Avant d'aller encourager les Bleus dans la banlieue, Geoffrey Dernis a accepté de répondre à quelques questions sur Dimitri, Blaise, le Stadium, le Chaudron et Bryan.
Supporteras-tu les Verts demain après-midi dans l'antre des vilains ?
Je serai ce samedi après-midi dans la banlieue de Saint-Etienne uniquement pour voir l'équipe de France hein, pas pour voir des Lyonnais ! Même s'il y aura des Verts en face, je supporterai les Bleus. Mais j'aime beaucoup les supporters des Verts, qu'ils soient stéphanois ou irlandais. Les supporters de l'Eire et de l'Irlande du Nord nous régalent depuis le début de l'Euro. J'aime beaucoup leur état d'esprit. Ils rigolent avec la police et les gens qu'ils rencontrent, c'est bon enfant. C'est festif, c'est jovial, c'est ce que doit représenter l'Euro pour moi. Ç'est plus sympa que de voir des Russes et des Anglais se taper dessus.
Deux de tes anciens coéquipiers stéphanois devraient être dans le onze de départ pour ce huitième de finale contre la République d'Irlande. Quels souvenirs gardes-tu de Dimitri Payet et Blaise Matuidi ?
Quand ils sont arrivés à Saint-Etienne, ils étaient jeunes mais je sentais qu'ils avaient déjà un gros potentiel. De là dire qu'ils allaient atteindre le niveau qu'ils ont aujourd'hui, c'est difficile à dire. Chacun a sa progression. Mais c'était déjà deux grands talents. Dimitri, dès son arrivée, avait démontré d'énormes qualités techniques. Il a réussi à gravir les échelons à son rythme, sans brûler les étapes. Aujourd'hui, il arrive à maturité et se révèle au plus haut niveau international. Blaise était déjà plus mature que Dimitri à l'époque où je les ai connus à Sainté. Blaise était promis à un très grand avenir, pour moi ça ne faisait aucun doute. J'ai le souvenir de deux joueurs très posés, qui avaient envie d'apprendre. Ils étaient à l'écoute, je n'ai jamais eu le moindre problème avec eux. C'était déjà de bons garçons et ça me fait plaisir de les voir à ce niveau-là. T'as parfois des jeunes talentueux qui ne confirment pas parce qu'ils se croient arrivés trop tôt. Dim et Blaise ont su écouter les anciens et ont continué de bosser. Ils récoltent aujourd'hui les fruits de leur travail.
Pendant que tu les supporteras dans la banlieue, ton bar-brasserie-sports diffusera la rencontre. Peux-tu nous parler de cet établissement qui a ouvert il y a trois semaines à Lattes, au sud de Montpellier ?
J'ai concrétisé un projet que j'avais dans la tête depuis très longtemps, bien avant que j'arrête ma carrière de joueur. Je me souviens que j'en parlais déjà avec ma femme quand on était à Sainté. Une chose était sure : je ne voulais pas rester dans le football. Il y a des établissements comme ça où j'aimais bien aller avec des potes voir des matches de Ligue des champions, de l'équipe de France. C'est quelque chose que j'ai eu beaucoup de mal à trouver. Moi qui suis fan de la NHL, de hockey sur glace, j'ai découvert des établissements qui diffusaient des matches sur grand écran de partout. J'ai trouvé ça extraordinaire, il y avait une ambiance de folie. Je me suis que c'était un truc à faire en France avec une ambiance, avec des repas, des animations, etc. Je m'étais gardé ça dans un coin de la tête.
La réalisation de ce projet t'a pris combien de temps ?
J'ai mis plus d'un an à le concrétiser. En France, on a beau entendre dire qu'il y a des politiques d'aide à l'emploi, dans les faits, quand t'as des idées et que tu veux te lancer, mine de rien on te met de gros bâtons dans les roues. Ça a été une bagarre incessante avec les banques, les administrations, etc. On te dit que tu vas obtenir des autorisations car on est en pénurie d'emploi en France mais en fait on ne t'aide pas tant que ça, c'est compliqué. J'ai eu trois mois de gros travaux quand j'ai trouvé mon local de 450 m2. On a ouvert deux jours avant le début de l'Euro.
C'est qui le patron ?
J'ai un associé, mais je suis le gérant de l'établissement, le patron. J'y suis tous les jours sauf aujourd'hui où je suis venu à Lyon mais uniquement pour voir un match des Bleus à l'Euro. Cet établissement, c'est mon bébé. C'est mon argent personnel que j'ai mis dedans pour le mettre en place. C'est vraiment mon truc à moi. J'ai nommé des responsables à chaque poste, au bar, à la restauration, à la cuisine. Ces personnes m'épaulent mais c'est moi qui prends toutes les décisions. Je fais moi-même les recrutements, qui choisis comment je veux voir les choses. J'ai un grand écran de 3m50 sur 2m au-dessus de mon bar, j'ai une dizaine d'autres écrans avec cinq coins salons où il y a des canapés et des écrans individualisés. Comme ça je peux satisfaire un maximum de demandes et diffuser plein de matches en même temps.
Les débuts de ton établissement sont prometteurs en termes de fréquentation ?
J'ai fait le plein sur tous les matches de l'équipe de France, la demi-finale de top 14 Montpellier-Toulon et la finale du top 14 Racing 92 – Toulon. Pour le reste, ça reste assez mitigé. Mais globalement je suis content. Pour un joueur, ce n'est pas toujours évident de trouver sa reconversion. Je crois en ce projet. Je vais le lancer tranquillement, le faire grandir. J'ai de très bons retours, c'est encourageant. Après l'Euro, on va diffuser le Tour de France puis les Jeux Olympiques, les tours préliminaires de Coupe d'Europe, la reprise de la L1, du Top 14, des matches de hand mais aussi de NBA. Les potonautes sont évidemment les bienvenus, s'il y en a qui sont dans la région de Montpellier pendant les vacances, je les recevrai avec plaisir. Mon établissement est situé à Lattes, route de Carnon, dans le centre commercial Le Solis, à côté d'Intersport. Ça me ferait plaisir de de discuter et de boire un coup avec des Stéphanois car j'ai passé trois années merveilleuses à l'ASSE.
Mais alors pourquoi as-tu appelé ton établissement "Le Stadium" et pas "Le Chaudron" ? Y'a pas photo entre la tiédeur toulousaine et la ferveur stéphanoise !
Le plus dur, c'est de trouver un nom d'établissement. Y'a des noms qui sont réservés, des noms que tu n'as pas le droit d'utiliser. Quand t'ouvres un établissement, tu te rends compte qu'il y a plein de réglementations que t'ignorais mais qu'il faut respecter pour ne pas avoir de problème. Des gens ont des établissements et achètent leurs propres noms, du coup on ne peut plus les utiliser. Moi j'avais plein d'idées de noms mais je ne pouvais pas les utiliser car je n'avais pas les droits ou alors j'étais obligé de payer pour les utilise. Je suis parti sur un truc très simple. J'ai choisi le Stadium non pas par référence à Toulouse mais parce que ça regroupe tous les stades, tous les sports. C'est le seul nom que je pouvais donner en étant tranquille. Ça paraît bête mais c'est la vérité.
A défaut d'avoir nommé ton établissement "Le Chaudron", tu es retourné à Geoffroy-Guichard en mai dernier pour assister au dernier match de la saison entre l'ASSE et le LOSC.
Et ouais, j'y étais ! J'étais trop content d'y retourner. Je reste un fervent supporter même si, ça va te faire rire, je redécouvrais le Chaudron terminé. Je n'avais pas encore vu le stade avec les coins fermés. Ce qui m'a fait plaisir, c'est que le stade est magnifique, déjà, et que la ferveur n'a pas changé. Il y a une ambiance de malade mental à Geoffroy-Guichard. Franchement, je me suis régalé. Sur le terrain ce n'était pas bon, mais dans les tribunes c'était vraiment génial.
Au final, comment juges-tu cette dernière saison des Verts ?
Ils ont vraiment mal fini en ne prenant qu'un point sur neuf lors des trois derniers matches. Le problème de Saint-Etienne, c'est qu'on a toujours l'impression qu'ils peuvent aller plus haut, mais ils n'y arrivent pas. Ils ont pourtant un bel effectif, le club est maintenant très bien géré, il y a toujours cette ferveur chez les supporters. Il manque peut-être trois ou quatre joueurs de renom pour franchir un cap. On sait que l'ASSE va terminer entre la 5e et la 8 place mais c'est dur d'aller plus haut. Malgré leurs difficultés à viser plus haut, les Verts sont désormais tous les ans en Coupe d'Europe.
Le lendemain de défaite des Verts contre Lille, tu as joué un match de gala lors de l'inauguration du nouveau stade d'Andrézieux.
Oui, c'était super sympa de rejouer avec Loïc Perrin, Jérémie Janot, Julien Sablé, Ilan, Christophe Landrin. Tous les potes étaient là. J'ai passé trois supers années à Sainté. On a retrouvé l'Europe la deuxième année. J'ai aimé nos retrouvailles à Andrézieux. On a bien rigolé, on a profité de ce moment-là tous ensemble. J'étais vraiment ravi de ce week-end stéphanois.
Bryan Dabo avait fait sa première apparition dans l'élite il y a six ans en te remplaçant en fin de match au Parc lors de la dernière journée de la saison 2009-2010. Te souviens-tu de ce match et que penses-tu de la première recrue du mercato estival stéphanois ?
Ce match reste un super souvenir. J'avais mis un doublé, Lilian avait marqué aussi, et malgré la réduction du score de Mevlut Erding, on avait gagné 3-1 et décroché notre qualification pour l'Europa League. En face il y avait notamment Grégory Coupet, Zoumana Camara et Jérémy Clément. Après cette entrée en jeu, Bryan est retourné un bon bout de temps avec la réserve pour parfaire sa formation. Ce n'est que deux ans et demi plus tard qu'il a rejoué dans l'élite et commencé à faire son trou avec les pros. Du coup je l'ai assez peu côtoyé.
Suffisamment quand même pour nous donner ton avis sur ce joueur !
Oui, d'autant plus que je l'ai beaucoup vu jouer depuis que je suis revenu m'installer à Montpellier il y a un an et demi. Bryan a indéniablement un gros potentiel. Il faut juste qu'il reste concentré sur son sujet, qu'il ne s'éparpille pas. Il a un gros volume de jeu, une très bonne technique, mais il doit se focaliser sur le jeu sans parler aux joueurs et aux arbitres comme il a parfois tendance à le faire. C'est un peu son défaut. Mais ça reste une bonne recrue pour Sainté. C'est un joueur assez complet, costaud, à l'aise avec le ballon. Il n'y a pas vraiment de domaine dans lequel il excelle mais il n'a pas de lacune. Il va falloir qu'il se mette à la ferveur verte, qui n'a rien à voir avec Montpellier.
Christophe Galtier envisage de le faire jouer en 8. Penses-tu que c'est à ce poste qu'il peut donner sa pleine mesure ?
Oui, je pense que c'est en jouant milieu relayeur qu'il peut tirer la meilleure force de son potentiel. Il a déjà joué derrière mais ce n'est pas son poste clé. C'est au milieu de terrain qu'il peut exprimer ses qualités à 100%. Il sort d'une très belle saison, où il s'est également découvert des qualités de buteur. C'est un garçon qui aurait dû exploser bien avant mais il s'éparpillait. Aujourd'hui, c'est un peu à l'image de Dimitri. S'il prend conscience de son potentiel, qu'il écoute et qu'il fait les choses sérieusement, il peut devenir un excellent joueur. Le problème, c'est qu'il a joué cette saison un peu arrière droit, un peu arrière gauche, parfois 6, parfois 8. Il a été un peu baladé. Ce serait bien qu'il se fixe sur un poste et qu'il le travaille. Il deviendra alors très, très fort. Un entraîneur comme Monsieur Galtier va lui apprendre les choses qu'il faut pour exploiter à 100% son potentiel. Ça va faire du bien à Bryan de changer d'horizon.
Quels autres joueurs verrais-tu nous rejoindre lors de ce mercato ?
C'est très compliqué de répondre à cette question. Je ne suis pas entraîneur et je ne connais pas précisément les profils ciblés. Tout ce que je peux dire, c'est que Patrick Guillou n'est plus disponible. Il faut oublier l'idée. Si on cherche un arrière gauche, il ne faut pas faire revenir Pat. Pour avoir joué avec lui récemment à Andrézieux, je pense qu'aujourd'hui il n'a plus le niveau, tout simplement ! (rires)
Merci à Geoffrey pour sa disponibilité.