Ancien joueur de l'ASSE, de l'OM et de Bastia, le directeur sportif du DFCO Sébastien Perez suivra avec intérêt les deux prochains matches des Verts. Entretien.


Sébastien, peux-tu nous parles des fonctions que tu exerces à Dijon ?

Je suis arrivé au DFCO, il y a à peu près deux ans de ça. J’ai pris mes fonctions en tant que directeur sportif au sein du club. Cela comprend non seulement le domaine professionnel mais aussi tout ce qui est formation, association et en relation avec l’administratif, et en perpétuelle relation avec les supporters et les spectateurs. Il y a beaucoup de choses à mettre en place, la plus belle a été le centre de formation qui a vu le jour cette année. On y a forcément travaillé largement et on a bâti notre centre de formation, ce qui est la base dans un club et notamment un club professionnel. 

Le DFCO s'est d'ailleurs illustré en remportant le dernière édition du tournoi international U19 de Saint Joseph !

Effectivement. C’est une fierté que, pour la première participation du DFCO, les garçons l’aient emporté, qui plus est puis de belle manière. Plus que le résultat, c’est surtout la manière que je retiens, que ce soit sur le terrain ou le comportement en dehors, puisqu’on y accorde aussi beaucoup d’importance.

La formation est capitale pour un club comme le tien qui ne roule pas sur l'or ?

C’est essentiel. Aujourd’hui, on est un club jeune, qui a grandit très rapidement puisqu’il a été fondé en 1998. C’est un club qui a eu la chance de gravir tous les échelons jusqu’au plus haut mais sans avoir orcément le réflexe de plus ou moins consolider le club. Aujourd’hui, l’objectif est donc d’asseoir une certaine stabilité au club et le centre de formation est essentiel dans le fonctionnement d’un club professionnel. On a la chance aussi d’avoir un bon staff, que ce soit professionnel ou aussi les éducateurs à l’association, qui sont non seulement compétents mais qui ne comptent pas leur temps de travail. Ce sont vraiment des passionnés à l’image de notre coach, qui vient aussi de la formation puisqu’il a été responsable du centre de formation à Nîmes. Dans notre réflexion, quand on a choisi Olivier Dall’Oglio, c’était vraiment essentiel à nos yeux qu’un club jeune se positionne comme un club formateur.

Quand tu es arrivé, Patrice Carteron était sur le banc dijonnais. Le climat était un peu tendu à l'époque avec cet autre ancien latéral des Verts, non ?

Moi je suis arrivé au moment où il y avait beaucoup de tensions au sein du club entre le coach et le président. Ma fonction première était surtout de travailler pour la saison qui arrivait et de mettre en œuvre justement la continuité, que ça soit en ligue 1 ou en ligue 2. J’ai plus été un spectateur qu’un acteur essentiel dans ces relations là. 

En Ligue 2, il est important que les jeunes éléments soient encadrés par des joueurs de métiers, d’expérience. Cédric Varrault - encore un ex latéral stéphanois ! - joue pleinement ce rôle ?

Cédric est un peu le grand frère du club, de l’équipe. C’est quelqu’un qui a une certaine expérience, que ce soit en ligue 1, ou à l’étranger aussi puisqu’il a fait quelques mois en Grèce. Avec le coach, après réflexion, il a été repositionné en défense central, par rapport justement à son expérience et au fait qu’il puisse encadrer des joueurs un peu plus jeunes. C’est un rôle qui lui sied à merveille et qui lui permet de se faire une deuxième jeunesse à ce poste la. C’est un bon mec, avant d’être un bon joueur. C’est surtout une bonne personne, qui est d’ailleurs capitaine de l’équipe.

Quelles sont les ambitions, les objectifs du DFCO ?

C'est d'être le plus performant possible. Le projet premier, si on a la chance de remonter en ligue 1, c’est d’y rester. Pour y rester, on se doit d’être performants non seulement dans les résultats mais aussi dans la formation. On en revient toujours au même thème. A partir du moment où on va avoir l’opportunité de monter, il faut y rester. Le plus dur ce n’est pas d’y monter, j’ai envie de dire, c’est d’y rester. Il y a beaucoup de clubs qui sont habitués à faire l’ascenseur. On n’a pas des finances qui nous permettent de recruter à tout va. Depuis deux ans, depuis ma prise de fonction, on n’a acheté aucun joueur. Tous les joueurs que l’on a recrutés, c’était des joueurs libres ou venant de division inférieure ou en prêt.

Est-ce que c’était lié à des contraintes budgétaires type DNCG ou c’était plus un choix ?

Oui oui c’était lié. Aujourd'hui, on doit être performant. C’est un peu notre marque de fabrique d’aller chercher des joueurs méconnus de tous comme vous avez cette année avec Benjamin Corgnet, des joueurs comme Bauthéac a Nice, des joueurs comme Guerbert qui est parti à Sochaux, comme Reynet à Lorient, aujourd'hui, des joueurs qui sont en pleine progression comme le petit Papou Paye.

Ce milieu défensif formé à Sainté, non conservé par l'ASSE à l'issue de son contrat stagiaire, a réussi à faire son trou à Dijon.

Oui, il le fait de belle manière. Encore une fois, c’est un joueur que l’on a vu, que l’on a fait venir à l’essai et sur des matchs de supervisons. Avec la cellule de recrutement, on a décidé de le faire venir, puis il a montré son envie, son application et puis toute sa fraîcheur. Il s’est imposé naturellement alors qu’il y avait, sur un poste de latéral droit, de la concurrence avec un joueur comme Bamba qui vient lui aussi du centre de formation de la Juve. Papou s'est fait sa place et aujourd’hui il fait le bonheur du club. Nous l’avons recruté en tant que milieu défensif, et puis on a eu une pénurie au poste de latéral. oN l’avait déjà testé plusieurs fois à l’entrainement sur le côté car pour moi il avait les qualités pour. En tant qu’ancien latéral moi-même et comme notre coach était aussi latéral, on arrive à détecter les joueurs avec les qualités requises, et lui les avait toutes, et il l’a démontré.

Lors du dernier mercato estival, avez-vous eu un intérêt pour des joueurs stéphanois, y a-t-il eu des contacts entre les deux clubs ?

Oui, des contacts il y en a entre les deux clubs, parce que le président Romeyer est quelqu’un que je connais bien. A l’époque il était au club quand je jouais avec la réserve et il nous suivait ardemment. C’est quelqu’un que j’apprécie énormément. Après aujourd’hui on ne peut pas se permettre financièrement de faire venir des joueurs de Ligue 1, mis à part des jeunes joueurs en manque de temps de jeu, mais on n’a pas repéré de joueurs comme ça. Le seul profil où l’on était attentif c’était Nicolita, mais forcément c’est un joueur qui a beaucoup de qualités donc on n’était pas les seuls à le suivre.

Tu évoquais tout à l’heure Benjamin Corgnet, un joueur au profil un petit peu atypique. Selon toi, quelles sont ses principales qualités ?

Son principal atout est son intelligence dans les déplacements, ce qui fait qu’il est toujours dans l’interligne. Et aujourd’hui Galette a bien vu qu’en neuf et demi, c’était la où il était le plus performant. Il a un jeu de tête, contrairement à ce que l’on peut penser, qui est très intéressant, C’est un playmaker, un jouer qui fait briller les autres, donc plus il est près de la cage, et plus il peut être performant dans la dernière passe, sans oublier ses qualités de finisseur comme on a pu le voir lors des derniers matchs.

Galette l'a d'abord aligné sur les côtés et ça n’a pas été très concluant. Depuis, Benj a été repositionné et il a été très performant, notamment contre Bordeaux et Valenciennes. Néanmoins, on l’a senti un petit peu moins bien lors de la dernière journée. Est-ce un garçon qui arrive à répéter les efforts ?

Oui, c’est une de ses qualités également, après il y a aussi le fait d’être un peu moins bien physiquement. Mais c’est quelqu’un qui répète les efforts normalement. Après il a aussi la qualité d’être le premier déclencheur du pressing, il arrive à bien sentir le bon moment pour déclencher, donc l’intérêt c’est aussi qu’il amène ses partenaires à jouer beaucoup plus haut quand il est sur le terrain.

Est-ce que tu penses que malgré tout il a encore quelques lacunes, une marge de progression, étant donné qu’il n’est pas issu d’un centre de formation ?

Chaque année il progresse, c’est quelqu’un qui est très à l’écoute, donc je pense qu’à Saint Etienne il va passer un cap avec ce coach.

On loue souvent Galette pour ses qualités de communicant, mais que penses-tu de Galette en tant que technicien ?

La réponse, il l’a faite de part ses résultats depuis qu’il est à Sainté. On lui a laissé le temps de mettre en place sa vision du football. C’est quelqu’un qui a eu l’intelligence de construire un groupe, et je pense qu’aujourd’hui le groupe est à son image. C’est un groupe qui est valeureux, qui a des principes, et surtout de la qualité. Je pense qu’il n’y a pas un joueur qui n’adhère pas à son discours, et ça c’est une très grosse qualité. Et ce n’est pas évident, car on sait que dans un groupe il n’y a que onze joueurs sur le terrain.

Ces bons résultats ont été concrétisés par cette Coupe de la Ligue que tout le peuple vert attendait depuis longtemps, comment as-tu vécu cet événement ?

J’étais dans les tribunes. On ne peut pas le retranscrire, l’émotion à la fin du match, quand on connait le peuple vert, c’est de penser à tous ces supporters qui ont attendus un nombre incalculable d’années pour voir leur équipe brandir un trophée.

Penses tu que Sainté cette année est mieux armée que la saison passée ?

Les Verts sont comme le vin, ils se bonifient d’année en année. Maintenant que je suis en Bourgogne, je commence à bien connaître le vin. Le fait d’avoir des dirigeants du cru c’est très important. Ça permet de garder les valeurs et de pouvoir les construire au jour le jour et de les entretenir. 

Tu parles de vin, on a quand même perdu deux très grand millésimes, des crus classés, avec Aubameyang et Guilavogui. Penses-tu que malgré leur départ le groupe est encore plus compétitif que la saison dernière ?

La qualité, c’est de savoir vendre le vin au bon moment. Même s'ils étaient de grands cru, malheureusement c’est le lot de toute équipe à part les grandes de ce monde. On est obligé d’avoir un voire deux coups d’avance parce que l’on sait que l’on peut perdre ces joueurs la. Après ils ont été remplacés, ce sont des joueurs qu’on ne peux pas comparer car ils ont des qualités différentes, mais je pense que la réflexion derrière était de construire le groupe.

Les Verts n’ont plus gagné au Vélodrome depuis 1979, est-ce qu’ils vont créer l’exploit ce mardi soir ?

Ils ont les qualités pour s’imposer à Marseille, en ce moment l’OM va un peu cahin-caha. Les Verts ont les qualités pour s’imposer n’importe où. On l’a vu l’année passée contre Paris notamment. A partir du moment où cette équipe a des valeurs, elle peut s’imposer n’importe où.

Est-ce que tu vois les Verts finir devant Marseille en fin de saison ?

Je pense qu’au niveau effectif, Marseille est plus imposant. Surtout du point de vue de l’expérience du haut niveau. Il y a aussi un bon recrutement qui a été fait. L’effectif étant vieillissant, ils ont pris de jeunes joueurs, notamment Imbula, Payet, Thauvin. Je aussi à Mendy sur le côté gauche, pour moi c'est un gros profil. Quand ils vont être en pleine bourre, ils vont être difficile à bouger.

Cette équipe est entraînée par Elie Baup, que tu as connu à Sainté. Quels souvenirs gardes-tu de lui ? Es-tu surpris de sa réussite à l’OM ?

Là encore c’est le relationnel qui est important dans un groupe, je pense qu’il a pris énormément d’expérience. Il ne faut pas oublier que quand il a pris le groupe à Saint Etienne, c’était un jeune entraîneur, on a eu l’occasion d’en discuter. Je pense qu'aujourd’hui il ne ferait peut-être pas les choses qu’il a faites à l’époque parce que cela s’appelle l’expérience. Entretemps il a été champion de France, il a vécu les belles années bordelaises, donc il a un certain vécu avec la crédibilité pour mener un groupe comme l’OM.

Il a souvent du mal à confirmer la deuxième année saison : on l’a vu lors de ses deux périodes stéphanoises, mais également à Toulouse. Est-ce que tu t'attends à ce qu'il vive une saison compliqué avec l’OM ?

L’année passée on n'attendait pas les Marseillais, donc forcément quand on n’est pas attendu, on n’a plus ou moins rien à perdre. La deuxième année, ce n’est pas uniquement le coach, un joueur qui fait une super première saison, l’année d’après il va falloir qu’il justifie sa bonne année. Le plus dur ce n’est pas d’y arriver, c’est de s’y maintenir, tant au niveau des entraîneurs que des joueurs.

Ce match permettra d’en savoir un peu plus sur le potentiel de Sainté cette saison, il y aura aussi dans la foulée la réception de Bastia, un club que tu as bien connu aussi pour y avoir joué deux saisons.

Bastia, ça reste de très bons souvenirs, comm Sainté. Ça a été une aventure humaine. Je suis arrivé sur la deuxième année de L1 du club, et au bout de la première année on est qualifié en Intertoto, et la deuxième année on gagne l’Intertoto et on participe à la Coupe d’Europe. On avait des joueurs pas forcément connus et reconnus à part Lubo, c’était lui qui était l’artiste du groupe. Mais il y avait d'autres anciens Verts, il y avait Pat Moreau, Piotr Swierzescki. On était pas mal de stéphanois à avoir pris le chemin de l’Ile de beauté, et puis ça a fonctionné avec un coach que vous avez connu par la suite à Sainté. La sauce a pris instantanément, il y avait plus que des individualités, c’était surtout un groupe. Fred Antonetti, c’était un entraîneur entier et on a vécu des supers moments mais quand il fallait se dire les choses on se les disait. Ça restait entre quatre murs, on fermait les portes et voilà… Ça c’était beaucoup respecté au niveau des joueurs

Ta première saison bastiaise, t'as claqué sept pions. Pas mal pour un défenseur !

J’ai eu l’opportunité de jouer à plusieurs postes dans ma carrière. J’ai fait tous les postes de la défense, milieu def, j’ai joué milieu offensif sur les côtés. En Angleterre, à Blackburn, j’ai même joué attaquant ! J'avais le sens de l’anticipation, je savais quand m’insérer à bon escient, surtout sur les coups de pieds arrêtés. J'’avais parfois la chance d’être à la tombée du ballon.

Es-tu content de voir Bastia faire un bon début de saison ? Cette équipe peut jouer les outsiders cette saison et créer des problèmes à Sainté samedi ?

Oui, Bastia a une équipe intéressante et puis y’a un sacré stade là-bas aussi, j’ai eu la chance d’y aller il y a une dizaine de jours. De voir Furiani avec deux grandes tribunes, deux virages on devine l’ambiance qu’il doit y avoir le soir des matchs du Sporting, c’est un atout supplémentaire.

Y’aura aussi une sacrée ambiance samedi soir à Geoffroy-Guichard pour la réception des Bastiais !

Oui, j'ai vu que le kop sud devait rouvrir à cette occasion, ça promet une belle fête !

Tu as bien connu les publics stéphanois, bastiais et marseillais. Qu’est-ce qui les caractérise et les différencie ?

Je fais l’amalgame car ce sont des passionnés, ce qui fait que chaque joueur a envie de se transcender et de jouer dans des stades comme ceux la. Avec des gens qui sont à fond derrière leur club. Quand on a la chance de vivre des émotions comme celles la que ce soit à Marseille à Saint Etienne ou à Bastia... Ce ne sont que des supers souvenirs. entrer dans des stades pleins avec des ambiances de fou ! Voila, y’a des joueurs que ça bloque et des joueurs que ça transcende. Moi j’avais la chance d’être transcendé à chaque match.

Le douzième homme joue-t-il un si grand rôle ? Les clubs turcs et grecs se prennent parfois des tôles à domicile en Ligue des Champions. pourtant les ambiances sont survoltées, tu es bien placé pour le savoir car tu as joué à Galatasaray.

Tu l’as dit, ce sont des matchs de Champion’s League, c’est carrément différent, tu joues des équipes qui ont non seulement des individualités mais aussi un collectif, une expérience. Tandis qu’en Ligue 1 tu joues la plupart du temps des équipes qui n’ont pas un niveau de Champion’s League ou quand elles ont le niveau, elles sortent d’un match de Champion’s League donc quand tu mets de l’ambiance et de la pression surtout que tu es à la maison, c’est beaucoup plus dur pour l’adversaire.

Tu n'as pas cité de points de différenciation entre les publics de GG, du Vélodrome et de Furiani.

Non, c’est l’ambiance plus sudiste ou plus familiale qui fait la différence mais la ferveur, c’est la même. J’ai eu la chance de faire pas mal de matches dans chacun des clubs cités et j’ai eu la chance de marquer dans ces stades là et c’est ouf !

T'as aussi eu la chance ou plutôt le malchance d’en prendre des belles dans le Chaudron. Alex forever !

Oui c'est vrai ! Ah, Alex... A chaque fois tu me reparles de ça, tu vas finir par m’irriter ! (rires) Oui je m’en souviens en plus c’était mon premier retour à Geoffroy… C’est aussi dans des moments comme ça que tu remets les pieds sur terre. Faut continuer à travailler, y’a rien d’arrivé.

Lors du dernier Sainté-Toulouse, l'arbitre n'a donné que deux minutes de temps additionnel alors que les Verts étaient menés et qu'il y avait eu beaucoup de changements. Penses-tu que l'arbitre donnera aussi peu d'arrêts de jeu si l'OM se retrouve mené au Vélodrome ? On a encore tous en travers de la gorge un but marqué par Koké à la 96ème...

Ah ça, c’est un domaine que l’on ne maîtrise pas...

Pour finir Sébastien, un petit pronostic pour les deux matches de la semaine ?

Non, non pas de pronostics… Je suis directeur sportif, je ne peux pas faire de pronostics. C’est interdit, c’est interdit. On ne peut plus faire de pronostics, on est condamné au silence (rires).

 

Merci aux potonautes sisse11, Ulysse42 et ale42 pour la retranscription de cet entretien.