AR75 ASSE 3-0 OL
Vingt ans après, et sur le même score : un match symbole, dont la dramaturgie particulièrement jouissive restera dans les annales.
Celui-là, on s'en souviendra. Pour ce qui est de l'analyse purement tactique, les Chroniques éponymes se sont déjà chargées du boulot - à lire ici. Nous allons donc nous contenter d'un résumé de la dynamique du match, agrémenté d'une mise en perspective avec le derby victorieux et printanier à Gerland : il semble bien que Galette tire des leçons de ses expérimentations.
L'exorcisme
Pour ceux qui n'auraient pas encore eu le bonheur de voir cette prestation aboutie : la première période est comme la marée. Le flux vert monte progressivement, étouffe les lyonnais, leur met un poteau (Ricky, 12') et un but (Sall, 18', belle course croisée avec Perrin pour se démarquer) - c'est là son apogée. Le reflux s'amorce rapidement et le creux est terrible.
Entre la 24' et la 30', Lyon assiège la surface stéphanoise. Les coups de pieds arrêtés se multiplient, Ruffier est décisif face au meilleur vilain du soir (Fékir, 25'), et le Chaudron tremble. Qu'il se rassure : la marée remonte bien vite, l'ASSE veut faire la différence et y arrive sur une action directe et lumineuse côté gauche, le côté où elle s'est le plus acharnée jusqu'alors (40').
Après la pause, on craint le pire : Sall fait sa boulette syndicale, mais Lacazette exploite mal le cadeau (46'). Les ligériens réalisent pourtant une entame très convaincante dans le jeu, ponctuée d'une barre (Perrin, 48'), d'un duel Tabanou/Lopes perdu (54') et d'opportunités de contres pas très bien gérées, la meilleure aboutissant à une frappe lourde de Gradel difficilement repoussée (62').
Il n'est pas rare qu'au cœur de la seconde période, au moment des premiers changements, un match perde en rythme - le calme avant la tempête finale pour forcer le destin, en somme. A la 68', en plein dans une période de ce type, Tolisso perd le ballon bêtement devant Cohade qui se le fait vite chiper par Jallet ; Jallet rend le ballon à Tolisso qui rend hommage à Nakata ; Cohade qui furetait marque.
3-0, la tête dans le seau. Mais il était écrit que les Vilains boiraient l'huile bouillante de la friteuse jusqu'à la lie. Profitant d'un certain relâchement défensif vert, Lacazette rate deux énormes occasions de sauver l'honneur (78' le péno, et 86' le poteau). Pire : à partir de la 87', les Verts enchaînent environ 40 passes scandées des "Olé !" du Chaudron. Rien à dire, dimanche, les plus forts, c'étaient les Verts.
La montée en puissance du 352
L'un des faits déterminants du match, est bien entendu le choix de Galette de reconduire le même 3-5-2 que lors du derby du printemps. Le même, vous en êtes si sûrs ?
Pour commencer, replongez-vous rapidement dans le résumé de l'époque, et notamment la troisième partie, la plus intéressante.
Que remarque-t-on ?
1- Le pressing, dimanche, a beaucoup plus insisté sur la neutralisation de la sentinelle adverse. Hormis quelques minutes lors des temps faibles stéphanois, Gonalons n'a jamais eu le champ libre pour orienter le jeu lyonnais, soit qu'un des attaquants rôde dans sa zone, soit qu'un milieu sorte pour le gêner. Sans plaque tournante, les banlieusards ont tout de suite eu beaucoup plus de mal à poser le jeu.
2- Le duo Ricky/Gradel n'a rien à voir avec le duo Brandao/Erding. Pas de longue balle aérienne pour disputer les seconds ballons : Gradel a endossé avec un brio éblouissant le rôle de meneur du jeu stéphanois. Très libre dans ses mouvements, il a su répondre au défi physique lyonnais, être à la réception des relances, distribuer le jeu et faire la différence par ses passes ou ses exploits personnels. En décrochage ou sur les côtés, il a opéré ce liant défense-attaque largement absent à Gerland.
3- Le poids dans l'axe : même si ce fut moins vrai en seconde période où il fallait suppléer Gradel qui commençait à tirer la langue, Ricky avait pour mission d'occuper l'axe comme un avant-centre à l'ancienne (un but un poteau, bilan pas dégueu) mais aussi de gêner la relance, ce qu'il fit avec générosité. Mais surtout d'autres joueurs sont venus régulièrement apporter du nombre dans l'axe : les projections des milieux, bien sûr, mais aussi le latéral opposé. Quand Tabanou, par exemple, s'apprêtait à centrer, vous pouviez être sûrs que Théophile-Catherine avait repiqué dans la surface pour être à la réception du centre.
On le voit donc : le 352, pari fou du printemps, catastrophique au Parc, utile d'abord défensivement contre Karabükspor et l'Inter, a acquis dimanche une dimension offensive qu'on ne lui soupçonnait pas encore. Certes, sans un Gradel aussi impressionnant, le résultat aurait été tout autre ; mais l'alternative gagne en crédibilité.