Mercredi s'est déroulé un petit évènement arbitral àGG avec l'annulation d'un penalty pourtant sifflé par l'arbitre. Petit décryptage.
Faute d'actualité particulièrement chaude concernant l'arbitrage les semaines précédentes - qui s'en plaindra ? - ce papier devait originellement être une compilation de quelques petites actions. Vous les trouverez en bonus àla fin de l'article !
Situons le contexte. Nous jouons la 51ème minute. Lorient vient d'ouvrir le score sur penalty. Aubameyang, dos au but dans la surface ne parvient pas à contrôler le ballon qui arrive à Nicolita démarqué. La frappe du Roumain est déviée en corner. A priori, rien de particulier ne s'est passé, pourtant Benoit Bastien indique son second penalty de la soirée, pour les Verts cette fois. Au bout de quelques secondes de jérémiades, l'arbitre consulte son assistant et revient sur sa décision, désignant finalement le coup de pied de coin.
Utilisation de la vidéo par le quatrième officiel ou pas ? La question a été posée par les commentateurs pendant la période un peu folle où personne ne savait vraiment ce qui se passait, avançant l'argument imparable que le banc lorientais s'était levé comme un seul homme. Pourtant, lors du direct, on voit que l'assistant Frédéric Haquette appelle son central avant même que la télé n'ait diffusé le moindre ralenti. Et j'ai appris de source très proche du quatuor que c'est exactement ce qui s'est passé : l'assistant pense d'abord que le central a indiqué le corner, comme lui. Quand il comprend que c'est un penalty qui est décidé, il lui demande via l'oreillette ce qu'il a signalé. Benoit Bastien pense avoir vu une main sur le contre, sans doute un effet d'optique dû à sa position. L'assistant prend donc l'initiative de le faire revenir sur sa décision, car lui-même est sûr et certain que le Lorientais a détourné de la jambe. Consultés par le biais de l'oreillette, les deux autres officiels n'ont rien vu. L'arbitre décide de suivre l'indication de son assistant et prend la bonne décision : pas de penalty.
Comment cela est-il possible ? Réglementairement, on peut s'appuyer sur deux points :
- La Loi VI sur l'arbitre assistant énonce : il "est également censé apporter son assistance à l'arbitre lorsqu'il est mieux placé pour voir l'incident, concernant en particulier des incidents survenant dans la surface de réparation". L'arbitre assistant n'a aucun "pouvoir", son rôle étant de "donner son opinion si l'arbitre la lui demande. Celui-ci reste le dernier juge de la décision à prendre". (Q 6.1.02)
- Justement, sur le central, la Loi V décrit ainsi les décisions de l'arbitre : "Les décisions de l'arbitre sur des faits en relation avec le jeu sont sans appel, y compris la validation d'un but et le résultat du match. L'arbitre ne peut revenir sur une décision que s'il réalise que celle-ci n'est pas la bonne ou, à sa discrétion, après avoir consulté un arbitre assistant ou le quatrième officiel, le tout sous réserve que le jeu n'ait pas repris ou que le match ne soit pas terminé".
On a donc assisté à un évènement sortant de l'ordinaire mais parfaitement justifié au regard de l'action et des règles. Certes, cela a desservi les Verts sur le moment, mais des prises d'initiative judicieusement prises par lui est ce qu'on attend d'un assistant depuis que son rôle n'est plus simplement celui de "juge de touche". En consigne d'avant-match un central glisse généralement : "Si je me plante, ne me laissez pas dans la m…" C'est exactement ce qu'il s'est passé.
Au-delà de la décision et sans tirer de conclusions définitives, ce fait de jeu illustre la grille de lecture que l'on peut avoir des aléas d'un match au nombre desquels l'arbitrage, comme la pluie, le vent, le terrain, les blessures, les poteaux est généralement le plus facile à critiquer (suivez mon regard pas plus tard que ce samedi). Pourtant, les Verts ont transformé cette frustration en révolte. Cela ne se passe pas ainsi chaque semaine, bien sûr. Qui se souvient d'un match où un défenseur troyen avait suppléé son gardien d'une claquette magnifique, sans que le trio arbitral ne siffle le penalty et l'exclusion qui s'imposaient ? L'ASSE avait finalement broyé 4-1 l'ESTAC. Deux exemples parmi d'autres - dans les deux sens d'ailleurs - symptomatiques d'un fait irréfutable : les joueurs décident du sort du match dans la majorité des cas.
Bonus 1 : Le coup d'envoi de la deuxième mi-temps à Toulouse
On frise ici le pinaillage, mais ce type d'action est tellement rare au plus haut niveau qu'il mérite un petit rappel de la règle, pas toujours connue au niveau amateur. Début de la deuxième mi-temps lors du match à Toulouse. Aubameyang donne le ballon à Battles et l'arbitre indique de rejouer le coup d'envoi. Pourquoi ?
Le meilleur buteur des Verts a tout simplement joué cet engagement vers l'arrière. Or, la Loi VIII décrit ainsi la procédure du coup d'envoi :
- Tous les joueurs doivent se trouver dans leur propre moitié de terrain.
- Les joueurs de l'équipe ne procédant pas au coup d'envoi doivent se tenir au moins à 9,15m du ballon tant qu'il n'est pas en jeu.
- Le ballon doit être positionné sur le point central.
- L'arbitre donne le signal du coup d'envoi.
- Le ballon est en jeu dès qu'il a été botté et a bougé en direction du but adverse.
- L'exécutant ne doit pas retoucher le ballon avant qu'il n'ait été touché par un autre joueur.
Bonus 2 : L'obsession de la mimine
Quinzième minute du match contre Rennes. Sur un coup de pied arrêté, un Rennais place une tête contrée quasi à bout portant par Aubameyang. Les Rennais lèvent les bras, laissant penser qu'il s'est passé un truc pas clair. Dès le premier ralenti quelques instants plus tard, on constate que l'action est… floue. Il est impossible de savoir avec certitude si le ballon a touché le bras, la hanche ou les deux et dans quel ordre. Surtout, un point n'est relevé par personne : Philippe Malige, pile en face du contact, porte le sifflet à la bouche et DÉCIDE de ne pas siffler, estimant à raison que si contact avec le bras de PEA il y a, il est totalement involontaire et ne peut être sanctionné. Pourtant, la réalisation de Foot+ va multiplier les tentatives de faire parler les images, en recherchant tous les angles possibles, jusqu'à nous sortir une espèce de loupe dégueulasse depuis le haut du Kop Sud. Lourd et franchement inutile quand, en plus, aucune image ne parvient à se faire une certitude. Le mieux serait de connaître un peu les règles.
Bonus 3 : "Pourquoi Aubame doit-il sortir du terrain pour relacer ses godasses ?"
La question a été posée telle quelle par Matrick sur le forum pendant le direct du match contre Rennes. En fait, l'attaquant ne fait pas simplement ses lacets à la 35ème minute. Il profite d'une intervention des soigneurs pour un Breton pour carrément changer de crampons. Or, la Loi IV est très explicite : un joueur doit quitter le terrain pour procéder à une quelconque modification de son équipement. En plus, s'agissant de chaussures, un des quatre arbitres doit s'assurer que la nouvelle paire ne présente aucun danger. Ce n'est qu'avec l'accord de l'arbitre central que le joueur peut regagner sa place, Zebina doit s'en souvenir. Sur le principe, la règle va même plus loin. Une certaine tolérance est appliquée, mais, normalement, remettre son maillot dans le short devrait être fait depuis l'extérieur du terrain. On appelle cela "un refoulement pour remettre son équipement en conformité" dans les questionnaires d'arbitres.
Pitchdobrasil
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