Ce mardi à Annecy, l'ancien Vert et ex-entraîneur de l'ETG Romain Revelli nous a accordé une interview de 90 minutes (sans compter le temps additionnel). Un entretien en quatre parties qui démarre par la formation.


Avant d'être formateur, tu as été formé à l'ASSE, des U16 jusqu'à la réserve. Quels souvenirs gardes-tu de ton expérience de jeune joueur stéphanois ? (Barre transversale)

J'en garde un souvenir magnifique parce que pour moi, et on le dit souvent, dans la carrière d'un joueur, ce sont souvent les plus belles années. C'est là que j'ai évolué au plus haut niveau parce que, déjà, je suis tombé dans des générations où le club, à cette époque-là, brillait au niveau des jeunes. On sait que parfois c'est un peu cyclique. J'ai fait des sélections en Equipe de France. J'ai fait une finale du championnat de France. On avait terminé premiers de notre poule, à l'époque dans la poule Sud. C’était la génération Jérémie Janot, Fabien Boudarène... On avait perdu contre l'INF de Thierry Henry. J'ai fait un quart de finale de Gambardella avec Adel Chedli, Willy Sagnol et toute la bande contre l'AS Cannes de Patrick Vieira. J'ai été capitaine de mon équipe. J'ai été trois ans aspirant, comme ça se passait bien, trois ans stagiaire. Mes plus beaux souvenirs de joueurs sont là. En plus, dans le centre de formation, c'est là que tu gardes les copains parce qu'après dans la carrière senior c'est un peu différent.

J'ai encore eu dernièrement Sylvain Flauto qui est sur Rhône-Vallées, tous les gars de ma génération, Jérémie, Bibi. Avec certains, plus proches, on se voit. Avec d'autres, on échange via les réseaux sociaux. J'avais Lucien Mettomo, longtemps, j'ai encore un de mes garçons qui s’entraîne avec son maillot de la CAN, du Cameroun. J'ai plein d'anecdotes. Je me souviens, au début, j'étais le seul à avoir une voiture donc on avait pris des appartements et je faisais la tournée. Je prenais mon ami Edik Korchagin, qui était le premier Russe arrivé, je prenais Lucien Mettomo qui habitait en bas de la rue Michelet et puis on allait s’entraîner à L'Etrat. Mais nous on avait des appartements et le centre de L'Etrat, c'était en 1996-1997, ça venait d'ouvrir. Donc ils me remerciaient et Lucien me ramenait des maillots. Edik m'avait ramené des poupées russes que j'ai encore chez moi. Je l'ai revu récemment, il était venu nous voir à L'Etrat, il avait été invité par les gens de L'Etrat, Bernard Champion…

Tu n'as pas réussi à signer pro à l'ASSE. Ça te laisse un gout d'inachevé ? (Poteau gauche)

Il y avait un goût d'inachevé qui m'a servi après aussi, un peu, parce que tout le monde me voyait gros comme une maison, bien au-delà de certains joueurs et puis la dernière année, je suis tombé avec Christian Larièpe qui était à la formation, ça s'est plus ou moins bien passé, je crois qu'il y a eu Repellini, Mankowski. J'étais dans le groupe pro pendant deux ans, on était en D2 mais sans jamais jouer si ce n'est les matchs amicaux, la préparation donc je ne suis pas passé et j'ai été libre. Et là, j'ai atterri au Puy, j'en garde un merveilleux souvenir mais peut-être que je me suis un peu précipité. J'y reviendrai après, sur les choix de club, être bien conseillé est important, qu'on soit entraîneur ou joueur. A l'époque on n'avait pas d'agent. Vu mon niveau, j'aurais pu évoluer largement. Mais à partir du moment où j'ai signé au Puy en CFA, j'ai basculé entraîneur dans ma tête et j'ai toujours eu en tête de retrouver le haut niveau que j'avais connu en jeune par l’entraînement.

Que gardes-tu de ton expérience d'entraîneur des U17 ? (Poteau gauche)

C'était merveilleux. Je sortais de quatre ou cinq ans en étant conseiller technique suite à ma carrière de joueur au Puy, en Auvergne. Et, donc, j'avais trop envie du club et je suis revenu au début d'un projet. Bon, la formation se portait plus ou moins bien. Avec Alain Blachon que j'avais connu en tant que formateur et en tant qu’entraîneur au Puy, on a toujours été très proche, on l'est encore. En 2007, beaucoup de choses changent, il y a Laurent Roussey qui prend du galon, qui a un œil sur la formation et il met Alain Blachon en tant qu'adjoint, responsable de la formation. Beaucoup de gens comme Luc Bruder ou Patrick Revelles partent et il faut des entraîneurs. J'arrive avec Alain Blachon et Abdel Bouhazama. On arrive tous les trois au début d'un projet et là c'est magnifique parce qu'au-delà des U17, on a fait 4-5 ans de projet où on a ramené un peu les choses en termes de joueurs formés, de résultats. Ce que je retiens de la formation, c'est que c'est que c'est une expérimentation permanente. Et puis, on s'est jeté corps et âme dans le projet. Moi j'étais entraîneur des U17 mais avec Blache on a ouvert la 6ème-5ème, on se mettait dans le recrutement. C'est là qu'on a recruté tous les bons joueurs qui sont sortis, Kurt Zouma, toute la clique. On allait aux coupes nationales. Et puis, tout doucement les résultats commençaient à suivre.

Je me souviens que la deuxième année, je crois, je me suis qualifié pour les poules finales avec la génération Vachoux, Zouma. Je crois que ça faisait 10-15 ans que le club n'y était plus allé. Abdel avait fait les finales de Gambardella, on retrouvait des sélections en équipe nationale, on a gagné les tournois de Montaigu. Donc autant en terme de résultats que de joueurs formés, parce que des 90 aux 95, à peu près, on a eu de grosses générations avec des joueurs qui sont dans les meilleurs clubs européens. De Guilavogui en passant par Ghoulam, par Zouma, par Vachoux, par Cros, par Saadi, toute la clique, on avait chaque année un ou deux joueurs de très, très haut niveau. Et puis, surtout, au niveau des entraînements, j'ai vraiment appris mon métier. On a expérimenté plein de choses, on avait une équipe d’éducateurs, avec Gilles Rodriguez, avec tout le monde, où l'on était toujours ensemble, du matin au soir. Les seuls repas qu'on faisait de temps en temps avec nos femmes on était encore ensemble, on ne parlait que foot. Il n'y a que dans des aventures comme ça que tu arrives à avoir des résultats. C'était super.

Quels joueurs t'ont le plus marqué en tant que formateur ? (Poteau droit)

Je ne vais pas sortir plus de noms que d'autres mais c'est vrai que j'ai eu de bons gamins, de bons jeunes hommes qui avaient tout compris. On s'éclatait avec eux. On les a fait grandir, on les a fait pousser. Alors forcément, on retiendra, on les a cités, les plus connus. J'ai gardé des rapports avec tous. Kurt, je l'ai vu il n'y a pas longtemps, je l'ai croisé parce que son plus jeune frère joue à Saint-Priest. Je suis allé en stage à Wolfsburg il y a un an et demi, chez Josuha Guilavogui. J'en vois beaucoup, j'ai beaucoup de relations avec plein de joueurs, le petit Kevin Mayi, le petit Momo Maouche. J'ai eu Idriss Saadi encore la semaine dernière au téléphone. Forcément j'ai un peu un peu plus de contacts avec ceux qui sont partis de l'ASSE, Même si j'ai des relations avec certains qui sont encore au club, on parle plus des pros, je ne me sens pas de les appeler. C'est plus pour les bons vœux, pour des choses comme ça. On s'adore mais vu ma place, mon départ, ce serait malvenu d'être beaucoup en contact avec les joueurs. Mais bien sûr que j'ai beaucoup de liens avec tous ces joueurs.

En m'inspirant des signatures de Kacou et Chapuis quand l'ETG devait démarrer en National, je te propose l'exercice suivant. Si tu pouvais signer en tant qu'entraîneur des joueurs laissés libres par l'ASSE, quel serait ton onze type ? (osvaldopiazzolla)

Ce n'est pas facile de répondre à cette question au débotté parce que je ne voudrais pas en oublier mais je vais quand même essayer de te donner un onze des joueurs que j'ai eu en U17. Si on parle du gardien, Axel, forcément, avec le petit Jérémy Vachoux, par exemple, parce que c'étaient des gamins, dans leur talent, dans leur travail, dans leur potentiel, qui avaient quelque chose en plus, donc ça nous ferait déjà deux bons gardiens. Bon après derrière, moi j'aimais beaucoup, pour ma première année, Loris Néry parce que, après il a dû changer de poste de par sa taille, mais quand il jouait dans l'axe, à cette époque-là, c'était formidable. Avec en plus Pierrick Cros, Kurt Zouma et Faouzi Ghoulam, je pense qu'on aurait une défense de joueurs intéressants. Mais il y en a d'autres. Ben Karamoko par exemple, qui a fait de très bons matches sur la fin, lors de mes dernières années. Au milieu, j'ai un très bon souvenir du petit Mohamed Maouche qui est en train d'éclater. Il a eu une année difficile et là il fait une bonne année avec Tours. Après il y a plein de joueurs, le petit Bilel Aouacheria qui est au Portugal maintenant. Il y a beaucoup de joueurs, j'en oublie. Devant, forcément Idriss Saadi et Kevin Mayi, deux joueurs qui m'ont marqué. J'ai un petit lien privilégié avec Dylan Saint-Louis, aussi, que j'ai toujours eu dans toutes mes équipes, en U17, en pro à Saint-Etienne et à Evian. Voilà, entre autres, avec Jo Guilavogui on n'arrive pas loin d'une équipe.

Il se dit beaucoup de choses autour des éducateurs à l'ASSE. Les critiques portent régulièrement sur leurs compétences et le fait que le copinage des anciens ait plus d'importance que les résultats obtenus. Pour toi, où se situe la vérité ? (Naar)

Je ne peux pas me permettre d'en parler maintenant que je suis parti. Déjà quand j'étais avec les pros, j'étais un peu plus loin de la formation, ce serait malvenu pour moi de parler de ça. Personnellement, si j'étais directeur d'un centre ou entraîneur numéro un, je prendrais surtout les gens sur la compétence. Je ne parle pas forcément des gens de Saint-Étienne, mais c'est un principe de management pour moi, plus que l'amitié. Après le travail de formateur, je peux en parler plus que des gens qui travaillent peut-être bien et que je ne peux pas me permettre de juger, surtout que je ne vois pas les entraînements, je suis pas dans les réunions. On pourrait juger, au pire, si on était dedans. Le travail de formateur, c'est un travail d'équipe. Ce n'est pas évident parce qu'il y a non seulement l'éducation de l'homme, le plan de formation du joueur, on ne fait pas pareil à 16 ans qu'à 18 ans ou qu'à 20 ans donc il faut être carré sur ça et puis surtout c'est une aventure humaine avec les joueurs et avec les entraîneurs. C'est-à-dire qu'on ne peut pas s'occuper que de son équipe, que d'un truc en particulier. Tu dois te mêler du recrutement, tu dois aller voir la préformation, tu dois aller voir l'équipe CFA, tu dois aller voir les pros donc moi je vois ça forcément dans sa globalité.

Si on veut une réussite, que ce soit dans une équipe pro ou à la formation, il faut qu'il y ait un investissement terrible de la part d'une équipe éducative qui soit mêlée sur tout. Comment ne pas être mêlé au recrutement ? Et même avec ça, parfois tu es très moyen parce que c'est un sport très très difficile où c'est la guerre pour recruter les bons joueurs. En plus, on est sur une ligue, la ligue Rhône-Alpes, où tout le monde se mêlait à aller voir les coupes nationales, les coupes interdistricts. Sûrement qu'ils font ça, peut-être, ça, je ne sais pas, je mets de côté. Si j'y étais, je chercherais des gens vraiment compétents et, surtout, des fous furieux de la formation qui vont travailler en équipe, chacun expert dans son domaine. L'expert de la préformation, ce n'est pas l'expert de la Gambardella, chacun a une spécialité autant au niveau psycho-pédagogique qu'au niveau football. Ça j'essaierai de le lier pour que chacun ait de la reconnaissance. L’entraîneur des petits, il est aussi important que l’entraîneur des grands. Et puis, surtout, un investissement de tous, notamment dans le recrutement.

Quel est le meilleur moyen de faire grandir des jeunes issus de la formation dans un club avec les objectifs et moyens de l'ASSE ? Quoi faire d'un très bon U19 - ça lui suffit juste des entraînements avec les pros, voir 10-15 minutes une fois par mois ? Doit-il rester avec sa catégorie d'âge, doit-il jouer avec la réserve (CFA2) ou être prêté à un niveau supérieur ? (Pilou)

Avec mon expérience de formateur et pour avoir eu un peu de recul en ayant été adjoint des pros pendant quatre ans après et encore après à Evian à faire une année, j'ai un peu plus d'idées. Surtout qu'à Evian, j'avais écrit un projet sportif où l'on était axé autour d'un club formateur. La ligue Rhône-Alpes, c'est la ligue, après Paris, qui sort le plus de pros, pas qu'en Rhône-Alpes, dans tous les clubs il y a des Rhône-Alpins et après Saint-Etienne et Lyon qui font l'élite mais qui réduisent leurs effectifs et mon idée c'était que sur la Savoie, la Haute-Savoie, l'Ain, l'Isère, parce que même si tu as Bourg-Péronnas et Grenoble, Evian était au-dessus en terme d'infrastructure et de qualité de formation, il y avait vraiment la place pour avoir une équipe de L2, c'était le but, avec pratiquement que des jeunes et là, on avait gardé nos meilleurs jeunes. Donc je m'étais beaucoup penché sur la formation.

Ce que je pense, maintenant, c'est qu'en France on se leurre un peu sur une chose, c'est qu'on pense qu'on va avoir, on va prendre l'exemple pour Saint-Etienne mais on peut prendre l'exemple sur d'autres clubs, que des Kurt Zouma ou des Raphaël Varane, c'est-à-dire un joueur mature très tôt, à 17 ans il rentre chez les pros, il n'en sort plus. Mais la formation, ce n'est pas ça. Ça arrive de temps en temps, il arrive chez les pros, il en sort plus, il a déjà la maturité dans la tête, il a tout ce qu'il faut et il est tout de suite au niveau. Mais l'idée de la formation, c'est quoi ? C'est d'avoir des jeunes dans ton équipe une mais peut-être qu'ils seront très bons à 23-24 ans. Et le problème, il est là, c'est que tout le monde, en interne ou en externe, quand le gamin a 19 ans et vient un peu et bien en interne tu as parfois l’entraîneur qui veut qu'il devienne tout de suite comme Kurt Zouma alors que lui est là pour un mois ou deux mais on sait très bien qu'il va être prêt à 22-23. Tu as, pareil, l'entourage du joueur, l'agent, la famille qui ne comprend pas, qui se dit "mais en fait, ça y est, il est avec les pros" et tu as l'impatience des journalistes qui ne comprennent pas trop parce qu'ils l'ont vu rentrer dans l'équipe, ils l'ont vu sortir et ils ne savent pas trop.

Moi, mon idée, si j'étais numéro un et si j'étais sur un projet de club formateur, ce serait d'être plutôt patient. Et je trouve qu'on n'est pas assez patient en France. On a ces exemples de supers gamins, mais qui sont des internationaux, mais ça, c'est un sur dix, le but, c'est que les neuf autres soient dans ton équipe. On peut donner des supers exemples. Pas par rapport au club, parce que les Stéphanois et moi c'est pareil, on n'aime pas trop ça, mais j'ai un joueur en tête parce que je l'ai connu en jeune et je l'ai connu en pro et je le connais ce joueur, c'est Rachid Ghezzal. Il sort à 23-24 ans. Entre temps, il fait dix matchs, il retourne en CFA, parfois il fait un match bon, pas bon, et là faut pas s'affoler en se disant 'on va vite le vendre' ou 'on va vite le prêter' ou 'on le dégage, il ne passera pas'. L'essentiel, c'est qu'on ait des joueurs pour notre équipe une. On se leurre à vouloir tous qu'ils soient exceptionnels. Parce qu'à 20 ans, Saint-Etienne, c'est très haut niveau, c'est cinquième, c'est quatrième, comment veux-tu ? A part des phénomènes, c'est impossible, dans ta tête, surtout si tu n'as pas l'entourage et même quand tu as l'entourage, même physiquement, tu n'es pas prêt... A 25 ans, tu es un homme, mais là, dans tes duels, c'est pas possible ! Il faut laisser plus de temps, il n'a jamais été prouvé qu'à 20 ans, ça y est. Alors oui, tu dois y être, mais pas encore un titulaire, surtout dans des clubs comme ça ! T'as quand même des clubs où tu as une attente !

D'après toi, quel est le meilleur âge pour intégrer pleinement dans l'équipe première (sans forcément faire de lui un titulaire) un jeune issu du centre de formation ? En supposant qu'il est un bon joueur, mais pas un surdoué comme Kurt Zouma, bien sûr. (Pilou)

Donner un âge c'est difficile mais il faut être patient. Le joueur faut le prêter. Je me souviens de Bafé Gomis qu'on avait prêté à Troyes. Des joueurs sont prêtés à droite à gauche, parfois ça ne réussit pas mais ça les aide. Et après ils déclenchent. Il faut de la patience. Vraiment il faudrait se dire, si à 22-23 ans, sur une saison complète, le joueur n'est pas dans ton équipe à jouer 20 matchs, on ne peut plus, mais parfois il faut attendre jusque-là si l'on sent que le mec a le niveau.

Toi qui a été un formateur, que pense tu de la formation stéphanoise et de l'intégration des jeunes en pro à l'ASSE ? (gb38)

Je pense que par rapport à d'autres clubs même proches de nous, quand on voit le potentiel qu'on avait et les résultats qu'on faisait contre eux, au final on aurait peut-être pu mieux faire. Je dis "on" car je me mets dedans. On aurait dû mieux faire sur le suivi entre les pros et la CFA, sur la patience. Quand je vois des joueurs au même âge qui jouaient dans d'autres clubs à Rennes, à Lyon, à Monaco puisqu'on en faisait partie du haut du panier, je me dis parfois qu'on peut nourrir quelques regrets sur des joueurs qui perdent un peu de temps. Ils ressortent souvent mais pas tout le temps, ça peut être des trucs très durs pour des carrières.

On a eu très bons résultats en U17 et en U19 mais nos meilleurs jeunes ont du mal à s'imposer avec les pros (José)

C'est vrai. Avec du recul, je me dis que j'aurais peut-être dû essayer de convaincre encore plus les gens pour qu'ils soient patients avec les jeunes joueurs, quitte à les prêter, à leur faire faire des aller-retours, à veiller à leur entourage. Il faut être costaud dans les clubs. Autour d'un joueur et d'une équipe pro, autour des jeunes joueurs en particulier, l'entourage est très important. C'est au club d'essayer d'être encore plus costaud, meilleur, plus au contact. Il faut éviter de laisser des jeunes de 19 ou 20 ans un peu déçus se braquer et partir. Parfois t'as passé six ans avec eux, et hop tu les perds, le mec ne sort pas chez toi et on s'énerve un peu… Je trouve ça dommage. Je prône davantage de patience.

Que penses-tu du cas Allan Saint-Maximin ? (gb38)

C'est un bon exemple de ce que je disais précédemment. Je l'ai eu en pro. Moi-même je me suis parfois pris avec lui car il n'était pas évident à gérer. Allan est un garçon très attachant et très intelligent, mais il y avait parfois des mauvais côtés. Lui aussi pouvait être impatient. J'ai vu qu'il a été papa, ça l'a certainement aidé à gagner en maturité. Quand un joueur a un gros talent, on se doit d'essayer par n'importe quel moyen de le conserver et de le faire évoluer. Mais c'était délicat dans ce cas-là car il avait une sorte de feu en lui qui faisait que parfois on le sentait dans l'amour de ce club un peu en guerre. Dans le foot d'aujourd'hui, on attache trop d'importance aux rares joueurs déjà mûrs à 18 ans et capitaine de leur équipe à 20 ans. Du coup on s'attend à ce que les autres joueurs de cette tranche d'âge, soient comme ça, notamment ceux que l'on présente comme des phénomènes.

Peux-tu nous éclairer sur le cas Jonathan Bamba ? Les éducateurs le présentaient comme le joueur idéal à disposer dans son effectif. Moins talentueux qu'ASM, mais plus à même de se fondre dans un collectif (Naar)

Jonathan est encore un bon exemple. C'est un joueur intelligent, très professionnel, on le voit percer gros comme une maison. Mais encore une fois, on voit bien que c'est très fragile. Des joueurs comme Bamba n'ont pas la maturité en termes de confiance en eux. A l'époque où le petit Jonathan est monté avec nous, et même après que je suis parti de Sainté, on le sentait introverti. C'était un problème de confiance et pas de niveau de jeu, son superbe but inscrit contre Nantes montre bien que c'est un garçon pétri de qualités. Je dis souvent qu'il faut juger un joueur quand il est en confiance et quand il a des jambes, quand le mec n'est pas blessé et au top de sa forme physiquement. Jonathan est parti sur un prêt en Belgique où il a un peu plongé car il n'a quasiment pas joué. Il est reprêté à Angers et on s'aperçoit que c'est de nouveau le joueur qu'on connait. J'ai vu ses matches. Ça montre bien que la maturité en termes de confiance n'est pas là chez les jeunes. C'est le rôle d'un entraîneur de les aider.

Selon toi, qu'est ce qui manque le plus à Sainté pour, comme Lyon, sortir des "cadors" de son centre de formation ? (marée verte)

Je pense que les entraîneurs chez les jeunes manquent d'expérience par rapport à leurs homologues lyonnais. C'est lié à la stabilité et au travail d'équipe. L'OL a de véritables experts dans leur catégorie. Je pense par exemple à Armand Garrido, qui s'occupe des U17 depuis très longtemps. L'OL bénéficie également du gros travail de Gérard Bonneau, responsable du recrutement des jeunes. Il a un gros réseau, des contacts avec les grands clubs européens. C'est une vraie référence dans son domaine. Maintenant, l'OL a aussi quelques petits soucis en termes de formation. Je vois jouer leurs équipes de jeunes, je me suis pas mal déplacé ces derniers mois sur des matches de Youth League, ce n'est pas évident même pour eux de trouver encore des joueurs offensifs. Eux aussi vont sans doute devoir apprendre à être un peu patients car ils n'auront peut-être pas de joueurs aussi précoces qu'un Alexandre Lacazette par exemple.

Le développement des partenariats avec des clubs amateurs dans toute la France te semble-t-il pertinent ? (Naar)

Je ne vais pas faire de langue de bois. Cette politique de partenariats est super en termes d'image du club pro, très importante mais pour faire des actions, ça n'a jamais aucun gain en termes de formation. Pour trouver des joueurs, il faut envoyer ses éducateurs et ses recruteurs sur tous les terrains, il faut aller voir les vrais clubs de cette belle Ligue qu'on a en Rhône-Alpes. Il faut aller à Grenoble, Saint-Priest, Annecy où il y a de bons joueurs. Et là, tu te bouges ! Les clubs partenaires, c'est à garder pour inviter les gens aux matches, mais sportivement, je suis sceptique.

 

Merci à Romain pour sa disponibilité et ForeverGreen pour la retranscription.