Christophe Pignol, qui a bouclé au LOSC une carrière pro entamée à l'ASSE, s'est confié à Poteaux Carrés avant le choc qui opposera les deux clubs ce samedi après-midi.


Peux-tu nous rappeler le contexte de ton arrivée à Sainté ?
Je suis originaire de Marseille. Je jouais à l’AS Mazargues, c’était un peu à l’époque un club filiale de l’ASSE parce que le recruteur Pierre Garonnaire allait souvent voir les cadets nationaux de Mazargues. Il y avait eu Laurent Roussey mais aussi Thierry Gros et Gilbert Ceccarelli avant moi qui avaient joué là-bas. J’ai signé en juniors à l’ASSE, j’avais 16 ans. J’ai intégré le centre de formation et j’ai connu à Sainté des hauts et des bas. Robert Herbin m’a fait jouer mon premier match en pro à 17 ans et demi. C’est un bon et un mauvais souvenir. Un bon souvenir car c’est toujours très marquant un premier match en pro. En plus c’était au Vélodrome. Un mauvais souvenir car ce n’était vraiment pas un cadeau. Je ne connaissais même pas les joueurs. J’avais fait un seul entraînement, et encore. Je me demande même si je n’ai pas fait le déplacement sans m’entraîner. Je me rappelle que je vouvoyais tous les joueurs. Il y avait Dimitrov, Sivebaek qui faisait sa rentrée en même temps que moi. Thierry Gros s’était blessé la veille. Christian Sarramagna m’avait appelé au centre et m’avait demandé de me préparer. J’étais bien sûr excité de redescendre à Marseille voir ma famille mais en même temps il faut imaginer la pression de faire ses débuts au Vélodrome des Giresse, Papin, Allofs Forster. J’avais beaucoup souffert et j’avais été remplacé à la mi-temps par Hervé Musquère. Je devais certainement être à la ramasse complet. C’est marrant mais je n’ai jamais retrouvé les images.

On peut te les retrouver. Membre de l’équipe du site Poteaux Carrés et administrateur de l’excellent compte ASSE Memories, Danish se fera un plaisir de te fournir les images.
Heu, non merci, c’est bon, je ne veux pas les voir ! (rires) Je ne tiens pas particulièrement à visionner ça, je devais être particulièrement à la rue. Le vague souvenir que j’ai, c’est que ça allait trop vite. Les mecs ils couraient à 2000 à l’heure par rapport à moi. Je me souviens qu’à la mi-temps le président André Laurent m’avait dit : « Début de carrière difficile, fin de carrière heureuse », un truc comme ça. J’avais gardé cette réflexion, je m’étais dit : « bon, il ne faut pas que je me décourage. » Après ça, Herbin avait continué à faire un peu appel à moi pour les entraînements, j’avais fait quelques bancs. Mais je n’ai joué qu’un seul autre match avec les pros, presque trois ans plus tard. J’avais encore passé une soirée difficile, on avait perdu 3-0 contre le Racing Paris d’Olmeta, Bouderbala et Ginola. J’avais enchaîné les blessures, ça avait freiné ma progression. Mais attention, j’endosse aussi une part de responsabilité. Peut-être que je me suis peut-être un petit peu endormi sur mes acquis. Je n’ai pas réussi à progresser alors que dans le même temps des mecs de ma génération comme Christophe Deguerville, Philippe Cuervo et Titi Camara ont fait leur trou et réussi à jouer. Moi je me suis peut-être un petit peu laissé aller. Ma dernière année de formation je suis parti à l’armée, au bataillon de Joinville, et de ce fait on ne m’a pas proposé de contrat pro.

Au final, qu’as-tu gardé de ces cinq années à Sainté !
Ma femme ! Ma femme ! Ma femme ! (rires) Ma belle-famille, beaucoup d’amis. Beaucoup de liens avec les gens, avec la région car j’y suis retourné après la maladie pour jouer à Andrézieux. J’aime beaucoup la région, je me suis vraiment attaché à la mentalité stéphanoise. Je vivais au club au départ, à Geoffroy-Guichard. J’étais pensionnaire du centre. Au bout de trois ans j’ai pris un appartement avec Jean-Marc Authié à La Terrasse. Ensuite j’ai pris un appart’ à Bergson. Je suis toujours resté proche du Chaudron ! Je garde des bons souvenirs d’ado. J’ai joué pas mal de matches avec les jeunes, notamment en équipe réserve. J’étais un peu couvé par Pierre Repellini, il m’appréciait beaucoup. Il m’avait nommé capitaine de la troisième division. J’ai aussi de bons souvenirs de matches en Gambardella. Mais le but, c’est de jouer en équipe première. J’ai très vite franchi un palier et ensuite j’ai stagné. Je pense que ce match à Marseille m’a fait beaucoup de mal. Je n’ai jamais eu l’occasion d’en reparler avec Robert Herbin, mais ce n’était vraiment pas un cadeau. Surtout titulaire à l’extérieur contre une grosse équipe. S’il m’avait fait entrer en cours de jeu à domicile dans un contexte plus favorable, ça se serait peut-être passé différemment. Après, on ne refait pas l’histoire. Mais au Vélodrome, j’étais trop juste physiquement, tactiquement.

Es-tu resté en contacts avec d’anciens coéquipiers stéphanois ?
J’ai gardé contacts avec certains mais pas avec beaucoup. Moi ma génération c’était Christophe Deguerville, Philippe Cuervo. Après il est arrivé Titi Camara, il y avait Greg Coupet. Willy Sagnol est arrivé un peu plus tard mais lui était en amateur. Je suis bien sûr toujours en contacts avec Willy car on est associés dans mon complexe de futsal. On avait rejoué ensemble à Monaco. Il m’est arrivé de rejouer avec des anciens. A cette occasion j’ai pu revoir des joueurs comme Gilbert Ceccarelli. J’ai revu aussi Thierry Gros car il est basé à Manosque.

Quel coéquipier t’a le plus impressionné à Sainté ?
Georgi Dimitrov. Il m’avait pris un peu sous son aile quand j’étais au centre de formation et que j’avais la chance de m’entraîner avec les pros. Il me donnait plein de conseils. C’était quand même le mec qui était capitaine de l’équipe de Bulgarie. Il m’a impressionné. Après, y’a plein d’autres joueurs qui m’ont marqué. Moi mon exemple c’était Thierry Gros qui jouait arrière gauche. Quand je regardais les matches dans la tribune Faurand, je ne regardais que lui. Rob Witschge aussi m’a impressionné.

Tu n’as pas été conservé à Sainté mais tu as eu le mérite de rebondir.
Effectivement. Quand l’ASSE m’a signifié qu’elle ne me proposerait pas de contrat pro, j’ai pris ma plume et j’ai envoyé des CV. Comme j’avais fait le Bataillon de Joinville sous les ordres de Roger Lemerre qui donnait de bonnes infos sur moi, j’ai sollicité des clubs surtout de D2 car je n’avais pas la prétention de pouvoir rejoindre un club de D1. Parmi ces clubs il y avait Alès, le Red Stad et Istres. Istres m’a demandé de faire un essai, ça s’est bien passé et j’ai passé mon premier contrat pro là-bas. Le choix a été fait rapidement car c’était un bon club de D2 et surtout ça me rapprochait de ma famille. J’ai eu la chance d’arriver à Istres à une période où ça marchait bien. Il y avait Beaufreton, Mohamed Chaouch, Réginald Ray, Pascal Grosbois, Chanelet… J’ai fait deux années complètes là-bas avant de partir à Nantes. Budzinski était venu superviser Jean-Marc Chanelet à droite mais ce jour-là j’ai été très bon à gauche. De retour à Nantes, Budzinski a dit à Coco Suaudeau : « Finalement on va prendre l’arrière gauche ». Jean-Marc m’a rejoint l’année suivante. Comme quoi il y a un facteur chance dans une carrière. A la base ce n’était pas moi que Nantes suivant.

Tu t’es régalé chez les Canaris.
Oui même si j’en ai un peu bavé au début car j’ai eu l’impression d’arriver sur une autre planète. Ça allait à 2000 à l’heure, je trouvais que les gaziers se trouvaient les yeux fermés. Les Pedros, Karambeu, Loko, ça jouait super bien. J’avais l’impression que je n’allais jamais jouer mais je me suis accroché. Pendant six mois je n’ai pas joué mais Coco m’encourageait. Il était positif, il me disait que ça allait venir. J’ai commencé à jouer quelques matches après la trêve hivernale, et progressivement j’ai gagné ma place de titulaire au poste d’arrière gauche à Nantes, au point que beaucoup de gens pensaient que j’étais issu du centre. C’était le plus beau compliment qu’on puisse me faire car ça prouvait que m’étais complètement fondu dans le collectif nantais. Je garde bien sûr de fabuleux souvenirs de cette période, d’autant plus que j’ai gagné là-bas mon premier titre de champion de France. Signer pro, c’est déjà une fierté, mais remporter le championnat, c’est extraordinaire. On n’en profite pas assez sur le moment mais avec le recul on se rend compte que c’est exceptionnel. On a encore le record de 32 matches sans défaites, même s’il est possible que le PSG le batte cette année. Ce n’est pas donné à tout le monde de faire une telle série. On avait vraiment un super groupe qui respirait le foot.

C’est à Monaco que tu as remporté ton second titre de champion de France.
C’est vrai, dans un contexte un peu différent. C’était pour moi un challenge après quatre ans passés à Nantes de partir à Monaco. L’AS Monaco jouait la Ligue des Champions, Tigana voulait absolument me faire venir. Il y a toujours eu d’excellents joueurs à Monaco. J’ai pu évoluer à côté de gars qui ont été champions du Monde. J’ai pas mal joué au début, puis un peu moins. La situation s’est compliquée pour moi quand Claude Puel a repris l’équipe. Le dispositif tactique fait que je n’étais pas utilisé de la même façon qu’à Nantes. Chez les Canaris, un latéral offensif avait toute sa place. Mais Claude Puel voulait plutôt à ce poste des gars avec de grosses capacités défensives. J’ai été mis en concurrence avec Philippe Léonard. J’ai moins joué les derniers mois mais j’ai quand même été champion de France pour la seconde fois de ma carrière. Même si parfois c’était parfois un peu dur de ne pas trop jouer, je ne crache pas dans la soupe. Cette expérience de trois ans à Monaco a été intéressante. J’ai évolué dans un cadre exceptionnel, dans un club exceptionnel avec des joueurs exceptionnels. J’ai eu la chance de jouer la Ligue des Champions. J’ai joué une demi-finale contre la Juventus de Turin.

Tu as ensuite rejoint le LOSC, où tu as dû prématurément mettre un terme à ta carrière de joueur pro.
Oui. J’avais pourtant signé un contrat de trois ans à Lille. J’étais en fin de contrat avec Monaco et le LOSC montait de Ligue 2 en Ligue 1 avec la génération à Vahid, Pierre Dréossi et derrière Françis Graille. Ils sont venus à Monaco et j’ai signé assez rapidement. J’ai rejoint un groupe exceptionnel humainement parlant, un coach qui tirait le maximum des joueurs qu’il avait à sa disposition et tout le monde le suivait. En ce moment on m’appelle beaucoup pour que je donne mon avis sur coach Vahid mais j’ai du mal à dire du mal de lui parce que j’ai connu huit mois où j’ai vu un groupe qui était derrière son entraîneur, l’entraîneur qui était derrière son groupe. C’étaient vraiment des gars exceptionnels. Moi je suis tombé malade au bout de huit mois et j’ai dû quitter mes partenaires.

Tu avais déjà eu des alertes, des signes avant-coureurs avant de tomber malade ?
Non, pas du tout, c’était une leucémie aiguë donc c’était assez brutal. Il y a plusieurs formes de leucémies, les leucémies chroniques qui viennent qui repartent, qui se soignent par médicaments. Moi c’était une leucémie aiguë donc c’était assez foudroyant. Je suis tombé quasiment dans le coma au moins 48 heures. Les signes, oui, j’en ai eu. Pendant une semaine j’ai eu une fatigue anormale, je voyais bien qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas, je ne mangeais plus, je n’arrivais plus à courir, mais j’étais loin de m’imaginer que j’allais avoir un truc pareil. On avait fait un stage à Casablanca, j’avais déjà ressenti la fatigue en stage mais on est rentrés à Lille. J’ai commencé à sentir que j’étais fatigué, ce n’était pas normal quoi ! J’ai demandé au médecin à faire une prise de sang et là, par contre, le verdict est tombé immédiatement et j’ai été hospitalisé en urgence. Après j’ai pris l’avion pour aller me faire soigner à Marseille parce que j’avais ma famille ici. J’ai quitté mes partenaires comme ça. J’ai suivi un petit peu à la télé la qualification en Champion’s league. C’est une épreuve, c’est pas un cadeau, hein ! Faut s’accrocher.

Tu as failli y rester.
Oui mais tu sais, dans nos malheurs, il faut un peu de réussite aussi. Je pense que le fait d’avoir été sportif, ça m’a aidé. Je n’avais que 31 ans, j’ai pu supporter des traitements assez lourds. J’ai eu la chance d’avoir été pris en charge assez rapidement, les médecins de Lille sont vite intervenus. Je suis rentré à l’hôpital, j’ai été transféré sur Marseille. Les traitements dans la nuit, ça a été vraiment une prise en charge immédiate. Après, je suis resté quinze jours en réa. Ensuite, c’est pile ou face. Si les traitements marchent on a une chance de s’en sortir mais si ça ne marche pas, malheureusement …. Heureusement pour moi les traitements ont fonctionné, j’ai en subi pendant huit mois. Au bout de huit mois, on m’avait parlé d’une greffe, je n’en ai pas fait, je m’en suis sorti comme ça. Il faut un peu de réussite aussi, après y a le soutien des gens autour et puis il faut être un battant. Il ne faut pas se laisser aller.

Après avoir guéri tu as créé une association.
Dans un premier temps il y avait beaucoup de gens qui me sollicitaient parce que ça avait quand même marqué un peu les esprits dans le monde du foot. Qui plus est l’équipe de Lille marchait bien donc j’avais les gars qui faisaient toujours un peu référence à la maladie. Les gens me sollicitaient et du coup j’ai créé une assoc. On a aidé les enfants atteints de leucémie, en filant des dispositifs informatiques, enfin quand j’ai le temps de m’en occuper parce que j’ai repris une activité professionnelle.

Pendant ta maladie le LOSC a été à tes côtés ?
Le club a été surtout aux côtés de mon épouse et de mes enfants. Ils ont accompagné ma femme matériellement parlant. Ils lui ont dit le jour où j’ai été hospitalisé à Marseille : « Tu suis Christophe et tu ne t’occupes de rien. Tout le reste on s’en occupe. » Le déménagement, le salaire qui tombait tous les mois. Ma femme, elle, n’avait qu’une idée en tête, c’était de me soutenir. Ils se sont comportés royalement, du début jusqu’à la fin. Vahid notamment a été présent, il avait toujours une pensée pour moi. Sa femme a appelé ma femme, il ne m’a jamais lâché. Quand j’ai eu terminé les traitements, il m’a appelé. Il m’a dit : « Christophe, qu’est-ce que tu veux faire ? Il te reste deux ans et demi de contrat ». Je lui ai dit : « J’aimerais bien essayer de reprendre ». Il m’a dit : « Et bien prépare-toi, je t’attends, tu reviens quand tu veux ». On a eu des relations assez fortes. Après je me suis rendu à l’évidence que je ne pouvais pas continuer à jouer au haut niveau, c’était trop d’exigences, trop de sacrifices que je n’avais plus envie de faire. A 31, 32 ans je me suis rendu à l’évidence qu’il fallait que j’arrête. Ça n’a pas été facile comme décision à prendre, j’aurais vraiment voulu continuer à jouer au football mais j’avais trop laissé de forces dans la bataille et un jour j’ai rencontré les dirigeants. A l’époque, Luc Dayan quittait la présidence et c’est Seydoux qui prenait la présidence, un gars que je ne connaissais pas. On a mangé ensemble, je lui ai expliqué mon cas et à la fin du repas, je me rappelle que Michel Seydoux m’a dit : « Voilà, il te reste deux ans, le club te doit ça ». Il a fait le chèque et je suis parti. Jusqu’au bout, le LOSC a été à mes côtés et je ne l’oublierai jamais.

Tu as ensuite fait ton come-back dans la Loire…
Exactement. En fait, j’avais envie de me prouver que je pouvais jouer encore un peu. Hervé Didier m’appelle, il était entraîneur d’Andrézieux. Il me dit : « Tu en es où ? » Je lui dis : « Ecoute, j’ai tout perdu musculairement ». Il me dit : « Cela ne te dirait pas de venir jouer avec nous en CFA ? ». Je réfléchis un peu et finalement je dis oui. On est repartis sur Andrézieux, j’ai joué toute une saison et je me rappelle avoir passé une saison extraordinaire, j’étais vraiment comme un gamin. Le fait de re-participer à des séances d’entraînement… Quand j’ai fait mon premier match de préparation j’étais comme un gosse, j’avais l’impression de rejouer au football pour la première fois. Je me rappelle que j’étais à la rue complet et Hervé me dit : « De toutes façons tu fais à ton rythme, je ne te mets pas de pression ». Moi je voulais faire bien, j’avais des gamins qui avaient vingt ans autour de moi et j’ai passé une super année. Après j’ai arrêté. Une fois que j’ai eu fini je suis allé voir les dirigeants d’Andrézieux. Je leur ai dit : « Je joue cartes sur tables, j’arrête d’être joueur. Si vous avez quelque chose à me proposer je reste ici, sinon … » Bon, à l’époque ils n’avaient peut-être pas trop de moyens. Donc du coup je suis redescendu dans le sud.

C’est là que tu t’es reconverti avec succès tout en gardant un lien avec le football.
Oui. J’ai eu l’idée de monter un complexe de foot indoor à une époque où il n’y en avait qu’une quinzaine en France. Je suis quasiment tous allé les voir et j’ai fait une synthèse de tout, je me suis dit que ça pouvait marcher. J’ai monté ça à Gémenos, près de Marseille, c’était le premier dans la région. Il y en a maintenant quinzaine. Ça fait onze ans qu’on a ouvert ça avec mon frère. Ça permet de toucher un peu au monde de l’entreprise et de rester dans un milieu qu’on affectionne, qu’on connaît. Je sais que quand j’ai fait les plans et monté le projet, je l’ai fait vraiment au feeling, vraiment comment je le sentais quoi, les dimensions, les ballons, je l’ai vraiment fait en fonction de mes sensibilités. Ça a bien marché tout de suite et voilà. Maintenant y a la concurrence. On a créé une école de foot, on a diversifié un peu, c’est bien !

En tant que consultant sur beIN, suis-tu avec attention le parcours de l’ASSE ?
Bien sûr mais cette saison je n’ai pas encore eu l’occasion de commenter les Verts car je ne couvre que le Sud. Par contre j’ai vu le LOSC à Monaco et j’ai vu bien sûr le Lille-Marseille de dimanche dernier car je suis aussi consultant à La Provence. Je n’ai pas encore eu l’occasion de voir des matches entiers des Verts cette saison mais j’ai quand même vu de larges extraits. Je suis obligé de suivre les Verts. Avec ma femme, c’est obligé ! Elle est de Saint-Just-Saint-Rambert. On a un peu de sang vert dans la famille ! (rires) Les Verts ont su garder leur ossature à l’intersaison. C’était le souhait de Jean-Louis Gasset. Ils ont ensuite apporté quelques renforts, notamment avec Khazri qui apporte sa touche technique mais aussi son efficacité. Le retour de Rémy Cabella apporte également une touche technique supplémentaire dans le secteur offensif. Après, Sainté est le type d’équipe qui ne doit pas avoir trop de suspendus ou de blessés. Il y a quelques cadres dans l’équipe, une colonne vertébrale assez importante : Ruffier, Perrin, M’Vila. Il fait vraiment que les cadres soient dans l’équipe. Ensuite on retrouve l’état d’esprit de Saint-Etienne, des gars qui mouillent le maillot. Mon fils est monté voir le match contre Monaco l’autre jour, il m’a dit que ça avait été un bon match.

Il était l’an dernier pensionnaire du centre de formation de l’ASSE.
Et oui, Lucas a du sang vert lui-aussi ! Il jouait à Gémenos depuis des années. Moi je ne l’ai jamais trop forcé à faire des essais ou des trucs comme ça mais comme c’est lui qui m’a demandé, je lui ai dit : « Ecoute, on va appeler Jean-Philippe Primard, s’il peut te prendre un peu, il te donnera son avis. » Jean-Philippe l’a pris pour un tournoi, ça s’est bien passé. Ils l’ont pris une année sans lui faire signer de contrat. Après il s’est rendu compte que ce n’était pas évident. D’abord parce que je pense qu’il aurait dû y aller un petit peu avant. Je pense qu’il avait accumulé trop de lacunes. Il a retrouvé des gars qui étaient déjà au centre depuis deux ou trois ans. Mais je pense que c’est la plus belle année que Lucas a passée. Il était hébergé chez son papy et sa mamy à Saint-Just. Il suivait les cours à Tézenas avec les gars du centre. Il s’entraînait tous les jours dans des supers conditions dans un super club. Pour un gamin de son âge, il a goûté, il a touché du doigt, il a vu ce que c’était. En même temps il a réalisé la difficulté. On ne devient pas professionnel comme ça. De sa génération, il y en quelques-uns qui pointent le bout du nez. Il y en a d’autres qui promettaient beaucoup et stagnent aujourd’hui. Lucas a envoyé un message à William Saliba après le match à Toulouse. Il était très content pour lui car c’est un de ses copains.

Sainté a une chance de finir sur le podium cette saison ? Derrière l’intouchable QSG, c’est ouvert. Les vilains sont inconstants, les Marseillais pas encore convaincants et les Monégasques sont un peu largués…
C’est vrai que c’est très ouvert. Paris survole le championnat mais derrière c’est encore très incertain. Marseille n’est pas régulier, Lyon fait parfois des faux pas, Monaco vit un début de saison très difficile. On avait misé sur Rennes mais cette équipe n’est pas performante depuis plusieurs matches, Bordeaux n’en parlons pas… C’est sûr que Sainté a une belle carte à jouer. L’équipe qui va avoir un collectif, une ossature, une bonne série va pouvoir tirer son épingle du jeu. C’est surtout une question de régularité. Après un quart de championnat, on se rend compte que tout est possible. Même Monaco, pour moi, a encore ses chances d’être sur le podium malgré son gros retard à l’allumage. Après, beaucoup d’équipes ont la Coupe d’Europe alors que l’ASSE peut se focaliser entièrement sur les compétitions nationales. Ça peut jouer. Saint-Etienne aura son mot à dire mais le LOSC peut aussi être l’équipe surprise de cette saison. Tout s’enclenche bien pour eux, leur dynamique n’a plus rien à voir avec la saison dernière. Christophe Galtier a pu cette fois préparer la saison, recruter lui-même, il a soigné la préparation. Ça change beaucoup de choses. Il y a des joueurs qui étaient déjà là la saison dernière mais t’as l’impression que ce ne sont plus les mêmes cette saison.

Quels sont les points forts des Dogues à tes yeux ?
Ils ont une vitesse, une vivacité offensive qui vont faire mal. Ils ont des joueurs très rapides, avec parfois un peu de déchet mais difficiles à arrêter. Des joueurs qui accélèrent comme ça, je ne dis pas qu’il n’y en a plus beaucoup, mais ça fait mal. Aujourd’hui, dans les actions offensives, on essaye souvent d’élaborer le jeu sur le côté mais c’est stéréotypé. Je le vois, moi qui suis souvent à Monaco. Dès qu’il n’y a pas Sidibé qui accélère un peu sur le côté… Falcao dans l’axe n’a plus autant d’efficacité qu’avant. Des joueurs dans l’espace, il n’y en a plus beaucoup. Alors que Lille a la chance d’en avoir deux ou trois. Je pense bien sûr à Nicolas Pépé, de toute évidence la révélation. Il était déjà très fort à Angers, il fait un gros début de saison et ce n’est sans doute pas fini. Christophe n’était pas sûr de pouvoir garder quand j’avais échangé avec lui à Monaco mais il est resté à Lille. Est-ce qu’ils vont réussir à le garder jusqu’à la fin de saison, c’est autre chose. Il a du feu dans les jambes. Après il y a Jonathan Bamba, bien sûr, un peu le pendant de l’autre côté. Dès qu’ils accélèrent, ça fait mal. On l’a vu dimanche dernier contre Marseille.

Ton prono pour le Lille-Sainté de ce samedi ?
Oh putain ! Tu veux que je me fasse virer de la famille ou quoi ? (rires) Je m’attends à un beau match car Lille est une équipe en confiance qui ne ferme pas le jeu. Je ne pense pas que ce soit dans la philosophie de Christophe et des joueurs qui composent cette équipe. Je vois un 2-2. Un match nul avec des buts.

Merci à Christophe pour sa disponibilité et aux potonautes Kabigon et titigreenfan pour la retranscription