Le Crom en vert est décomposé, il est utilisé dans le football nîmois pour tester les mailles des filets.
Aujourd'hui, Ronan a glissé son grand format àTroyes. A l'Aube de cette nouvelle année, et àdeux jours de ses retrouvailles avec Sainté, l'ancienne doublure de Janot se confie.
Ronan, d'où vient ta vocation de gardien de but ?
C'est à l'âge de 11-12 ans que je me suis installé définitivement au poste de gardien. Au départ, j'étais attaquant. Et oui, j'ai eu le plaisir de marquer des buts, plus jeune! Je jouais ailier droit.
On a tous quelque chose en nous de Nicolas Marin !
Ouais, ça doit être ça ! (rires). Mais à côté je faisais beaucoup d'autres sports, du volley notamment, qui m'ont permis de développer mes réflexes, ma détente, et mon adresse avec la balle. Bref, les qualités d'un gardien. J'ai également choisi de devenir goal pour essayer d'égaler un jour mes idoles : Joël Bats et Rinat Dassaev.
Formé à Auxerre, tu a disputé ton premier match de D3 avec l'AJA contre Saint-Etienne. Gardes-tu un souvenir précis de ce match ?
Oui ! Je me souviens que Maurice Bouquet m'avait mis en danger sur coup franc, mais je n'avais pas pris de but et je crois qu'on avait gagné [ndlr : les Auxerrois avaient en effet remporté 1-0 ce match du 12 décembre 1992]. Cette saison-là , j'ai remporté la Gambardella avec Diomède et Danjou notamment.
A Auxerre, tu as côtoyé Lilian Compan et Nicolas Marin. Quels souvenirs gardes-tu de ces joueurs ?
De bons souvenirs. On a galéré en CFA tous les trois mais on a eu le mérite de s'accrocher et chacun d'entre nous est arrivé à faire sa petite carrière. J'ai également sympathisé avec Gilles Leclerc, du temps où on jouait ensemble à Valence (1997-1998). La saison suivante, il a participé à la montée des Verts en première division. Pour en revenir à Lilian, je dois dire que c'est à Saint-Etienne que j'ai appris à le connaître. A Auxerre, on se côtoyait mais ça s'arrêtait là . Quand on s'est retrouvé tous les deux chez les Verts, on a fait chambre commune pour les déplacements. On a appris à se découvrir et il y a maintenant une grande complicité entre nous.
Quel bilan tires-tu de tes 5 années de professionnel à l'AJA ?
Le bilan est forcément nuancé. J'ai bien appris mon métier, dans un club connu pour former des gardiens de qualité : je pense notamment aux internationaux Bats, Martini et Charbonnier. Malheureusement, je n'ai pas eu l'opportunité de m'exprimer à Auxerre. J'ai joué de malchance lorsque je me suis blessé en mars 1995 : à l'époque, j'étais en concurrence avec Fabien Cool. Il a su saisir sa chance. Ensuite, ç'est devenu difficile. Il y a une politique de club qui consiste à installer un gardien et on lui fait confiance à 100%. Normalement, ce gardien finit par partir mais ça n'a pas été le cas, et Fabien continue aujourd'hui de garder les cages auxerroises.
Après avoir joué 17 matches à Châteauroux (1996-1997) et 17 matches à Valence la saison suivante, tu as joué deux ans à Guingamp.
Oui, c'est dans ce club que j'ai vraiment débuté en Ligue 1, car à Guingamp j'ai eu un poste de titulaire à part entière. C'était un peu un pari de débuter à 28 ans en D1, je n'ai pas eu le droit à l'erreur. Globalement, ça s'est bien passé même si à l'issue de la deuxième saison, le club est descendu en ligue 2.
Pourtant, l'année de la descente, Guingamp a fait ce que tous les clubs devraient faire : prendre 6 points contre Lyon !
(Rires). Exact! En plus je n'avais pas pris un seul but contre l'OL : on avait gagné 2-0 au Roudourou et 1-0 à Gerland.
En Bretagne, tu as joué avec Drogba, qui a connu depuis une fulgurante ascension. A l'époque, le pensais-tu capable de devenir l'un des meilleurs attaquants du monde ?
Oui, ce joueur transpire la classe, c'était déjà frappant à Guingamp ! Pareil pour Florent Malouda, que j'avais connu à Châteauroux. Lui aussi était au-dessus du lot, et je sentais bien qu'il aurait rapidement un niveau international. Il y a des joueurs comme ça qui ont une espèce d'aura et un potentiel extraordinaire. C'est frappant pour Drogba : non seulement c'est un joueur exceptionnel, mais en plus c'est quelqu'un de très ouvert, très écouté, qui donne beaucoup aux autres. Un joueur charismatique.
Pourquoi as-tu choisi de quitter Guingamp pour Saint-Etienne ?
J'étais prêt à jouer en Ligue 2 avec Guingamp, mais les dirigeants bretons ont fait venir Thierry Debès pour me reléguer en deuxième gardien. Je leur ai donc fait savoir que je quitterai le club si j'avais des opportunités. Quand l'ancien directeur sportif de Guingamp m'a contacté pour rejoindre les Verts, je n'ai pas hésité : le lendemain, j'étais à Saint-Etienne. Les responsables du club ont été clairs avec moi, ils m'ont fait venir pour être la doublure de Jérémie. Comme il a fait une saison exceptionnelle, on n'a pas eu besoin de moi.
Malgré ton temps de jeu plus que limité, gardes-tu de bons souvenirs de ton unique saison stéphanoise ?
Je garde de très bons souvenirs de mon passage à Saint-Etienne. J'ai connu une équipe, une vraie, avec une ambiance très sympa, extraordinaire. Parfois, la mayonnaise ne prend pas. Mais à Saint-Etienne, tous les ingrédients étaient réunis : le groupe était composé de personnalités très différentes, qui se respectent. Les remplaçants ont tiré dans le sens du collectif. Quand le collectif marche, individuellement on a des retombées. C'est ce qui s'est passé. Il n'y a pas eu d'éléments perturbateurs dans le groupe. Pour ma part, j'ai essayé de remplir au mieux mon rôle de doublure : j'ai entretenu d'excellentes relations avec Jérémie Janot.
Ton seul match officiel avec les Verts a eu lieu en Coupe de France contre Nîmes. Cette rencontre te laisse-t-elle des regrets ?
Des regrets, oui et non. De toutes façons, c'est toujours des matches à la con (sic). Le plus gros a toujours tort. On n'a pas su se mettre à l'abri, on a cru que le match était plié à 2-0. On a eu une grosse occasion de 3-0. Mais les Nîmois sont revenus dans le match. Je m'en veux un peu sur le premier but, mais en même temps j'me dis qu'il peut refaire mille fois son centre et il ne la mettra jamais au fond... Il a marqué ce jour-là , tant mieux pour lui.
Que penses-tu des performances de Jérémie Janot ?
Avant de le retrouver à Sainté, j'avais eu l'occasion d'affronter Jérémie Janot en CFA du temps où j'évoluais dans l'équipe réserve d'Auxerre. Jérémie a réalisé l'an dernier une saison magnifique, il n'y a rien à redire. Du fait de nos morphologies respectives, on évolue dans des registres différents. Jérémie fait partie des meilleurs gardiens français, et personnellement j'apprécie son explosivité. Ce que j'aime en lui, c'est qu'il est à la fois spectaculaire et efficace.
Selon toi, qui mérite de garder les cages de l'équipe de France lors la coupe du monde en Allemagne : Coupet ou Barthez ?
Le choix n'est pas évident. Mais ma préférence va à Grégory Coupet. Si on regarde le bilan des 4 dernières années en club, Greg a une consistance inégalable. Il réalise de hautes performances presqu'à chaque match. D'un autre côté, Fabien Barthez a toujours été excellent en équipe de France.
Mais Coupet a également fait de belles prestations sous le maillot bleu.
Peux-tu nous dire quelques mots de Jessy Moulin, qui garde les buts des Verts en CFA. A-t-il le potentiel pour faire carrière chez les pros ?
Jessy est un gardien très explosif. Pour progresser, il faudra peut-être qu'il canalise davantage sa fougue. Il a bon potentiel, à lui de le développer pour avoir sa chance avec les pros.
Es-tu resté en contact avec certains joueurs stéphanois ?
Oui, avec pas mal de joueurs ! Même si Pat Carteron est parti lui aussi, on s'appelle régulièrement.
J'ai aussi des contacts réguliers avec Juju, Hérita. Celui que j'appelle le plus est sans doute Allaedine Yahia, un bon copain que j'ai connu à Guingamp. Je l'ai eu récemment au bout du fil, il est déçu de ne pas être sélectionné pour la CAN mais j'espère qu'il défendra les couleurs de la Tunisie lors de la coupe du monde. Je suis aussi resté en contact avec Jeannot Déès et Vincent Tuong Cong. J'ai eu aussi Vincent Hognon au téléphone tout récemment. Evidemment, on se chambre à quelques heures de nos retrouvailles. C'est plutôt sympa car il y a un profond respect entre nous, on a un vécu commun et on s'apprécie. Après, que le meilleur gagne !
Comment juges-tu l'équipe stéphanoise de cette saison par rapport au groupe de l'an dernier ?
Je ne suis pas forcément le mieux placé pour en parler mais je pense que le groupe, qui a peu changé à l'intersaison, a les mêmes qualités que l'an dernier. Il y a une certaine continuité, qui va dans le sens de la politique voulue par le club : installer durablement les Verts dans l'élite.
Ronan, quel est l'attaquant de ligue 1 qui t'impressionne le plus ou te réussit le moins ?
Ah, sans hésiter Pauleta ! A chaque fois, il m'en met un ou deux. D'ailleurs on a fini par établir une sorte de complicité tous les deux : je ne m'avoue jamais battu, je gagne quand même quelques duels contre lui (heureusement !), mais il arrive toujours à trouver la faille. Pauleta est un joueur de grande classe.
Quels sont tes objectifs avec Troyes individuellement et collectivement ?
Individuellement, mon objectif est d'atteindre la performance sur la durée : être consistant à chaque match, et si possible sur toute une saison. Je suis sur la bonne voie pour atteindre cet objectif mais j'attends la fin de la saison pour faire le bilan. Collectivement, notre objectif est bien sûr le maintien, avec un projet de jeu. Notre but est d'essayer de progresser à chaque sortie. On se concentre sur nos forces, sans regarder le classement pour l'instant.
Les anciens Verts Sylvain Meslien et Alassane N'Dour n'ont pas disputé un seul match avec Troyes depuis le début de la saison. Pour quelles raisons ?
Tous les deux ont été victimes de blessures au genou. Ils terminent leur convalescense et seront bientôt opérationnels. S'il retrouvent leur forme optimale, peut-être que l'entraîneur fera appel à eux pendant la deuxième partie de la saison.
Après-demain [ndlr :l'interview a été réalisée lundi 2 janvier] , tu retrouve les Verts. Qu'avais-tu pensé du match aller, qui s'était soldé par un match nul et vierge ?
Selon moi, ça avait été un très bon match, et j'avais été très content du résultat. Je crois que le monde était content : Jérémie avait été sauvé par ses poteaux, mais les Verts s'étaient procurés quelques occasions dangereuses. Pour moi, ce match était un peu spécial car ça faisait très peu de temps que j'avais quitté Saint-Etienne pour Troyes. C'était limite marrant de jouer contre mes anciens coéquipiers, en tout cas c'était très agréable.
Te souviens-tu de tes anciens matches à Geoffroy-Guichard ?
Oui. J'ai joué mon premier match dans le Chaudron la saison 1996-1997. A l'époque, je défendais les couleurs de Châteauroux. Je me souviens qu'on avait perdu 2-0 [ndlr : buts d'Aulanier et de Lagrange] et que je m'étais blessé tout seul pendant le match. J'ai également joué à Geoffroy Guichard avec Valence, deux fois pendant la même saison : la première fois, je n'ai joué qu'une mi-temps car la partie a été arrêtée à cause du verglas et de la neige. Je me souviens que j'avais cassé le nez de Gilles Leclerc sur une sortie (rires).
Ah oui, c'est vrai, tu nous a dit tout à l'heure que tu avais sympathisé avec lui. Tu casses le nez de tous tes potes ?
(Rires) Non, j'te rassure.
Bon, revenons à ton dernier match à Geoffroy ?
On est donc revenu à Geoffroy Guichard avec Valence, et on avait fait 0-0. C'était il ya eu 8 ans déjà ...
Es-tu impatient de rejouer dans ce stade ?
Oui, ça me fait plaisir de retourner dans le Chaudron : c'est un stade mythique, le public est extraordinaire. Pour moi, il y a 4 stades en France où tu ressens une atmosphère particulière. Saint-Etienne, Lens, Paris et Marseille.
En tant que gardien de but, as-tu déjà été déstabilisé par les grosses ambiances et par la bruyante hostilité du public ?
Un joueur professionnel doit se préparer mentalement à affronter de tels environnements. Personnellement, la pression du public adverse ne me déstabilise pas. En revanche, je reste convaincu qu'un public peut transcender ses propres joueurs. Le 12ème homme peut pousser son équipe à se surpasser.
Penses-tu être bien accueilli par le public stéphanois, sachant que Grégory Coupet a été conspué par une partie du public lors du dernier derby ?
Le contexte est différent. On verra bien. En ce qui concerne les insultes envers Coupet, je pense qu'il y a des cons partout. A Saint-Etienne comme ailleurs. Les cons sont minoritaires mais hélas ils se font entendre.
Helder Postiga a renforcé l'ASSE au mercato, il fera sans doute ses débuts contre toi. T'es-tu renseigné sur ce joueur ?
Je ne le connais pas, mais c'est le travail du staff de décortiquer le style de jeu de chacun des attaquants que je suis amené à affronter en match. Je me concentre avant tout sur ma performance, sans oublier pour autant la particularité des joueurs adverses évidemment.
Postiga joue avec Pauleta en équipe nationale du Portugal. Il va certainement lui demander quelques tuyaux pour te prendre à défaut... Ronan, pour finir l'entretien, je te propose de répondre au questionnaire de Proust revu et corrigé par poteaux-carrés. Ton équipe préférée ?
L'ESTAC.
L'équipe que tu détestes?
Metz car c'est une équipe qui ne me réussit jamais.
Ton geste technique favori ?
La sortie aérienne
Le son, le bruit du stade que tu aimes ?
L'ambiance de Bollaert.
Le son, le bruit du stade que tu détestes ?
Le stade Vélodrome.
Ton juron, ton gros mot ou blasphème favori lors d'un match ?
Putaiiin !
Un footballeur pour illustrer un nouveau billet de banque ?
Didier Drogba (rires)
Le métier du foot que tu n'aurais pas aimé faire ?
Toute la partie administrative d'un club de foot
Le joueur, l'entraîneur ou l'arbitre dans lequel tu aimerais être réincarné ?
Joël Bats
Si le Dieu du foot existe (on aurait entraperçu sa main lors d'un Angleterre-Argentine resté célèbre), qu'aimerais-tu après ta mort, l'entendre te dire ?
C'est bien, tu as vécu ta passion à fond, maintenant tu peux te reposer !