Dixième épisode des confessions d'Helder Postiga à son docteur, par Rising42. A savourer sans modération !


Alloooooooooooo ! Docteur ! C'est moi !!! Helder Postiga !!!

Je vous appelle de Marseille.
Oui, je sais, je suis encore à Marseille. Je suis sur le quai de la gare Saint-Charles avec les copains, et nous rentrons en train, parce que le charter égyptien, que le petit frisé avec l’écharpe verte avait réservé pour le retour, n’a pas pu décoller, car la compagnie aérienne n’avait pas payé sa facture de kérozène, ni l’équipage qui s’était mis en grève... C’est ce que j’expliquais au coach juste avant de vous parler… Les avions, c’est comme le football... À trop vouloir payer pas cher, on se retrouve avec des chèvres, alors qu’on croyait avoir acheté des purs sangs… Comment ?... Qu’est-ce que c’est que vous entendez?.... Euuuuuh…Je ne sais pas, Docteur… Aaah oui !!! Ce n’est rien !... Ce n’est que le Muezzin qui appelle à la prière, juste au moment où le TGV entre en gare...

Bon je m’installe et je vous raconte mon escapade marseillaise….

Voilà, Docteur... Je suis à vous… Donc, nous sommes arrivés à Marseille avant-hier. Nous avons atterri à Marignane par le vol de 15H15, sous un beau ciel bleu, un grand soleil et avec beaucoup de vent. Il paraît que le vent a été inventé par les Grecs à Marseille, pour que les bateaux avancent plus vite avec une voile, afin de ne pas fatiguer les rameurs. Nous avons été accueillis par les mouettes, dont le bavardage et les engueulades incessantes m’ont rappelé ma bonne ville de Porto au bord de l’Atlantique. Mais, Docteur, la différence avec Porto, c’est qu’ici, outre les mouettes qui mettent de l’ambiance, les habitants en rajoutent par leurs piaillements et leurs exagérations. Déjà à l’aéroport, tout le monde s’est disputé… Les grévistes… Les non-grévistes…Les grévistes-après-la-sieste… Nos sacs étaient bloqués dans un no man’s land tenus par les diverses tendances, et il a fallu toute la finesse du coach, appuyée par la persuasion d’Ilunga et de Jacky Chan, pour que nous puissions enfin les récupérer. Je ne vous parle même pas d’Omar, qui avait décidé de ne pas lâcher la drapeau de touche d’un arbitre qui avait atterri en même temps que nous. Heureusement que le petit excité avec l’écharpe verte avait sur lui quelques pesos argentins, et qu’il lui a suffit de les agiter devant les yeux d’Omar pour que ce dernier se concentre sur la monnaie et lâche le manche du drapeau, et par là même la main de l’arbitre.
Puis nous avons enfin pris la route vers notre hôtel ; et depuis le car j’ai pu me faire une petite idée de la ville. C’est une très belle ville, idéalement lovée dans un site incomparable. J’ai pu apercevoir le Vieux Port, minuscule, avec quelques bateaux qui essaient de flotter dans une flaque... Les bus en grève… La Canebière, une avenue de mille mètres qui descend de la ville jusqu’au port, que vous pouvez voir depuis la lune si vous êtes équipé d’un télescope Afflelou, mais qui fait bien ridicule comparée à notre Grand’ Rue stéphanoise de sept kilomètres... Le port de commerce en grève… Le minaret de Notre-Dame de la Garde qui surveille la mer pour prévenir de l’arrivée des Maures... Les ferries en grève... Le Château d’If, sur une île au large, une ancienne prison où a été incarcéré le comte de Montecristo, et un dirigeant de l’Olympique de Marseille, le club de football local, qui, m’a raconté Loïc, envisage d’y transférer son siège social, en raison des enquêtes policières en cours, et en prévision des prochains procès, par soucis de proximité avec les cellules, afin d’éviter les transferts coûteux des condamnés.

Et puis, Docteur, j’ai aperçu mes premiers Marseillais… Enfin, pas les premiers, puisque notre capitaine, Julien Sablé, est né à Marseille. Mais Julien, lui, est tellement resté au froid, qu’il a pris l’habitude de se bouger pour ne pas geler sur place… Il a seulement conservé l’accent qui m’empêche de comprendre clairement les consignes qu’il nous donne avant les matches. Mais ici, Docteur, quand on observe bien les Marseillais, on a une impression de surplace, ou en cas d’agitation, on croirait regarder un ralenti à la télévision. Le moindre geste est décomposé en de nombreuses séquences successives, comme chez Walt Disney. Des partisans du moindre effort… De plus, ils font souvent un geste récurent… Ils lèvent le coude sur les terrasses… Tantôt à droite… Tantôt à gauche… Et d’une façon tellement bien synchronisée, qu’on dirait un bande de canards assoiffés et non confinés. Ils portent tous à leurs lèvres 51 fois un verre empli d’un liquide jaune qu’ils appellent Pastaga, une sorte de vin d’anis, sans doute apporté par un de mes lointains ancêtres, échoué ici lors d’un naufrage, alors qu’il naviguait vers Saint Jean d’Acre, pour la Troisième Croisade. Les Marseillais ont tous des lunettes noires sur le nez, pour se protéger du soleil qui les fait cligner des yeux, ce qui les fatigue et les fait transpirer, ou bien pour ne pas être reconnus par la police, car ils appartiennent tous, de près ou de loin, aux maffias locales, la marseillaise, la corse ou l’olympienne, et pour se donner une contenance, un air macho qui leur sert à draguer les filles, qui n’aiment que les Scandinaves... Ce qui fait dire à Feindouno qu’il n’a aucune chance ici, et au Sud de l’Europe en général, et qu’il ferait peut-être mieux de se faire transférer à Rosenborg.

Ici la circulation automobile est folklorique… Les passages cloutés et les feux tricolores sont de pures objets de décoration… Les Marseillais aiment le vert, et ne s’arrêtent jamais au rouge. Ils se parlent d’une rue à l’autre, ou d’une voiture à l’autre, en hurlant pour se faire entendre, pour que tout le monde en profite et pour s’imaginer qu’ils existent… Ce qui fait que personne ne se comprend… Ici, Docteur, tout le monde se traite de con avec le sourire… J’ai lu dans ma grammaire que les Marseillais ne connaissent pas la virgule, et qu’ils la remplacent par « putain Â» , et quelquefois même par « encu** Â»â€¦ Ce qui peut s’expliquer par l’origine grecque de la grande majorité des habitants… Vous n’êtes pas d’origine grecque au moins, Docteur ? Aaah, bon, vous me rassurez… Mais tout cela se passe dans la bonne humeur, car dans la langue marseillaise, tous ces mots ne sont pas des insultes, mais des marques d’affection… Il paraît que les seules insultes qu’ils emploient sont « Parisien Â» et … Vous ne devinerez pas, Docteur… « Lyonnais Â», qui me semble être beaucoup plus grave.

Vous connaissez le nom du stade, Docteur ? Il se nomme le stade Boulodrome, parce que les supporters marseillais ont les boules à chaque fois qu’ils voient jouer leur club. Docteur, il paraît qu’ici les gens sont masochistes… Ils sont en permanence à la recherche du plaisir dans la souffrance, et pour cela, ils vont dans leur stade, où les matches se transforment en séance de flagellation collective, et où ce sont les joueurs qui tiennent le fouet. Je ne sais pas si ça se soigne, Docteur, mais vous devriez vous intéresser à ce problème endémique, où le soumettre à l’OMS… Non, Docteur, ce n’est pas l’OM au pluriel… C’est l’Organisme Mondial pour la Santé… Le stade Boulodrome n’est pas couvert… Le public y siffle sans arrêt… Janot m’a raconté qu’ici tout le monde siffle n’importe qui ou n’importe quoi : L’arbitre… Les joueurs marseillais… Les adversaires… Une mouette qui passe… Les publicités… On dirait une volière à ciel ouvert d’où personne ne s’envole sauf les sifflets. Il y a les titres des journaux dans les tribunes…Comme chez nous… J’ai même vu un jour à la télévision une pancarte que des supporters marseillais avaient installée pour faire connaître l’un de leur site : http://www.equipedemerde.com…vous/ connaissez ce site, Docteur ?... Moi, je ne savais pas trop ce que ça voulait dire, alors j’ai essayé d’y aller, mais, à chaque fois que je tapais l’adresse sur mon clavier, je tombais systématiquement sur un site de supporters lyonnais… J’ai dit au coach qu’il fallait peut-être prévenir par courtoisie les dirigeants marseillais, et il m’a dit de fermer ma gueule… Moi j’avais juste dit ça pour rendre service… J’aime bien rendre service, moi, Docteur...

Docteur, le coach nous a bien prévenus… Marseille est une équipe qui joue à seize joueurs.
- Onze joueurs sur le terrain qui portent un maillot blanc et bleu ciel, les mêmes couleurs que la Sainte Vierge qui domine la ville, et qui sert de douzième homme… Si je peux dire… Vous me suivez, Docteur ?!!!...
- Le treizième homme est l’arbitre qui , m’a expliqué David, laisse durer les matches jusqu’à ce que Marseille marque le but de la victoire ou celui de l’égalisation… Quelquefois, les matches peuvent durer toute la nuit, voire même jusqu’au lundi soir, si j’ai bien tout saisi...
- Un quatorzième homme, non identifié celui-là, qui offre des bouteilles d’eau aux adversaires après y avoir injecté avec une seringue un produit pour décaper les fourneaux.
- Un quinzième, qui nettoie les vestiaires avec de l’ammoniac pour être bien sûr que les microbes importés du reste du pays ne s’y incrustent pas, et qui par la même occasion tue tous les moustiques et les mouches à merde… Donc certains devront faire gaffe...
- Le seizième est l’infirmier qui aligne avant le match tous les joueurs de l’OM, les fesses à l’air dans le vestiaire, et qui les vaccine avec un lubrifiant pour moteur de Formule Un… Même que le coach nous a dit qu’il en a mis dans le réservoir de sa voiture et quand il a démarré il a pris le capot dans la gueule… Les fois où l’OM prend des raclées, c’est quand le soigneur injecte par erreur aux joueurs le produit destiné aux bouteilles d’eau, ou bien pour la Saint-Ernest, car suivant le proverbe provençal bien connu : À la Saint-Ernest, l’OM prend sa veste.

Papus Camara, qui a joué à Marseille dans sa jeunesse dissolue, m’a expliqué que l’OM a trois entraîneurs : Jean Fernandez, un bien brave, qui exprime sa satisfaction permanente, toujours sur la même note, un ut mineur, quel que soit le résultat... Louis Acariâtre, tellement mielleux et sucré qu’il vous refile du diabète rien qu’en vous regardant dans les yeux… Et José Anigo, que les autres prennent comme le condensé d’un âne et d’un nigaud, mais qui en réalité est juste un Marseillais pure race, et sans aucun doute un homme qui aurait beaucoup apporté à ce club en travaillant sur le long terme. Mais, il paraît que le long terme est une formule seulement employée à Lyon. De plus, Marseille possède deux présidents. Le Président officiel qui gaspille sans compter l’argent apporté maladivement par le Président officieux, aux trois initiales et aux trois rayures. Vous voyez, Docteur, que j’en ai appris des choses, moi ?...

Savez-vous encore, Docteur, que l’Olympique de Marseille est, d’après le journal But et la propagande sportive en général, le club français le plus titré, avec Saint Etienne ? Non !!! Vous non plus, vous n’y croyez pas, Docteur ? Eh bien vous avez parfaitement raison. J’avais moi-même un doute et j’ai demandé à Feindouno, mais il ne connaît rien au palmarès de son club, alors vous imaginez ce qu’il peut connaître des autres !... Alors, j’ai consulté mon maître, José Mourinho, Docteur ès Football diplômé de l’Université de Coïmbra, pour avoir un avis sûr. Eh bien figurez-vous, Docteur, que tout ce que racontent les journalistes est totalement arrangé, comme les matches de Marseille. José m’a dit que Marseille a gagné un tiers de ses titres de Champion de France ou de vainqueur de la Coupe de France au dix-neuvième siècle, alors que le football n’était représenté que par quelques clubs folkloriques ; un autre tiers en débauchant les joueurs qui avaient fait la gloire de Saint-Etienne, donc en profitant du travail des Verts ; et le dernier tiers sous la présidence d’un repris de justesse par un radar sur l’autoroute de Béthune, qui truquait une grande partie des matches en offrant aux joueurs adverses une pelle et une pioche pour faire des trous dans leurs jardins… Ce qui ne marchait pas avec les joueurs de Monaco, parce que là-bas il n’y a pas de jardin, il n’y a que du béton, et l’investissement dans onze marteaux piqueurs aurait été trop lourd. Marseille a aussi gagné une Coupe d’Europe, parce que les adversaires avaient la diarrhée et toutes sortes d’indélicatesses digestives, et parce que les joueurs marseillais étaient anormalement excités, tellement exaltés, que quand certains pleuraient de joie après avoir marqué un but, on voyait leurs larmes gicler à cinq mètres, de vrais karcher. Si bien, que d’après José, l’étoile d’or qui orne le maillot marseillais est totalement usurpée, pas comme la nôtre. Là aussi, j’ai expliqué tout cela dans le car… Et encore une fois le coach m’a dit de la fermer, que je fatiguais tout le monde, et que ça ne servait à rien de faire une révolution dans un pays où il fait bon se voiler la face sur l’origine des victoires depuis 1944, et se glorifier d’artifices.

Un qui était content de venir à Marseille, c’était le petit excité avec son écharpe verte. Surtout qu’à ce que l’on m’a raconté, il connaît très bien les lieux, car il y a quelques années, il sévissait à l’OM et portait une écharpe blanche et bleu ciel autour du cou... Mais il l’a perdue au bout de quelques jours seulement, et a disparu très vite de crainte de finir au Château d’If. Depuis, il a erré comme une âme en peine, jusqu’à ce que les Verts le recueillent, ou plutôt accueillent son portefeuille.

Docteur, vous connaissez la devise de l’OM ?... Non ?... Eh bien, c’est : Droit au but. Ce qui explique pourquoi Piquionne n’a jamais signé à Marseille, puisque, ne connaissant pas la définition de la ligne droite, sa technique personnelle pour voyager consiste plutôt de passer par Buenos-Aires pour aller à Rome. Il n’est d’ailleurs pas le seul chez nous à passer par Buenos-Aires…Moi j’en connais qui ne font pas qu’y passer, mais qui y passent du temps… Donc vous imaginez, Docteur, pour que Piquionne aille droit au but, il faut au minimum le programmer pour qu’il suive une ligne blanche qui l’y mène.

En parlant de Fred, je ne sais pas ce qu’il lui arrive… Depuis que nous sommes à Marseille, il semble avoir été touché par la grâce. Il passe son temps à chercher la Bonne Mère avec une boussole, et tombe à genoux dans la même direction pour déblatérer des prières et expier ses occasions loupées. Samedi, durant l’entraînement au bord de la mer, il a tapé comme une mule dans le ballon… Tellement fort, qu’il l’a envoyé au large… Eh bien, vous ne me croirez pas, Docteur, mais il est allé le chercher en marchant sur l’eau… Transfiguré… Je lui ai même dit que si par miracle il marquait encore d’ici la fin de la saison… Pure hypothèse d’école… Il faudrait qu’il bénisse le ballon pour multiplier les buts… Lorsque le petit excité avec l’écharpe verte a vu cela, il aussitôt envoyé un fax au Vatican… Quant au coach, il a demandé au cuistot de faire des menus très particuliers pour Piquionne… Avec des abats pour le muscler derrière les oreilles et de la cervelle… Beaucoup de cervelle… Pour régénérer je ne sais plus trop quoi… Moi j’ai voulu manger la spécialité locale : la Bouillabaisse… Succulent… J’ai demandé au cuistot comment il faisait… Il m’a dit que pour faire une bonne bouillabaisse, il fallait se lever de bon matin, préparer le pastis et sans cesse, raconter des blagues avé les mains, et surtout ne pas oublier les deux s à la fin, parce que ça ne veut pas dire la même chose… Je n’ai rien compris à cette recette, mais c’était bien bon. Ça manquait un peu de morue, mais, bon, Docteur, je vous la recommande.

Sinon, hier soir nous sommes allés au stade Boulodrome vers 19 heures pour jouer à 21 heures… Docteur, je crois bien qu’à force de reculer l’heure des matches, un de ces jours, nous allons jouer à 5 heures du matin… Bon enfin bref… Le coach a emmené toujours les mêmes, sauf mon copain argentin qui devait jouer avec la CFA samedi à Balma… Mais le match ayant été reporté, il est resté à Geoffroy Guichard pour repeindre les poteaux des cages en vert fluo, afin de faciliter le repérage et les tirs sans visibilité de Piquionne. Mazure, lui, est venu avec sa caisse à outils… Au cas où il n’y aurait pas eu de lumière dans les vestiaires, ou bien une panne de douche… On n’est jamais trop prudent, surtout quand on se rapproche de l’Afrique… Et puis, quand on a dans un groupe un bon ouvrier à tout faire, et pas cher, il ne faut pas s’en priver. Le plus gênant, c’est encore le petit frisé avec l’écharpe verte qui suit son clone comme une ombre. Je me tue à dire que ce type a pété une durite ou a cramé un circuit… Je ne sais pas, moi… Mais la preuve qu’il a été démonté et remonté dans le désordre, c’est le regard plein de complicité qu’il a échangé avec Ribéry lorsqu’il l’a croisé dans les couloirs des vestiaires, comme s’ils s’étaient connus chez Speedy pour leur dernière révision au rabais.

Nous entamons le match en étant dominés pendant les dix premières minutes. Puis nous prenons progressivement la situation en main. J’ai même une occasion en tirant dans la surface malgré l’opposition d’un défenseur, mais Barthez détourne la balle du pied. Oui, Docteur, Barthez… Oui c’est cela, celui-là même qui se prend pour un lama et qui crache à la gueule des gens... Il s’en suit une occasion en or pour Piquionne qui la gâche lamentablement… Comme quoi la cure de cervelle n’a pas eu l’effet escompté. Puis, Loïc Perrin est littéralement agressé par Civelli. Il se tord de douleur, et l’arbitre, déplorable sur ce coup-là, ne comprenant la gravité de la blessure qu’après une minute d’hésitation, se décide à donner un carton jaune à l’agresseur, alors que le rouge s’imposait, et tout cela sous les sifflets d’un public marseillais non moins déplorable, qui prouve ici, s’il en était besoin, qu’il est composé majoritairement de braillards hystériques qui ne comprennent rien au football. Entorse du genoux pour Loïc, et je crains que ce ne soit plus grave… Deux minutes plus tard, l’arbitre siffle un coup franc totalement imaginaire pour Marseille, et Pagis marque d’un tir tendu au ras du poteau droit, alors que notre mur saute en l’air comme à Berlin…Mais comme chante Piquionne sous la douche : Qui ne saute pas pas n’est pas Lyonnais… Pendant ce temps, Loïc n’est toujours pas remplacé, car Mazure n’avait pas terminé de repasser le maillot de Diawara, son remplaçant, qui ne pouvait donc pas rentrer sur le terrain… Pagis, encore lui, profita de ce que nous ne soyons plus que dix sur le terrain pour ajouter un second but… Pagis est un joueur opportuniste, Docteur, un homme qui sait saisir sa chance et profiter de la faiblesse de l’adversaire, comme il a su quitter le navire strasbourgeois avant qu’il ne coule. Moi je crois bien que ces attitudes dénotent d’une forme de lâcheté. D’ailleurs, Janot, qui fait toujours preuve d’un goût très sûr en portant un maillot de rugby parisien, et d’une intelligence très fine, a lui-même convenu à la fin du match avec un journaliste que Pagis est un joueur exceptionnel, allant même jusqu’à dire qu’il était content que ce soit lui qui lui ait mis les deux buts. Mais il est vrai que si on compare Pagis à Fred, il n’y a pas photo… Ils ont tous les deux un amour limité du maillot qu’ils portent, mais le premier a tout de même un sens aiguisé du but. Et pendant ce temps, Diawara, patiente sur la ligne de touche en fredonnant cette chanson bizarre :

Le bon Roi Dagobert a mis sa culotte à l’envers,
Le bon Roi Dagobert a laissé son maillot au vestiaire...


Malgré ces coups du sort, nous reprenons progressivement nos esprits, et atteignons la mi-temps sur ce score peu flatteur mais immérité de 2-0.
Après le discours du coach mêlé d’encouragements et de reproches, nous revenons sur le terrain, bien décidés à redresser la barre, du moins pour certains d’entre nous… Car, Docteur, j’ai de plus en plus la sensation que j’évolue dans deux équipes en même temps : l’A.S. Saint-Etienne, et l’A.S. Feindouno-Piquionne. Nous réalisons une assez bonne seconde période, et partageons le temps de jeu avec notre adversaire, qui joue à douze jusqu’à la fin du match, avec l’arbitre qui a choisi son camp. Déjà il avait clairement voté au premier tour pour Marseille en n’expulsant pas cette brute épaisse de Civelli… Mais à présent il confirme son vote en ne sifflant pas un pénalty évident, lorsque je m’engouffrai dans la surface et que Ribéry me faucha comme du blé mûr. Ribéry, qui avait bien convenu de l’existence du pénalty, voulu démontrer par l’exemple à l’arbitre son erreur grossière de jugement, et il mima dans notre propre surface, avec l’aide de Camara, la faute qu’il avait lui-même commise quelques instants plus tôt… L’arbitre convint de son incompétence en sifflant cette fois-ci, pour se faire pardonner, un pénalty logique pour Marseille. Ce qui me fait plaisir, Docteur, c’est que parfois la justice sait reconnaître ses torts, et indemnise les faux coupables. Pagis, encore lui, tira le pénalty de fort belle manière, et Janot, qui n’est jamais si bon que lorsqu’il ne pense pas trop, détourna la balle au prix d’un plongeon admirable, comme il fit d’ailleurs de nombreux beaux arrêts durant tout le match. Perquis démontra son admiration pour Civelli en manquant d’envoyer Nasri à l’hôpital. Puis, Feindouno sombrant dans un quasi coma, Piquionne occupa son temps entre les occasions perdues, les tentatives isolées et la combativité stérile. De peur que ma présence déprime Fred, le coach préféra me sortir à dix minutes de la fin pour faire entrer Sébastien Mazure, fort mécontent que l’on vienne le déranger dans son repassage. Mazure démontra une fois de plus son incompétence en ne marquant pas les trois buts de la victoire en dix minutes. Docteur, je ne comprends pas que le club ait embauché un joueur aussi nul, incapable d’être meilleur buteur du championnat en ne jouant que les temps additionnels. Bon, comme dirait le coach, je ne suis pas là pour donner mon avis… Mais quand même… La fin du match fut dramatique, car Barthez sortit sur une jambe, victime sans doute d’un claquage… La blessure de Loïc est anecdotique… Celle de Barthez fut l’évènement majeur du match, car tout le monde se demande comment l’équipe de France va se débrouiller pour la Coupe du Monde en Allemagne sans son gardien fossilisé… Nous sortîmes d’ailleurs du terrain tous en larmes, et Mazure, sitôt arrivé dans les vestiaires, se mit à confectionner des brassards noirs en signe de deuil... Et voilà, le match s’est terminé sur un drame et par une défaite… On en avait perdu l’habitude… Mais dimanche prochain, on va se refaire une santé en battant Strasbourg, et ça ne sera pas difficile, puisque Pagis est maintenant à Marseille, les Strasbourgeois n’ayant pas de chéquier et l’arbitre n’acceptant pas les cartes bancaires.

Sinon, Docteur, vous, ça va, j’espère ?!!! Bon le train démarre… Je vais vous laisser… Il faut que je mette mon casque, car Piquionne est assis en face de moi, et on ne sait jamais… Au cas où il basculerait vers l’avant pendant son sommeil agité…

On se rappelle, Docteur !!!... Portez-vous bien d’ici là !!!...