Ismaël Diomandé a signé aujourd'hui son premier contrat pro avec l'ASSE. Abdel Bouhazama, qui l'a eu sous ses ordres la saison dernière, nous présente ce prometteur milieu de terrain défensif.
Peux-tu rappeler brièvement le parcours d'Isma aux potonautes ?
C'est un garçon né en 1992 qui est arrivé chez nous seulement l'été 2010. Il a été repéré quand il jouait au Paris FC par l'un de nos recruteurs, Ludovic Paradinas. Lorsqu'Isma est venu faire un essai chez nous, on a trouvé avec Jean-Philippe Primard et Gérard Fernandez que ce garçon avait des qualités assez impressionnantes sur le plan physique mais aussi sur le plan technique. Il avait montré de belles dispositions sur le plan footballistique et nous avait montré un engagement total lors des entraînements. Il avait signé stagiaire.
Comme le décrirais-tu humainement ?
On a découvert le garçon au fil des séances. Dans la vie de tous les jours, c'est quelqu'un d'agréable et de très facile à entraîner. Il a une énorme envie de réussir, il avait vraiment envie de travailler pour progresser rapidement. Il partait de loin par rapport à des jeunes qui ont eu la chance de rejoindre le centre de formation dès l'âge de 14 ans. Lui n'avait pas connu de centre de formation en France. C'est un leader naturel. Il n'a pas besoin de gueuler ni de parler. Juste dans son tempérament et dans sa façon de jouer, il tire les autres vers le haut et met tout le monde dans sa roue. C'est un garçon qui a du charisme, qui s'impose naturellement.
Sur le plan footballistique, quelles sont ses principales qualités ?
C'est un garçon qui a surtout de grosses qualités dans l'impact physique dans l'entrejeu. Isma a un gros volume de jeu. Il court beaucoup et longtemps et sait se rendre disponible quand l'équipe a le ballon. Il aime toucher le ballon, il aime aller le chercher dans les pieds de l'adversaire. Il ne se cache pas derrière l'adversaire quand on a le ballon. L'année dernière, j'avais même un peu peur qu'il en fasse un peu trop mais il fallait l'accepter tel quel. C'est ce que j'ai fait en Gambardella et en championnat, sachant qu'il a également évolué et progressé en CFA avec Jean-Philippe Primard. En Gambardella, ce n'était pas mon capitaine de brassard car Saadi le portait. Mais c'était le poumon indispensable de l'équipe, le cœur de l'équipe. Il était très attachant car très respecté de tous ses partenaires, et en plus il faisait mal à l'adversaire. Il avait ce côté protecteur avec ses partenaires. Lorsque les attaquants se faisaient un peu chatouiller les chevilles, c'est lui qui allait rendre la monnaie de la pièce aux défenseurs.
On sent que tu apprécies beaucoup Isma.
J'ai beaucoup de superlatifs pour ce garçon. Je suis content pour lui. Même s'il n'a pas passé beaucoup de temps chez nous, c'est encore un joueur qui signe pro issu de la formation. Ça montre le travail de nos recruteurs et de nos formateurs. Félicitations à Isma, c'est avant tout à lui qu'il faut rendre hommage. Il voulait aller chercher ce contrat pro, il l'a signé aujourd'hui. C'est, je l'espère, le début d'une grande carrière. La signature d'un premier contrat pro n'est bien sûr pas une fin en soi, mais c'est une étape importante. Il voulait ce contrat. Je me souviens des discussions que j'avais avec lui lors de l'épopée de la Gambardella. Alors qu'on n'était qu'au début de la compétition, il me disait : "Coach, moi je veux gagner des titres, je veux qu'on gagne la Gambard' " Il me disait aussi : "Coach, moi je veux être pro, je veux à tout prix réussir ici, je veux jouer en équipe première à Geoffroy-Guichard."
Quand on le voit jouer, on sent qu'Isma est un compétiteur né.
Tout à fait. Il a ça dans le sang, il a ça dans les gènes. Et en plus il transmet sa détermination aux autres, c'est ça qui est impressionnant. Lui, on n'avait pas besoin de trop le bouger. Quand il avait décidé de faire quelque chose, il rameutait tout le monde. Il n'a pas besoin de gueuler, il en impose par sa volonté farouche de gagner. Je me souviens notamment de notre demi-finale de Coupe Gambardella contre Troyes à Mérignac. Il avait pris la parole juste avant qu'on rentre sur le terrain. Il était habité et avait dit "oh les gars on lâche rien". Ses partenaires l'ont tous regardé avec des gros yeux. Il a fait comprendre à tout le monde qu'on n'avait pas le droit de lâcher. C'est l'image forte qui me reste d'un leader charismatique. Il dégage quelque chose.
Quel est son véritable poste ? C'est un pur numéro 6 ou davantage un milieu relayeur ?
C'est un 6 moderne. Il veut le ballon, il n'a pas peur d'aller le chercher, il le touche beaucoup. On peut le considérer comme un relayeur mais c'est quand même un 6 dans le profil qu'on espère avoir un peu plus tard dans nos effectifs. C'est un joueur capable de récupérer le ballon dans les pieds de l'adversaire mais c'est aussi un joueur capable de jouer. Par moment il se comporte vraiment comme un gros récupérateur de ballons, il aime aller chercher le ballon dans les pieds de l'adversaire. Dès qu'il a le ballon, il sait bien l'utiliser. Il est capable de jouer long des deux pieds, il a une belle frappe de balle, un bon jeu de tête. C'est un garçon qui se projette assez rapidement vers l'avant par ses courses et balle au pied.
A quel milieu défensif pourrais-tu le comparer ? Clément, Guilavogui ou Lemoine ?
Il a un peu de Clément dans sa façon de travailler sans relâche et dans son gros volume de jeu. Dans la force, dans la percussion, c'est du Guilavogui. Par moment, dans la justesse et le fait de se projeter vers l'avant en soutien des attaquants, c'est du Lemoine. En fait Isma me rappelle un peu Blaise Matuidi, toutes proportions gardées et avec beaucoup de respect et d'humilité. Blaise récupérait beaucoup de ballons et aimait se projeter vers l'avant, il était capable de frapper et avait même marqué des buts chez nous. Matuidi se projetait assez facilement balle au pied ou par des courses, même sur des appels. Isma est lui aussi capable d'éliminer des lignes sur des courses ou des appels.
Quels sont les points qu'il doit améliorer pour s'imposer chez les pros ?
Par moment on pouvait lui reprocher un certain déchet technique et des choix pas toujours très justes. En U19 et en Gambardella ça allait bien mais à l'échelon au-dessus, lors de ses premiers matches de CFA, il manquait parfois de clairvoyance. Il a progressé là -dessus et le fait de s'entraîner avec les pros lui a permis de franchir un palier. Il y a une image que je prends souvent : un bon milieu de terrain défensif, ça doit être une machine à laver. Il doit rendre le ballon propre pour les partenaires et mettre l'équipe dans le sens du jeu. Il récupère souvent les ballons dans des conditions difficiles, et doit essayer de les bonifier pour l'équipe. Il faut alimenter ses partenaires, être en soutien. Ce n'est pas facile, c'est un rôle ingrat. C'est un peu un travailleur de l'ombre, Ismaël aime faire ça. Par moment il devrait épurer son jeu, éviter les touches de balle pour que son jeu soit encore plus fluide et simple. C'est ce qu'il arrive à faire désormais. Lors du dernier match de la réserve à domicile, contre Monaco, j'ai vu un Ismaël Diomandé rayonnant. Il a joué juste et proprement. Tout ce qu'il faisait était simple et bon, il n'y avait pas de fioritures dans son jeu. Il avait donné le tempo au milieu de terrain et j'ai trouvé ça très intéressant et riche de promesses pour la suite. On sent qu'il est en train de prendre une autre dimension. Isma s'est vite adapté et il a pris la mesure de ce qu'il doit faire pour le haut niveau.