Ancien capitaine des Verts, ex-entraîneur de l'AJA et actuel entraîneur de Dieppe, Jean-Guy Wallemme nous présente Paul-Georges Ntep, qui devrait s'engager ce mercredi avec les Verts jusqu'à la fin de la saison après avoir passé avec succès sa visite médicale aujourd'hui.


Peux-tu nous rappeler à quand remonte ta collaboration avec Paul-Georges Ntep ?

J’ai entraîné Paul-Georges à l’AJA en 2012 pendant 9 mois, en L1 puis en L2. C’est un garçon né en 1992 que j’ai lancé en championnat chez les pros comme l’autre grand espoir du club à l’époque, Christopher Jullien, qui a un an de moins. J’ai vu d’ailleurs que Christopher, qui évolue désormais à Toulouse, a marqué un but refusé pour hors-jeu le week-end dernier à Saint-Etienne. Même s’ils ne jouent pas au même poste, ces deux garçons ont un autre point commun que leur période auxerroise : une expérience mitigée en Allemagne. A Fribourg pour Christopher, à Wolfsbourg pour Paul-Georges.

 

Quels souvenirs gardes-tu de Paul-Georges ?

Quand je l’ai entraîné, il avait à peine vingt ans. Mais même s’il était jeune, il avait déjà une mentalité beaucoup plus mature. De temps en temps il fallait le freiner car il avait parfois des comportements de quelqu’un de vraiment adulte. Il voulait s’imposer dans le groupe, il voulait se faire respecter. Sur le plan du jeu, c’est un bulldozer. Il a une puissance extraordinaire. Quand tu va le rencontrer, tu vas voir les cuisses qu’il a ! C’est impressionnant. Il a une puissance athlétique vraiment hors norme. C’est ce qui fait sa force : quand il pousse le ballon, il a une force de pénétration exceptionnelle. Il aime percuter, il provoque des fautes.

 

Tu le faisais jouer à quel poste ?

Je l’ai surtout utilisé côté gauche. Paul-Georges est un droitier mais il aime bien jouer sur la flanc gauche. Il aime bien rentrer sur son pied droit pour enrouler ou pour s’appuyer sur l’attaquant et finir parce qu’il a une très bonne frappe. A l’époque il y avait encore les relents du 4-3-3 à la Guy Roux avec des ailiers. Paul-Georges était vraiment un joueur de couloir. Après, il aimait prendre une certaine liberté sur toute l’attaque offensivement car il aime aussi créer et finir les actions. Au début il était un peu sectarisé dans le côté « je déborde, je centre ». Ça, il sait toujours faire, mais il a élargi sa palette, diversifié son jeu.

 

As-tu détecté des points à améliorer dans son jeu ?

Paul-Georges n’a pas de problème avec le ballon. Maintenant, il a une telle puissance que les joueurs adverses se mettaient parfois à deux ou trois sur son dos. Je lui disais : « tu sais, le jeu sans ballon est important, parfois tu ne vas pas recevoir le ballon mais tu rendras quand même service à l’équipe en mobilisant plusieurs adversaires. Tes appels vont bénéficier à toute l'équipe ». Il trouvait ça ingrat, il rechignait un peu car c’est un mangeur de ballons. Je lui ai dit que ses appels étaient tout sauf gratuits, en emmenant trois adversaires, les autres en profitaient. Quand de temps en temps Paul-Georges ne touchait plus trop le ballon, dès qu’il en avait un, il voulait absolument le garder ! (rires) Quand t’es un attaquant et que t’as de grosses qualités individuelles, l’altruisme n’est pas spontané. Mais avec la maturité et l’âge, tu peux progresser dans ce domaine. Il s'est amélioré à ce niveau-là.

 

Humainement, comment le décrirais-tu ?

Paul-Georges a du caractère. Pas un mauvais caractère mais je devais parfois le canaliser. Parfois il était à la limite de l’arrogance. Comme il a cette puissance et cette capacité à éliminer, il aimait bien casser les reins de ses adversaires. Et il leur montrait qu’il aimait bien ça ! Quand on est défenseur, on n’apprécie pas trop. Du coup il se faisait chatouiller de temps en temps, ce qui est normal. Il faut bien se faire respecter et contrer la force et la puissance qu’il a en lui. Le but qu’il a mis avec Rennes contre Reims, en se couchant pour mettre la tête, c’est du Paul-Georges ! Sa jeunesse et son insouciance peuvent être intéressantes sur le terrain mais ce geste a pu être compris comme un manque de respect ou de l’arrogance. Je ne suis pas sûr qu’il le referait aujourd’hui. Il y a toujours le fond et la forme. Sur le fond, Paul-Georges n’est pas un mauvais garçon.

 

Que t’inspire son parcours ? On a le sentiment qu’il n’a pas encore confirmé sur la durée tout son potentiel.

J’ai été un peu surpris qu’il ne reste pas un peu plus longtemps à Rennes. Mais c’est vrai que ce club se cherche depuis un moment, végète un peu. Apparemment il a eu du mal à tirer son épingle du jeu en Allemagne. Autant j’ai suivi avec attention son évolution à Rennes, autant je ne l’ai quasiment pas vu jouer à Wolfsbourg. Ce qui prédomine dans son parcours, c’est le manque de régularité et de constance. C’est peut-être dû à son jeu, à sa personnalité. Je pense qu’il a besoin de trouver plus de constance, c’est un vrai axe de progression pour lui. C’est un garçon qui compte deux sélections en équipe de France mais qui n’a pas encore réussi à faire décoller complètement sa carrière. Sa progression a sans doute été entravée par les quelques blessures musculaires qu’il a contractées à Rennes. Quand on est fait comme il est fait, la moindre petite déchirure peut avoir des conséquences.

 

Paul-Georges est-il armé mentalement pour s’imposer dans un club en délicate posture comme l’ASSE ?

Oui, je le crois, à double titre. Jean-Louis Gasset est quelqu’un d’assez malin et d’assez expérimenté pour trouver la bonne formule avec ce garçon-là. J’ai vraiment confiance en cet entraîneur-là, il saura lui donner les capacités d’être très efficace pour le groupe et pour lui. La deuxième chose, c’est que Paul-Georges va plaire au public stéphanois. Il fait la différence, c’est un joueur puissant, il ne rechigne pas à l’effort. Je pense qu’il va plaire au Chaudron. Les Verts ont besoin de ce genre de joueur pour faire mal aux défenses adverses. Pour moi, c’est une bonne pioche, il va apporter un vrai plus dans le secteur offensif stéphanois !

 

Merci à Jean-Guy pour sa disponibilité