France Bleu, Vosges-Matin, L'Echo Républicain et la Pravda ont tour à tour annoncé l'imminente signature à l'ASSE de l'attaquant d'Epinal Jean-Philippe Krasso. Fan des Verts, l'entraîneur des gardiens spinaliens John Panfili nous présente cet attaquant de 22 ans, buteur contre Sainté il y a trois mois en quart de finale de Coupe de France.


Jean-Philippe Krasso a-t-il signé à Sainté ?
Je sais que le contact est établi, ça c’est sûr. Mais avec cette histoire de confinement, ça fait longtemps que je ne l’ai pas revu. Ce n’est pas encore officiel mais la dernière fois que j’ai eu Xavier Collin au téléphone, il m’a dit que le contact était toujours établi entre les deux parties et que vraisemblablement ça allait se faire.

Que t’inspire sa probable signature ?
Je trouve ça beau que la Coupe de France puisse révéler des jeunes talents comme ça. C’est un peu pour ça que cette compétition est très attractive pour les clubs amateurs. Souvent, dans une épopée d’un club amateur, il se noue des contacts avec les clubs rencontrés ou avec d’autres clubs qui remarquent les joueurs qui se mettent en évidence. Jean-Philippe a marqué contre Sochaux, réalisé un doublé contre Lille, a scoré contre Sainté. Forcément, ça ne passe pas inaperçu. Il a montré de bonnes qualités lors de ces rencontres et en plus il reste assez jeune. C’est presqu’inespéré qu’un club de L1 s’intéresse à un joueur de N2. Je trouve ça super pour lui, c’est aussi une belle récompense pour les clubs qui l’ont formé.

Pour toi, l’histoire serait d’autant plus belle que Jean-Philippe rejoindrait ton club de cœur.
C’est sûr que quand je vais descendre à Saint-Etienne, j’aurai encore un autre intérêt à venir. J’espère que si tout se concrétise je pourrai le voir jouer sous le maillot vert. Moi je suis né en 1971, j’habitais dans un petit village, dans un bar à Bologne (Haute-Marne). On ne parlait que de Saint-Etienne et de son épopée, j'ai supporté les Verts dès l’âge de six ou sept ans. Les Verts, c’est un amour de plus de quarante ans maintenant. La première fois que je les ai vus au stade, c’était à l’occasion du retour de Michel Platini à Nancy, lors de la saison 1979-1980. Depuis je les ai vus partout dans l’Est de la France : Metz, Nancy, Sochaux, Strasbourg… Je suis également descendu à Saint-Etienne pour l’Intertoto, pas mal d’affiches notamment contre le PSG, pour Manchester United, etc.

Ton dernier match dans le Chaudron ?
La demi-finale de Coupe de France contre Rennes, à l’invitation de l’ASSE. Inoubliable ! Cette initiative du club m’a touché, elle était au-delà de mes pensées. Je suis plutôt quelqu’un de réservé pour ne pas dire timide. Moi je ne demandais rien et j’ai été accueilli les bras ouverts. Loïc Perrin m’a offert son maillot après le quart de finale à Nancy [ndp2 : porté par John Panfili sur la photo ci-dessous] et je l’ai revu par hasard dans une pizzeria le jour du match contre Rennes. Il m’a mis en contact avec l’attaché de presse Nicolas Parent, qui m’a invité à voir le match, sinon j'aurais acheté ma place dans l'après-midi. Roland Romeyer avait invité tout notre staff avant et après le match. C’était super ! Et quel match, quel scénario, quelle ambiance ! J’adore ce stade, on a vraiment l’un des meilleurs publics de France.

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Jean-Philippe est un pur numéro neuf ou un attaquant polyvalent ?
Il a une certaine polyvalence mais le poste qu’il affectionne le plus, c’est dans l’axe. Jean-Philippe est un numéro neuf. C’est un faux lent. On a l’impression qu’il ne va pas très vite mais c’est tout le contraire. Jean-Philippe a cette capacité à bien jouer en remise, il est assez costaud sur ses appuis. On peut jouer en fixation avec lui, c’est intéressant car ça lui permet d’avoir plusieurs registres. Je trouve aussi que c’est quelqu’un qui ne se met pas de pression. Quels que soient le match et l’ambiance, il est hermétique à la pression. On a vu par exemple qu’il a pris ses responsabilités sans trembler pour marquer le penalty contre Saint-Etienne. On a pu aussi apprécier son sang-froid contre Sochaux et sur son doublé contre Lille. Signer à l’ASSE serait une belle revanche pour Jean-Philippe, formé chez les Merlus mais non retenu par Lorient.

A quel joueur pro actuel ou ancien plus connu te fait-il penser dans son style de jeu ?
Je ne sais pas si ça va parler à tous les supporters stéphanois car je vais citer un joueur qui évolue dans le club pro le plus proche de chez nous à Epinal, à savoir l’AS Nancy Lorraine. Jean-Philippe Krasso me fait un peu penser à Eli Kroupi. Lui aussi avait joué à Lorient d’ailleurs auparavant mais c’est sans soute à Nancy qu’il a été le plus efficace. Il a claqué une quinzaine de pions l’année de la remontée de l'ASNL et une dizaine la saison suivante en Ligue 1

Ah, Kroupi… A cacasson comme on dit chez nous ! Dans quel schéma tactique Jean-Philippe est-il le plus à l’aise : Seul en pointe ou dans un 4-4-2 ?
Cette année, il a éclos en jouant en seul en pointe avec des ailiers de débordement. La saison dernière, Jean-Philippe était associé avec un autre joueur devant et c’était un peu plus compliqué. Dans certains systèmes il n’y a pas la place pour deux et ils avaient un peu le même registre. Ça convient mieux à Jean-Philippe d’être seul devant.

Quelles sont ses principales qualités de footballeur ?
Je trouve que Jean-Philippe est un attaquant assez technique. Quand on lui donne un ballon, il sait quoi en faire. Il a un dribble à son image : on a l’impression que ça ne va jamais passer mais ça passe toujours. Un de ses points forts, c’est d’être calme devant le but. C’est évidemment important pour un attaquant de ne pas perdre ses moyens devant les cages. Il est adroit du pied droit, pas embêté du pied gauche. Il a jeu de tête correct, même si c’est peut-être un domaine qu’il peut encore parfaire. Son timing est quand même pas mal, quand on joue en fixation sur lui, il est capable d’aller au duel avec les défenseurs de la tête.

A-t-il d’autres axes de progression ?
C’est un travailleur, il a encore une marge de progression dans tous les domaines. En signant dans un club pro, il va être entouré de joueurs de haut niveau et performants donc ça l’amènera à élever son niveau. Il n’a que 22 ans et Claude Puel aime travailler avec des jeunes, les faire grandir et progresser. Ça peut être pour Jean-Philippe les conditions idéales pour exploiter son potentiel. Il sait être buteur et passeur mais peut sans doute se montrer encore plus décisif. La saison passée, quand on jouait à deux, je le trouvais pas assez personnel, pas assez égoïste devant le but. Cette année ça s’est moins vu car il était souvent seul sur le front de l’attaque. Jean-Philippe reste un bon coéquipier et sait se montrer altruiste, il n’a aucun mal à faire la passe quand ce sera le moment et la bonne solution. Peut-être que par la suite il faudra qu’il soit plus tueur.

Jean-Philippe n’a claqué que 21 pions en 5 saisons de N2. S’il signe à Sainté, marquera-il plus de buts que les 3 Jean-Philippe ayant joué en vert : Primard (1), Delpech (0) et Séchet (3) ?
Oui, sans problème ! Et j’espère qu’il en mettra d’aussi beaux que celui que Jean-Philippe Séchet avait marqué lors d’un derby.

Son parcours et ses stats en N2 laissent pas mal de supporters stéphanois dubitatifs quant à ses chances de s’imposer en équipe première à Sainté. Qu’en penses-tu ?
Jean-Philippe a un potentiel indéniable, si Claude Puel s’intéresse à lui ce n’est pas le fruit du hasard. Jean-Philippe a du talent et c’est aussi un bosseur donc il a des armes pour réussir. Maintenant, il va falloir qu’il hausse son niveau de jeu, bien plus prépondérant car il y aura peut-être moins d’occasions de briller. Je comprends que les supporters se posent des questions, on se pose tous la question. Nancy, qui le suivait également, se l’est posée aussi. Un joueur qui n’a joué qu’en N2 peut-il s’imposer en pro ? L’interrogation est légitime mais c’est une histoire de confiance. Un attaquant, déjà intéressant à la base, peut réussir s’il est en confiance et bien entouré. A Saint-Etienne, il sera dans un environnement propice car je pense que Claude Puel est un bon entraîneur pour les jeunes.

Quid de sa complémentarité avec les autres joueurs offensifs actuels de l’ASSE ?
Je pense qu’il est complémentaire avec un jour comme Denis Bouanga, qui est plutôt un excentré capable de rentrer dans l’axe. Les deux ont joué ensemble dans la réserve des Merlus. Denis Bouanga peut d’ailleurs être une source d’inspiration pour Jean-Philippe. Il n’a pas été conservé au Mans, a joué dans ensuite dans un club de DH, a joué avec la réserve de Lorient avant de s’imposer en équipe première. Il a franchi des paliers successivement à Tours, Nîmes et Sainté. A chaque fois on s’est dit « est-ce qu’il va franchir le cap supérieur » et il y est arrivé. Au final, c’est l’un des meilleurs joueurs des Verts cette saison. Pour en revenir à Jean-Philippe, il a un peu le même profil que Charles Abi ou Loïs Diony. Si on prend Diony, c’est un joueur de fixation, capable dans un premier temps de garder le ballon pour que le bloc monte. Après, les associations, ça se passe aussi naturellement ou via le travail effectué à l’entraînement.

Y at-il du Carasso en Krasso ? Tu le verrais dépanner en cas de besoin dans les buts ?
(Rires) Parfois quand on fait des spécifiques gardiens, il y a toujours un ou deux joueurs qui s’esclaffent en disant qu’ils pourraient être gardiens. Je le vois bien essayer, de là à être performant, c’est autre chose. Vaut mieux faire confiance à Stéphane Ruffier ou Jessy Moulin !

Y-a-t-il du Caïazzo en Krasso ? Jean-Philippe est-il attiré par les micros ? Aime-t-il Paris et les instances ?
Non, Jean-Philippe est très tranquille et plutôt discret. C’est ce qui fait tout son charme : il sait rester à sa place, se fondre dans un groupe. Mais il sait aussi être un ambianceur dans le vestiaire. Il ne le paraît pas aux premiers abords mais il sait se lâcher. Ce n’est pas le dernier à dancer avec ses coéquipiers ! Maintenant, je ne pense pas qu’il soit attiré par les médias et qu’il aspire à présider un club.

Humainement, comment le décrirais-tu ?
Il est calme, posé, sérieux dans le travail. C’est un bosseur et un bon coéquipier, apprécié du vestiaire car je pense qu’il a de bonne valeurs. C’est un garçon bien élevé et à mes yeux c’est important. Je dis toujours que quelque part ces qualités-là rejaillissent sur le terrain.

Pour terminer, as-tu une anecdote à nous raconter à ce sujet ?
Une fois, je suis allé le voir car il y a un truc qui m’embête un peu avec lui : il célèbre les buts en faisant des sauts périlleux à la Aubame ou à la Manu Rivière. Je me suis permis d’aller le voir. Je lui ai dit : « JP, il faut peut-être que tu penses à ne plus faire ça car tu risques de te blesser. » Il m’a répondu : « Ma mère n’arrête pas de me le dire. » Je lui ai rétorqué : "Maintenant on est deux." Je ne sais pas si ça suffira ! (rires)

 

Merci à John pour sa disponibilité