, juger, prendre une décision. Ce que fait l’arbitre, et il le fait en un clin d’œil. Alors je sens bien que je vais de l’un à l’autre. De temps en temps, je suis le supporter qui se laisse aller, qui lève les bras, qui fait la ola. D’autre fois, je regarde ceux qui font la ola ou je regarde l’arbitre et du coup je suis forcément un peu détaché de l’aspect premier.

Le signe de croix des joueurs qui entrent sur la pelouse ou marquent un but est-il recevable d'un point de vue théologique ?

Pour moi c’est toujours un moment d’émotion. Je dois dire que quand je les vois faire un signe de croix, il y a une certaine connivence avec eux. Alors quel est le signe qu’ils font, pourquoi ils le font, il faudrait leur demander. Mais moi je crois profondément que toute notre vie, en particulier ce que nous voulons faire de plus grand, de plus beau dans notre vie, je le vis avec Dieu. Et je pense qu’eux, c’est la même chose.

Vous intéressiez-vous à l'ASSE avant d'être nommé évêque de Saint-Etienne en 2006 ?

Oui bien sûr ! Je suis de ceux qui ont supporté les Verts dans les années 70 et plus particulièrement en 1976. Même si je ne suis pas forcément de ceux qui connaissent par cœur le palmarès de l’ASSE, je suis resté fidèle à Saint-Etienne. J’ai toujours regardé le classement de la Ligue 1, j’ai toujours regardé où en était Saint-Etienne. Je dois dire que je n’ai jamais supporté d’autres clubs que Saint-Etienne.

Aviez-vous une affection particulière pour Dominique Rocheteau, que l’on surnommait l’Ange Vert ?

Oui Rocheteau, Jean-Michel Larqué… Même des joueurs comme Piazza m’ont marqué. Bien sûr Platini qui est passé par ici. Mais j’ai toujours eu de l’admiration pour les défenseurs. Il y avait Bathenay qui était en numéro 6 si je me souviens bien, proche du poste que moi-même j’ai occupé. Je dois dire que je regardais de façon plus extérieure ceux qui étaient à l’avant que ceux qui étaient plutôt à l’arrière et qui m’ont toujours impressionné.

Dans le football d’aujourd’hui, votre footballeur préféré, c’est Messi, non ? On imagine que son patronyme vous est-cher, non ?

(Rires) Oui, à vrai dire je n’y avais pas trop pensé. Ce qui me fascine beaucoup, c’est l’évolution du jeu. Quand on voit l’école du Barça actuellement, on ne peut pas ne pas être très impressionné par une dimension collective. De fait, il y a des joueurs qui sortent du lot. C’est comme l’équipe de France : depuis que Zidane est parti, ce n’est pas faire injure aux autres joueurs que de dire qu’il manque un peu une locomotive ou une étoile qui va faire briller l’ensemble du jeu. Il faut sans doute les deux : à la fois une personnalité forte et en même temps un collectif. Quand on voit la limpidité du jeu du Barça, on est conquis. C’est là que je dis qu’il y a du spectacle. Là ce sont des artistes. Il y a une dimension artistique, c’est quelque chose que j’aime beaucoup. L’aspect combat me plaît moins. Quand on voit les roulettes qu’on fait maintenant, avant c’était simplement les dribbles.

Vous êtres friand de gestes techniques qui sortent un peu de l’ordinaire ?

Ah oui, moi j’aime beaucoup, y compris le lob de 50 mètres qu’on a vu il n’y a pas très longtemps. C’est un beau geste !

Vous avez été arbitre pendant treize ans. Qu'avez vous retiré de cette expérience ?

J’ai beaucoup apprécié cette expérience, je l’ai considérée comme une mission. Evidemment, le football sans les joueurs, c’est rien. Mais il se trouve que sans l’arbitre, ça ne marche pas très bien quand même… C’est donc la complémentarité des rôles qui m’a intéressé. Et puis l’arbitre, c’est celui qui joue un sport collectif tout seul. Là il y a une petite analogie avec la mission du prêtre que j’étais à cette époque-là. Le prêtre est seul derrière son autel face aux fidèles. Mais le prêtre sans les fidèles, il n’est rien. Il a une certaine puissance, un certain pouvoir. Mais s’il ne fait pas voir son pouvoir, c’est aussi bien. Il est au service, c’est un pouvoir de serviteur. D’habitude on dit que ceux qui sont au service dépendent de quelqu’un, mais non, c’est le contraire. D’une certaine manière, il a un pouvoir qui devient service. Et je trouve ça très profond, y compris pour l’histoire de l’homme. On a intérêt à considérer que l’on est au service de l’autre. Un magistrat est au service de ceux qu’ils jugent, un Président de la République est au service de ceux qu’il gouverne. J’ai appris ça un peu dans le football grâce à l’arbitrage.

S’il est un serviteur, l’arbitre est souvent vilipendé, on l’a encore vu récemment. Pensez-vous qu’il n’est pas assez considéré de nos jours ?

Alors là, j’ai peur de ne pas être objectif. Dès qu’on critique les arbitres, ça m’énerve. Dès qu’on les critique je suis rarement d’accord. D’ailleurs on a vu il y a quelques années pendant toute une soirée qu’il y avait trois caméras montrant qu’il n’y avait pas main, qu’il y a avait un penalty imaginaire, etc. Le lendemain, c’est la cinquième ou sixième caméra qui avec un autre angle nous montrait la réalité. On ne le répétera jamais assez, dans les règles du football, il y a à juger l’intention. Ce qu’il ne faut pas faire quand on est dans la vie, il ne faut pas juger l’intention et le cœur de l’autre. Comment voulez-vous juger l’intention à travers un écran de télévision ? C’est quand vous voyez la personne, c’est les sourcils, c’est les battements de cils, c’est le sourire ou l’absence de sourire, c’est ce qu’il regarde juste après avoir commis sa faute… Tout ça permet de juger l’intention. Dire qu’il y a eu une erreur, c’est parfois très difficile. Parfois il y a des erreurs patentes, par exemple le ballon est complètement sorti, il peut y avoir des effets d’optique. Mais en général, quand même, les arbitres sont très bons. Dans la société, on cherche souvent des coupables quand il y a quelque chose qui ne marche pas. Les Verts ont marqué alors que les Brestois étaient à dix, un joueur aurait pu rentrer plus tôt. Mais il a aussi eu sa responsabilité de choisir de changer ses crampons à la 85ème minute. D’aucuns peuvent penser aussi que l’arbitre avait peut-être senti que le joueur désirait un peu ralentir la fin de match.

A quelle époque avez-vous arbitré ?

De 1985 à 1997, donc c’était jusqu’à la veille de la coupe du Monde de 98. En fait j’ai cessé car j’ai été nommé à Rome donc j’ai quitté la Seine-Saint-Denis. Après on perd l’entraînement, on perd la forme, et puis on arrive à un âge où il n’est plus bien autorisé d’arbitrer au moins en ligue régionale.

Êtes-vous favorable au recours à l'arbitrage vidéo ou sceptique quand à l’apport de cette technologie dans le football ?

Je suis à la fois d’accord et sceptique. Je suis d’accord car il est évident que la vidéo devrait pouvoir nous aider pour savoir si un ballon a franchi la ligne. Mais je suis sceptique à cause de l’esprit. De fait, on est en train de chercher la perfection. Or la perfection n’est pas de ce monde. Il faut jouer avec l’humain. A mon avis, il faut plutôt encourager le bon esprit au lieu de l’esprit qui consiste à dire qu’il faut être sûr. Après tout, si malheureusement on en est arrivé là, c’est qu’il y a des questions d’argent. Aujourd’hui une défaite, même si vous êtes au milieu du classement, ce n’est pas les mêmes revenus en termes de droits télévisés au bout du compte. Et ça c’est désastreux.

Paris-Normandie nous a appris que vous aviez arbitré un match de jeunes en mai dernier à Bonsecours (Seine-Maritime). Vous arrive-t-il ponctuellement de ressortir votre sifflet ?

Je suis originaire de Normandie, à Rouen. Je faisais un petit retour en famille si j’ose dire sur mes origines. Je n’y étais pas retourné vraiment depuis que j’étais évêque. Le curé de la paroisse l’ayant appris, il m’a dit qu’il avait une équipe de jeunes et m’a demandé si je voulais arbitrer. Je l’ai fait avec grand plaisir. Ce qui a peut-être été le plus amusant pour moi, c’est quand j’ai été arbitrer le Variétés Club avec la Garde Suisse. J’ai fait un match à Rome, sur le terrain d’entraînement de l’AS Roma, avec des gloires du football passé ou à venir du Variété. Thierry Roland était là, il y avait Jean-Michel Larqué, Karambeu, Rocheteau… La Garde Suisse avait plus d’entraînement que le Variétés Club, mais c’est quand même le Variétés Club qui a gagné.

Il y a donc une équipe de football au Vatican ?

Visiblement la Garde Suisse n’en était pas à son premier match. Le Vatican est un tout petit Etat, il y a très peu d’habitants. Il y a un lycée donc je pense qu’il doit aussi y avoir une équipe de jeunes.

Pensez-vous qu'il faudrait faire évoluer les lois du jeu ? Si oui, quelles sont vos propositions ?

J’aimerais faire un retour en arrière mais ce n’est jamais possible. Quand j’ai commencé l’arbitrage, si une équipe faisait une entrée de touche au mauvais endroit, on lui demandait de recommencer. Désormais, on rend la balle au voisin. Qu’est-ce qui a fait qu’on a changé ? On part maintenant du principe que le joueur qui se trompe d’endroit le fait volontairement et triche. Pourquoi part-on du principe qu’il triche ? Avant on considérait qu’il s’était trompé. C’est assez facile de se tromper, quand c’est dans les airs, très haut, celui qui fait la touche n’est pas forcément à l’endroit où le ballon est sortir. L’arrière peut remonter pour effectuer la touche. On peut comprendre qu’il se trompe de trois mètres. On part maintenant du point de vue que le joueur triche, il ne faudrait pas aller trop dans ce sens-là. Il faut redonner à l’arbitre la décision selon l’intention. Et ça c’est important.

 

D’après l'Evangile selon Saint-Matthieu, Jésus a dit : « Les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers. » Pourquoi Lyon n'a pas été relégué en L2 depuis son premier titre de champion en 2002 ?

(Rires) Evidemment vous comprenez bien que ça ne veut pas dire la même chose que ce qu’on pourrait penser ! Il s'agit des derniers dans leurs cœurs, vis-à-vis de Dieu. Ceux qui se prennent pour les meilleurs ne sont pas forcément les meilleurs aux yeux de Dieu. C’est que disait Pierre de Coubertin quand il dit « l’important c’est de participer ». Il y a malheureusement des excès dans le football, même si je l’aime beaucoup.

Jésus n'a rien dit concernant les dixièmes. Ayant fini à cette place la saison dernière, Saint-Etienne est-il condamné au ventre mou ?

De fait, Jésus ne s’est pas beaucoup prononcé sur l’avenir de l’ASSE ! (rires) Je m’en réjouis d’une certaine manière, ça nous donne une vraie liberté de pensée. Je pense que le club de Saint-Etienne a décidé aussi d’être un club modeste. S’il y avait des capitaux venant de très loin qui se présentaient, je serais assez d’accord qu’on les refuse d’une certaine manière. Je crois d’ailleurs que le football français a touché sa limite. Je pense que le contexte de crise dans lequel nous sommes va finir par nous faire comprendre qu’il y a des absurdités. Je crois que les salaires des joueurs sont plafonnés voire diminués.

A l'intersaison, un défenseur dénommé Miracle a rejoint l'attaquant Saint-Louis dans l'équipe des moins de 17 ans de l'ASSE. Un Miracle n'arrivant jamais seul, Jésus a renforcé l'équipe féminine. Lemoine est entré dans les ordres de Christophe Galtier. L'heure est venue de vous confesser : c'est vous le responsable de la cellule de recrutement du club, n'est-ce pas ?

(Rires) Je n’avais pas repéré tous ces bons mots, très évangéliques. Je dois vous confesser que je ne suis pour rien dans le recrutement de l’ASSE.

Jean-Pascal Mignot a-t-il un lien de parenté avec Monseigneur Mignot, l'ancien archevêque d'Albi ?

Vous m’apprenez qu’il y avait un archevêque d’Albi qui s’appelait Monseigneur Mignot, donc il faudrait lui demander (rires).

Autre recrue stéphanoise, Clément est-il le descendant d'un pape ou d'un anti-pape ?

Je n’en sais rien mais on voit que Jérémy Clément est un homme solide, donc il y a peut-être une parenté spirituelle avec le pape, qui doit être un roc.

Le Château Pape Clément est un fameux vin de Pessac. Quid du vin de messe ? Vous buvez du Côtes du Forez ou du Beaujolais ?

Je ne voudrais pas faire de publicité, il existe encore du vin de messe comme autrefois. C’était tout simplement un vin dont on est certain qu’il n’avait pas eu d’addition. C’était un vin purement naturel, un vin écolo. Maintenant, avec le développement de l’hygiène alimentaire, tous les vins doivent respecter la règle. On peut donc dire la messe avec n’importe quel vin.

Souhaiter la défaite de Lyon, est-ce un péché ?

J’ai peur d’être pécheur (rires). En vous disant cela, oui, ça pourrait l’être, mais ça dépend ce qu’il y a dans notre cœur quand on le souhaite.

La qualification des Lyonnais en huitième de finale de la Ligue des Champions, est-ce un miracle ? Est-ce le fruit des prières de Lacombe et Gomis ou s’agit-il d’un match arrangé ?

Je ne crois plus au match arrangé, j’espère que non en tous les cas, mais c’est plutôt de l’ordre du miracle.

Il y a deux mois, le club a créé une association Cœur Vert ayant pour but de développer des opérations caritatives (soutiens aux handicapés et hospitalisés, don du sang, etc). Etes-vous sensible à cette démarche ?

Oui, à chaque fois il peut y avoir un écho médiatique à ces questions-là, mais en fait – on ne le dit peut-être pas assez – les joueurs eux-mêmes, très souvent ont un grand cœur et participent à de nombreuses opérations humanitaires. Nous en avons un certain nombre d’exemples dans le club de l’ASSE, en particulier des joueurs qui sont là depuis longtemps. Je ne vais pas citer de noms car certains préfèrent le faire discrètement, ce qui est une bonne chose, même si ce sont des exemples donnés en particulier aux plus jeunes. C’est bien qu’ils sachent qu’une partie de ce qu’ils gagnent est consacré à des œuvres charitables et à des œuvres humanitaires.

Josuha Guilavogui a déclaré sur le site Guinée Foot : "Je suis dans une famille très catholique, on a beaucoup la foi. Donc, quand j’ai l’occasion, je redescends auprès de ma grand-mère, qui va tous les dimanches à l’église à la messe. C’est elle qui m’a inculqué la foi, et je remercie Dieu de me donner la chance d’être en bonne santé et de vivre de ma passion." Avez-vous déjà discuté avec ce joueur ou avec d’autres ?

Pas avec les joueurs professionnels en direct, plus avec l’encadrement. Je sais que Bafé Gomis avait des relations avec un prêtre du diocèse. Au temps de la grande équipe de 76, des prêtres se souviennent avoir eu des conversations. Il y a dans le football une part qui n’est pas déterminée d’avance, une part d’inconnu. Je crois que ça aide aussi à être réaliste et à s’en remettre à quelqu’un qui est plus grand que soit.

Après la défaite de son équipe lors de la première journée de championnat, Francis Gillot a déclaré : «On n’a pas eu de réussite en première mi-temps, contrairement à Saint-Etienne qui en a eu beaucoup. Le premier but n’est pas très catholique." L’entraîneur girondin faisait allusion au but marqué contre son camp par Ciani. C'est quoi un but catholique ? Un but marqué par le Celtic Glasgow ?

(Rires) Non, je crois qu’effectivement un but catholique est un but marqué dans les règles de l’art.

Mais marquer contre son camp n'est-il pas une preuve d'amour pour son prochain ?

Oui, c’est vrai que Jésus a dit « tu aimeras ton ennemi ». Disons que c’est plutôt se réjouir quand les autres font une bonne performance. Je remarque qu’il y a pas mal de fair-play dans les interviews en particulier d’entraîneurs. On se réjouit quand une équipe française gagne une autre équipe et surtout quand elle produit du bon jeu.

"Celui qui se perd dans sa passion est moins perdu que celui qui perd sa passion" Vous retrouvez-vous dans cette formule de Saint Augustin ? A-t-elle vocation à s'appliquer au public stéphanois ?

Ah oui, je pense que c’est tout à fait juste comme expression. La passion est à double tranchant si j’ose dire. Pour une part évidemment la passion est une très bonne chose quand elle est dominée. Mais elle peut-être dévorante, on peut sortir de soi-même, et à ce moment là ce n’est plus juste.

Quelle devise épiscopale vous-êtes vous choisi ?

« Je vous appelle mes amis. » C’est une phrase de Jésus. Il est avec ses apôtres, ses disciples, et il leur dit : « je ne vous appelle plus serviteurs mais amis. » Je crois que c’est inscrit dans ma foi très profondément. Dieu veut l’amitié des hommes. Il ne veut pas les punir, il ne veut pas leurs souffrances. Il veut un lien de confiance, un lien d’amitié. On se choisit mutuellement. J’aimerais bien être un signe de l’amitié de Dieu pour beaucoup de monde.

Pouvez-nous rappeler qui était Saint Etienne ?

Saint Etienne est le premier martyr. C’est un diacre, il a été choisi pour être un des serviteurs de la communauté. Le mot diacre veut dire serviteur. Il est mort martyr, il a été lapidé par des pierres. A ce moment-là, le grand Saint Paul était plutôt du côté de ceux qui martyrisent. Il raconte lui-même qu’il gardait les manteaux de ceux qui lançaient des pierres sur Etienne, et après il s’est converti. C’est une grande leçon, ça veut dire qu’aucun mal ne doit finir sans être transformé en bien.

Germain est un autre Saint qui attire notre attention à quelques jours du "catholico" Saint-Etienne/ Paris Saint-Germain. Un Saint qui vous est cher car vous avez été curé de la Paroisse Saint-Germain de Pantin. Qui était Germain ?

Saint Germain était un évêque de Paris, à l’époque de Sainte Geneviève si je me souviens bien. C’est assez normal qu’il y ait un Saint-Germain-en-Laye, une commune près de Paris. Et c’est à cause de cela que Paris s’appelle Paris-Saint-Germain.

Après les fêtes, commencera le mercato. Il y'a un père catho dans l'Eglise ? Si l'archevêché de Lyon vous fait une grosse proposition, laisserez-vous tomber vos fidèles stéphanois ?

Ah non, pas du tout ! Nous, on n’est pas soumis à la loi des marchés, ni à la loi des transferts, ni d’ailleurs à la réélection. Donc je suis tranquillement à Saint-Etienne jusqu’à l’âge de 75 ans.

Nous voilà rassurés. Votre prédécesseur venait de Lyon, on pensait que vous risquiez de faire le chemin inverse…

Non, non, non, non !

Vous avez été curé de la cathédrale-basilique à Saint-Denis, juste à côté du Stade de France. Pensez-vous que l'ASSE aura l'occasion d'y jouer prochainement en finale de Coupe de France ou de Coupe de la Ligue ?

Je peux vous faire une confidence : quand le représentant du Pape à Paris m’a annoncé que j’étais nommé évêque de Saint-Etienne, il m’a dit : « oh, ça ne va pas vous changer beaucoup, vous allez passer du Stade de France au Chaudron ! » J’aimerais bien maintenant accompagner l’équipe des Verts à Saint-Denis. J’ai de bons amis là-bas, je n’aurai pas de difficulté pour être logé. Vraiment, sauf imprévu, si les Verts montent à Paris, je serai de la fête.

Bernard Pivot avait déclaré à asse-online: "Il y a une expression que j'aime beaucoup, même si elle est désuète : c'est « mettre la soutane ». J'ai souvent entendue cette formule imagée lors que je jouais au pensionnat Saint-Louis à Lyon. « Mettre la soutane » ou « faire soutane », c'est empêcher un adversaire de faire un petit pont. Si l'on met la soutane, le ballon ne peut pas passer entre les jambes !" Connaissiez-vous cette expression ? Vous-est il arrivé de faire soutane ?

Je ne connaissais pas cette expression, est-ce une expression très locale ? En tous les cas, j’ai comme tous les joueurs été surpris par les petits ponts et j’ai essayé de les empêcher.

Avez-une astuce pour éviter les grands ponts ? Utiliser l'étole comme un lasso ?

Il vaudrait mieux prendre une chasuble, c’est plus ample. D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez remarqué mais on utilise des chasubles, l’expression existe dans le milieu du football. C’est dans les entraînements le vêtement qu’on revêt pour être d’une couleur différente.

Monseigneur, on vous propose de terminer notre entretien par le questionnaire de Proust revu et corrigé par poteaux-carrés. Votre équipe préférée ?

Saint-Etienne.

L'équipe que vous détestez ?

Je n’en ai pas.

Votre geste technique favori ?

La roulette.

Le son, le bruit du stade que vous aimez ?

L’explosion après un but.

Le son, le bruit du stade que vous détestez ?

Le silence mortel après un but dans l’autre sens.

Votre juron, gros mot ou blasphème favori lors d'un match ?

Je n’en ai pas.

Un footballeur pour illustrer un nouveau billet de banque ?

(Rires) Andreu. C’est un joueur qui me séduit par sa jeunesse et son application.

Le métier du foot que vous n'auriez pas aimé faire ?

Agent de joueur.

Le joueur, l'entraîneur ou l'arbitre dans lequel vous aimeriez être réincarné ?

Joël Quiniou.

Si le Dieu du foot existe (on aurait entraperçu sa main lors d'un Angleterre-Argentine resté célèbre), qu'aimeriez-vous après votre mort, l'entendre vous dire ?

Viens, bon et fidèle arbitre !