Formé par Laurent Huard et ex-coéquipier de Denis Bouanga, le capitaine lorientais Fabien Lemoine est resté supporter des Verts. 


Né à Fougères comme toi, Laurent Huard est de retour depuis dix jours dans la maison verte. Ça t’inspire quoi ?
Je suis content pour lui. Je l’ai eu comme entraîneur au Stade Rennais en U17 et avec la réserve. J’ai le souvenir d’un très gros travailleur. C’est ce que je ressortirai en premier. Quand je l’ai connu à Rennes, il était encore à ses débuts de formateur. Il a accumulé depuis une grosse expérience à travers les différentes équipes qu’il a pu manager, à Rennes comme au PSG. Il entame à Sainté une nouvelle étape de sa carrière. C’est vrai que Laurent avait été une saison l’adjoint de Pierre Dreossi dans le staff des pros au Stade Rennais mais dans ce club il avait surtout travaillé avec les jeunes. A Saint-Etienne, il va travailler avec un effectif différent. Ça ne va plus vraiment être des jeunes, ce sont des hommes. Du coup je pense que ça va être différent. Pour lui en tout cas c’est une grosse progression, une énorme expérience.

Humainement, tu le décrirais comment ?
C’est une très bonne personne. On a des valeurs communes, on vient du même coin. Je trouve qu’il a une énorme force mentale. C’est vraiment un guerrier. Il a des valeurs humaines qui vont forcément coller avec le Forez. Il connaît bien la maison verte, il a déjà joué à l’ASSE.

Quand on l’avait interviewé il y a huit ans à l'occasion de ton arrivée à Sainté, Laurent nous avait révélé que tu venais avec le maillot des Verts en U17 aux entraînements du Stade Rennais.
C’est vrai ! Laurent, lui, n’avait jamais rien dit par rapport à ça, mais c’est vrai qu’à l’époque j’avais eu droit à quelques remarques du directeur du centre comme quoi j’étais à Rennes et pas à Sainté. Ce n’était pas forcément bien vu de mettre le maillot des Verts pendant les repas ou pendant les quartiers libres. Mais voilà, moi j’avais tendance à mettre le maillot vert, et à descendre regarder les matches de l’ASSE à la télé. On m’avait dit : « Ecoute, si tu n’es pas bien ici et que tu préfères aller à Sainté, vas-y maintenant ! » J’ai attendu quelques années mais j’ai fini par y aller ! (rires) Curieusement, on n’a pas trop parlé des Verts avec Laurent. Je me souviens qu’il avait joué près de deux ans là-bas, c’est d’ailleurs à Sainté qu’il avait dû arrêter sa carrière suite à ses problèmes cardiaques. Je crois que son retour à l’ASSE à ce poste d’entraîneur adjoint des pros va lui permettre de grandir encore. Ses valeurs collent parfaitement à Sainté.

Aux côtés de Ghislain Printant, il va entraîner Denis Bouanga, qui a joué à tes côtés à Lorient lors de la saison 2017-2018. Que vaut Denis, Papy ?
Quand je suis arrivé à Lorient, je ne le connaissais pas vraiment. Je savais juste que Denis venait de faire une grosse saison à Tours. Je crois qu’il avait marqué 16 buts en L2 avec cette équipe. Sur sa lancée, lors des six premiers mois de sa saison avec Lorient, il a marqué 14 buts toutes compétitions confondues, dont 8 en championnat. Certes, ses trois ou quatre derniers mois ont été plus délicats. Mais cette saison-là Denis était notre atout offensif numéro un, il avait une grosse efficacité. C’était un joueur vraiment très adroit. J’étais vraiment agréablement surpris du joueur. Quand j’étais à Sainté, je ne regardais pas forcément la Ligue 2. J’ai découvert un joueur complet et talentueux. C’est un dévoreur d’espace, il est rapide, puissant. Denis est à l’aise avec le ballon.

Tu as senti ce joueur progresser lors de cette saison lorientaise ?
Oui, Denis a évolué. Là où je trouve qu’il a vraiment bien progressé à Lorient, c’est dans le jeu entre les lignes. Au début, je trouvais qu’il prenait beaucoup le côté, il fixait et puis c’était parti… Après, il a commencé à amener de la variété, à revenir un peu à l’intérieur. Il a élargi sa palette. Pour avoir vu quelques matches de Nîmes la saison passée, j’ai trouvé qu’il avait vraiment passé un cap. Denis, quand il est en confiance… Pfiou, c’est du très haut niveau ! Je lui ai envoyé un petit message pour le féliciter de sa signature à Saint-Etienne. On en avait discuté un petit peu quand j’étais à Lorient, Denis est assez fan des grosses ambiances donc forcément il me posait quelques questions, Sainté le faisait rêver. Je pense que l’énorme ferveur qui entoure l’ASSE va lui apporter encore un plus. Déjà qu’à la base il a une débauche d’énergie énorme, quand il va sentir le Chaudron pousser, ça va l’exciter encore plus. Il va kiffer Geoffroy.

A quel poste le trouves-tu le plus à l’aise ?
Moi je trouve que là où il est le plus fort, c’est à gauche. Denis a une très grosse frappe. Les six premiers mois à Lorient, partout d’où il tirait, il marquait. Il était en totale confiance, il avait la réussite. Ce que j’aime aussi chez Denis, c’est que c’est un gros travailleur à l’entraînement. J’ai le souvenir qu’il restait beaucoup à la fin des séances, il frappait. Denis n’est pas qu’un garçon doué, c’est aussi un bosseur. Il peut jouer aussi à droite mais c’est à gauche que je le préfère, c’est d’ailleurs sur ce côté qu’il a joué le plus souvent à Nîmes. Je trouve que Denis est le plus à l’aise quand il a le jeu en face, il peut rentrer, déborder, s’appuyer. Pour moi il est moins à l’aise qu’un Khazri dos au jeu. Wahbi, dos au jeu, c’est très bon. Denis est plus à l’aise sur un côté que dans l’axe où il y a plus de densité. Même s’il a progressé dans ce domaine, ce n’est pas la qualité première d’être dos au jeu et un peu arrêté.

Est-ce qu’il y a du PEA en Bouanga ?
Denis et Aubame sont des joueurs différents. Moi quand je suis arrivé à Sainté, j’étais littéralement scotché par la vitesse de malade qu’avait Aubame. Denis va vite mais Aubame était supersonique, il jouait beaucoup là-dessus. Après, j’ai trouvé qu’Aubame a beaucoup progressé dans le jeu lors de ses années à Sainté. Pour avoir joué contre lui avant, lorsqu’il était à Monaco ou à Lille, je trouvais qu’il allait vite mais il n’avait pas le niveau qu’on a connu à Sainté. Lors de ses premiers mois en vert, Aubame n’était pas un monstre d’efficacité. Mais il est devenu un super buteur à Sainté, un buteur de classe internationale qui a confirmé depuis, que ce soit à Dortmund ou à Arsenal. Denis ne marque pas autant de buts mais je trouve qu’il a une plus grosse frappe de balle. Il a un profil différent. Aubame, il vole sur le terrain. Denis, je trouve que c’est plus dense. Aubame allait tellement vite qu’il n’avait pas vraiment besoin d’être costaud. Denis a quand même cette faculté à résister. C’est pour ça que pense qu’à gauche c’est vraiment son poste. Quand il rentre, avec la frappe de balle qu’il a… C’est un grand point fort !

C’est toi qui lui as appris les grosses frappes ? On se souvient tous que c’est de la sorte que tu as claqué quatre de tes six pions en vert hors de la surface…
Non, Denis avait cette qualité de frappe avant moi ! (rires) Avec son pote Faïz Selemani, ils ont fait quelques concours. Ils évoluaient déjà ensemble à Tours. Et Denis a marqué quelques buts de plus que moi depuis le début de sa carrière ! (rires)

A tes yeux, quel est le plus beau but que tu aies marqué en vert ?
Le plus beau but de ma carrière, c’est sans doute celui que j’ai marqué contre le Red Star en février dernier, celui-là c’était le plus difficile. Le plus beau de mes années stéphanoises, c’est celui contre Monaco, une des plus grosses équipes du championnat. C’était un match à enjeu, c’était le premier but qui avait décanté un peu le match. Je me rappelle qu’on avait fait une grosse prestation. C’était un samedi à 17h00, c’était le quatrième contre le troisième. Pour nous c’était un match hyper important. C’était dans ce Chaudron que j’aime tant, dans un stade bien rempli.



Denis célèbre-t-il ses buts comme tu l’avais fait après ton premier but marqué en vert ?
Non, il est beaucoup plus à l’aise ! Il en marque plus souvent, il sait quoi faire. Tu ne le verras pas faire une vieille galipette comme celle que j’avais faite à Sochaux ! (rires) Je me suis pas mal fait chambrer après ça mais quand tu regardes la vidéo de mon but à Bonal, tu vois que les autres joueurs sont super contents que ce soit moi qui ai marqué.



Tu penses que Denis va s’imposer sans problème à Sainté ?
Je pense que Denis a beaucoup de qualités et aura une belle carte à jouer. Je ne sais pas dans quel système le coach Printant compte l’utiliser. A mon avis Denis peut occuper plusieurs postes de l’attaque. Il a des atouts pour apporter un vrai plus à cet effectif. Denis percute, il sait marquer des buts, faire des passes décisives. Il tire très bien les coups de pied arrêtés aussi. En arrivant à Sainté, Denis découvre un autre monde. Mais chaque année il a su franchir les étapes. Il s’est révélé Tours, il a progressé à Lorient, il s’est imposé à Nîmes. Il va continuer de grandir chez les Verts. Bien sûr il aura plus de concurrence, il y aura plus de monde. Mais ça ne va pas le perturber ou le faire cogiter. Denis est un joueur un peu insouciant, c’est un atout pour lui.

Humainement, Bouanga est un bon gars ?
Ouais ! Franchement c’est un bon mec. Il a la joie de vivre. Denis est quelqu’un de souriant, il apprécie la vie. C’est très agréable d’être au quotidien avec lui. Il a toujours le sourire. Même à la fin, quand ça s’est un petit peu moins bien passé pour lui à Lorient, il arrivait avec la banane à l’entraînement alors qu’il était déçu de ne pas jouer, évidemment. C’est quelqu’un de joyeux.

La saison dernière, tu as eu l’occasion d’affronter en L2 d’autres joueurs s’étant révélés dans ce championnat et qui sont désormais stéphanois. Ils t’ont fait bonne impression ?
J’ai effectivement affronté Harold Moukoudi en début de saison dernière. Je l’avais trouvé très bon, très sûr, costaud, très fort dans les duels. J’avais trouvé aussi qu’il avait une bonne qualité de relance. C’est un jeune défenseur central qui semble très prometteur, avec encore une belle marge de progression. Dans un autre style et à un autre poste, Franck Honorat est un joueur intéressant. Il dynamisait le jeu de Clermont. C’était l’un des très bons joueurs de Ligue 2. Il va très vite et a fini dans les meilleurs passeurs. Après, c’est sûr que ces jeunes joueurs vont devoir confirmer dans un club d’un autre niveau plus élévé qu’au Havre ou à Clermont. A Sainté c'est plus relevé et il y a plus de pression. Mais en tout cas ces recrues stéphanoises sont des joueurs de qualité. Comme Vagner, qui nous a fait mal cette saison lors de son prêt à Nancy. Il a quelques caractéristiques communes avec Denis. Il prend les espaces, il a une bonne frappe. Je l’avais trouvé vraiment très bon contre nous.

Selon Ouest-France et la Pravda, Sainté fait partie des clubs qui convoitent ton jeune et prometteur meneur de jeu Alexis Claude-Maurice. Tu peux l’orienter vers Sainté s’il te plaît ?
Ah j’ignorais que Sainté s’intéresse à Alexis, je sais qu’il est courtisé par plusieurs clubs étrangers. C’est sûr qu’aujourd’hui Alexis est un petit phénomène. Pour avoir joué toute la saison dernière avec lui, c’est un joueur qui fait d’énormes différences. Il est hyper vif. Même s’il est assez fin, il est quand même très solide dans les un contre un et dans la protection de balle. Pour moi c’est un top joueur. Il sort d’une très grosse saison, il a à peine 21 ans. La saison précédente il avait montré à l’entraînement qu’il avait d’énormes qualités, même s’il avait à l’époque un peu plus de mal à les exprimer lors des matches. Mais déjà à l’époque j’avais remarqué qu’il était super à l’aise techniquement.

Tu l'aimes, ACM !
Alexis est un joueur super intéressant, qui fait des différences dans la verticalité. C’est un joueur qui fait très mal, qui percute. C’est un milieu offensif qui a beaucoup joué à gauche, il rentrait alors souvent dans l’axe pour dézoner, pour rentrer intérieur. C’était notre relais entre le milieu et l’attaque, c’était vraiment lui qui dynamisait notre jeu. Il a aussi joué pas mal de fois numéro 10. Il avait beaucoup de joueurs au marquage car maintenant tout le monde sait à quel point il peut être dangereux. Alors que quand il était sur le côté et qu’il rentrait, il se faisait un peu oublier et c’était intéressant pour nous. Dès que tu le touches entre les lignes, il se passe quelque chose. Il n’est pas avec nous en stage, du coup il est probablement sur le départ. C’est un garçon réfléchi, je suis curieux de savoir où il va signer.

Même si tu as mal vécu la fin de ton aventure stéphanoise, es-tu resté supporter des Verts ?
Forcément, je suis resté supporter. Je suis super content que les Verts retrouvent la Coupe d’Europe et je vais regarder leurs matches, c’est une évidence. J’ai un de mes meilleurs amis qui joue encore là-bas, Rom’ Hamouma. J’étais supporter des Verts quand j’étais ado, j’aimais déjà l’ASSE avant d’y être. J’ai vécu dans ce club les moments les plus intenses de ma carrière. C’est un rêve qui s’est réalisé. J’ai kiffé la vie là-bas. J’ai kiffé ce qu’on a fait, les relations humaines que j’ai pu avoir. C’est sûr que ma dernière saison s’est un peu moins bien passée. Mais avec le temps j’ai eu une prise de conscience, j’ai mis un peu d’eau dans mon vin. Je sais que je ne suis pas forcément quelqu’un de très facile. J’ai mon caractère, j’ai mal pris certaines choses. Mais avec le temps, ça s’est apaisé. J’ai gardé pas mal de contacts avec des joueurs qui ne sont plus au club : Paul Baysse, Renaud Cohade, François Clerc, Jérémy Clément. Quand je vais sur Sainté, je vais toujours voir mon gars Rom’. Et on a créé un petit groupe avec les anciens du tarot, Loïc, Jessy, JP Mignot, Jonathan Brison… Même si je les vois un peu moins, je suis toujours ce qu’ils font, leur parcours.

 

Merci pour tout Papy !