... vers d'autres horizons.

Coup bas. Coup tordu. Coup de Trafalgar. D’où sévère coup de blues après la sortie de route Danoise.
Bref, coup de gueule.


Rappelez vous : « L'ASSE réaffirme ainsi sa volonté de placer la formation au centre de son projet sportif ».
Ne riez pas. C’est ce qu’on a tous lu le 1er juillet sur le site officiel. Cette auto-célébration coutumière du club nous a été resservie à l’occasion de la signature du premier contrat Pro de Saint-Maximin.
Nos dirigeants aimant le comique de répétition, ils ont donc récidivé mi-août au moment de la prolongation de Jessy Moulin : « Cette prolongation de contrat est une nouvelle preuve de la volonté du club de promouvoir la formation et de s’inscrire dans la continuité. »

L’affaire Ghoulam, puis le départ précipité de Guil' décrivent une réalité nettement plus contrastée (doux euphémisme). Celle d’un club plaçant la formation au centre de son projet économique avant tout.
Rappel des faits : après Benalouane (parti à 23 ans après 65 matchs en Ligue 1 en Vert), après Rivière (parti à 21 ans après 73 matchs), après Nery (parti à 21 ans après 23 matchs), Faouzi Ghoulam (22 ans, 70 matchs), à une garantie bancaire près, aurait dû être le suivant.
Mais si Roro a dit no au Torino, il a dit banco à l’Atletico (oui, sans h, comme hérésie, hébétude, habitude…). Et c’est finalement Jos' (22 ans, 86 matchs) qui s’y est collé ajoutant un nouveau nom à la liste des espoirs formés à Sainté et nous quittant sans avoir réellement construit une histoire avec leur club formateur.

Ça vous ennuie ? Ça ne devrait pas. C’est pas moi qui le dis, c’est Roro qui l’affirme dans Le Progrès, le 5 septembre : « Ce départ arrange tout le monde ». Rires. Nerveux. Car cette affirmation est un non-sens, qui, s’il n’était pas pathétique, aurait pu nous faire sourire en repensant aux belles saillies drôlatiques de jadis (l'éternel sketch « ferme et irrévocable » repris récemment avec succès dans un spectacle à Lille par le comique Michel Seydoux).

Ça arrangerait donc tout le monde ? Passons en revue ce fameux « tout le monde »

 

 

Ça arrange Joss' ?


En mai dernier le Guil avait déclaré sur RMC : "Oui, je reste à Saint Etienne l’année prochaine. J’ai un contrat jusqu’en 2016. C’est avec ce club que j’ai intégré le groupe France. En plus, l’année prochaine, il y a la Coupe du monde au Brésil".
En août dernier, au moment du match de l’EDF contre la Belgique, il surenchérit en employant le mot « évidence » à propos de son choix de rester à Sainté à un an de la coupe du monde. Partir à l’Atletico, club historique et de haut de tableau du championnat d’Espagne, où les milieux défensifs sont soit internationaux espagnols soit très bien installés dans l’équipe constitue pourtant clairement un gros risque. Non seulement le Guil', une fois leur suspension passée, va voir avec les retours de Matuidi, Pogba et Cabaye, la concurrence s’intensifier chez les Bleus. Mais il court le risque ne pas jouer à Madrid. Les deux facteurs cumulés rendent bien incertaine sa présence au Brésil (si tant est qu’on y aille bien entendu…).

 

Ça arrange Galette ?


Ce même Guil' précisera dans la Pravda en août : « le coach et le président ont été clairs avec moi : ils ne voulaient pas me laisser partir. » Pas fou Galette, qui sait parfaitement que le Guil', qui a participé à tous les matchs de championnat la saison dernière, a pris une envergure nouvelle au milieu de terrain. Nouvelle et double. Au moment de la blessure de Clément, il était dans une forme exceptionnelle dans son rôle de relayeur au sein du milieu en triangle inversé. Ses trois buts en championnat et son doublé à Caen en Coupe démontraient un apport offensif prometteur qu’illustrait parfaitement en fin de championnat sa belle percée contre Bordeaux suivi de la frappe terrible brillamment détournée par Carasso.
Sortant de ce rôle, le Guil' avait su progressivement, après la blessure de Clément s’imposer et séduire dans un autre registre, celui de sentinelle du milieu de terrain.
Cette double compétence, ce double registre et la marge de progression du joueur ne faisaient elles pas de Guilavogui le plus précieux des quatre milieux utilisés par Galtier l’an dernier ?
Et comment douter que son départ constitue d’abord une réelle perte sportive pour un groupe qui a perdu non pas un -comme promis en juin dernier- mais deux de ses piliers ?

 

Ça nous arrange ?


Nous le fameux peuple vert. Celui qui aime à penser que son club est à part. Celui qui entend souvent ses dirigeants louer les valeurs spécifiques du club, les valeurs humaines, pas celles de l’argent dixit Caïazzo récemment. Attaché aux valeurs humaines, le peuple vert est logiquement attaché aux hommes qui les incarnent le mieux. Et le Guil' en faisait clairement partie. A la fois humble dans son discours, il était aussi rafraîchissant par son envie, sa joie palpable de participer à l’aventure de ce groupe. Voir un joueur formé à Sainté, grandir chez nous, percer en EDF tout en affichant de telles valeurs constituait un véritable miracle. Un rêve éveillé. Un aboutissement. Le graal du supporter. Une forme de réconciliation avec le foot qu’on aime et qui s’éloigne inexorablement.
Son départ, plus qu’une perte symbolique, est un déchirement.

 

Si, en cherchant bien … Ça doit arranger notre Directeur Financier


Romeyer dans la même interview au Progrès le 5 septembre lâche le morceau en déclarant que « ce sont les actionnaires qui ont pris la décision » puis quelques lignes plus tard, sans vergogne oser affirmer que « c’est le sportif qui gère les transferts qui dit on compte sur untel ou untel… ».
La contradiction insupportable une fois digérée (si ça ne passe toujours pas, vous pouvez toujours essayer de vous consoler en vous rappelant qu’on s’est à peu près remis du départ de Gomis chez l’ennemi, trahison bien supérieure…) tentons pour chasser le dépit de nous raisonner un peu. Comment ? En considérant, qu’il en est du football comme de la politique, que la realpolitik y est parfois un mal nécessaire. Pensons par exemple aux clubs que nous ne nommerons pas (car certains sont innomables) qui ont grandi en moneyant au prix fort leurs jeunes talents.
Grandir ? Vendre nos meilleurs joueurs aussi vite serait le passage obligé pour grandir ? Aubame, comme le Guil' ont joué deux saisons pleines avant de partir. En 2011, quand Payet et Matuidi, autres joueurs piliers de l’équipe, nous ont quitté, c’était après quatre saisons pleines à Sainté. Notre capacité moindre à conserver dans le temps nos meilleurs joueurs n’est-elle pas la preuve plutôt d’une incapacité à avancer sportivement ?
La vente de nos bijoux de famille, comme levier incontournable de la progression du club, cela reste donc discutable.
Mais admettons. Et acceptons –de mauvaise grâce et sans entrain- que ce modèle a payé chez nos vilains voisins. Modèle dont on aura au moins su s’affranchir en ne construisant pas, nous, un immonde ASSE land, et en préservant notre historique Chaudron. Les joueurs passent, le stade, valeur refuge, reste. Ouf.

Les mauvaises langues diront qu’agrandir GG pour faire grandir le club n’était pas le choix de nos dirigeants, qui en la matière aussi, avaient la douteuse tentation d’imiter nos vilains voisins. Valeurs humaines qu’on vous dit …

 

 Parasar