Prêté 6 mois à Saint-Etienne entre janvier et juin 1999, Marc Zanotti a participé à la remontée des Verts en L1 avant de retourner à Bordeaux puis de découvrir Jean-Louis Gasset à Caen.


Marc, que deviens-tu depuis l'arrêt de ta carrière ?

J'entame ma 11eme saison au Sporting Club de Toulon. J'ai été responsable technique des jeunes, j'ai fait adjoint de l'équipe première, j'ai coaché les 19 ans pendant deux ans. J'ai aussi été entraîneur des féminines pendant 4-5 ans. On est monté en D2 une saison avec une victoire en Coupe du Var. Malheureusement, on a fait un peu l'ascenseur car le niveau était trop élevé. On n'avait pas recruté assez de joueuses de gros calibre. Actuellement, je suis reparti avec les petits, des U6, U11 et j'interviens dans les écoles, sections sportives au collège. J'ai connu tous les publics depuis 11 ans à Toulon.

Tu as eu envie de changer de port d'attache ?

C'était un choix familial de rester à Toulon. De plus, je suis originaire de Sanary, j'ai retrouvé cette qualité de vie, je suis attaché à mes racines. Après, il ne faut jamais dire jamais. Désormais, mes enfants sont grands donc pourquoi pas. Mais si ça vient pas, tant pis, je ne cours pas après. Et puis, le contexte du covid fait que je privilégie un peu plus ma qualité de vie. Mais à 45 ans, je suis ouvert à toute réflexion.

Tu as la possibilité d'entraîner jusqu'à quel niveau aujourd'hui ?

Jusqu'en National 2. J'ai le DES (Diplôme d'Etat Supérieur, ndp2). Je suis monté à Paris en août pour obtenir le BEPF, le diplôme de formateur. J'ai été présélectionné trois fois mais je n'ai pas été pris. D'ailleurs, j'avais eu des échanges avec Julien Sablé sur ce sujet. Je suis assez déçu, je pense qu'être dans un club amateur m'a largement desservi mais je m'étais dit que la 3eme fois serait la bonne. Avec mes 10 ans d'expérience, je pensais avoir les prérequis nécessaires pour faire passer le message d'un formateur. Je suis passé par le monde amateur, j'ai joué dans toutes les divisions, en DHR, National 2, National, D2, D1 ... j'ai un parcours relativement riche. C'est dommage, je m'étais mis ce petit challenge de faire cette formation en 2 ans. On m'en avait dit le plus grand bien. Je ne pense pas retenter une 4eme fois.

Est-ce que tu peux nous rappeler le contexte de ton arrivée à Sainté en 1999 ?

J'appartenais à Bordeaux où Rolland Courbis m'avait fait venir. Après, j'ai connu Guy Stéphan avec qui ça s'est également bien passé. Ensuite, Elie Baup est arrivé. On avait de bons rapports mais je n'avais pas beaucoup de temps de jeu. On m'a prêté à Nancy qui montait en D1. Je suis tombé sur Laszlo Bölöni et ça ne s'est pas bien passé. Les torts étaient partagés. C'était un coach très rigoureux avec une mentalité de l'est. Moi, j'étais un joueur technique, créatif et je ne rentrais pas dans ce moule. Heureusement, j'ai eu la possibilité de venir à Saint-Etienne. J'ai eu l'opportunité d'être prêté deux fois dans la même saison.

Au départ, c'est un consultant qui savait que l'ASSE recherchait un milieu gauche. Au début de la saison, ils avaient recruté le regretté Fabrice Lepaul. Il y avait aussi Christophe Robert qui avait repris du service. A l'époque, mon agent c'était Henri Zambelli. Il connaissait très bien Gérard Soler et mon prêt s'est fait comme ça.

Tu gardes un bon souvenir de Sainté, au sein d'une équipe qui tournait super bien ?

J'arrive fin décembre 1998, le club sortait d'une longue série sans perdre un match mais ils venaient d'enchaîner un match nul (contre Troyes) et deux défaites (à Guingamp et Niort). J'ai vécu 6 mois qui font partie de mes meilleurs souvenirs. Tout de suite, on part en stage à Sousse. Je fais mes débuts en vert au Parc des Princes en Coupe de la Ligue face au PSG dans un stade plein.



Derrière, on a enchaîné 7 victoires consécutives. J'étais titulaire, je mets 9 ou 10 passes décisives en 12-13 matchs et je marque 2 buts, c'était super ! La fin de la saison était un peu plus difficile, on s'est un peu relâchés parce qu'on avait beaucoup d'avance au classement. Moi-même, j'étais moins performant. Pourtant, Saint-Etienne voulait m'acheter mais Bordeaux a demandé un peu trop d'argent. Les Verts étaient en même temps sur Stéphane Pédron. C'est tout ça qui a fait que je suis retourné en Gironde.

Tu serais resté si tu avais pu ?

Ah oui ! Bien sûr ! Mon intégration s'était faite super rapidement. J'étais très proche de Patrick Guillou et Julien Sablé. Aujourd'hui, Patrick reste un ami intime. J'ai gardé de bons contacts avec Gilles Leclerc également. Il y a quelques temps, on a même créé un groupe Whatsapp avec les anciens verts de 1998-2000. On y retrouve les Mettomo, Ferahoui, Revelles, Potillon, Alonzo, Ponsard, Fayolle, Robert, Billong ... c'est un grand plaisir, on se chambre ! Il y aussi le coach, le doc Demonteil ... on s'entend bien et j'espère qu'on pourra faire un match entre nous. Ca démontre l'état d'esprit du groupe. Même si je ne suis pas resté en D1, je sais que cette équipe qui est remontée a laissé un grand souvenir. Pour moi, elle représentait les valeurs stéphanoises à merveille. Il y avait de la générosité, du talent, de l'agressivité, j'étais comme un poisson dans l'eau ! D'ailleurs, au bout de quelques mois avec Patrick Guillou et Julien Sablé, on avait parodié tous les membres de l'équipe. Alors, évidemment, l'instigateur, c'était Patrick ! On se retrouvait chez lui à Saint-Just-Malmont et on faisait des parodies comme Les Inconnus ! J'ai toujours la cassette vidéo, c'est à hurler de rire ! Après la saison, on avait eu la tournée aux Antilles, ce sont des supers souvenirs !

J'ai aussi plein de souvenirs de Geoffroy-Guichard ! A Sainté, on joue vraiment à 12 ! En 1999, j'avais 24 ans et je me rends compte de cela avec le recul. Je connaissais l'épopée des Verts, la légende, mais on ne se rend pas compte du poids du maillot, j'étais insouciant. Pour mon premier match à la maison, on gagne Cannes 6 buts à 1, derrière on bat le Red Star au Stade de France ... c'était magique même si j'ai ressenti plus d'émotions dans le cocon de Geoffroy-Guichard qu'à Saint-Denis.





On imagine à la fin de saison que le retour à Bordeaux n'est pas facile ...

Oui il y a avait de la déception. Mais ça m'a permis de jouer la Ligue des Champions. Les girondins venaient d'être sacrés champions de France. Si j'étais resté avec eux en 1998-1999, j'aurais été champion de France mais je préfère être sacré champion de D2 avec Sainté et jouer une quinzaine de matchs que de faire des bouts de matchs en D1 avec Bordeaux. Et c'est une sacrée fierté d'avoir été champion avec les Verts !

La saison suivante donc, je joue très peu avec Bordeaux. Heureusement, j'ai joué la Ligue des champions. On avait joué 12 matchs, face à Willem II, Prague et Moscou. On est sortis de cette poule et derrière, le second groupe c'était Manchester United, Fiorentina, Valence. Et c'était pas n'importe quoi. Manchester United avec Keane, Beckham, Giggs, Cole ... du lourd ! La Fio, c'était les Batistuta, Rui Costa, Toldo. Je me souviens du dernier match en Italie, on fait 3 buts partout. J'avais ma famille italienne qui était là et j'ai marqué le second but avant de donner la balle de l'égalisation à Laurent Batlles. On me rappelle ça de temps en temps à Toulon ! Pourtant, j'avais fait une saison relativement blanche en dehors de cela.

Et après cette saison en demi-teinte, tu quittes Bordeaux pour Caen.

Oui j'ai trop peu de temps de jeu à Bordeaux et je signe 4 ans à Caen. Eric Bédouet était proche de Pascal Théault, l'ancien coach du SMC. Il me recrute grâce à ce qu'il connaît de moi de Saint-Etienne ! Il leur fallait un milieu gauche pour palier le départ de Jérôme Rothen. J'avais l'ambition de refaire un peu ce que j'ai fait à Sainté mais malheureusement, je tombe dans un groupe pas très sain. Je mets 2 buts contre Cannes pour mon premier match mais au bout de 7 journées, on est derniers. L'entraîneur change et c'est Jean-Louis Gasset qui récupère le club. Rapidement, je me blesse. Une hernie. Je reprends en janvier mais je me fracture le péroné avec arrachement des ligaments de la cheville sur un tacle. Ca a été un gros coup d'arrêt dans ma carrière. Je me blesse fin janvier 2001 et mon premier match pour ma reprise c'est contre ... Saint-Etienne entraîné par Frédéric Antonetti au mois de novembre (victoire des Verts 4-2 au Stade Malherbe, ndp2)



Ensuite, j'ai connu une saison blanche avec Patrick Rémy en tant qu'entraîneur. Il me restait une saison de contrat et j'ai résilié. Après un an de chômage, j'ai signé à Nîmes en National et on avait même éliminé les Verts en Coupe de France.



Ensuite, j'ai arrêté ma carrière vers 30-31 ans et je suis revenu dans le sud en jouant dans des clubs amateurs et en passant mes diplômes. Mais c'est vrai que Sainté et Bordeaux font partie de mes meilleurs souvenirs.

Quelles sont les personnes marquantes que tu as rencontrées tout au long de ta carrière ?

Ca a bien marché avec beaucoup de coachs. Je pense à Robert Nouzaret, à Rolland Courbis. En tant que joueur, j'avais besoin de ce genre de personnages un peu paternalistes, meneurs d'hommes. Courbis me repère quand je suis à Toulon en National. On élimine le Bordeaux de Zidane en Coupe de France. Je pars à Bordeaux avec lui et je découvre l'Equipe de France Espoirs. Malheureusement, Courbis est parti à l'OM ensuite.

Jean-Louis Gasset est un peu le même genre de coach. C'était un sudiste comme moi. Guy David qui était avec lui également. Malheureusement, j'ai été beaucoup blessé pendant son passage à Caen.

Tu continues de regarder le football aujourd'hui, comment tu le compares au foot de ton époque ?

Disons que je ne regrette pas d'avoir joué à l'époque où j'ai joué. Au niveau des mentalités, je pense qu'à l'époque, le côté humain était plus développé. Le côté club, camaraderie était vraiment important. Il y avait déjà de l'argent dans le milieu à l'époque, mais rien à voir avec aujourd'hui.

Ce qui me frappe, ce sont certaines attitudes sur les terrains. Par exemple, je me souviens de Kévin de Bruyne qui perd la demi-finale de Coupe du Monde contre la France et qui sourit avec son fils, fait coucou à la famille ... je ne sais pas, moi quand je perdais un match, je faisais la gueule, je rentrais au vestiaire. Quand je ne jouais pas, je faisais la gueule. Peut-être qu'on passe plus vite à autre chose aujourd'hui. C'est une époque différente.

Tu le vois au niveau des jeunes ?

J'essaye de véhiculer ces valeurs de passion du foot. Moi à l'époque, je voulais jouer au football. C'est tout. Aujourd'hui, il y a toujours le volet financier qui entre en ligne de compte. Ce qui m'intéressait, c'était de jouer dans des stades pleins. J'adorais le football. Par exemple, la perte de Maradona m'a mis les larmes aux yeux, c'était l'idole de mon enfance. Pareil pour Paolo Rossi, c'est toute mon enfance. J'ai des origines italiennes donc ça me parle et ça me touche.

A quel joueur d'aujourd'hui tu pourrais te comparer ?

(Il hésite) J'aime bien Di Maria au PSG. J'admirais aussi le toucher de balle de Pastore. Ce sont des joueurs qui me parlent ! Quand j'ai joué en D1, il y avait des supers joueurs, Henry, Trezeguet, Scifo ... on retrouvait partout des joueurs techniques, des créatifs ... A Bordeaux, on avait Ziani, Martins. C'est de la technique, du jeu ! Aujourd'hui, je ne vois pas trop de fantaisie dans le jeu. Hormis peut-être en Ligue des Champions avec certaines équipes. Je me régale surtout avec ces matchs. Il y a une autre intensité. Je suis nostalgique de certains joueurs de mon époque. Des Roberto Baggio par exemple, des mecs avec une finesse, des Del Piero, des Totti ... ça devient compliqué de trouver des talents comme ça. Evidemment, on a Ronaldo et Messi mais mes idoles de jeunesse ont plus de charisme je trouve.

Il y a quand même quelques talents à Sainté !

Oui Khazri, Boudebouz ça joue au ballon. Mais ce n'est pas simple de s'exprimer quand on n'a pas trop de temps de jeu. Il faut savoir répondre présent quel que soit son âge quand on fait appel à nous, c'est parfois compliqué.

Revenons-en au match de ce mercredi entre Sainté et Bordeaux, tu le vois comment ce match ?

Les Girondins sont un peu mieux que Sainté en ce moment même s'ils ont perdu à Lille. Bon, ce n'est pas dur en ce moment d'être mieux que les Verts (rires). Mais ça reste un championnat très homogène. On voit même que le haut du classement est très resserré cette saison. Quand on voit que l'OM joue les premières places et a gagné un seul match de C1, ça veut dire quelque chose du niveau de la L1.

Je vois les résultats des Verts, ce n'est pas brillant. Il y a beaucoup de cadres qui ont été écartés en début de saison. Peut-être que si certains avaient été là pour encadrer les jeunes, ça aurait été mieux. Même si l'entraîneur a de l'expérience, il te faut des relais sur le terrain pour faire passer le message. Les jeunes sont insouciants, ils foncent parfois tête baissée, ils n'ont pas tous la maturité donc il te faut des cadres. C'est ce qu'avait réussi à faire Jean-Louis Gasset lors de son passage Sainté avec des joueurs comme M'Vila, Debuchy ...

Un petit pronostic malgré tout ?

(Il hésite longuement) On va dire 2-2 ... C'est dur pour moi car il y a Sainté d'un côté et de l'autre, j'ai Bordeaux et Gasset qui a compté pour moi, qui me ressemble.

Tu ne veux froisser personne !

Ouais (rires) ! Objectivement, je vois peut-être plus Bordeaux gagner ... J'aurais dû dire 2-1 pour Bordeaux mais mon cœur stéphanois me faire dire match nul !

Merci à Marc pour sa disponibilité.