Après un premier match solide mais offensivement mou, les Verts ont rappelé qu'ils pouvaient enflammer une rencontre.
1- Le cadre
C’est seulement le deuxième match de Jean-Luc Vasseur à la tête des Champenois ; il est logique qu’il cherche encore la bonne carburation. L’équipe alignée dans le Chaudron est donc sensiblement différente de celle qui a obtenu le nul face au PSG la semaine dernière. Il s’agit d’un pur 4-1-4-1 : Bourillon monte d’un cran, en sentinelle, reléguant Albaek sur le banc. Le trou laissé en défense centrale est comblé par Mohamed Fofana qui n’a plus été titularisé depuis le 1er février (ce jour-là, la charnière Tacalfred/Fofana en avait pris 4 contre Montpellier…). La recrue offensive Moukandjo opère ses débuts sur l’aile droite. Enfin, Kossi Agassa reprend sa place dans les bois.
Les consignes : on s’applique à jouer à terre pour ne pas rendre la balle trop vite, et on cherche à créer le maximum de duels avec les latéraux adverses. Pour le pressing, mieux vaut ne pas le déclencher au-delà de la ligne médiane.
Côté locaux, Galette choisit de titulariser Corgnet dans un 4-2-3-1 sans grande surprise – au milieu, c’est Cohade qui s’assoit sur le banc. Hamouma laisse sa place à Kévin Monnet-Paquet, titulaire pour ses grands débuts sous le maillot vert. Brison coiffe à nouveau sa casquette d’intérimaire de droite.
Les consignes : jeu direct et rapide. Soit on s’appuie à terre sur la Corgne pour ensuite distribuer le jeu, soit on allonge le long de la ligne et on se bat comme des morts de faim sur les deuxièmes ballons. Enfin, pressing à fond : on est chez nous, diantre.
2- Le match
Parler de match à sens unique serait dur pour les Rémois. Volontaires dès l’entame de match, dominateurs quelques minutes dans l’euphorie de l’ouverture du score inattendue, ils subissent certes la plupart du temps. La réussite est avec eux : le poteau sauve Agassa sur une reprise de Corgnet consécutive à un corner de Gradel dès la 3’. Le tournant de cette première période se situe autour de la 25’, et toujours Fortune les favorise : coup sur coup, un excellent jeu en triangle Lemoine/Corgnet/Gradel permet à ce dernier de placer une frappe très dangereuse contrée par Tacalfred ; KMP récupère le ballon dans le rond central, remonte tout le terrain et frappe trop mollement pour inquiéter Agassa ; et contre toute attente, c’est Moukandjo qui pousse Perrin à marquer contre son camp (26’). Le hold-up aurait même été parfait si, à la 45’, Ruffier n’avait sorti le grand jeu sur une frappe de Charbonnier. Pourtant, les Verts ont collectivement rendu une copie de bonne facture. Si Brison et Tabanou sont pris de vitesse une ou deux fois par Diego Rigonato et Benjamin Moukandjo, la baraque est bien tenue. Offensivement, Corgnet, très actif, aimante les ballons et les distribue avec justesse ; on le voit même quelques fois gratter la gonfle aux milieux adverses. On notera pour terminer un coup-franc direct vicieux tiré par Gradel à la 35’: Agassa est à la parade, mais ce n’est que partie remise…
Le score défavorable oblige les hommes de Christophe Galtier à hausser leur niveau de jeu après la pause. Les Stéphanois veulent la gagne et prennent des risques. Les défenseurs centraux participent beaucoup plus au jeu ; on n’hésite plus à faire des transversales pour bouger le bloc rémois très friable du côté de Rigonato et Signorino. En même pas dix minutes, trois fois le décalage est créé côté droit (sous l’impulsion notamment de KMP), trois fois Corgnet gâche les centres par des reprises trop molles ou complètement ratées. En revanche, côté gauche, le déchet technique de Gradel et de Tabanou devient inquiétant. On commence à craindre le contre fatal ; heureusement, Reims n’y arrive pas. Juste avant l’heure de jeu, malgré sa baisse de régime, Gradel décapite l’araignée côté nord et égalise.
Il reste une demi-heure, les deux équipes sont à égalité, et le ballet des remplacements commence. Vasseur sent bien que son équipe prend l’eau : il change ses cartouches au milieu, en faisant entrer Ca à la place de Bourillon (63’) – sans grande réussite. Tout le contraire pour Christophe Galtier : à la 69’, Gradel sort pour Hamouma. D’une, cela permet de régler le problème côté gauche : KMP vient l’occuper ; en meilleure forme, il soulage mieux Tabanou dont la qualité de jeu remonte à un niveau très correct. De deux, Hamouma, par sa fraîcheur et son explosivité, apporte ce qu’il faut pour entretenir la domination stéphanoise avant qu’elle ne se tasse. Le résultat est immédiat : pour son premier ballon, Hamouma est impliqué dans l’action et le centre de haute volée réalisés par Erding : si KMP marque dès sa première apparition, il peut remercier le natif de Saint-Claude (70’).
Enfin devant au tableau d’affichage, les Verts décident de gérer leurs efforts. Corgnet, comme à son habitude exténué prématurément, laisse sa place à Cohade pour un retour au 4-3-3 stabilisateur (75’). Vasseur tente le tout pour le tout : l’arrière gauche Signorino sort pour l’offensif Atar (80’). Le choix se révèle mauvais. Dans la minute qui suit, alors que les Champenois semblent ne pas savoir qui doit couvrir le côté gauche de la défense, Hamouma est totalement oublié. Le boulevard est trop large pour ne pas l’exploiter ; le centre est à nouveau parfait, et cette fois c’est Erding qui conclut (81’).
La fin du match est anecdotique, malgré la courte rentrée de Ricky van Wolfswinkel. Le public ne s’y trompe pas, déjà tourné vers la Turquie : le Chaudron résonne des clameurs « Saint-Etienne, coupe d’Europe »....
3- Le point faible
Malgré son but, Reims n’a pas beaucoup pris la défense verte à revers. Et pourtant, au cours du match, un même type d’action a fonctionné trois fois, et aurait pu coûter très cher.
Reprenez l’action de la 26’ qui amène le but de Perrin contre son camp : Moukandjo, à l’arrêt, en position d’ailier, élimine Tabanou sur le côté gauche de la défense par un crochet intérieur qui le met dans le sens du but, puis avance jusqu’à la frappe sans qu’aucun joueur adverse (milieu ou défenseur) ne parvienne pas à l’arrêter. Non seulement Moukandjo rééditera le même exploit individuel de l’autre côté dans les arrêts de jeu (90’+4) ; mais Antoine Devaux réalisera la même chose, encore côté droit de la défense stéphanoise, à la 74’.
Si les trois frappes étaient a priori non cadrées, ce qui ne sera pas toujours le cas, il a suffit d’un pied mal placé pour faire but.
Cette fragilité est à surveiller de très près !
4- L’avant-centre
Mevlut Erding rayonne. Trois buts et une passe décisive en deux matches, excusez du peu ; d’autant qu’il n’a pas du tout joué dans le même registre contre Reims qu’à Guingamp…
Dans le jeu stéphanois, on peut schématiquement découper l’axe de l’attaque en quatre fonctions principales, de la plus défensive à la plus offensive :
- Le pressing : gêner les défenseurs centraux et éventuellement le milieu le plus bas adverse dans la relance,
- La fixation : être à la réception de la relance stéphanoise pour permettre au bloc de remonter, et remettre l’équipe face au jeu par une remise ou l’élimination de l’adversaire,
- La construction : participer à la création des occasions par des passes et des déplacements, ou par le gain de duels,
- La finition : la mettre au fond, bordel de dieu.
En 4-3-3, c’est-à-dire avec un seul joueur dans l’axe de l’attaque, la fonction qui prend le pas sur les autres, c’est la fixation. C’est ce qui explique, en 2012-13, les meilleurs résultats de l’équipe avec Brandao seul en pointe qu’avec Aubame, ce dernier étant nettement moins performant dans ce registre.
En 4-2-3-1, c’est très différent : la fonction de fixation est presque entièrement déléguée à Corgnet. L’accent est alors mis…sur la construction. Il faut alors prendre en compte la construction avec ballon, mais surtout celle sans ballon : en monopolisant l’attention des défenseurs, l’avant-centre permet aux autres joueurs, et notamment celui qui partage l’axe de l’attaque, d’avoir de l’espace.
Que ce soit à Guingamp en 4-3-3 ou contre Reims en 4-2-3-1, Erding a réussi deux très belles performances avec deux rôles assez différents. Et comme en plus, la finition était au rendez-vous…