Un match à part que celui de samedi contre Nice, y compris pour un arbitre qui a dû prendre des décisions importantes d'entrée de jeu puis adapter son sifflet et son attitude au contexte qu'avait créé la faute sur Clément. Sur ce tacle, tout a été dit. Quoique…


Beaucoup, y compris Galtier en conférence de presse (et sous le coup de l'émotion), ont critiqué l'engagement des Niçois, l'accusant de connaître un aboutissement "logique" dans ce tacle. Qu'en est-il réellement ? Nice traîne une image historique méritée d'équipe dure. Pourtant, cette année, leur tableau de sanctions était jusqu'à présent plutôt léger : Nice était avant le match troisième au classement du fair-play avec un seul carton rouge reçu (Ospina pour une faute anéantissant une occasion manifeste) et un nombre d'avertissements dans la moyenne basse. Baste l'historique : après tout, une équipe gentillette peut aussi bien dégoupiller qu'une escouade de serial killers. Tentons d'analyser les 25 premières minutes du match. En toute sincérité, elles semblent plutôt accréditer la thèse de l'acte isolé. En début de match, les Niçois mènent un pressing très haut et intense sur des Verts qui ont beaucoup de mal à s'en extirper. Mais ils le font sans commettre plus de fautes que la moyenne. Avant la faute sur Clément, Nice commet sept fautes (Bauthéac à la 3ème, Gomis à la 5ème, Civelli à la 8ème, Anin à la 10ème et la 16ème et Maupay à la 17ème et la 20ème) dont une seule est un peu intense contre seulement trois pour les Verts. Une rencontre accrochée en L1 voit facilement quarante fautes sifflées.


Et, plus que le nombre de fautes, l'arbitre n'a pas non plus beaucoup eu l'occasion de laisser l'avantage (une fois à la 14ème sur une succession de pertes de balle des deux équipes avec quelques contacts sans que l'arbitre ne juge bon d'intervenir), car les quelques fautes sifflées sont plutôt nettes, les actions claires. Alors, il y a peut-être d'autres moyens de mettre la pression (paroles, petits coups loin du ballon, petits accrochages…), des détails échappant au spectateur devant sa télé et qui expliqueraient la réaction de Galtier, mais pas vraiment de trace d'énervement avant cette fatidique 23ème minute. Pour preuve, l'arbitre n'a pas eu à faire l'habituel rappel à l'ordre sur les premiers coups de pied arrêtés. Le seul UN PEU véhément sur le pénalty puis le but refusé est Digard, d'ailleurs calmé par un équipier sur cette deuxième action. À la 11ème, Cohade met Anin dans le vent dos au but mais le Niçois ne le "tombe" pas et le laisse frapper. L'action se reproduira plusieurs fois. La minute suivante, le corner niçois est joué dans un climat de Bisounours ! Brandao laisse légèrement traîner le pied devant Ospina à la 15ème et passe dix secondes à s'excuser sans que le portier azuréen n'ait bronché. Pas d'agressivité outre mesure, pas d'échauffourée, pas d'intervention en retard ou d'anti-jeu : non, définitivement, on n'a pas l'impression d'une équipe voulant mettre ses balloches sur le nez de l'adversaire, de l'intimider.


Facile mais pas de tout repos


En ce début de match, l'arbitre a tout de même du prendre deux décisions très importantes. Dès la 5ème minute, il siffle un pénalty a priori incontestable sur Aubame. Le gif animé réalisé par le potonaute larsouille (un grand merci, ainsi que pour la capture suivante !) est parlant : le Niçois touche légèrement le pied du Stéphanois qui est déséquilibré. Les supporters niçois ont beau crier à l'injustice et à la simulation, à pleine vitesse et en croisant les courses, un contact, même léger, peut suffire à déstabiliser complètement. Il faut bien avoir conscience du fait que le joueur placé devant et en possession du ballon a une position préférentielle. Dernier détail, quel intérêt avait l'attaquant stéphanois à plonger au lieu de fusiller Ospina ?


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La seconde à peine trois minutes plus tard est de refuser le but de Civelli, à juste titre. On dit souvent que les gardiens sont trop protégés en France - en citant systématiquement la comparaison avec l'Angleterre - et c'est peut-être vrai. Dans les faits, il est tout à fait autorisé de charger un gardien, même en l'air (comme pour un duel aérien classique entre deux joueurs de champ). Sauf qu'il est extrêmement difficile de disputer "loyalement" le ballon en l'air à quelqu'un qui dispose de l'énorme avantage d'avoir le droit de se servir de ses bras pour jouer le ballon. Par contre, à partir du moment où le gardien touche ou tient le ballon (et c'est le cas ici), il ne peut être chargé.


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En résumé, il y a faute parce que Ruffier est en possession du ballon au moment du contact, mais il y aurait probablement eu sanction même sans cela. Dernier point, le fait que le contact a lieu dans la surface de but ne change rien à l'affaire : la règle qui précisait que le gardien ne pouvait être chargé dans les 5,5m a été abolie il y a dix à quinze ans au moins. À la décharge du Niçois, il est vraiment dans l'optique de marquer le but et Ruffier saute dans sa direction, un déplacement qui rend forcément le contact plus rude et impressionnant, tout en provoquant un réflexe de protection de Civelli (c'est d'ailleurs à cause de ce réflexe qu'il semble marquer du bras ou de l'épaule). Donc, encore une fois, l'engagement du Niçois est très loin des limites de l'acceptable. Il n'est même pas averti ou sermonné pour le coup.

 

Collatéral

Parfois, un arbitre à côté de son match, une ou deux équipes très remontées sont des signes qu'un match peut dégénérer, mais ce n'était pas le cas samedi. Le début du match est vraiment propre alors même que Nice pourrait se sentir - à tort - floué par l'arbitrage. Et vint ce tacle. Évidemment, sur le geste en lui-même, il n'y a rien à analyser. Par contre, la seconde qui le précède a une importance capitale. Pourquoi ? Car un petit accrochage parfaitement sanctionnable est commis sur Eysseric. et ce coup de pied lui fait prendre le retard qui sera fatal et l'énerve suffisamment pour qu'il se lance de manière complètement disproportionnée.

 
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On reproche souvent (et régulièrement à raison) aux arbitres français de trop siffler, nuisant ainsi au rythme de la partie. Pourtant, depuis quelques saisons, un vrai travail est fait pour sanctionner au minimum les "micro-fautes", laisser au maximum l'avantage. L'arbitre est-il donc en partie responsable de l'agression ? Non, pas plus que cette petite faute ne peut justifier l'engagement d'Eysseric. À moins d'être doué de préscience, l'arbitre ne pouvait deviner les conséquences de sa décision, car on est ici dans l'exceptionnel, le genre d'action qui se produit une fois par an au maximum en Ligue 1. Le contexte du début du match ne l'a vraiment pas incité à serrer la vis et siffler ce contact anodin : il a fait confiance aux joueurs. D'ailleurs, au moment de la faute, il est en train de siffler la première et ainsi de revenir sur l'avantage. Et il n'a pas pris conscience immédiatement de la gravité du geste et de la blessure, c'est assez flagrant sur les images.

 
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Aller au bout

Que faire pour lui par la suite ? Tout le monde est choqué sur la pelouse et la fin de la première mi-temps est totalement anecdotique. C'est une situation que j'ai à titre personnel vécue à plusieurs reprises. La suite dépend paradoxalement souvent de ce qui s'est passé auparavant : si le match a été calme, il le sera encore plus ou, au contraire, peut dégénérer ; si le match était chaud, ce sera la guerre. L'intelligence de l'arbitre est souvent d'aller capter les moments potentiellement dangereux et les anticiper : siffler un peu plus tôt, sortir des cartons ou dialoguer avec les joueurs selon les situations et le feeling qu'il peut avoir. Varela nous a plusieurs fois montré ses capacités d'apaisement (voir l'article sur VA-ASSE la saison passée) et il l'a fait une fois de plus samedi. Il sait par expérience, par exemple, que Ruffier a le sang chaud (voir l'article sur Bastia-ASSE cette saison). D'ailleurs, après l'évacuation de Clément, le gardien stéphanois vient haranguer ses coéquipiers, sans doute pour les inciter à ne pas lâcher malgré ce coup du sort (image de gauche ci-dessous).

 
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En tout début de deuxième période, Bauthéac est lancé quand la Ruff lui enlève le ballon dans les pieds. L'attaquant touche, sans doute involontairement, le portier qui a un sérieux mouvement d'humeur et va pousser le Niçois. En toute autre circonstance, qu'aurait fait l'arbitre ? Il aurait probablement adressé un avertissement à l'ancien Monégasque. Mais pas ici, car il juge le carton contre-productif. Il préfère lui parler, assez longuement d'ailleurs, d'abord de façon autoritaire avant de s'adoucir à mesure que Ruffier descend de ses grands chevaux. On est alors à un moment charnière du match. Les joueurs reviennent juste des vestiaires et rien ne dit que la plus petite étincelle ne peut faire exploser le match : ont-ils eu des messages d'apaisement ou, en particulier le coach des Verts, un discours de vengeance ? L'arbitre ne sait rien des consignes passées par les entraîneurs à la mi-temps. Sa pédagogie avec Ruffier aura pour conséquence de donner le ton de la suite du match : il a montré qu'il comprenait que tout le monde était touché par la blessure de Clément. Résultat, le seul événement un peu tendu jusqu'à la fin du match sera l'avertissement à Bauthéac pour une intervention en retard sur Brison.


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