Contre Nantes, l'ASSE a signé sa première large victoire cette saison, au terme d'un match maîtrisé de bout en bout.
Large victoire, pleine de maîtrise, c'est sans surprise que le terme "match référence" a été utilisé par les joueurs et le staff après la rencontre : "c'est un match référence cette saison" (Kolo), "je ne sais pas si on peut parler de match référence, mais on n’en est pas loin" (Gasset). Le résultat final est sans appel et même si l'ouverture du score a été assez tardive, elle a été méritée, tellement les Stéphanois ont été au-dessus de leurs adversaires dans la gestion du match. Ils ont eu une large possession, et si au début elle a été plutôt stérile, peu à peu les occasions sont apparues et à la fin elles ont été converties. Toujours dans les mots de Kolodziejczak : "Nous avons été patients et tactiquement nous avons été très bons. (...) Nous les avons fait beaucoup courir et en seconde période ils ont lâché sur le marquage". Les exemples qui suivent nous permettent de mieux comprendre cette analyse du défenseur de l'ASSE : le plan de jeu des Nantais, comment il a été déjoué par la tactique des Verts et pourquoi la patience stéphanoise et la fatigue adverses ont été importantes.
En première période
A partir de la 10e, et pendant un peu plus de 6 minutes, l'ASSE a eu une très large possession (73%), mais presque entièrement sur la ligne médiane, sans pouvoir s'approcher de la surface adverse. La faute à un marquage individuel des Nantais, surtout sur les trois milieux stéphanois, M'Vila, Selnaes et Cabella. Sans illustrer toute cette phase de possession, quelques images nous permettent de remarquer ce marquage individuel au centre du terrain :
Peu importe le positionnement des trois milieux (ici Selnaes est la pointe haute), il y a trois adversaires qui les suivent. Et si un des trois attaquants décroche, il est suivi toujours par son adversaire direct :
Hamouma et Cabella avaient inversé leur place, la sentinelle est au marquage du premier. Khazri décroche jusque dans le rond central...
... il est suivi par un défenseur central, aller-retour. Diony propose une solution entre les lignes, il est suivi aussi :
Ainsi, ça revient à la défense de faire le jeu, de construire, pendant que les trois milieux se déplacent un peu partout pour éventuellement se défaire du marquage...
... mais sans vraiment y arriver :
À plat, en triangle pointe basse ou pointe haute, c'est toujours du 3-contre-3 dans l'axe :
Peu importe le positionnement des trois milieux (ici Selnaes est la pointe haute), il y a trois adversaires qui les suivent. Et si un des trois attaquants décroche, il est suivi toujours par son adversaire direct :
Hamouma et Cabella avaient inversé leur place, la sentinelle est au marquage du premier. Khazri décroche jusque dans le rond central...
... il est suivi par un défenseur central, aller-retour. Diony propose une solution entre les lignes, il est suivi aussi :
Ainsi, ça revient à la défense de faire le jeu, de construire, pendant que les trois milieux se déplacent un peu partout pour éventuellement se défaire du marquage...
... mais sans vraiment y arriver :
À plat, en triangle pointe basse ou pointe haute, c'est toujours du 3-contre-3 dans l'axe :
Cette tactique n'a qu'un but : empêcher les Verts de construire, en éliminant leur trois dépositaires du jeu. La solution ? Du mouvement, de la patience et... rajouter un 4e joueur au milieu. Comme dans cet exemple qui commence à la 31e...
... avec une situation désormais classique. Marquage individuel sur le trio au milieu, les trois attaquants sur sur la ligne de la défense (Hamouma et Khazri avaient interchangé), les deux latéraux sont surveillés par les milieux latéraux adverses et les deux centraux se passent la balle en attendant une solution. Qui vient suite à un mouvement coordonné :
Selnaes s'écarte vers la droite et Hamouma décroche dans cet espace libéré. Cabella se déplace de la zone d'un milieu dans celle d'un autre (pour ne pas être suivi), avant de décrocher aussi. Kolo a deux solutions, il choisit Cabella :
Après s'être placé à côté de Selnaes, Hamouma se déplace dans l'espace libéré par Cabella - il attire ainsi avec lui les deux milieux axiaux adverses. Le 3e se trouve seul entre M'Vila et Cabella. Selnaes fait des grands gestes, étant libre - les Verts jouent avec 4 milieux et aucun attaquant, les deux défenseurs centraux nantais ne servent à rien. Cabella combine avec Hamouma...
... qui avait continué sa course et qui joue avec M'Vila, qui passe en retrait à Kolo. Selnaes demande toujours le ballon à l'opposé, et il finit par le recevoir :
Tous les milieux glissent vers ce côté, pendant que Hamouma se replace en avant-centre. Selnaes combine avec Cabella...
... et tous ces mouvements ont complètement fait sauter le marquage individuel, les trois milieux adverses étant tous autour de Cabella, ce qui libère M'Vila. Diony et Hamouma sont dans l'axe, les couloirs sont pour Debuchy et Gabriel Silva et la combinaison stéphanoise est très belle :
Deux Nantais sortent sur M'Vila, Diony plonge dans le dos du latéral, où il est servi. Il passe en retrait pour Silva, qui centre en retrait pour Hamouma, mais malheureusement son tir est contré.
En deuxième période
L'entrée de Salibur à la place de Hamouma n'a rien changé, il a repris ce rôle de "deuxième 10", qui amène du surnombre au milieu. L'entrée de Beric à l'heure de jeu n'a pas changé grande chose tactiquement non plus, même si son jeu dos au but a été mis en évidence dès ses premières secondes sur le terrain :
Dégagement du gardien adverse gagné de la tête par M'Vila. Le ballon arrive à Beric, qui remet à Salibur dans le couloir. L'ailier joue en arrière avec Debuchy...
... qui cherche Beric, plus haut dans le même couloir. Malgré le défenseur dans son dos, le Slovène protège le ballon en attendant la course de Salibur :
Il talonne pour Cabella, qui lance en profondeur Salibur, mais le centre vers Khazri, qui venait de l'aile opposée, est repoussé.
Cette action a été plutôt une exception à la règle, le jeu stéphanois continuant à passer par le milieu du terrain après une construction pleine de patience, la fatigue des Nantais et ce surnombre apporté par Salibur de temps en temps leur permettant de trouver la faille. Par exemple, à la 66e, après une touche stéphanoise, le ballon est baladé dans la défense :
De droite à gauche, puis de nouveau à droite, on attend une solution. Elle arrive grâce au mouvement de Salibur :
Il a quasiment changé de place avec Selnaes, avec qui il combine, mais seulement pour revenir en arrière vers Subotic :
En effet, le marquage individuel nantais est toujours présent. Mais des erreurs commencent à être commises :
Selnaes est pris, Cabella aussi, M'Vila a même deux joueurs autour de lui... et les deux le quittent, lui permettant de recevoir le ballon tranquillement :
Selnaes est pris par deux joueurs et il y en a deux pour la paire Cabella-M'Vila, mais qui ne savent pas où aller quand le premier décroche. Ce qui permet au deuxième de bien trouver Gabriel Silva dans le couloir, qui prolonge avec Khazri...
... qui remet en arrière pour Cabella. Malgré l'appel de Silva vers la surface, c'est toujours Khazri qui est cherché et son centre peut être très dangereux. Beric et Salibur font des appels dans la surface, suivis par les deux défenseurs nantais restants... ce qui laisse Debuchy tout seul au 2e poteau. Malheureusement, son premier tir est contré par... Beric et un adversaire l'empêche de bien tirer une deuxième fois.
Cette action a été facilitée par l'infériorité numérique des Nantais, un joueur blessé n'ayant pas encore été remplacé. Chose faite, une minute plus tard, l'ASSE construit une nouvelle attaque :
Malgré le marquage individuel, les Stéphanois combinent au centre du terrain. Le jeu est écarté vers la droite...
... où Subotic essaye un ballon en profondeur pour Debuchy, intercepté par la défense. Au milieu, les quatre Verts (Salibur s'y étant rajouté) étaient tous pris. Un défenseur dégage le ballon, mais il est de suite récupéré :
Salibur le donne à Selnaes, qui le sort de ce petit périmètre vers M'Vila. La paire Salibur-Selnaes était entourée par 3 milieux, laissant donc un seul pour M'Vila-Cabella. Mieux que ça, Beric aussi se place intelligemment entre les lignes :
Selnaes pris, Salibur pris, Cabella initialement pris aussi, mais son adversaire sort vers M'Vila : le défenseur central adverse fait des gestes désespérés - un latéral doit chercher Khazri, un autre est au marquage de Debuchy, son compère dans l'axe est par terre, le bloc nantais est très en déséquilibre. Finalement, M'Vila oriente le jeu à gauche, où Khazri lance vers la surface Gabriel Silva. Son centre-tir lobé passe juste à côté du poteau, sans pouvoir être repris par Beric.
Conclusions
Si les trois buts ne sont pas une conséquence directe de cette opposition tactique (un centre directement après une touche, un coup-franc direct et un corner), cette maîtrise affichée par les Verts y est quand-même pour quelque chose. A force de refuser le jeu et de courir après le ballon et les Stéphanois, les Nantais ont fini par faire des erreurs. Et le danger sur leur but est devenu de plus en plus présent, jusqu'au moment où ils ont craqué. Du côté de l'ASSE, au delà du score, le plus réjouissant n'est ni le fait d'avoir déjoué tactiquement le plan adverse, ni la patience et maîtrise affichées. Mais bien le fait de l'avoir fait tout au long de la partie, du début à la fin. C'est bien la première fois de la saison que les Verts font un match complet, de bout en bout. Comme quoi, les deux derniers mauvais résultats ont servi à quelque chose. Reste maintenant à confirmer, à reproduire une prestation complète, dans un contexte différent, à l'extérieur (Bordeaux, Nice) ou contre un adversaire qui ne viendra pas seulement pour défendre (Marseille).