Les Verts se sont lourdement inclinés à domicile contre un adversaire plus mûr et qui a clairement maîtrisé son sujet.


Les Verts ont été moins réalistes que leurs adversaires du jour, le staff stéphanois a admis avoir reçu une "leçon de réalisme". Mais ce n'est pas seulement le dernier geste qui a fait défaut aux joueurs de Claude Puel, ils se sont confrontés à une équipe très bien en place, qui les a empêchés de developper leur jeu et qui a su profiter de sa supériorité dans plusieurs secteurs de jeu. Certes, les Verts aussi avaient identifié une faille, qu'ils n'ont pas exploité, comme on peut le voir dans les exemples suivants.
 

Dans le dos de la défense

 
Le staff stéphanois a fait confiance au système de jeu et au positionnement des joueurs offensifs utilisés depuis le début de la saison, un 4-2-3-1 / 4-4-2 avec Hamouma et Nordin devant, Aouchiche à gauche et Bouanga à droite :
 
 
Les seuls changements par rapport au 11 de départ habituel ont été forcés par les blessures, Neyou et Fofana, incertains avant le match, ont laissé la place à Youssouf et Moukoudi. Dans l'exemple qui commence avec cette capture d'écran, les Rennais font circuler le ballon de gauche à droite pour contourner le bloc stéphanois, mais le centre de l'ailier arrive dans les gants de Moulin. Qui relance avec Kolo : 
 
 
Camara reçoit le ballon et le garde en attendant une solution. On remarque facilement l'alignement de la défense adverse sur la ligne médiane et le pressing haut effectué par les autres joueurs bretons. Ça veut dire qu'il y a de la place en profondeur et les 4 offensifs de l'ASSE se tiennent prêts : Bouanga part trop tôt et se trouve hors-jeu...
 
 
... mais c'est la course croisée de Hamouma qui est recherchée par le ballon en profondeur de Camara. L'attaquant stéphanois se trouve en position de centre et il trouve au deuxième poteau Nordin, mais ce dernier n'arrive pas à bien reprendre de la tête :
 
 
Selon Opta, c'était le seul des neuf centres de Hamouma (coups francs et corners inclus) qui a trouvé un coéquipier... Ce qui est dans la moyenne générale de l'équipe, avec seulement 2 des 25 centres dans ce match qui ont été "réussis" (repris par un coéquipier).
 
Les Verts gagnent immédiatement le ballon après la remise en jeu et Moulin peut recommencer une attaque :
 
 
Après des échanges de passes avec son gardien et avec Moukoudi, Kolo monte balle au pied. En face, la défense est toujours très haute et les Stéphanois sont prêts à des appels dans son dos :
 
 
C'est toujours l'appel de Hamouma qui est choisi, mais cette fois-ci dans l'axe, pas sur un côté. Ce qui fait que le gardien adverse arrive à s'emparer du ballon à la limite de sa surface - avec une défense si haute, il avait besoin de souvent sortir pour couvrir. 
 
Mais il ne l'a pas réussi à chaque fois, comme dans cet exemple quatre minutes plus tard, quand une autre relance commence de Moulin...
 
 
... avec Kolo et Maçon, qui rejoue avec son capitaine du jour. La défense rennaise toujours sur la ligne médiane, les 4 attaquants stéphanois toujours prêts pour plonger dans son dos, avec Aouchiche et Hamouma qui changent de place. Ainsi, quand le long dégagement de Moulin est dévié par Nordin...
 
 
... c'est le jeune Aouchiche qui le reçoit et qui lance parfaitement Bouanga dans le dos de la défense. L'attaquant se présente dans la surface, mais son centre-tir est complètement raté et sort en touche.
 
Rennes a fait le choix de placer un bloc très haut, ce qui a considérablement gêné la construction stéphanoise, mais qui a laissé aussi beaucoup d'espaces en profondeur. Où les Verts ont su se projeter, mais d'où ils n'ont pas réussi à concrétiser leurs occasions.
 

Problèmes défensifs

 
Si les attaques stéphanoises ont été plutôt basées sur du jeu en profondeur, regardons aussi leur défense lors des longues séquences de possession rennaise, avec un focus sur le milieu :
 
 
Le duo Camara-Youssouf (Camara-Neyou en 2MT) était en infériorité numérique contre le trio breton et n'a pas été aidé par d'autres coéquipiers. Dans cette exemple tout est bien en place, un bloc en 4-4-2, le premier rideau coupe les passes vers la sentinelle adverse et les deux autres milieux rennais sont pris. Mais quand il y a un défenseur central qui monte balle au pied, un déséquilibre est créé à la gauche de la défense :
 
 
Ni Hamouma, ni Nordin ne suivent, le ballon est envoyé dans le couloir, le latéral droit dédouble, mais l'ailier préfère jouer en arrière avec un milieu central...
 
 
... qui joue avec un autre. Maçon est au marquage du défenseur, Aouchiche a suivi l'ailier, Camara a pris un milieu, Youssouf est à côté d'un autre... mais le troisième milieu axial rennais n'a pas d'adversaire direct, Nordin étant loin. Camara monte sur lui...
 
 
... et Aouchiche sur l'autre, ce qui laisse Maçon seul contre deux adversaires. Heureusement, ils jouent en arrière avec leurs milieux :
 
 
Normalement ça laisse du temps aux Stéphanois de rééquilibrer le rapport des forces dans ce périmètre, mais Nordin reste loin de l'action. Pire, Camara, qui était à côté de l'ailier, ne le suit pas quand celui-ci fait un appel en profondeur :
 
 
C'est Maçon qui le fait, ce qui laisse le latéral adverse complètement libre, Aouchiche étant en train de défendre sur un milieu axial. Le centre est travaillé, mais la défense arrive à regagner la possession du ballon. 
 
Ce n'était qu'un exemple, mais ce genre d'action a souvent été proposé par Rennes : du jeu à 3 ou 4 dans les couloirs avec des milieux qui apportent le surnombre. Ce surnombre est inhérent aux confrontations entre deux systèmes différents, à deux contre trois milieux, mais normalement un des attaquants doit compenser - ça a rarement été le cas dans ce match. Et si le but du break peu après la pause n'a pas été issu d'une action construite, mais d'un pressing haut, il y avait le même déséquilibre, dans le même couloir, où deux Stéphanois ont dû défendre contre trois adversaires...
 

Problèmes offensifs

 
Malheureusement, ce n'est pas seulement défensivement que la différence en nombre, expérience et automatismes au milieu a été visible. Dans la construction du jeu aussi, comme dans cet exemple à la 71e minute : 
 
 
Neyou était entré à la place de Youssouf, Fofana en latéral droit et Krasso en avant-centre (Nordin passant ailier droit). Le bloc adverse est en place, avec une défense toujours très haute. Le ballon arrive à Kolo, Hamouma décroche mais n'est pas servi. Le défenseur stéphanois garde le ballon pendant 6 secondes (les deux captures d'écran sont faites juste avant et après). Pendant ce temps Nordin fait un appel en profondeur...
 
 
... mais il n'est pas servi. Ça fait reculer un peu la défense, mais tout le bloc suit, la distance entre les lignes reste faible. Kolo avait fait le choix de s'appuyer sur Camara, qui écarte de l'autre côté avec Moukoudi. Le défenseur garde le ballon pendant 8 secondes et c'est le même Camara qui se déplace pour lui offrir une possibilité de passe :
 
 
Pendant que le défenseur gardait le ballon, Nordin avait fait un autre appel en profondeur, toujours pas servi. Il n'y a pas de solution de passe à travers le bloc rennais, donc le ballon circule en dehors et arrive de nouveau à Kolo :
 
 
C'est Bouanga qui fait un appel en profondeur, pas servi. Hamouma essaye de se placer entre les lignes, mais les angles de passe sont coupés, pendant que Neyou est surveillé de près. Le ballon reste dans les pieds de Kolo pendant 6 secondes...
 
 
... et ensuite il y a un échange de passes avec Neyou, avant que Bouanga soit recherché haut dans le couloir. Sauf qu'il revenait d'une position de hors-jeu (son appel précédent) et le ballon sort en touche.
 
Certes, le bloc adverse a été très bien en place, haut et compact. Mais les Verts n'ont pas su mettre du rythme et le déséquilibrer autrement que de jouer dans son dos ou d'inviter les adversaires à un pressing haut, pour créer des espaces. Sauf qu'à 2-0 les Bretons n'avaient plus besoin de presser et les Stéphanois ont manqué cruellement d'idées.
 
 
Point positif du match, après Sidibé il y a une semaine, c'est encore un autre jeune issu du centre de formation qui a fait sa première apparition en pro, Tyrone Tormin :
 
 
 

Conclusions

 
On dit qu'il vaut mieux perdre une fois 3-0 que trois fois 1-0. Certes, les Verts ont connu leur premier revers de la saison, mais ils ont perdu contre plus fort qu'eux. Ils peuvent regretter les occasions non transformées en première période, quand les projections dans le dos de la défense adverse auraient mérité des meilleures conclusions. Les Rennais ont affiché un vrai bloc équipe, ils ont été capables de créer régulièrement des déséquilibres dans les couloirs, et les Stéphanois ont fini par craquer. Il y a plein d'enseignements tactiques à tirer de ce match pour les jeunes joueurs de l'ASSE - au staff stéphanois de bien les accompagner et de s'assurer qu'ils poursuivent ainsi leur apprentissage.