Moi j’ai envie qu’on gagne…
Que répondre à l’impatience de mon fils au moment où Sako pose un ballon pour un coup franc que Gradel finira par tirer trop mollement, avec à la clé une énième occasion gâchée par Aubameyang et par manque de lucidité (qui a dit pléonasme ?) ?

Moi aussi j’ai envie qu’on gagne, lui ai-je laconiquement répondu.

J’aurais pu lui dire bien des choses encore. Mais ni pic, ni roc, ni péninsule. Juste un océan de doutes. Peut-on tout dire aux enfants ? Comment lui avouer le fond de ma pensée sans prendre le risque de décourager sa passion naissante ?
Parce que le fond de ma pensée, comme tout fond qui se respecte, est sombre. Mon cœur est aussi vert que mes idées sont noires.


Le contraire m’eut étonné…

Chantait Gainsbourg dans son requiem pour un twisteur. Là c’est pour des supporters.
Les difficultés de ce début de saison obéissent à une logique sportive et économique implacable. Hormis Paris, quel club de L1 a autant renouvelé ses troupes que Sainté ? Et qu’ils ne m’en tiennent pas rigueur, mais Gradel, Kitambala et Nicolita ne sont pas Pastore, Gameiro ou Blaise (Blaise…snif).
Ainsi, comment, contre Toulouse, imaginer gagner un match quand seulement trois des onze joueurs alignés au coup d’envoi faisaient partie de l’effectif l’an dernier ? Qui oserait prétendre en plus que les trois en question (Aubameyang, Ghoulam, Guilavogui) émargent à la catégorie piliers ?
Comment, contre Auxerre, imaginer gagner avec trois défenseurs sur quatre qui jouaient en CFA il y a un an ?
L’ASSE a perdu ses deux meilleurs joueurs cet été, voire trois si on inclut Manu qui rêva - sombre idiot - en écoutant les chants forts de Sadran, et son fameux tube mate moi ce beau projet sportif à six chiffres
Le club a fait le choix d’en blacklister trois autres, et donc de renouveler son effectif dans les grandes largeurs et pour partie sur le (très, trop) tard.
Clore le premier quart du championnat avec deux victoires, quatre nuls et trois défaites est finalement, dans ces conditions, un moindre mal.


La bourse ou l’envie

Galette l’a évoqué sans trop s’apesantir, tant le sujet est délicat à manier pour un entraineur qui est à la fois tenté d’expliquer qu’il fait avec les moyens du bord, tout en cherchant à ne pas vexer ses joueurs.
Il sait son effectif moins talentueux que le précédent et mise donc sur une meilleure assise collective. Dans une version modernisée du fameux on n’a pas d’pétrole mais on a des idées, il nous vend un on n’a pas d’argent mais on a de l’envie aussi réaliste que tue-l’amour
Car le nerf de la guerre reste définitivement l’oseille. Le club a fait le choix d’un cadre financier ultra strict avec le fameux plafond salarial des 90 000€ mensuels.
L’ASSE est bas de plafond… comme certains de ses supporters qui font mine de ne pas le comprendre et sifflent à la moindre passe en retrait.
Pour mémoire, Frau, Wendel et Hadji voulaient venir. Trois valeurs sûres de L1. A chaque fois, l’affaire a capoté à cause du flouze. Et in fine Nicolita, Gradel et Kitambala ont débarqué. 
A ce jour, chaque match a confirmé le pronostic : la saison sera laborieuse ou ne sera pas. Certains s’agacent déjà en remettant en cause les choix du coach, qui serait trop frileux. Mais Mourinho lui-même ferait-il mieux avec un tel effectif ?

Douloureux flash back : depuis 2004, on a eu Piquionne, Feindouno, Ilan, Machado, Gomis, Payet…Chacun de ces joueurs, dans son style avait un talent certain, que ce soit dans un rôle de pivot, de créateur ou de finisseur. L'évocation de ces noms démontre que nous possédons cette année l’armada offensive la plus pauvre depuis 2004 et notre remontée en Ligue 1.


Lille aux enfants ?

Etablir ce constat, c’est admettre, à contre cœur, qu’on vivra, au mieux, une saison de transition. En espérant ne pas être condamnés sur le long terme à se faire souffler des joueurs par Caen ou Rennes. Sinon il faudra vraiment s’interroger sur les choix stratégiques d’une Direction qui nous a pris pour des enfants en nous vendant Lille comme modèle de construction.
Lille ? Pourquoi pas… L’idée pourrait sembler pertinente si le club ne s’était pas acharné cet été à faire le contraire de ce que son modèle a patiemment élaboré. Car là où le LOSC s’est construit sur la stabilité avec un effectif chaque saison renforcé autour de piliers (Mavuba, Landreau, Obraniak, Debuchy, Balmont …), nous avons procédé à une quasi totale liquidation des stocks qui rend de fait toute comparaison avec les Dogues vraiment déplacée, voire indécente.
Alors certes, nous, vieux supporters qui ne sommes pas nés de la dernière averse, en avons vu et entendu de pires, mais à nos enfants qui ont besoin de rêver pour ne pas se détourner du club, on leur dit quoi sur ces lendemains qui (dé)chantent ?

Que l’envie, ça renverse des montagnes, qu’une coupe un jour ira à leurs lèvres tremblantes, que la solidarité et le mouillage de maillot sont, avant le talent et les paillettes, notre éternelle marque de fabrique ???
Oui, on leur dit tout ça. Comme on leur a dit pendant 6 ou 7 ans que le Père Noël débarquait une fois l'an. Oui on leur dit tout ça car c'est notre devoir, nous sommes là pour supporter. Dans tous les sens du terme.
Oui on leur dit tout ça, même si on pense très fort que nos pieds sont carrés, et qu'il faut (encore) faire le dos rond.