Comment ne pas hurler de rage face à un scénario aussi cruel qu’injuste ?
Cette chronique n’a, je crois, jamais été le théâtre de récrimination envers l’arbitrage. Moi-même ancien arbitre pendant deux saisons, je réalise à quel point il est difficile d’assumer ce rôle, qui plus est à un tel niveau. Mais la grossière erreur de jugement de l’arbitre assistant est trop décisive pour ne pas insister dessus. Aucune excuse ne peut-être trouvée : la défense n’est pas remontée en sprintant, il était facile de la suivre ; les trois foulées de Modesto ne peuvent pas faire illusion quant à un éventuellement replacement… Le porteur du drapeau a failli, et le vide bastiais est récompensé injustement par une faute qui n’aurait pas dû être.
Ceci étant dit, revenons à nos moutons : le match, et un bon match de la part des stéphanois. Compte-tenu des absences, une seule surprise dans la composition stéphanoise : la titularisation de Diomandé à la place de Clément. Le jeune espoir stéphanois, à 21 ans, ne fête que sa troisième titularisation en pro, la faute à une saison 12/13 perturbée par les blessures. Sa prestation très sereine ponctuée d’un magnifique but confirme qu’il peut prétendre au titre de mousquetaire du milieu (vous savez, les trois qui en fait sont quatre).
En face, Hantz est contraint de bricoler. Dans le système défensif, d’abord : privé d’un défenseur central titulaire (Squillaci) et de son remplaçant putatif (Harek), ainsi que de son capitaine-base de l’entrejeu (Cahuzac), le technicien bastiais fait le choix de reculer Sablé d’un cran et de titulariser Diakité au milieu. Effet domino : ce dernier était jusqu’alors le latéral droit inamovible ; Cioni dispute donc ses premières minutes de la saison. Devant, Hantz procède à un turn-over significatif : Bruno fête sa troisième titularisation, Raspentino, sa première ; en revanche Khazri et Boudebouz enchaînent. Ilan et Keseru, les deux autres attaquant les plus utilisés, sont sur le banc.
Devant ce match, les questions tactiques peuvent être évacuées assez rapidement : Sainté joue dans son 4-1-4-1/4-3-3 traditionnel de la saison passée ; Bastia dans son 4-2-3-1 strict non moins habituel. A domicile, on joue haut, en alternant jeu court/long et en utilisant toute la largeur du terrain ; à l’extérieur, on essaie de presser haut, mais ensuite on balance dans l’espace en espérant qu’un des quatre offensifs rattrape la balle et gagne un duel. Cela n’arrivera pas en première mi-temps. Au milieu, Romaric et Diakité sont étouffés par une paire Cohade/Lemoine qui n’avait pas été à un tel niveau depuis longtemps. Les espaces laissés dans leur dos par les ailiers corses sont exploités à fond par Ghoulam, un peu moins par Clerc. On voit de l’engagement, de la hargne, des jeux en triangle sur l’aile, des frappes de loin, des permutations (et donc par moment des ailiers inversés dangereux), des combinaisons intéressantes dans l’axe grâce à l’activité d’Erding (dont le jeu en pivot est décisif sur les deux buts), et même une réelle présence sur les coups de pied arrêtés pour une fois assez nombreux : on retrouve l’ASSE telle qu’on l’aime.
Pour l’inauguration du nouveau kop sud (et enfin un GG entièrement ouvert !), les hommes de Galtier donnent une première mi-temps de haut niveau. Les occasions sont nombreuses dans les temps forts (comme entre la 8è et la 18è) ; et même en phase de pause, la maîtrise est telle que Bastia n’existe pas. L’ouverture du score est on ne peut plus logique. Les Verts vont ralentir un peu le rythme, en ne pressant plus qu’à partir de la ligne médiane ; pourtant, ils seront les seuls à se créer encore des situations, et notamment un contre à la 35’ initié par une passe derrière le pied d’appui exceptionnelle de spontanéité de Tabanou - mais Hamouma n’arrive pas à mettre la caboche.
Maîtrise, sérénité…et calamité
En deuxième mi-temps, rien ne change : Bastia est inexistant ; Sainté gère sans prendre de risque, et se lâche : Bayal y va même de sa chevauchée piazzesque (63’). Sainté se créé beaucoup d’occasions : il s’en faut de peu pour que Tabanou ne marque sur des centres d’Erding (47’) et de Ghoulam (68’), de même qu’Hamouma sur un service de Ghoulam (70’). A la 72’, Hantz tente le tout pour le tout en remplaçant son arrière-droit Cioni par un attaquant, Keseru. A ce moment là de la partie, Bastia joue en 4-1-3-2, la ligne de trois étant essentiellement offensive !
Deux éléments principaux vont progressivement donner à cette seconde mi-temps un visage un peu différent. Premièrement, l’entrée d’Ilan (56’), qui va aspirer tous les ballons offensifs et venir peser un peu au milieu ; sans être dangereux, on sent que Bastia est dorénavant capable d’enchaîner trois passes. Ensuite (et surtout !), l’usure des ailiers stéphanois : si elle ne sera sans guère de conséquences dans le cas de Tabanou (sorti dès la 74’ – Diakité, replacé latéral droit, n’aura profité qu’une fois de sa fatigue), elle sera déterminante pour Hamouma, dont l’absence de replacement défensif pèse lourd dans le premier but bastiais…et qui aurait peut-être marqué à la 70’ avec un peu plus de fraîcheur.
Pourtant, ce qui marquera peut-être le plus les esprits sera sans doute le manque de réalisme d’Erding. L’action de la 79’ symbolise parfaitement sa prestation : un travail en pivot très intéressant (il reçoit la balle dos au but, parvient à se retourner et prend le dessus sur trois adversaires avant de servir proprement Hamouma) mais une finition déficiente (frappe à côté malgré un bon service de Ghoulam). Son face à face raté contre Landreau sept minutes plus tard préludera la réduction du score bastiaise.
Ce but sort de nulle part ; les Verts ne paniquent pas, sûrs de leur fait, et remportent le match sans trembler. Enfin presque.
Les buts
1-0 Tabanou, 27’
Clerc et Cohade se font des politesses côté droit, vers la ligne de touche. Pour être précis, il s'agit d'un une-deux-trois statique, histoire que le reste de l’équipe se mette en place. C’est Erding qui se rend disponible, plein axe : dos au but, le turc résiste à la pression et arrive à s’orienter vers la gauche où il écarte vers Lemoine. Le jeu a changé de côté : le temps que Bastia coulisse, Ghoulam a déjà pris le couloir. Bien lancé par papy, Faouzi centre en retrait – dégagé en touche en catastrophe par les corses. Ghoulam, c’est une de ses spécialités, réalise une longue remise en jeu qui tient plus du centre que de la touche. Les bastiais se trouent, mais pas Tabanou. Demi-volée de brute, et ça fait but.
2-0 Diomandé, 57’
Longue touche de Ghoulam pour Erding : à 30 mètre de Landreau, dos au but, pressé par Cioni et Sablé, Erding contrôle de la poitrine, se retourne, se faufile entre les deux bastiais et se fait faucher. Le coup-franc qui suit est dégagé en touche de l’autre côté. Bastia procède à son premier changement : Ilan remplace un Raspentino fantomatique. Clerc joue la touche : Erding est trouvé dans la surface, dos au but encore, avec un défenseur sur le paletot. Il tente la remise à Hamouma qui arrive lancé : un pied corse traîne ; Mevlut continue le combat, et arrive enfin à pousser le ballon en direction de Diomandé. Il ne sera pas crédité d’une passe décisive : l’arbitre a touché le ballon, le déviant à peine. Diomandé ne s’en laisse pas compter : sa frappe est pure, sèche, montante, puissante ; Landreau ne peut rien. Premier but en pro pour Isma – et quelle patate !
2-1 Bruno, 86’
Contre pour les Verts : Erding se retrouve seul face à Landreau…mais perd son duel. Modesto se précipite pour éviter le corner ; les bastiais relancent vite et partent à leur tour en contre. Les stéphanois tardent à se replacer : à l’image, on voit Cohade marcher. Mais celui dont l’absence sera décisive, c’est Hamouma. Palmieri, l’arrière gauche, prend le couloir : Clerc doit sortir pour le gêner, obligeant Clément, qui aurait dû trainer au point de pénalty, d’opérer la couverture dans l’axe habituellement réservée à Clerc. Bruno se retrouve seul, plein axe, face au but – et ne faillit pas. Il ne s’agit pas de crier haro sur Hamouma, qui a été très actif durant la première heure de jeu – simplement de constater qu’il n’avait plus les jambes.
2-2 Modesto, 90+5 (oui,+5, sur un match sans arrêt de jeu marquant)
Ce but n’existant pas (entaché d’un hors-jeu flagrant et après des arrêts de jeu très exagérés), l’Autre Résumé refuse de le commenter, et renvoie au trio arbitral pour plus d’informations.