La force décuplée des perdants. Il y avait un peu de ça ce dimanche après-midi.


Un peu de cela qui s’exprimait dans l’extase des joueurs à la 89ème, dans la joie mal contenue de spectateurs venus au cochonou stadium comme à un rendez-vous de résistants en plein Paris occupé.

Un peu d’un cauchemar finissant aussi. Un peu de l’église remise au centre du village. Oui, le précédent derby était un accident. Une terrible, immonde et hélas inoubliable parenthèse. Mais une parenthèse. Dans un océan de derbies accrochés, serrés, disputés, comme toujours. Dans cet océan de derbies où, depuis 2010, l’honneur est toujours sauf, ce putain de match de l’automne restera heureusement comme une sale parenthèse.
Dès lors que l’écart sportif est réduit entre les deux équipes, dès lors qu’un staff comprend l’essence du derby et les leviers qui permettent de l’aborder de la meilleure façon, alors les ingrédients sont réunis au moins pour qu’il y ait match, et plus si t’as fini le thé.

Il y a eu match. Il y a eu ce bonheur disproportionné venu d’une égalisation tardive, une douce revanche non pas sur l’aller, mais sur ces terribles et cruels précédents où nous étions la victime éplorée du fameux money time. Money changes everythting chantait Cyndi Lauper à l’époque où je tentais vainement d’égayer un échange scolaire en émoustillant la Teutonne.
Malgré son prénom de shampouineuse, elle avait raison, Cyndi.
Ce money time a tout changé. Il nous a, en une reprise comme une caresse, fait basculer de la frustration éternelle à la jouissance totale. Un déclic manaresque en somme.
L’argent, celui que Roro et Bozzo ont lâché cet hiver, a aussi fait la différence. M’Vila et Debuch notamment en sont la parfaite démonstration.
Y a l’argent. Et y a l’esprit aussi. Celui de joueurs combattant jusqu’à la délivrance. Celui que traduisait si joliment l’extase collective de l’empilement vert au poteau de corner.
Il y a avait bien eu aussi, quelques secondes auparavant la tentation de la réponse du berger à la bergère, mais question bonne éducation, nous remportons le derby haut la main, comme toujours. Alors Debuch’ a esquissé le geste, puis s’est ravisé. Pas de maillot brandi, pas de volonté d’humilier, non, mais qu’importe, le bonheur est là et l’ivresse décime tout Décines.

Pas de limite à la célébration collective. Car le front est levé, car l’affront est lavé.
Et cette envie, perdue depuis quelques mois, d’aimer notre équipe enfin fait son retour. Le retour des bons footeux doublés de bon mecs (Debuch’), le retour de la joie de jouer et la banane contagieuse (Cabella, Beric, Diousse), le retour de nos éternels (Ruff’, Dieu) mais aussi de ceux, qui au-delà des avanies récentes, au-delà des saisons plus décevantes, restent de magnifiques traits d’union entre les bonheurs passés et la nouvelle ère qui s’annonce (KMP, Hamouma).

Car au bout du bout d’une soirée qui, même sans victoire nous a rendu l’honneur et réconcilié avec les Verts, revient très vite, au-delà de la chimérique perspective européenne en mai, la question de demain.
Par la grâce d’un mercato quasi parfait tant dans le renforcement de l’effectif que dans son « nettoyage » la recette des bonheurs futurs semble assez claire. C’est déjà ça. Car tout le reste est flou, et le chantier immense.

Il serait bien que nos dirigeants ne profitent pas de la léthargie post-coïtale pour abandonner toute idée d’évolution du modèle économique du club.


Money changes everything.... Alors au boulot !