Ancien entraîneur de la réserve stéphanoise et actuel coach de Dunkerque (leader de National 1), Claude Robin nous présente Yvann Maçon, seule recrue du mercato hivernal des Verts.


En quoi Maçon était l’un de tes meilleurs artisans ?

C’est un joueur qui a fait une première moitié de saison consistante. Il s’est affirmé et comme il n’a pas eu de blessure ou de suspension, c’est un garçon qui beaucoup joué depuis le début de saison. Yvann a été constant, a enchaîné les prestations intéressantes. C’est un jeune joueur en progression. Il a bien évolué.

Maçon est bien outillé ? Il a des qualités à la pelle ?

Oui, Yvann a pas mal de qualités. C’est un garçon très tonique, doté d’une technique très honorable. C’est un milieu de terrain de formation que j’ai converti en arrière latéral. Au départ il faisait quelques erreurs tactiques mais il les compensait par sa vitesse, par sa tonicité. C’est un garçon assez complet, qui a un bon potentiel. Ça peut être une vraie surprise.

En tant qu’architecte du jeu dunkerquois, comment utilisais-tu Maçon ?

Je l’ai utilisé dans deux schémas. Yvann a joué arrière latéral dans une défense à quatre mais je l’ai également fait évoluer dans un rôle qui lui convenait très bien, celui de piston quand on jouait dans un 3-5-2 ou un 5-3-2. Yvann était comme un poisson dans l’eau à ce poste de piston droit car il a de réelles qualités offensives, il apporte de la percussion. Ce système de jeu lui permet de mettre en valeur sa vitesse et sa tonicité.

Pour toi, le départ de Maçon est un coup de massue ?

Non, je vis ça plutôt bien. C’est toujours intéressant quand on est éducateur et formateur dans l’âme. Bien sûr en tant qu’entraîneur compétiteur en lutte pour la montée en L2, je perds en cours de saison un élément de valeur. Mais je ne me vois pas empêcher un jeune joueur prometteur de progresser dans un club plus huppé. Yvann a saisi l’opportunité de signer dans un club pro, et pas n’importe lequel en plus ! Je suis sincèrement très content pour lui. De même que je me réjouis que Mehdi Chehiri vienne de signer pro à Strasbourg. Comme Yvann, il n’est pas passé par un centre de formation. Je l’avais lancé la saison dernière à Dunkerque et cette saison il s’est illustré avec le Red Star. A 23 ans il rejoint une équipe de l’élite, c’est une belle ascension pour lui aussi.

Moi mon but c’est de faire progresser les joueurs, je suis très content pour Yvann. Il le doit à lui-même, certes, mais il le doit aussi beaucoup à ses coéquipiers qui lui ont permis de se mettre en valeur. Ce n’est pas sûr que Saint-Etienne et d’autres clubs pros se seraient intéressés à lui si on n’avait pas joué les premiers rôles cette saison en championnat de National 1. Yvann faisait partie de nos meilleurs éléments. Je le mettais tout le temps, il était performant. Mais je n’ai pas l’habitude de m’apitoyer sur les gens qui sont absents. On pense à l’avenir, on compensera, on trouvera des solutions et on souhaite bon vent à Yvann.

Ça te fait quoi de voir Maçon rejoindre la maison verte ?

Il rejoint une institution que je connais bien pour avoir entraîné l’équipe réserve de l’ASSE de 2005 à 2007. Mais on n’en a pas du tout parlé avec Yvann. Pourtant j’ai beaucoup apprécié mes deux années stéphanoises, j’aimais énormément ce que je faisais là-bas. J’ai quitté la maison verte pour des raisons personnelles. Mais l’ASSE est un très bon club qui fait toujours rêver pas mal de jeunes et plus largement beaucoup de joueurs professionnels en France. Tout le monde en tant que joueur rêve de jouer à Saint-Etienne, ça je le sais ! Je suis très content pour Yvann, il va avoir le bonheur de porter ce mythique maillot vert. Pour lui c’est une belle opportunité, d’autant plus qu’il va évoluer sous les ordres d’un entraîneur qui fait confiance aux jeunes et n’hésite pas à les faire jouer.

A quel autre latéral droit que tu as entraîné à Sainté le comparerais-tu ?

A l’ASSE, j’ai surtout fait jouer à ce poste Yoann Andreu, Julien Cétout, et Anthony Badel mais j’ai également eu Mouhamadou Dabo avant qu’il ne monte chez les pros. Yvann a un peu des caractéristiques de Mouhamadou car il est très tonique, mais peut-être qu’il a une marge de progression un peu plus grande. C’est ce qui est intéressant avec Yvann, il a encore une grosse marge, tactiquement notamment. Comme c’est un joueur à l’écoute, il va intégrer ce qu’on lui dit et agir en fonction. Je ne pense pas qu’on puisse comparer Yvann à des garçons comme Julien Cétout, Yoann Andreu, qui évoluaient dans un registre un peu différent. Yvan est un joueur hyper tonique et très puissant, très intéressant offensivement.

Il y a six ans on suivait Ciman, aujourd’hui on recrute Maçon. Il sait bétonner ?

Yvann n’a pas que des qualités offensives. C’est un défenseur doté de grosses qualités athlétiques. Il sait jouer défensivement. Il peut encore s’améliorer dans ce domaine et il va le faire. Il est présent dans les duels, il met de l’impact. Yvann a en plus un bon jeu de tête, ce qui n’est pas le lot de tous les latéraux. Sincèrement, c’est un joueur assez complet. Son registre défensif peut être très intéressant. Il n’y a pas qu’en piston qu’il s’est mis en évidence, je l‘ai très souvent utilisé dans une défense à quatre, il n’avait pas de problème. Yvann n’a joué que trois ou quatre matches piston, pas plus. Ce rôle lui allait bien mais il est capable de jouer défenseur pur au poste de latéral, même dans un club plus huppé que Dunkerque, ça s’est sûr.

Il est bon sur coup franc, Maçon ?

Ce n’est pas sa qualité. Plus globalement, sa qualité de centre reste à améliorer, il a encore une marge là-dessus. Je pense qu’il peut être plus décisif. Il n’a fait que deux passes décisives et n’a pas marqué de but chez nous. Il a de la marge dans l’efficacité et va progresser au contact de garçons comme Mathieu Debuchy. Yvann est souvent en bonne position mais il ne réussit pas tout, c’est normal. Il ne faut pas oublier qu’il n’a que 21 ans.

On voit Maçon au pied du mur. Il a la dalle et le niveau pour jouer plus haut ?

Oui, Yvann est un garçon qui a faim, il croque à pleines dents ce qui lui arrive. Il est très ambitieux. Signer pro à Sainté, c’est une superbe opportunité. C’est un garçon qui n’a joué qu’une vingtaine de matches en National 1. Il va découvrir complètement le monde professionnel. Il a un parcours très atypique car il n’est pas passé par un centre de formation. Il a vécu en Guadeloupe avant de jouer quelques années dans un club amateur de la banlieue de Montpellier, Castelnau-Le Crès. A Dunkerque il a d'abord joué avec la réserve. Yvann a encore de la discipline à acquérir. On peut faire confiance à Claude Puel, il n’y aura pas de problème là-dessus. Il est prévenu.

Maçon balance des parpaings ?

C’est un vrai joueur de foot, il sait faire de belles ouvertures et de bonnes passes. C’est un très bon élément Yvann, hein, attention ! C’est un bon technicien et j’ai bon espoir qu’il le démontre chez les pros.

Maçon à Sainté, c’est l’effet Claude truelle ?

(Rires) Claude est en effet un bâtisseur qui a montré dans les différents clubs où il est passé qu’il savait donner sa chance aux jeunes et les faire progresser. Moi je lui ai donné sa chance en équipe première alors qu’il n’avait joué que quelques matches avec la réserve de Dunkerque. Yvann avait en effet été absent sept mois en raison d’une phlébite. Quand il a retrouvé la plénitude de ses moyens physiques, j’ai vu que c’était un élément vraiment intéressant, compétitif. Je le fais jouer en réserve en fin de saison dernière car l’équipe fanion était dans une bonne dynamique. On en a profité pour le préparer à ce poste de latéral en vue de cette saison. Il a confirmé ensuite les espoirs qu’on avait placés en lui. Et maintenant il rejoint le bon club et surtout l’entraîneur idoine. Yvann change de Claude mais ne perd pas au change.

« Le maçon ivre » et « Le maçon blessé » sont des œuvres de Goya (le peintre, pas la chanteuse). Rassure-nous, rien à voir avec Yvann ? Maçon ne finira pas en cellule de dégrisement ou dans le plâtre ?

A priori non ! (rires)

Le dernier joueur guadeloupéen à avoir porté le maillot vert en pro n’a pas laissé un souvenir impérissable. Masson est plus fort qu’Agasson ?

Je n’ai qu’un lointain soutenir d’Agasson. Je ne l’ai pas bien connu donc je ne me prononcerai pas.

Maçon est un bon garçon ?

C’est un bon garçon. Je pense qu’il a été un peu perturbé par l’éloignement de sa maman, l’éloignement entre sa maman et son papa. Mais c’est un très bon garçon, facile à vivre et à manager.

Maçon a évidemment le moellon. Mais a-t-il le melon ?

Non et j’ose espérer qu’il ne le prendra pas. On ne peut jamais prédire ce qui va se passer. L’évolution des jeunes, ce n’est pas simple. Mais il n’y a pas de raison qu’il ne garde pas la tête sur les épaules. Je ne me fais pas trop de soucis pour lui. Signer pro, c’est une chose, s’imposer dans la durée dans le monde pro en est une autre. Yvann en a conscience et il sait qu’il va devoir travailler pour avoir sa chance.

Quid de son alimentation ? Il mange des brocolis, Maçon ?

(Rires) Tu lui demanderas. C’est possible maintenant qu’il s’est mis au vert !

 

Merci à Claude pour sa disponibilité