Cette saison, les Vilains ne ressemblent plus à rien. Ou plutôt si, ils sont simplement devenus ce qu’ils ont toujours été : vilains. Vilains dans l’état d’esprit, ils sont également devenus vilains dans le jeu et les résultats.
Pour un peu, on les prendrait en pitié, tant ils s’enfoncent soigneusement dans une délicieuse médiocrité. Leur « quelconquisation » est en marche, rythmée par les fessées infligées de week end en week end par les cadors du championnat que sont Evian, Reims ou Ajaccio.
Mais qu’importe leur stature banale, qu’importe leur profil idiot d’ex-nouveau riche chouinant (ah les ravages de la mémoire courte) devant les moyens du QSG. Qu’importe l’absence quasi totale de joueurs de calibre dans leur effectif. Dimanche c’est LE derby, et plus que jamais c’est LE match de la saison.
Bien avant Esjberg, bien avant la terrible désillusion, cette soirée du 10 novembre occupait déjà une place bien particulière dans mon esprit incurablement torturé, dans mon âme tellement (trop ?) encombrée du poids symbolique de cet affrontement. Pressentant le standing vacillant du club de la banlieue, j’ai, au delà de l’espoir d’une campagne accomplie en Europa League, dès le mois de juin et le calendar fraichement publié, caressé le fantasme d’une revanche enfin éclatante dans l’écrin de Geoffroy.
Car oui, bien sûr, malmener Paris et ses pétro dollars depuis une saison et demie est une immense fierté. Mais taper enfin les Vilains, marquer concrètement le renversement de tendance nous emmènerait bien au delà de la fierté, au coeur d'un plaisir immense, rare. Pour un moment qu'on rangerait parmi les meilleurs de nos souvenirs verts, qu'on ait 7 ou 77 ans.
J’exagère ?
Il faut se souvenir de tout. De la Playstation, des visages peints et des cheveux teints, des insultes au balcon et du cynisme d’Aulas à l’heure des fausses excuses, des doigts du même triste sire (restons courtois...) montrant le score final à Geoffroy. Se souvenir aussi du tacle de Pjanic envoyant impunément Matuidi à l’infirmerie dès le début d’un derby où Bergessio sera privé inexplicablement d’un pénal. Ce même pénal non sifflé malgré la faute évidente sur Ilan à Gerland. Ce même pénal doublé d’une expulsion de Diatta sifflé sur la même terre maudite pour une prétendue faute pourtant commise à l’extérieur de la surface. Et puis la fin de carrière de Compan découpé par Cris. Et puis Bastos venu provoquer le kop. Et puis, au delà de ces coups de Jarnac, tous ces coups du sort, cette égalisation si tardive de Benzema face à un mur posté à 11 mètres, ce terrible retournement de situation réalisé par un onze lyonnais survitaminé face aux Verts de Baup à Geoffroy...
Il est surréaliste de concevoir que Zouma n'était pas né ou Mitterrand pas mort (sans qu'il n'y ait aucun rapport sauf scoop à venir dans Paris Match) lors de notre dernier triomphe dans le Chaudron. Cet affreux enchînement n'a qu'un avantage : il n'en rendra que plus exquis le coup de sifflet final victorieux dimanche soir. Car oui, face à la si nauséabonde, James Bond, litanie de coups tordus, il n’y a pas à réfléchir ni à hésiter. Cela n’a que trop duré. La motivation des Verts dimanche égalera au moins celle manifestée contre Paris. Si l’occasion nous est donnée de les piétiner, de les humilier, de leur faire ravaler leur éternelle morgue, de les renvoyer à leur statut de club sans Histoire avec un grand H, de les faire rentrer en crise (si tant est qu'ils le puissent tant il faudrait pour cela que ce club suscite un miminum de passion), il ne faudra surtout pas s’en priver. Rien que pour nos yeux.
Et lorsqu'un jour (le plus tard possible) viendra l’heure de conter la légende de Galette à Sainté, alors ce jour là, parmi ses accomplissements, en bonne place à côté du nouveau titre conquis au SDF en avril dernier, on placera ce vieux titre retrouvé de capitale du football. Cette église replacée au centre du village, qui domine la banlieue. On parlera de gratitude. On évoquera aussi le plaisir procuré, et la fierté rendue, nettoyée, polie, soignée, fignolée, briquée, éclatante après quelques bonnes tôles infligées aux Vilains.
Ces Vilains, qui aujourd'hui s'inventent de pathétiques cache-misère : Ils ne parlent plus de centre de formation mais d'Academy pour se donner encore l'illusion de la grandeur, de la modernité. Ils remplissent leur stade à coup d’invitations distribuées à la pelle chaque matin par des hôtesses sans charme à des spectateurs sans envie à l’entrée des stations de métro. Il faut bien donner le change pour celui qui toute sa vie aurait bien aimé avoir l’air, mais n'a jamais eu l’air du tout.
Dimanche, nos joueurs doivent mordre le ballon comme jamais. Leur talent, désormais supérieur, fera inexorablement le reste.
C’est écrit, c’est fatal, c’est tellement moral.
Allez les Verts !
Parasar