Ce matin, me dirigeant d’un pas allègre en direction du kiosque à journaux, ma baguette sous le bras, j’ai croisé un étrange personnage qui fredonnait sur l’air de la cucaracha : « La Pravda ment, La Pravda ment, La Pravda est allemand. »

Ce matin, me dirigeant d’un pas allègre en direction du kiosque à journaux, ma baguette sous le bras, j’ai croisé un étrange personnage qui fredonnait sur l’air de la cucaracha : « La Pravda ment, La Pravda ment, La Pravda est allemand. » Surpris par cette étrange apparition mais me forçant à ne pas être décontenancé, je poursuivais mes activités normalement. Je m’acquittais donc de ma dîme et emportait ainsi L’Equipe afin de lire ce fabuleux journal en compagnie d’un café et de quelques tartines.

Saint-Étienne maintient sa réserve

"L’ASSE a confirmé, hier, auprès de la Ligue, la réserve concernant la présence de François Clerc sur la feuille du match qui a opposé les Verts à l’OL samedi à Gerland (2-1). Pour justifier sa requête, la direction stéphanoise conteste que le défenseur international des champions de France ait purgé son match de suspension le 30 septembre lors de la rencontre à Sochaux : « Suspendu pour quatre matches dont trois avec sursis par une décision de la commission juridique en date du lundi 25 septembre, cette décision avait été assortie de l’exécution provisoire. (…) La peine de suspension prononcée est exécutoire à compter du lundi 0 heure qui suit le prononcé du jugement. Donc à compter du lundi 2 octobre. Le joueur n’avait donc toujours pas purgé sa peine de suspension ferme, même en étant absent de la rencontre Sochaux-Lyon du 30 septembre."

En fait, ce sont les décisions de la commission de discipline qui prennent effet le lundi, le temps de les notifier aux parties. Dans l’affaire Clerc, la commission juridique avait demandé et motivé (fait rarissime) l’exécution immédiate. Mieux, le directeur général adjoint de l’OL, Marino Faccioli, avait demandé des précisions par fax à la LFP la veille du match. Le jour même, Jean-Pierre Hughes, directeur général, après avoir interrogé André Soulier, président de la commission, avait répondu à l’OL, avec copie à Saint-Étienne, que « le joueur avait volontairement, dès sa notification, purgé la suspension qui lui avait été infligée ». Le jour du match, l’affaire était définitive puisque aucune des parties n’avait interjeté l’appel, le joueur ayant même payé l’amende de 15 000 euros à la LFP". – J.-Y. D. et M. Ch.


Ce superbe article m’apprend ainsi que la réserve formulée par l’ASSE commettait l’erreur, que l’on peut deviner grossière à ce niveau, de confondre les décisions de la commission de discipline (qui prennent effet le lundi qui suit la décision) et celles provenant de la commission juridique qui avait charge de trancher le litige concernant F. Clerc. Ah, c’est bien ce qu’il me semblait, ces perdants veulent entamer des procédures tout à fait injustifiées. Beuh, mais, ah ? tiens ! je me souviens soudain d’un article du règlement de la LFP, l’article 177 :

"La commission juridique peut prononcer l’une ou plusieurs des sanctions disciplinaires prévues à l’article 200 des règlements généraux de la Fédération française de football lorsqu’elle constate des violations ou des manquements graves au présent règlement, à la convention collective nationale des métiers du football et à la convention collective des administratifs et assimilés du football. Dans cette hypothèse, elle doit respecter la procédure applicable devant la commission de discipline et fixée par les articles 157 à 170 du présent règlement."

« Dans cette hypothèse, elle doit respecter la procédure applicable devant la commission de discipline », huum, difficile de faire plus clair ! La commission juridique doit appliquer ses sanctions de la même façon que la commission de discipline ! Or, les articles 157 à 170 sont également très clairs, pour une suspension de 4 matchs dont 1 ferme et 3 avec sursis ne suivant pas d’une expulsion lors d’un match, la procédure est que la suspension rentre en vigueur le lundi qui suit la décision. Huum tout cela est étrange, ennuyeux même, l’Equipe se serait trompé ? La loi serait-elle du mauvais côté ?

Mais non, voyons, coup de théâtre dans « ce grand spectacle qu’est la Ligue1 » (A. Ruiz), l’article de L’Equipe m’apprend que « Dans l’affaire Clerc, la commission juridique avait demandé et motivé (fait rarissime) l’exécution immédiate. » Suis-je bête, il fallait lire l’article jusqu’au bout évidemment. Curieux, alerte et soucieux d’éclairer ses lecteurs, L'Equipe ne va pas manquer de nous dévoiler ce qui a pu provoquer ce fait rarissime, et nous livrer les raisons assurément excellentes qui ont motivé cette demande. Je poursuis alors avidement ma lecture… Et bien non, rien, pas un mot… c’est tout de même formidable l’information, parfois un détail vous manque et tout vacille...

Bon, qu’à cela ne tienne, la cadence infernale soumettant les journalistes sportifs à de bien dures conditions de vie, ce silence ne doit être dû qu’à un malheureux oubli. Allons voir le communiqué officiel de la LFP à propos de cette affaire, ils n’auront, à coup sur, pas oublié d’y formuler leur demande exceptionnelle et les motivations de celle-ci :

Commission Juridique - 25/09/2006 - François Clerc suspendu

"La Commission Juridique de la LFP a suspendu le joueur de l'Olympique Lyonnais François Clerc. La Commission Juridique de la LFP a infligé lundi au joueur François Clerc de l'Olympique Lyonnais une suspension de quatre matches dont un ferme et trois avec sursis, ainsi qu'une amende de 15.000 € pour le non respect de l'article 257 de la Charte du football professionnel.
Dans ce dossier, la Commission Juridique a également infligé une amende de 5000€ à l'Olympique de Marseille et un rappel au règlement au président de l'Olympique de Marseille."


Ah bah, non, tiens, rien non plus. Ils ont aussi oublié de préciser cette procédure inhabituelle sortant du cadre du règlement régissant l’ensemble des clubs et joueurs de Ligue 1… Je me sens un peu ennuyé… La commission juridique a dérogé à la procédure stipulée par le règlement, pour des raisons exceptionnelles mais il est impossible d’en trouver ni trace ni même allusion… Le doute commence à s’immiscer dans mon esprit, c’est insupportable.

Bon, bien décidé à savoir, je vais aller sur le site http://www.lequipe.fr,/ j’y trouverais certainement des informations plus précises. Et oui, c’est le cas, dans une brève au style chatoyant et à l’orthographe aussi précise que la manière dont elle relate les faits, je trouve le fin mot de cette histoire : "Le dossier juridique de l'Olympique Lyonnais paraît donc aussi solide que son équipe sur le terrain". Enfin ! Dans un éclair aussi vif que le levé de drapeau d’un arbitre de touche sur un hors-jeu de Malouda, dans une clairvoyance aussi précise qu’un penalty sifflé par Mr Duhamel, dans un élan aussi irrépréhensible qu’un plongeon d’un vice-champion du monde, mon esprit a tout saisi, d’un bloc la sérénité m’envahit. Le club qui tire tout le football français vers le haut ne peut avoir tenté de frauder, la commission juridique présidée par Monsieur Soulier ne peut s’être fourvoyée, elle ne peut encore moins avoir tenté d’avantager ce club si honnête, si humble et si fair-play. Et puis quels intérêts pourraient bien avoir des hommes aussi droits que Mr Soulier et a fortiori le président Thiriez de nous tromper. Je vous le demande, hein ?! Des avocats respectables à l’abri des soucis financiers grâce à leur travail, l’un au service d’un des patrons les plus dynamiques de France et l’autre au service de cette entreprise si brillante qu’est la CEGID. Ces hommes incarnent l’honnêteté et l’impartialité qui siéent si bien à leur fonction, et cela au-delà de tout doute raisonnable. Et un journal aussi honnête, perspicace et olbjectif que L’Equipe pourquoi nous cacherait-il des éléments, pourquoi transformerait-il les faits ? Hein, je vous le demande ?! Et puis tout le monde est d’accord de toute façon, que ce soit Canal+ ou TF1, il faut allumer sa télé ce soir pour regarder ce magnifique club gagner son match. Ah, je m’en réjouis d’avance, et demain je pourrai lire leurs exploits dans mon journal favori. Et cela doit continuer, pour le bien de tous.

Je finis mon petit-déjeuner content, heureux, béat. Ah, dans quel merveilleux monde enchanté vivons-nous ! Un petit détail me titille, je ne sais pas trop quoi, comme un arrière-goût aigre… Sûrement mon café, peut-être devrais-je changer de marque, un ami m’a parler récemment de café équitable… comment s’appelle t-il déjà… ? Ah oui, Carte Rouge, celui qui sponsorise le cycle d’Ollywood. Et j’entends un gars fredonner l’air de la cucaracha sous ma fenêtre, mais je n’y prête pas attention, je dois me concentrer sur le paiement de ma facture de l’abonnement à Canal+. Le bonheur c'est si simple.