Le droit d'image prend de plus en plus d'importance pour les sportifs en général, et pour les footballeurs en particulier. Retrouvez quelques informations sur ce thème...
Droit à l’image des sportifs professionnels en Europe
Le constat général est que le sport professionnel a pris des proportions considérables depuis environ vingt cinq ans. En effet, le marketing, le marchandising, le sponsoring se sont développés, la performance sportive semble passer au deuxième plan derrière le spectacle que le sport peut procurer. La législation de chaque pays a donc dû s’adapter à ce changement, chacun a dû également prendre en compte le changement du contexte géopolitique européen.
Il semble donc nécessaire de comprendre pourquoi il y a eu un tel exode, qu’est-ce-que les sportifs sont allés chercher à l’étranger. Nous allons pour cela comparer la situation fiscale et les ressources des clubs et des sportifs professionnels français à celle des allemands, des espagnols, des italiens et des anglais.
I) le cas français :
A) La situation antérieure à 2004 :
« Parce qu’il est un personnage public (et même un personnage aimé du public), le sportif de haut niveau, est souvent sollicité pour placer sa notoriété au service des intérêts les plus divers, le plus souvent lucratifs, parfois désintéressés. C’est ainsi que s’est développée, dans le monde du sport professionnel, la pratique des contrats d’image par lesquels les sportifs apportent ou prêtent leur image à des opérations de promotion de produits ou de services. » (rapport Denis sur certains aspects du sport professionnel en France novembre 2003).
La tradition française a longtemps été réticente à l’élaboration d’un régime spécifique dérogatoire au droit commun pour la rémunération des sportifs.
La rémunération des sportifs professionnels est un sujet brûlant et ce depuis de nombreuses années. Elle se pose avec une grande acuité dans les sports les plus populaires et notamment le football. L’une des raisons du départ massif de nos stars du ballon rond est l’inégalité économique et fiscale régnant entre les pays européens. La question se pose également car les clubs français sont incapables de lutter avec les clubs anglais, allemands espagnols ou italiens, qui peuvent prendre en charge les impôts de leurs joueurs sans que les sommes en question soient réintégrées aux revenus des sportifs et qui surtout, payent des salaires importants mais peu soumis à charges sociales.
Jusqu’en 2004, le sportif fut considéré comme un salarié à part entière. Cela n’est plus adapté à la situation actuelle du sport business. C’est notamment dans cette perspective qu’un projet de loi (DDOF) avait prévu, en 1997, de distinguer dans la rémunération de tout sportif une fraction exonérée de charges sociales correspondant à l’exploitation de son image. Ce texte prévoyait la fixation, par voie réglementaire, d’un plafond de rémunération mensuelle au-dessus duquel les revenus acquis au titre du droit d’image auraient été exonérés de charges sociales, étant précisé que les sportifs professionnels resteraient alors soumis au régime de droit commun en matière d’imposition sur le revenu.
Le 21 juillet 2004 deux députés, Edouard Landrain et Jean Marie Geveaux ont déposé à l’Assemblée Nationale une proposition de loi portant diverses dispositions relatives au sport professionnel.
B) La LOI n° 2004-1366 du 15 décembre 2004 portant diverses dispositions relatives au sport professionnel
* Le contenu de la loi :
La loi du 15 décembre 2004 se compose de six articles qui portent respectivement sur :
• la reconnaissance d'une rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs ;
• la sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en Equipes de France ;
• la suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée ;
• la levée de l'interdiction absolue de la multipropriété des sociétés sportives ;
• la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations.
* Commentaires :
Selon les termes de cette loi, la rémunération du sportif pourra donc être un salaire « normal » versé en contre partie de la prestation de travail ainsi qu’une rémunération versée sous forme forfaitaire, correspondant à la commercialisation par son club employeur de l'image collective de l'équipe à laquelle il appartient.
Les modalités de fixation de la part de rémunération afférente à l'image collective sont fixées conventionnellement. La détermination de ce quantum tient notamment compte des recettes de parrainage, de publicité et de marchandisage ainsi que de celles provenant de la cession des droits de retransmission audiovisuelle des compétitions, ces dernières devant logiquement se limiter aux droits hors direct. Le pourcentage maximal correspondant à la part de rémunération de l'image collective est fixé à 30 % de la rémunération brute totale versée par la société au sportif.
Un pas ayant été fait en France, voyons maintenant les autres pays européens afin d’examiner les différences et de comparer la position française à la position européenne.
II) Les exemples européens d’une exploitation d’image en dehors du contrat de travail :
A) Les Pays-Bas, l’Allemagne et le Royaume-Uni :
a. Les Pays-Bas
Aux Pays-Bas, dans certains cas isolés, les clubs de football ont été autorisés à appliquer " la règle des 35 % " qui permet, dans certaines circonstances, aux employeurs de ne payer aucune charge sur 35 % du salaire de leurs employés. Cette règle, édictée pour les entreprises employant des salariés de très haut niveau, vise à les protéger de la concurrence étrangère. En outre, les sportifs ont droit à des fonds ; ces fonds, alimentés par les sportifs pendant leur carrière professionnelle, leur reversent des prestations quand celle-ci est achevée. Ils sont destinés à faciliter la transition entre la carrière sportive et la seconde carrière
b. L’Allemagne
En Allemagne, lorsqu'ils sont salariés, les sportifs professionnels sont soumis au régime de droit commun. L'éventuelle exploitation de leur image s'effectue en dehors du contrat de travail.
c. Le Royaume-Uni
Les sportifs professionnels sont généralement des salariés. A ce titre, ils sont redevables de l'impôt sur le revenu sur l'ensemble de leur rémunération, au même titre que n'importe quel salarié de droit commun.
L'exploitation de l'image des sportifs professionnels est indépendante des contrats de travail.
B) L’Italie : un statut mixte :
Les rapports entre les clubs et les sportifs professionnels sont régis par la loi n° 91 du 23 mars 1981. Cette loi définit notamment le domaine du sport professionnel, le régime de la prestation sportive et les règles applicables aux contrats des sportifs. Il ressort de ces dispositions que le sportif régulièrement employé par un club doit être salarié.
Le salaire des sportifs professionnels est soumis à l'impôt sur le revenu au même titre que celui de n'importe quel salarié de droit commun. Il en est de même en matière de cotisations sociales.
Cependant, un régime spécifique a été introduit en 1981 en faveur des footballeurs. Désormais la part de leur salaire annuel soumise au taux normal de cotisation est plafonnée à environ 72 000 euros. La partie comprise entre 72 000 euros et 460 000 euros ne donne lieu qu'à une retenue de 1,5 % au titre de la contribution de solidarité, répartie pour moitié entre les joueurs et les clubs. La partie du salaire annuel excédant 460 000 euros sera exonérée de cotisations.
Le régime de la prestation sportive doit faire l'objet d'un contrat écrit passé directement entre le sportif et le club. Le contrat est un contrat-type, conforme à l'accord signé tous les trois ans entre la fédération, les clubs et les sportifs.
La loi de 1981 ne contenant aucune disposition relative à l'exploitation de l'image des sportifs professionnels, les règles applicables sont celles des accords collectifs négociés.
Ces accords prévoient généralement que :
- les clubs peuvent exploiter l'image collective de leurs joueurs en tant que membres d'une équipe.
- le sportif professionnel est libre d'exploiter individuellement son image au travers de contrats publicitaires, à condition que les marques et produits qu'il représente ne soient pas concurrents de ceux des sponsors des clubs.
C) L’exception espagnole :
Bien que tous les pays reconnaissent le "droit d'image" des sportifs professionnels, seule l'Espagne les autorise explicitement à percevoir une participation aux bénéfices obtenus en contrepartie de l'exploitation commerciale de leur image.
Jusque récemment, les revenus de l'exploitation de l'image des sportifs, qui représentaient souvent la moitié des sommes versées par les clubs, échappaient en grande partie à l'impôt.
Conclusion :
Cette étude fait apparaître qu'outre une différence de puissance économique qui permet aux clubs étrangers de mieux rémunérer leurs joueurs, il existe, au détriment de la France, d'importantes disparités de régimes fiscaux et sociaux, touchant notamment les charges patronales.
En France, la solution envisagée par l'UCPF (l'Union des clubs professionnels de football) afin de remédier à cet état de fait, reprise par le ministère de la Jeunesse et des Sports, consiste à reconnaître aux sportifs professionnels un statut particulier prenant en compte la médiatisation de leur profession. Il était ainsi proposé de "faire échapper à la législation du travail et de la sécurité sociale une fraction de la rémunération perçue par le sportif professionnel, représentative de l'exploitation de son image par son employeur", qui se serait donc distinguée du salaire au sens habituel.