Les Verts ont mis fin à leur série de 7 défaites consécutives en faisant match nul contre Lille, un des cadors de la Ligue 1.
Après la première mi-temps à Brest la semaine précédente, quand ils ont été complètement absents, les Stéphanois étaient attendus lors de la réception d'une des équipes en forme du championnat. Et ils ont réussi à hausser leur niveau de jeu, de prendre l'ascendant sur leur adversaire... pendant les premières 45 minutes, seulement. Ils ont été bien dépassés après la pause, mais ils ont su résister, pour prendre à la fin leur premier point depuis plus de deux mois.
En conférence de presse, le manager stéphanois a bien résumé la différence entre les deux périodes, très distinctes, de ce match : "on a mis les bons ingrédients, en première mi-temps notamment, avec beaucoup de qualités, de maîtrise, des situations, des occasions. (...) En deuxième, Lille est reparti fort, on a perdu deux ou trois ballons qui nous ont fragilisés un peu et ont permis de remettre cette équipe lilloise en selle. On sait qu'avec les entrants et leur effectif ils peuvent maintenir un rythme très élevé jusqu'à la fin du match". Voici quelques exemples.
1MT - solidarité et jeu long
Le staff stéphanois a choisi de continuer avec le système utilisé lors des derniers matchs, un 4-4-2 avec Zaydou Youssouf en milieu latéral, mais avec 4 retours très importants dans le 11 de départ :
Hamouma et Khazri, de retour de suspension, ont été alignés en attaque, et Debuchy et Trauco, enfin capables de démarrer un match, aux postes des latéraux. De l'expérience donc.
Sur l'action qui commence avec cette capture d'écran, les Lillois - disposés en 4-2-3-1 - arrivent à trouver leur meneur de jeu entre les lignes. Mais les Verts sont solidaires et les milieux sont aidés...
... par Hamouma, qui descend et récupère le ballon. Kolo était aussi sorti de la défense pour suivre l'adversaire aussi et l'empêcher de distribuer le jeu. Le ballon arrive à Bouanga, qui joue avec sa défense...
... et via Neyou le ballon circule jusqu'à Debuchy à droite, qui balance une longue transversale à la recherche de Bouanga, à gauche.
Les Stéphanois ont clairement préféré attaquer avec des longs ballons. C'était intentionnel, comme l'explique Debuchy : "on a mis beaucoup de longs ballons dans le dos de Bradaric pour Khazri notamment. C'était travaillé et voulu. Ils ont une bonne défense mais on savait qu'on pouvait jouer dans leur dos, derrière leurs défenseurs centraux, sur le côté, car ce ne sont pas des joueurs qui sont très rapides". Mais il y a aussi eu un changement majeur dans l'approche tactique des Stéphanois et la statistique des passes effectuées par Moulin est très parlante. Par match, en moyenne, il fait 6 longues passes sur 28... mais contre Lille il en a fait 26 sur 32 !
Un changement tactique qui a porté ses fruits :
Moukoudi joue à un coup franc défensif et le ballon arrive à gauche, où Trauco joue plus haut dans le couloir à destination de son ailier. Le bloc adverse entoure bien les milieux stéphanois, le jeu doit passer par les côtés. Mais il n'y a aucune construction recherchée :
Bouanga balance en première intention un long ballon à destination de Khazri, dans le dos du latéral adverse, qui rate sa remise au gardien et fait tomber l'attaquant stéphanois dans la surface.
Ça serait réducteur de baser l'animation offensive des Verts seulement sur des longs ballons dans le dos de la défense. Ils ont aussi proposé des séquences de construction plus élaborées, comme par exemple à la 14e :
Bloc adverse en place dans sa propre moitié, Camara joue avec Moukoudi, qui envoie à droite. Debuchy prolonge avec son milieu, Youssouf, avant de dédoubler dans le couloir. Mais le milieu stéphanois ne combine pas, il hésite et finalement après avoir gardé le ballon dans les pieds pendant 6 secondes, il joue en arrière :
Sur cette image on remarque que Debuchy et Khazri avaient fait le même appel, ils étaient l'un à côté de l'autre collés à la ligne de touche. Le ballon circule jusqu'à Trauco à gauche...
... avant de revenir à droite. Debuchy est toujours à côté de Khazri, c'est Zaydou qui recule en position de latéral. D'où il trouve Camara entre les lignes :
Le milieu stéphanois cherche une solution à son tour, pendant 6 autres secondes. Entre temps, Hamouma aussi s'est excentré et se retrouve collé à la ligne de touche. La combinaison s'effectue naturellement dans ce couloir...
... avec Debuchy qui prolonge jusqu'à Hamouma, qui lance en profondeur Camara. Son centre en retrait ne trouve pas Khazri, mais arrive dans la course de Trauco, qui arme le premier tir cadré des Verts.
2MT - moins bien en place
Le changement de physionomie entre les deux périodes est évident dans les chiffres de possession. Si jusqu'à l'ouverture du score les Verts ont eu le ballon (58% de possession), ils ne l'ont plus trop vu après la pause (27% de possession en 2MT !). Un changement tactique, voulu ou forcé, mais qui peut se justifier pour une équipe qui mène au score, qui peut se contenter de défendre et jouer en contres.
Le problème est que les opportunités de contre n'ont pas été jouées à fond, comme dans cet exemple à la 58e :
Les Lillois sont présents dans la moitié stéphanoise et ils essayent un jeu vertical. Facilement lu par Kolo, qui intercepte et qui joue de suite avec Camara. La sortie est propre...
... avec Hamouma en point d'appui, qui décale Zaydou. Il joue à droite avec Khazri, qui s'était excentré - il était dans le rond central au moment de l'interception. Il est le Stéphanois le plus haut sur le terrain...
... mais Hamouma se projette et reçoit le ballon en profondeur. Sur cette image on voit que Bouanga se trouve à la même hauteur que lui, pendant que Camara et Youssouf ne sont pas loin derrière. Mais quand Hamouma centre...
... il n'y a que Bouanga dans la surface, les autres Stéphanois n'ayant pas suivi.
Un autre problème de la tactique de l'ASSE en 2MT vient des approximations techniques ou tactiques des joueurs stéphanois. On ne va pas insister sur les pertes de balle dans leur propre moitié en tout début de la période, elles ont été relevées même en conférence de presse. Mais il y a eu aussi de l'indiscipline tactique, parfois manquant un élément dans le bloc équipe, ce qui a facilité la tâche pour les Lillois. A titre d'exemple, voici une capture d'écran :
Bloc stéphanois en 4-4-2 avec un seul joueur pas à sa place, Youssouf. Les Lillois ne sont pas très haut, ils n'ont que l'avant-centre et les deux ailiers dans les 30 derniers mètres. Par contre, ils ont le latéral gauche complètement libre et en deux passes ce joueur se trouve en position de centre et Lille égalise...
Un autre exemple est très parlant de la difficulté d'avoir un projet de jeu basé sur du pressing :
A la 76e, Bouanga sort d'un coup de sa place pour presser le latéral droit adverse, qui se déjoue facilement de lui. Nordin et Boudebouz, entrés à la place de Khazri et Hamouma, ne faisaient pas de pressing, cherchant seulement à empêcher une relance des défenseurs. Le latéral adverse n'a donc pas d'adversaire devant lui dans le couloir...
... et Trauco sort aussi de sa place au lieu d'attendre le retour d'un coéquipier. Un Lillois plonge naturellement dans son dos, montrant clairement où il veut le ballon (et Neyou montre aussi où il faut défendre). Décalage dans le couloir gauche de la défense, que Kolo essaie de combler...
... mais il est facilement éliminé et Lille à une super opportunité de marquer un deuxième but. Heureusement, leur avant-centre ne cadre pas son tir...
Un enchaînement d'erreurs individuelles comme on a vu à des nombreuses reprises ces derniers mois. Sans solidité défensive, sans défenseurs capables de gagner régulièrement leurs duels, se découvrir devient synonyme de se mettre en danger...
Conclusions
Vu la physionomie du match, les Verts ne méritaient pas plus qu'un petit point, ils ont été largement dominés dans le jeu en 2MT. Mais ce point n'est pas volé après leur prestation convaincante avant la pause et surtout, il fait un bien fou au moral. La série de défaites est arrêtée, mais les maux récurrents n'ont pas disparu et il reste encore beaucoup de travail avant de parler d'un début de guérison. Et le plus important maintenant est de confirmer, de capitaliser ce point pris, comme l'explique très bien Boudebouz : "C’est bien de stopper la série négative face à une belle équipe du championnat. Maintenant, il va falloir continuer, on a un match à Dijon qui est très important. J’espère qu’on ne fera pas comme on l’a fait après le match de Lyon. Il y avait de bonnes choses dans le derby mais après à Brest on s’était écroulé"...