Au secouuuuuuuuuuuuuuuuurs !

Je ne suis pas fouuuuuuuuuuuuuuu !

Détachez-moi tout de suite !


Au secouuuuuuuuuuuuuuuuurs !

Je ne suis pas fouuuuuuuuuuuuuuu !

Détachez-moi tout de suite !
Enlevez-moi ces électrodes branchés partout sur mon corps et cette sonde enfilée dans mon croupion comme une broche dans celui d’un poulet. Je ne suis pas une volaiiiiiiiille ! Et cette ventouse à déboucher les chiottes, qu’est-ce qu’elle fiche sur ma tête ?
Mais qu’est-ce que c’est que cette ville de fouuuuuuuuuuuuuuuus ! Bandes d’esclavagistes !
Au secouuuuurs ! Mamaaaaaaaaaaan ! Papaolaaaaaas ! Nanaaaaaaard ! Comment quel Nanard ? Aaaaaaah non, pitié, pas le Nanard d’ici, ce faux cul ! Mon Nanaaaaard de Lyon !
Mon Nanaaaaard ! Je veux parler au coach ! Non pas le Tchèque ! Ce tortionnaire ! Nooooooon pas Marek… Pitié pas Marek !
Cotchouiller ! Voilà, je veux parler à Cotchouillier… Voilà un mec bien sous tout rapport, propre sur lui et dans sa bouche. Vite, appelez-moi Cotchoullier, et que ça saute bande de pouilleux ! Au secouurs !

Mademoiselle, pitié ! Comment ? Ah, Ma sœur, pardon ! Marie-Madeleine, vous qui avez une âme charitable, vous qui êtes près de Dieu, vous qui êtes la copine à Jésus, prenez pitié d’un pauvre esclave persécuté. Ecoutez ! Approchez votre grande oreille de ma grande bouche ! Chuuuut !..... Pouvez-vous contacter pour moi Amnesty International, Green Peace, euh, non pas Green Peace, ça craint, c'est vert. Appelez plutôt Nicolas Hulot, l’Inspection du Travail inhumain, Martin Luther King, Laurent Duhamel, Nelson Mandela, le Géant Casino. Non, pas le Casino, ça craint aussi ! Jean-Michel Larqué ! Ah oui voilà, c’est bien, ça, Jean-Michel Larqué, comme ça il pourra appeler mon Papaolas… Oui voila, c’est bien, ça… Comment vous ne pouvez pas ? Vous vous foutez de ma gueule, Ma sœur ? Je suis un chrétien, moi ! Quoi, qui est-ce qui a dit un crétin , hein ? Qui est-ce qui a dit un crétin ? Détachez-moi bandes d’hystériques ! Où j’ai foutu mes cartons jaunes ? Mes cartons jauuuunes ! Bougez pas ma Sœur, vous ne perdez rien pour attendre ! Je vous mets mentalement un carton jaune. Mais le rapport va être carabiné. Vous allez voir, quand Papolas va s’occuper de votre cas. Comment ? Vous contestez ? Pénalité ! Reculez de dix mètres ! Quoi ? Carton rouuuuge ! Carton rouuuuge, expulsée, Ma sœur ! Quinze minutes en enfer, connasse ! Et arrêtez de m’appeler mon fils ! Je ne suis pas votre fils… Je suis le fils de Papaolas ! Non mais !

Je veux parler au docteuuuuuuuuuuuuuuuuur ! Appelez-moi le docteuuuuuuuuur Jemal Hoku !
Non ne me piquez pas les fesses ! Vous n’avez pas le droit ! Non, je n’ai pas mal au cul. Appelez-moi tout de suite le docteur Jemal Hoku, où je téléphone à Bernard Kouchner……..
Aaaaaah ! Pas de piqûre ! Aaaaaah ! Je pars ! Je sombre ! Wouuuuuuuuu ! Je vole !!!
Nooon je ne veux pas voler ! Les oiseauuuuuux ! Pas les oiseauuuuux ! Quoi ? Qu’est-ce qu’il a ce con d’infirmier à rigoler sous son casque à pointe ? Et ça te fait marrer les oiseaux qui s'envolent… Les oiseaux qui s'envolent… Les oiseaux qui s'envolent… Les oiseaux qui s’envolent… Pas sur la tête ! Ne tapez pas sur ma tête ! Quoi mon disque est rayé ?… Ne tapez pas sur ma tête ! Bourreaux ! J’ai le vertiiiige ! Docteuuuuuuuuuuuuuur !
Docteuuuuuuuuuur !

Zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz …

Aaaaah , Docteur, on m’avait endormi. Je vous devine, là, dans le brouillard au milieu des nénuphars. Ouvrez la fenêtre, Docteur, pour faire entrer le soleil. Nooooon, pas la fenêtre ! Attentioooon, Docteur ! Fermez vite ! Viiiiiiiiite ! Attention aux oiseauuuux !
Les oiseauuuux !
Aaaaah , c’était limite, d’un peu mieux il y avait hors jeu, on se faisait gauler par l’arbitre de touche… Ce vendu… Aaaah, merci, Docteur, ça va mieux, aaah…
Vous ne me reconnaissez pas, Docteur ? Comment ça ? Frédéric P’tiquionne… Oui, c’est ça, Docteur… C’est moi qui vous ai envoyé un bon client, l’an dernier. Ce barge de Portugais, Helder Postiga, qu’on a fait disjoncter avec les copains en lui balançant des ballons pourris à longueur de matches. À ce propos, Docteur, il y a un problème. Voilà, j’ai bien vérifié mes comptes. On avait bien dit 50 % pour moi sur vos honoraires si je rendais Helder Postiga totalement fou ? Quoi ? 25% ? Vous rigolez, Docteur ?… En dessous de 50 % c’est plus un job, c’est de l’esclavage…Bon on en reparlera quand j’aurai obtenu l’asile politique à Lyon. J’en toucherai deux mots à Papaolas ou à Tonton Nanard. À moins que… Tenez, Docteur, aidez-moi, et nous serons quitte.

Docteur, d’abord, vous allez m’expliquer pourquoi je suis ici. J’étais tranquillement installé sur le toit de ma voiture à Bellevue, en train de guetter les oiseaux. Parce que vous savez, Docteur, à force de leur tirer dessus, et d’en tuer des quantités gastronomiques l’an dernier, sur les conseils de RoRo², les survivants ont créé un syndicat pour me harceler et me détruire, le S.L.I.P. : le Syndicat Libre pour l’Internement de P’tiquionne. Depuis, je sors armé. J’ai acheté un bazooka sur Ebay, à l’Armé Rouge en plein démantèlement, et je l’ai installé sur le toit de ma modeste voiture. Alors que j’avais envoyé une bonne dizaine de roquettes sur leur chef, un gros oiseau à hélice qui fait un bruit infernal lorsqu’il vous survole… Entre parenthèses, je ne sais pas ce que c’est que cette bestiole, mais d’après le dossard qu’il porte, ça doit être un SAMU… Donc après avoir envoyé mes roquettes et l’avoir loupé plusieurs fois, lorsque j’étais vraiment au point et que j’étais sûr de le descendre, alors qu’il revenait, une bande de dégénérés vêtus de maillots verts m’est tombé dessus, et m’a embarqué ici… Merde, Docteur ! On ne peut même plus se défendre dans cette ville ! Et les Droits de l’Homme, hein ? Et la Sainte Trinité qui m’a parlé cette nuit au téléphone : Saint Jean, Saint Michel et Saint Bernard… Même qu'ils m'ont dit, je ne déconne pas, Docteur, ils m'ont dit :

Les Oiseaux tu liquideras… Les Stéphanois tu baiseras… Et à Lyon tu joueras…

Et ce matin encore, Cotchouiller m’a dit la même chose… Et me voilà ici. C'est injuste. Je n'ai fait qu'écouter le Ciel. Elie ! Coach Elie ! Pourquoi m'as-tu abandonné ?...

Mais heureusement, Docteur, j’ai tout de suite pensé à vous et je vous ai réclamé à corps et assis. J’ai confiance en vous Docteur Jemal Hoku… Parce que vu votre nom, vous n’êtes pas un Stéphanois. Vous ne faites pas parti de cette race de bâtards. Au fait, vous êtes de quel pays, Docteur ? Apatride ? C’est où, ça, l’Apatrie ? C’est une île ? Aaaaah, je vois… Je n’y suis jamais allé, mais dès que j’aurai été libéré de mes fers, et que je pourrai enfin jouer au paradis gone, je gagnerai ma vie décemment, et je pourrai aller sur votre île pour m’étaler comme une merde sur la plage au sable fin, et pour me faire servir par les esclaves du coin.

Parce qu’ il faut que je vous dise, Docteur, avant j’étais normal... Pas con, même… Si, si… Rigolez pas, Docteur…

Mes problèmes ont commencé à Rennes. De vrais cons ces Bretons. Surtout les gamins. Il y en a un qui m’a tellement gonflé, qu’un soir je lui ai mis un tel pain en travers de sa sale gueule, qu’il est allé directement à Saint Malo sans toucher terre. Alors, les Rennais m’en ont voulu. Ils donnent à leurs enfants une éducation très libérale. Alors que moi, je les dresse. Donc, comme nous n’avions pas la même conception sur le sujet, j’ai été harcelé jusqu’à ce que je m’en aille. En fait, je ne suis pas parti de moi-même. C’est un ange qui est venu me chercher. Coach Elie. Il a été peiné devant ma détresse, et il m’a transféré à Saint Etienne, en touchant juste au passage un petit pourcentage sur le transfert, histoire de payer son hôtel à Rennes et ses frais de route. Et puis en venant à Saint Etienne, on a pris la route tordue, par Bordeaux, et on a récupéré mon copain numéro 14, un étonnant joueur qui danse le casatchok avec des castagnettes, et qui marque des buts en descendant une bouteille de vodka. Et là aussi, pareil, coatch Elie a touché son petit pactole, de la monnaie, une misère, pour payer l’autoroute et l’hôtel de Bordeaux. Un saint, ce coatch Elie. Mais si j’avais su dans quel enfer je venais me jeter ! Et si lui-même il avait su dans quel traquenard il allait tomber, il se serait arrêté à Toulouse, et moi je ne serais jamais venu ici, et je serais aujourd'hui aussi à Toulouse à me foutre sur la gueule avec Pieroni. Mais taper sur un Belge, Docteur, c'est bien une bonne action, non ?

Figurez-vous, Docteur, que j’ai mis deux ans à me rendre compte qu’ici c’est comme au Moyen-Âge. Pire même.

J’avais pas fait gaffe, mais les gens vivent dans des clapiers. Ils creusent sans arrêt des galeries sous le sol. Ils sont tout noirs. Les mains, le visage, les ongles. Et ils se baladent, même en plein jour, coiffés d’un casque sur lequel est fixé un phare. À cause du temps. Le froid, le brouillard. Ici, vous avez pu vous en rendre compte, Docteur, il fait plus noir à l’air libre que des centaines de mètres sous terre. Et, le pire, Docteur, ce sont les carottes. Comme les lapins, ils bouffent des carottes. Il paraît que les carottes, ça rend aimable. Eux, ça les rend cons. Et agressifs. Ils ne se rendent même pas compte qu’ils sont exploités. Par quelques milliardaires. Comme les deux sbires qui dirigent le club où je suis payé pour marquer des buts. Parfois, j’en marque d’ailleurs. Mais pas assez. Et puis, je m’en fiche des buts. Moi, ce que je veux c’est être payé décemment. Vous imaginez, Docteur, 80 000 € par mois. Vous allez où, vous, avec 80 000 € par mois ? Quand vous avez payé les impôts sur le revenus, les impôts locaux, l’ISF, les pneus de la BM, la vignette pour la Suisse, les fringues… Ben, oui, les fringues… C’est pas parce qu’ici ils sont habillés comme des souillons que je vais me laisser aller, non ?... Donc quand vous avez tout payé, il vous reste quoi… Plus rien pour payer l’essence de la voiture. Faut dire qu’elle consomme ma voiture. C’est vrai ça, j’ai même pas les moyens d’en changer…
C’est pas comme RORO². Lui, il a une Ferrari jaune. En fait, elle était rouge, mais il l’a peinte en jaune pour passer inaperçu. Et les autres barges, ils n’ont rien vu. Remarquez bien ici, ils sont tous à se trimballer dans des espèces de boîtes à roulettes, debout, le bras en l’air pour pas se casser la gueule, à cause qu’il n’y a pas d’ABS… Des trams qu'on appelle... Et ils passent, comme des cons… À longueur de journée… À regarder les autres, tous aussi cons, qui marchent le nez en l’air dans les rues… Dans la rue, devrais-je dire, puisqu’il n’y en a qu’une. Tout en long. Tellement longue et étroite cette rue, que même l’esprit des gens est devenu comme elle… étroit… Et pourquoi moi aussi je n’aurais pas une Ferrari ? Hein, je vous le demande, Docteur. Pourquoi ? Parce que je suis un ES...CLA...VE... C’est tout simple. Enfin non, c'est pas simple.

Ce sont mes amis lyonnais qui m’ont ouvert les yeux. Il faut dire que je vais souvent à Lyon pour me ressourcer. Si je n’avais pas cet échappatoire, je serais mort aujourd’hui. C’est sûr. Aussi sûr que la Terre rote sur elle-même.
Là-bas, c’est le paradis. Il fait toujours beau. On ne prend jamais de cartons jaunes ou rouges, car on sait parler aux arbitres. La nourriture est survitaminée. Vous connaissez Superman, Docteur ? Eh bien, goûtez un peu à la quenelle lyonnaise qu’on sert à Gerland… Vous avez une sensatiooon !!!… Je ne sais pas moi… Rien ne vous résiste. Comme Obélix. Mieux, comme Armstrong. Vous n’avez même plus besoin de voiture… Vous courez sur l’autoroute tout à gauche. Vous pulvérisez les radars…
Papaolas me l’a dit : Fred, viens chez nous, tu verras comme c’est confortable. Il y a même des coussins sur le banc de touche.
Et le public ! Aaaah, le public ! Quel public !
Tenez, allez voir le site des supporters, vous comprendrez : http://www.publicdemerde.com/ .
En plus, rien que des illettrés ! Le rêve, l'extase, parce que comme ils ne savent ni lire ni écrire, il n’y a pas de banderoles !
Et pas d’oiseaux non plus! Ils ne survivent pas aux fumées toxiques des banlieues.
Et puis, deux fois par an, qu'il me dit Papaolas, tu mettras une branlée à ces bâtards de verts qui ont tant profité de ton talent sans te payer à ta juste valeur.

Schlurps ! J'en salivais ! Je ne me faisais pas trop de soucis, Docteur, parce que les Lyonnais avaient infiltré le club, et j’étais soutenu, aidé, conseillé par Lamine Diatta. Pas bête le prénom de Lamine. Il passait totalement inaperçu ici au milieu des crassiers et des crasseux. Mais malheureusement, il s’est fait repérer à cause de sa manie du bavardage. Et maintenant ma fuite est rendue quasiment impossible. Je suis surveillé, séquestré. Alors, j’ai pensé qu’il n’y avait pas que le football dans la vie. Maintenant je suis prêt à tout abandonner. Je ferais comme Luis Fernandez il y a trente ans, lorsqu’il envisageait de reprendre son métier d’électricien dans le bâtiment, je reprendrai mon métier… Merde, Docteur, j’ai pas de métier… Je pourrai faire des têtes dans le vide chez Holiday on Ice... Ou il faudrait peut-être que j’envisage de faire des études… J’ai bien pensé à l’Université d’Eté créée par Ribery à Marseille, pour reconstruire les accidentés de la vie et leur muscler le cerveau. Mais, tout réfléchi j'ai plus trop envie, parce que quand je vois la gueule de Ribéry, je me dis que si son université lui a musclé la cervelle, elle lui a éteint le regard.
Et toutes ces pensées m'échauffent les neurones.
Et c’est pour ça que je suis agité.
On m’appelle « Little Red Fish Â», comme le petit poisson rouge qui nage et qui fait des vagues dans ma tête…

Tenez, Docteur, je crois bien que je vais rentrer en Martinique. Je vivrais sous les cocotiers… De presque rien… De temps en temps je serais le larbin de RORO² qui viendra bronzer en vacances.

Merde, Docteur !... Ca y est ça recommence… L’esclavage… C’est mon destin.

Mais où m’emmenez-vous, Docteur ?... Détachez-moi !!! Au secouuuuurs ! Cotchoullier ! Cotchoullier ! Nooon, Docteur, pas dans le micro-ondes. Je ne veux pas cuire dans ce four micro-ondes ! Docteur, pourquoi vous enlevez votre blouse blanche ? Docteuuuuur, pourquoi avez-vous un maillot vert dessous ? Docteur, vous êtes un sale con ! Comme tous les autres ici !
Pas le micro-ondes !
Pas le micro-ondes !
Je préfère les oiseaux ! Les oiseauuuuuuuux !