Belle victoire, rassurante et porteuse d’espoir. Pourtant, on évitera encore de parler de match référence…


Contrairement à son prédécesseur, René Girard n’est pas homme à réserver des surprises à son adversaire. Le système est immuable, le 11 de départ est connu, la hiérarchie des remplaçants de même. Sidibé pour Béria, Rozenhal pour Basa, Rodelin pour Martin : les programmeurs de Football Manager ne vont pas avoir beaucoup de mal à encoder le comportement du LOSC. En face, Christophe Galtier choisit de revenir au 4-3-3, pour la première fois depuis la déroute à Rennes, le 4 décembre dernier.

Image

Rien qu’à voir les compositions ci-dessus, on devine ce qui sera la principale caractéristique du match : l’embouteillage de l’axe. Lille ne joue en effet qu’avec deux seuls joueurs de couloir : les latéraux. Bien sûr, les attaquants (incluant Rodelin, qui dans le jeu est plus un troisième joueur offensif mobile verticalement que la pointe avancée d’un losange médian) vont parfois chercher la largeur ; mais globalement, Kalou, Roux et Rodelin restent dans une zone très resserrée. Si on ajoute qu’en face, Hamouma a une forte tendance à faire des appels vers l’axe…


Ca bouchonne dans l'axe

Face à ce blocage, les deux équipes vont tenter des solutions différentes. Sainté, d’abord, n’abandonne pas totalement l’axe : Brandao est très souvent cherché en fixation, pour des combinaisons rapides avec Hamouma et Cohade qui doivent ensuite organiser l’attaque. Alternative : on travaille côté gauche (avec Tabanou et Ghoulam en mangeurs de ligne), en essayant de faire craquer de ce côté-là, ou de faire déserter le côté droit par les lillois afin de les piéger par un renversement rapide. Rien ne marche vraiment : si les stéphanois sont efficaces pour s’extirper du haut pressing nordiste (l’apport de Clément en sentinelle est décisif), l’utilisation offensive de la balle est moins rayonnante. On aperçoit bien une frappe de Lemoine à côté (21’) après que Brandao ait assuré le boulot dos au but et un centre à ras de terre de Tabanou consécutif à une récupération haute de Cohade (32’), mais c’est maigre.

Pourtant, une combinaison de la 26’ a montré une voie efficace pour désengorger l’axe : Hamouma repique dans la zone de Mavuba, sentinelle, avant de faire un appel tranché sur le côté. Mavuba anticipe, et est aspiré : dans le même temps, Brandao décroche pour prendre l’espace libéré par Mavuba plein axe et est servi sans marquage. L’action se développe facilement, le décalage est créé, mais Tabanou envoie son centre dans le kop nord… Ce qui met en évidence un autre problème : les imprécisions techniques. Les Verts vont régulièrement, au cours de cette première période, envoyer le ballon en touche sans pression lilloise particulière, et même concéder deux corners largement évitables à cause d’interventions non maîtrisées de Clément et de Bayal.


Le LOSC, candidat au Tournoi des Six Nations ?

En face, les Dogues sont tout sauf étincelants. Les résumés montrent à l’envi les deux coups de pieds arrêtés de la 2è et de la 8è, ce dernier obligeant Ruffier à sortir le grand jeu devant Kalou. Mais au-delà de ça… C’est certes très solide, mais c’est soporifique. Les Lillois s’en remettent à des duels répétés sur les côtés pour espérer progresser sur le terrain, mètre par mètre, en attendant le corner (6 lors des 37 premières minutes !). De temps en temps, une longue ouverture axiale varie quelque peu le jeu nordiste, qui relève alors du kick and rush. En un mot comme en cent : le jeu de Lille ressemble à du rugby ! Le terrain peut-il vraiment suffire à expliquer cela ?

La pause est sifflée, alors que les Verts réussissent leur première action collective aboutie (45’, frappe de Cohade facilement bloquée par Enyeama). Après le quart d’heure de repos, les choses reprennent comme auparavant. Ceux qui se souviennent de l’aller doivent alors désespérer : ce match bloqué va encore se jouer sur un coup du sort. Certes, Sainté joue bien mieux qu’en août dernier (il faut dire que cette fois, il y a un vrai pivot performant sur la pelouse, en la personne de Brandao), mais en face, il n’y a pas d’espace.

Pire : Lille semble plus à l’aise. A la 53’, Perrin sort aventureusement pour suivre Rodelin : Kalou sent le coup, est servi dans l’espace libéré, et contraint Bayal à la faute. Le coup-franc est dangereux ; malgré un dégagement difficile, les Verts ouvrent le score sur le contre. La domination lilloise s’amplifie alors : la situation arrêtée de la 58’ est particulièrement tendue. Pourtant, c’est Sainté qui prend l'ascendant pour de bon à la 61’ avec le second but. Au passage, Balmont, très énervé depuis le début de match, se fait expulser pour avoir été trop véhément envers l’arbitre, persuadé qu’il est que Tabanou a fait faute sur le but.


On le tue, ce match, ou pas ?

Autant dire qu’à l’orée de la dernière demi-heure, le match change d’âme et s’endort pour quinze bonnes minutes. D’un côté, Lille ne veut pas exploser en vol : on cherche à tenir intelligemment le ballon en 4-4-1 – Delaplace remplace Kalou, et Rodelin recule d’un cran pour former une ligne (de droite à gauche) Delaplace – Mavuba – Rodelin – Gueye. En face, Sainté décide de gérer tranquillement. Rassuré de voir le match équilibré à 10 contre 11, René Girard fait un choix audacieux à la 76' : Rodelin sort pour Origi, et Lille va finir la rencontre en 4-3-2. L’effet immédiat est plutôt contre-productif : Hamouma, très remuant dans les dernières minutes, sert sur un plateau le doublé à Tabanou, qui manque sa frappe (79’). Pourtant, Lille y croit, et à raison : la défense verte n’est pas si sereine. A la 86’, Sall se troue : Ryan Mendes (qui vient d’entrer en jeu) a la balle du 2-1 au bout du pied, mais Ruffier est impeccable.

La toute fin de match sera marquée par l’entrée de Zouma…au milieu de terrain. Et en piston, s’il vous plaît, pas en sentinelle ! Ces 4 ou 5 minutes-là sont un peu courtes pour tirer la moindre conclusion. On se contentera donc d’une considération plus générale : le podium est à portée de points !


Les buts

55’ 1-0 Brandao
Les Verts peinent à se dégager suite à un coup-franc très dangereux obtenu par Salomon Kalou. Un renvoi au petit bonheur est gratté par Brandao, serré de près par un adversaire : le brésilien résiste à la pression, conserve le ballon ce qu’il faut pour que ses coéquipiers sortent, et la donne proprement à Perrin qui peut changer de côté. La remontée de balle est limpide : Ghoulam et Lemoine réalisent une sorte de une-deux à retardement. A 25/30m, le long de la ligne, l’international algérien déclenche un centre, de ceux, vicieux, qu’un genou malheureux suffit à envoyer en lucarne après un rebond malencontreux. Pendant ce temps-là, dans l’axe, Hamouma et Brandao croisent : Sidibé et Kjaer ne réagissent pas suffisamment vite. Hamouma est trop court d’un cheveu ; Brandao est lui parfaitement placé. Enyeama n’essaie même pas de plonger : il sait.


61’ 2-0 Tabanou
Difficile de parler d’action, car il n’y en a pas vraiment ! C’est plutôt le but de la hargne ; moche, c’est certain, mais obtenu grâce à la volonté sans faille des principaux protagonistes. On notera encore le superbe travail de Brandao dos au but, et le flair d’Hamouma qui sent le coup à merveille, obligeant Enyeama à sortir le grand jeu. Mais Tabanou a suivi et ne tremble pas au moment de retrouver le chemin des filets pour la première fois depuis septembre.