Le SAC, une préoccupation de santé publique
Les spécialistes français se penchent depuis plusieurs semaines déjà sur un cas rare qui touche exclusivement la ville de Saint-Etienne (Loire), et qui les émoustille autant que les Phallic Mastres à l’annonce de la reformation des New-York Dolls.« A Saint-Etienne, explique le Pr Lagaffe, chirurgien, on ne sait pas si c’est le fait que les gens reçoivent des claques depuis 25 ans, ou le fait qu’ils soient placés juste contre le terrain, qui a tout déclenché. Mais en tous cas, je suis prêt à vendre ma Ferrari pour venir étudier ça de plus près. Je m’en fous, j’en ai déjà trois. »
C’est ainsi que de nombreux médecins ont accouru des six coins de l’Hexaguignol (désolé, réflèxe) pour venir constater le phénomène et tenter d’en élucider la cause. Ils ne se sont pour le moment mis d’accord que sur une chose : le nom de la « maladie », qu’ils ont baptisée le Syndrome de l’Avant-Centre (SAC).
« Depuis que je suis tout petit, rappelle le Dr Matt Manaman, du CHU local, j’ai toujours entendu dire que Didier Tholot était une chèvre, que Titi Camara et Etienne Mendy ne valaient pas une cacahuète…Bref, d’après moi, le SAC ne date pas d’hier ! »
Une cible restreinte
Le public stéphanois semble en effet prêt à tout pour défendre son gardien, même s’il reste pétrifié sur sa ligne pendant que le ballon navigue dangereusement au-dessus des crânes des attaquants adverses, et ce uniquement parce qu’il a été formé au club ; on se fiche que les défenseurs dégagent systématiquement dans les tribunes, pourvu qu’ils tacklent. Peu importe que les milieux soient aussi à l’aise avec le ballon qu’avec un parpaing, l’essentiel est qu’ils courrent dans tous les sens, comme des dératés sous LSD. Enfin, on s’en tape que les ailiers partent tête baissée dans les panneaux publicitaires, parce qu’un jour, peut-être qu’ils délivreront un bon centre. Enfin, un centre, au moins.Mais l’avant-centre, lui, parent pauvre du foot stéphanois, n’a pas droit à tous ces égards.
Ainsi, dans les archives de José Nicollin, supporter exilé, les victimes du SAC s’empilent comme les joyeux membres de Sainté2Night le vendredi : Samba N’Diaye, Didier Thimothée, Alex DiRocco…
« Et pourtant, leurs stats ne sont pas si mauvaises que ça, finalement » souligne José, en essayant en même temps de savoir ce qui s’est passé le 24 février 1952.
Etude de cas
Ces dernières années, seuls deux « n°9 » ont semblé avoir miraculeusement échappé au SAC : Wohlfart et Aloisio. « Néanmoins, Aloisio n’était pas vraiment un avant-centre, donc ça ne compte pas » reprend le Dr Manaman. Quant à l’Allemand, « il est probablement resté trop peu de temps dans le Forez pour développer le syndrome ».Lancé comme Rodrigao dans l’axe de la défense amiénoise, le Dr Manaman poursuit son exposé : « Certains joueurs, comme Kuzba, Cuca, ou Luhovy, ont semble-t-il développé une forme foudroyante de la maladie. »
Il ne semble pour le moment pas y avoir de cure à ce mal : Lilian Compan a subi pendant un an et demi le SAC, et s’il s’en est sorti, c’est grâce à l’immense courant de sympathie qui a entouré l’équipe à partir de la fin de l’année 2003. Un miraculé. Aujourd’hui, Piquionne, autrefois « attaquant super maladroit » qui tuait même des oiseaux selon une toute petite frange du public, semble être également sur la bonne voie, mais on sait dans la région (jurisprudence Malouda et Govou) qu’une rechute est vite arrivée. Surtout dans la surface de réparation.
« Reste le cas Gomis, bien sûr » soupire le Dr Manaman. « Le public a qualifié sa prestation face à Lens de pitoyable. Alors que, bien sûr, c’est un jeune attaquant plein de talent en progrès depuis son retour de prêt à Troyes. Autant il était parfois pénible avant son départ pour l’Aube, autant il semble désormais avoir envie de travailler et de s’améliorer. Il faudrait juste lui laisser encore un peu de temps… »
Quelles solutions ?
Que faire ? « On ne peut pas envoyer le public voir pendant un an les matches de Troyes, évidemment » conclut Manaman en souriant. Dans son rapport, il préconise pour tous les supporters stéphanois l’arrêt de la diffusion de l’émission « L’Equipe du Dimanche » qui pourrait être remplacée « par une sélection des ratages de Thierry Henry ou de Ronaldo. Cela donnerait peut-être une chance de salut aux futurs avant-centres de l’ASSE. Ce qu’il faut, c’est de l’éducation, comme l’a toujours répété le Pr Timick, du CHR de Maurienne. »On aimerait que cet espoir devienne réalité. La lutte ne fait que commencer. Ensemble, détestons le SAC !
Saint-Etienne, le 02/09/06.
Didier Bigard is not a dissident