Une défaite, l'Europe s'échappe. Bordeaux a signé le glas des espoirs Verts dès la 1ère mi-temps, grâce à... son numéro 6. Explications.


L’équipe

Comme depuis la victoire à Dijon, Galtier décide d’aligner une équipe organisée autour de trois milieux centraux, aux profils plutôt défensifs. Le triangle est clairement tourné vers la défense : Clément, la pointe, joue juste devant la paire Mignot-Marchal. Ce bloc de 3 dans l’axe doit permettre la montée des latéraux. Guilavogui et Lemoine sont censés s’assurer la maîtrise du milieu. Devant, le fait de ne jouer qu’à trois oblige les ailiers à revenir dans l’axe dès lors que le jeu s’écarte sur l’aile opposée. Plus généralement, Sako va plusieurs fois demander le ballon dans l’axe, tandis que Gradel fera ses appels dans son couloir : l’asymétrie qu’affectionne Galtier est respectée. Ces deux-là vont d’ailleurs peu permuter.

A la 70’, le remplacement de Lemoine par Batlles nous fera revenir au bon vieux 4-4-2 / 4-2-3-1 que nous avons eu déjà maintes fois l’occasion de présenter.


Le déroulement

Dès lors qu’on parle de défendre, la plupart des entraîneurs aiment le chiffre 4. Beaucoup même le doublent, adjoignant au quatuor de derrière un 2è rideau symétrique au milieu. Gillot, lui, préfère le 3. Bordeaux se présente ainsi avec un double rideau axial de 3 joueurs à chaque ligne, qu’encadrent de chaque côté un joueur de couloir qui fait piston (Trémoulinas à gauche, Mariano à droite). Appelons-le 5-3-2 ou 3-5-2, peu importe.

Pour compenser les absences de 3 titulaires, l’entraîneur aquitain choisit de faire glisser Sané, habituel milieu, en défense centrale, de titulariser N’Guémo à sa place au milieu et d’introniser un couple Gouffran-Diabaté devant. Ces deux-là vont fonctionner comme un couple classique de 4-4-2 : un grand costaud bon de la tête qui joue les points de fixation et réceptionne les centres, et un rapide qui tourne autour. Derrière eux, Plasil et Obraniak tentent de se porter vers l’avant quand leur équipe a la balle tandis que N’Guémo joue la sentinelle proche de sa charnière. Et paradoxalement, c’est de ce numéro 6 que viendront la quasi-totalité des problèmes des Verts en 1ère mi-temps.

En effet,  le positionnement reculé de N’Guémo lui permet d’être libre de tout marquage. Lorsqu’il a le ballon, il est le plus souvent plein axe, face au jeu, et dispose de plusieurs secondes pour faire ses choix. Capable de jouer long ou court et disposant d’une bonne vision du jeu, l’ancien Nancéien va être le joueur clé de cette première mi-temps : il sera à l’origine des actions amenant les deux buts de Diabaté, tout en déséquilibrant les Verts dans le jeu. En effet, après 10 minutes, Lemoine va réaliser l’importance de ce joueur et va se retrouver le cul entre deux chaises : soit le laisser seul (et ça fera des dégâts), soit le presser mais libérer Plasil. Au final, le milieu stéphanois n’arrivera à bien faire ni l’un ni l’autre ; son positionnement approximatif désorganisera le milieu ligérien et sera l’une des explications du fait que Sainté penche tant à droite (du côté de Guilavogui), avec la timidité offensive de Ghoulam. 

Les Verts avaient pourtant une belle carte à jouer : celle des latéraux. En effet, Trémoulinas et Mariano se repliant très bas pour contenir les menaces Sako et Gradel, l’espace était ouvert pour Perrin et Ghoulam, qui l’ont malheureusement assez peu exploité avant la pause. Regardez à nouveau le match : à l’origine de quasiment tous les décalages se trouve un latéral (et le plus souvent Perrin). De plus, Bordeaux était en danger dès que les Verts changeaient de côté rapidement : là encore, cette arme ne sera que peu utilisée dans un premier temps. Lorsque ses solutions sont combinées (comme à la 39’, où Guilavogui rate une tête pourtant facile), les Bordelais sont déstabilisés. Mais on préférera les dribbles et les passes directes pour Aubame. Le seul but Vert, par ailleurs très beau dans les derniers gestes, viendra d’une énorme erreur d’un Sané qui, rappelons-le, ne jouait pas à sa place.

Après avoir pris le match à leur compte après un premier quart d’heure équilibré, les bordelais reculent et attendent une fois qu’ils mènent au score. 2-1, l’Europe est loin pour les Verts.

Il semble qu’à la pause Galtier ait donné de nouvelles consignes. Au retour des vestiaires, Lemoine prend N’Guémo en individuel, les autres milieux s’organisant en fonction ; Perrin va passer son temps dans le camp bordelais (11 centres au final, c’est 3 de plus que le cumul des centres des 3 autres latéraux titulaires du match ; et encore, il ne le finira pas !) ; on tentera plusieurs transversales latérales. Et sur le terrain, ça se voit : les 15 premières minutes sont à sens unique, les Verts égalisent très rapidement mais n’arrivent pas à prendre l’avantage.

A la 57’, on assiste à ce que j’appelle « la spéciale », une faille qui revient quasiment à chaque match : les Verts ont un CPA offensif ; renvoyé par la défense, se développe un contre assassin ; au bout du compte Diabaté oblige Ruffier à se coucher.

A ce moment-là, Rennes mène alors déjà 4-0. Est-ce que les joueurs le savent ? Est-ce de la fatigue ? Le rythme faiblit côté stéphanois. Paradoxalement, alors qu’ils doivent absolument gagner, les joueurs de Gillot semblent incapables de reprendre le match en main : il va falloir une perte de balle bête des stéphanois pour qu’ils inscrivent un but, qui sera celui de leur qualification mais aussi de leur réveil. Les entrants stéphanois (Batlles, FSP et Ebondo) apporteront de l’animation, mais cela ne suffira pas. Malgré la défaite, on ne pourra pas accuser les Verts de baisser les bras : à la 88è, PEA est tout près d’égaliser sur une nouvelle erreur de Sané. La saison se termine sur une défaite. Et sans Europe.

Sur ce match, l’ironie est flagrante jusqu’au bout : c’est à cause du positionnement et de la qualité technique d’un milieu défensif (N’Guémo) qu’on encaisse 2 buts en 1ère mi-temps ; c’est du côté d’un des joueurs les plus actifs et précieux du match (Perrin) que Bordeaux a trouvé la faille à chaque fois.

Les buts

1-0 Guilavogui 18’
Tout vient d’une balle en profondeur anodine à destination d’Aubameyang. Sané intervient, le ballon se dirige en corner ; le bordelais, habituel milieu replacé cette fois en défense, veut dégager en touche mais se rate. PEA à l’affut, récupère, a le coup d’œil et la vista pour servir Guilavogui d’un superbe centre que celui-ci reprend d’une volée non moins belle. A ce moment-là, les Verts sont virtuellement qualifiés pour l’Europa League.

1-1 Diabaté 22’
Plein axe, face au jeu, Landry N’Guémo a 10 bonnes secondes devant lui pour ajuster une transversale parfaite pour Trémoulinas, côté gauche. Gradel n’a pas suivi le latéral bordelais, qui peut prendre tout son temps pour ajuster son centre. Le grand Diabaté prend le dessus sur les défenseurs centraux stéphanois et égalise.

1-2 Diabaté 29’
On prend les mêmes et on recommence. 2 variantes : Gradel s’est replacé un peu plus bas, mais pas au marquage. Perrin intervient cependant plus vite, obligeant Trémoulinas à transmettre d’abord à Obraniak, relais supplémentaire qui d’un enchaînement sombrero/chandelle retrouve Diabaté pour le doublé.

2-2 PEA 49’
Perrin, seul sur le côté droit à 30m, cherche Lemoine à l’entrée de la surface. La balle, dégagée, lui revient dans les pieds ; sans contrôle, il centre pour Aubame qui ajuste de la tête un Carrasso avancé. Le décalage est bien venu du latéral.

2-3 Gouffran 69’
Nous sommes au milieu du terrain, les Verts dominent ; seuls 3 bordelais pressent. Perrin transmet à Lemoine un peu fort, Lemoine rate son contrôle ; les bordelais récupèrent et jouent bien le contre. Gouffran va chercher l’Europe.


Olaf