Mon verre de vin bio à la main, tout réjoui du spectacle de Verts ayant eu le bon goût de ne pas me gâcher le long week end pascal carrot, je méditais, en ce dimanche soir décontracté du blanc, sur l’ampleur du contraste.
Oui, je méditais.
Méditer vert c’est bon pour la santé, même si ça l’est moins pour le sommeil. En l’espèce, ma méditation m’a fait faire un tour de montagnes russes. De celles qu’aimerait bien gravir Debuchy dans deux mois. De celles qu’a fuies M’Vila il y a trois mois. L’un comme l’autre symbolisent parfaitement le vertige de cette saison qui nous a entrainés au fonds de la misère footballistique en décembre et au sommet de l’expression collective depuis quelques semaines. Sommet, le mot est fort, et reste très relatif à l’heure où le monde du foot se remet à peine de la démonstration extra-terrestre de Cristiano Ronaldo.
Mais à l’échelle des performances vertes depuis 2015, dans la maîtrise collective, comme dans la constance des résultats, nous sommes indéniablement au sommet depuis deux mois. Au-delà de la hauteur à laquelle les Verts sont perchés, le vertige tient réellement à la distance qui la sépare de la profondeur du trou dans lequel les hommes de Juju s’ensablaient quelques semaines avant.
Oui, de mémoire de mastre grisonnant, j’en ai guère connu des équipes aussi moribondes que celle à qui le ballon brûlait les pieds contre Monaco ou à Guingamp. Peut-être celle d’Alain Perrin en 2009, fantomatique au Parc dans les jours précédant l’arrivée de Galette. Sûrement celle de Baup en 1995, pathétique dans le Chaudron contre Auxerre. Dans ces deux cas, la saison fut cohérente, presque linéaire. De la souffrance continue avec Perrin puis Galette qui nous sauvera de justesse de la relégation. De la chute lente et inexorable jusqu’en D2 avec Baup et ses tristes successeurs Bossis et Bathenay.
Aussi mauvais, hélas, on l’a donc déjà été, en hiver et au printemps, mais aussi bons si peu de temps après avoir été aussi mauvais, on tutoie l’inédit. Le contraste est saisissant. Limite enivrant, s’il ne ressemblait pas à ce point à une parenthèse enchantée.
Enchantée certes, mais parenthèse aussi … dont on situe bien le début, à ce mercato quasi parfait, mais dont on craint tellement connaître aussi la fin.
La fin. Celle qui justifie les moyens mis sur la table en janvier pour renverser la logique sportive. Mais la fin, celle de la parenthèse, serait, elle, justifiée par l’absence de moyens. Les moyens d’appliquer dès juin, et quelle que soit l’issue de la saison, les recettes qui font fureur comme on dit en virage sud du cochonou stadium.
Les moyens de poursuivre sur ce délicieux cocktail à base de joueurs chevronnés, revanchards, arrivés à maturité et revenus d’exils aussi dorés que chimériques. Des bons mecs guidés avant tout par l’envie de mordre à pleins crampons dans le plaisir que notre club procure quand ça veut rigoler.
On touche du doigt l’excellence, on goûte avec gourmandise au plaisir d’une équipe intelligente, cohérente, ambitieuse dans le jeu, et performante.
La crainte de revenir à l’ordinaire est d’autant plus élevée qu’on a marché au super. Nous voir voler dans les plumes des canaris fut si exquis qu’on vivrait encore plus mal le fait d’être pris pour des pigeons par une Direction qui, aveuglée par ces succès éphémères, prendrait la mauvaise …
On ne jurerait pas que, fort de ce rétablissement aussi soudain qu’inespéré, Roro et Bozzo ne soient pas tentés par un statu quo suicidaire. Or il n’est pire menteur que la victoire. Les incohérences structurelles sont là. Toujours là. Comme avec Galette, nos succès du moment portent la signature d’un homme, JLG, dont l’expérience et les réseaux ont fait merveille. Mais l’après Galette a montré à quel point bâtir un succès sur un homme était dangereux.
Alors goûtons sans réserve, savourons sans retenue, jouissons sans entrave, et prions sans tarder pour que le chantier, qui est toujours immense, soit pris en mains. A la lumière de nos expériences récentes, on sait que conserver les hommes qui ont construit le succès est une bonne idée, au-delà, conserver les recettes qui y ont conduit est une nécessité.
Ca semble évident. Mais le silence actuel laisse place à toutes les interprétations. Un maigre communiqué pour nous faire patienter a été pondu. Mais au-delà du Directeur Général, il faut mettre le paquet. Du profil incertain du futur effectif à celui hypothétique de notre prochain actionnariat, toutes les questions demeurent.
Nous vivons vraiment une parenthèse en chantier.