Sans écraser leur adversaire, et même en tremblant un peu, les Verts posent les bases d'une saison qui s'annonce solide.
Et voilà la première feuille de match de l'année. Pas vraiment de surprise ni d'un côté ni de l'autre : les recrues offensives guingampaises sont sur le banc ; les Verts font dans la continuité la plus stricte... à une modification près au milieu, qu'on abordera à la fin.
Résumons d'abord la symphonie matchale.
Premier mouvement : Le pressing stéphanois est excellent (Lemoine et Cohade asphyxient Dos Santos et Mathis), Guingamp est étouffé, et dès la cinquième minute, Renaud Cohade met sur orbite François Clerc qui en bout de course, manque sa frappe. D'une durée de huit minutes environ, cette entame allegro fait place à une transition plus molle, marquée par un petit coup de mou physique qui permet à Guingamp de respirer un peu.
Rapidement, le second mouvement s'installe : c'est un adagio. Sainté gère ses efforts et s'assure la domination "à l'économie", avec quelques coups de boutoir ponctuels. L'équipe penche à droite, sous l'impulsion de Clerc et Cohade, solistes brillants. Trois fois, le tempo s'accélère depuis l'aile dextre : à la 28', Hamouma centre, Erding passe devant un Samassa fébrile et est à un cheveu (qu'il a court) de toucher le ballon ; à la 36', l'action commence comme au rugby (fixation côté droit, puis en retrait à l'ouvreur Cohade, qui déclenche instantanément le jeu long au pied) et finit comme au hand (remise dos au but du pivot axial Erding pour Gradel dont la frappe est contrée) ; et enfin le déboulé d'Hamouma, appuyé par Clerc, qui obtient le pénalty à la 39' - Erding ne tremble pas, les Verts mènent sans forcer leur talent.
Main ferme et drapeau levé
Quoique...à la toute fin de la période, Sall oublie Yatabaré sur corner et Ruffier fait preuve d'à propos pour éviter que la coda ne se termine en couac...
Coup de semonce, certes ; mais surtout annonciateur d'un début de seconde période compliquée. Les bretons ont décidé de bouger leurs adversaires ; ils haussent le rythme. Les Verts, eux, ne peuvent pas suivre, à l'image du pressing dont l'inefficacité nouvelle inquiète. D'entrée de jeu, Beauvue gagne son premier duel face à Tabanou et Yatabaré est à un cheveu (qu'il a vraiment très, très court) de reprendre le centre. Paradoxe : les situations chaudes se succèdent, mais jamais Ruffier n'a à s'employer - c'est que le bloc est solide.
Pour une fois, l'heure de jeu constitue réellement un tournant. D'abord parce que Clerc, excellent jusqu'alors, sort blessé ; ensuite parce que la recrue Marveaux remplace un Giresse peu en vue. Immédiatement, les dézonages du néo-costarmoricain crééent le surnombre dans l'axe, et Mandanne est par deux fois tout près de marquer le 300è but de son club dans l'élite : heureusement la main de Ruffier est ferme à la 64', et l'arbitre assistant vigilant pour signaler le hors-jeu et faire annuler l'égalisation de la 68'.
Ce but refusé est l'acmé de la domination rouge et noir. Guingamp atteint alors ses limites physiques ; l'énergie déployée à compenser le déficit technique et collectif n'est plus suffisante ; Sainté reprend le fil de son adagio là où il en était resté à la pause, à ceci près que la bande à Galette joue un peu plus bas et attend pour contrer.
L'entrée de Corgnet à la 81' se révèle judicieuse : on connait les qualités de la Corgne dans le jeu rapide et direct. C'est pourtant son pressing mêlé à celui de Max-Alain Gradel qui pousse Dorian Lévêque, entré un quart d'heure plus tôt, à offrir à Mevlut Erding un nouveau tête à tête avec Samassa (90'+2) ; tête-à-tête conclu sans trembler pour achever le peu de suspens qui haletait encore.
La modification
Revenons, pour conclure, à la modification qui vous a peut-être fait tiquer pendant le match. En effet, le placement du trident du milieu vous aura étonné : pourquoi, contrairement à l'habitude bien ancrée désormais, Lemoine s'est-il installé à gauche et Cohade à droite ? Bien qu'happé par l'émotion du supporter face à aux évènements qui s'écrivent en direct, vous avez remarqué Papy se positionner souvent plus haut sur le terrain que Coco, renversant là encore l'animation traditionnelle.
Vous avez alors scruté de plus près cette danse à trois Verts qui s'écrivait dans l'entrejeu. Et vous l'avez vu clairement, ce 4-3-3, ou plutôt ce 4-1-4-1, solidement assis dans son propre camp, devenir 4-2-3-1 quand l'équipe campait tout près des buts de Samassa, avec Lemoine en meneur de jeu proche de ses attaquants. Quant à Cohade, vous avez applaudi à ses quelques renversements de jeu, propres et précis, qu'une position plus reculée, c'est-à-dire un gain de temps et d'espace pour lever la tête et s'appliquer, ont facilité. Vous sont alors revenus en mémoire quelques moments l'année passée où Cohade et Corgnet alignés ensemble illuminaient chacun à leur niveau le jeu stéphanois.
Et vous vous prenez à conjecturer. Et vous serez vigilants dans les rencontres à venir pour évaluer l'ampleur réelle de cette modification. Christophe Galtier n'a t-il pas déclaré lui même que "dans l'animation, quelques choses étaient différentes" ?