L'ASSE a utilisé plusieurs approches pour essayer de marquer un but contre Bastia et une analyse très pertinente des attaques vertes à été fournie par Nolan Roux même. Mais comme tout le monde ne sent pas le jeu comme un professionnel, quelques exemples sont peut-être nécessaires pour mieux illustrer ses propos.


L'oeil tactique de Roux

 
L'interview de Nolan Roux au bord du terrain à la fin de la première période est pleine d'enseignements:
 
"Ils nous pressent très bien et on a du mal à ressortir les ballons. On a eu quelques possibilités, quelques contres, mais on les a mal joués malheureusement. On joue un peu trop dans les pieds, je trouve, il y a la solution par dessus la défense, mais on l'utilise pas quand il faut, c'est un peu dommage. En plus de ça, on aurait pu concéder un but dès le début, donc il faut rester vigilant. On défend bien, mais si on veut l'emporter, évidemment il faut marquer, mais il faut mettre plus que ça. Il faut qu'on évite un peu le jeu court. Sur les vidéos on a vu qu'il fallait combiner sur les côtés. On l'a fait quelques fois, on a mis quelques bons centres, mais il faut faire encore plus, parce que même si on a quelques possibilités, ça reste pas grand chose pour l'instant. On ne désespère pas, mais si on veut l'emporter il faut revenir en deuxième mi-temps avec plus d'ambitions."
 

La première période

 
Pour vérifier la deuxième partie marquée en gras, il suffit de regarder les passes effectuées par les Verts lors du premier acte (en bleu foncé les réussies, en rouge les ratées, en bleu clerc celles qui ont été suivies par une frappe - image fourfourtwo.com) :
 

 

En effet, il semble y avoir une zone de non-droit pour nos joueurs, ils n'ont pas du tout essayé de combiner dans la zone centrale de la moitié adverse. Et si on suit les données whoscored.com, les Verts ont effectués 5 centres (2 du côté droit, 3 du gauche) pendant cette première période. Bref, les données corroborent parfaitement l'analyse de Roux.  

 

La deuxième période

 
Mais Nolan avait-il raison avec la première partie de sa déclaration marquée en gras : est-ce qu'il y avait vraiment moyen de passer au dessus de la défense? Prenons un exemple en deuxième période.
 
Les Verts récupèrent le ballon, qui arrivent dans les pieds de Tannane, alors que Roux et Cohade font des appels en profondeur :
 

 

Tannane profite de ces appels pour aller sur le côté gauche, là où KMP monte aussi et où il reçoit le ballon : 
 

 

Jusque là, non seulement on joue de nouveau sur un côté, mais nos deux ailiers se trouvent sur le même ! Ce côté se referme, alors KMP redonne le ballon à Tannane qui revient vers l'axe - à noter que 10 secondes se sont déjà écoulées avec cet essai de passer sur le côté et donc le bloc bastiais s'est repositionné : 
 

 

Comme il n'a pas de solutions (Cohade et Roux sont sur la même ligne suite à leur appel, Pajot est pris), Tannane est obligé de faire une passe en arrière jusqu'à Clément, dans le rond central :
 
 
De Clément, via Pajot, le ballon arrive jusqu'à Sall, qui temporise... une attaque placée va s'organiser. On note que Cohade se positionne toujours comme un deuxième attaquant, que Tannane et Pajot sont dans l'axe, mais derrière le premier rideau défensif corse et que Clément recule pour couvrir une éventuelle montée de Sall. 20 secondes ce sont déjà écoulées après le début de l'action :
 

 Sall joue un un-deux rapide et statique avec Pajot. Le but n'est pas d'éliminer un défenseur, mais d'en attirer un et de donner encore plus des temps aux coéquipiers de se démarquer. On voit ainsi comment un des milieux suit le ballon et monte sur Sall, ce qui permet à Tannane de se libérer et demander le ballon dans l'entre-jeu. On voit aussi que KTC a avancé de quelques mètres, en entamant un appel en profondeur :

 


Long ballon de Sall au dessus de la défense, dans la course de KTC, centre en première intention dans la course de Roux et but !

 
Une action de plus de 30 secondes pendant laquelle les Verts ont essayé de passer sur un côté, puis ils sont revenus dans l'axe, où ils ont temporisé pour mettre en place une attaque telle que Roux souhaitait.
 

Conclusions

 
Tout le monde, joueurs et coach compris, s'accorde pour dire que les Verts ne pratiquent pas un jeu spectaculaire. Mais au delà du spectacle, ce qu'ils font, ils le font bien. Le bloc défensif est bien en place et concède peu d'occasions. Les attaques sont basées sur des principes simples, mais efficaces car bien effectués. Cet exemple est utile pour comprendre que jouer avec des ballons longs ne se résume pas juste à les balancer n'importe comment - il y a une phase de préparation qui est très importante. Et que parfois ce style de jeu, même s'il n'est pas spectaculaire, est tout simplement une solution à une situation particulière. Ce n'était peut-être pas le plan de jeu initial, mais des joueurs comme Roux ont compris rapidement que c'était une option, ils l'ont utilisée et le résultat leur donne raison. Et comme ça fait quatre victoires consécutives, on peut même penser qu'ils savent ce qu'ils font...