Formé à l'ASSE, le capitaine d'Evian-Thonon-Gaillard Olivier Sorlin s'est confié aux potonautes à quelques heures de ses retrouvailles avec le Chaudron.
Peux-tu nous rappeler ton parcours de jeune joueur stéphanois ?
Je suis de Montreynaud, comme Faouzi Ghoulam. J'ai commencé à jouer à l'âge de quatre ans et demi à l'ASPTT Villars. Mes cousins plus âgés que moi jouaient dans ce club, j'allais les voir jouer. Ils m'ont donné le goût du foot. J'ai joué là-bas jusqu'à l'âge de sept ou huit ans avant de rejoindre l'ASSE. J'ai fait là-bas toutes les catégories : poussins, pupilles, minimes, etc. J'ai souvent été capitaine d'ailleurs. J'ai joué en moins de 15 ans nationaux puis en moins de 16 ans Ligue. Quand je suis sorti des moins de 15 ans, pas mal de joueurs sont montés en moins de 17 nationaux mais moi j'étais souvent avec les 16 ans car je ne jouais pas trop. A l'issue de cette année-là, le club ne m'a pas gardé.
As-tu senti venir ce coup dur ?
Pas vraiment, cette décision était inattendue. En centre de formation, à l'issue de chaque année, tu passes dans un bureau où l'entraîneur te dit si tu es gardé et comment va se passer la suite. Au départ on m'avait dit que je serais conservé. Sept à dix jours plus tard, j'ai été rappelé pour m'entendre dire que finalement on ne me gardait plus. A l'époque, en seize ans, ils avaient fait venir des joueurs de l'extérieur au centre de formation. Ils ne voulaient pas avoir été chercher quelqu'un pour le renvoyer chez lui au bout d'un an. Comme moi je n'appartenais pas trop au centre de formation car je dormais le soir chez mes parents, il y avait moins de crasse à faire ça à moi qu'à un mec qui venait de Lyon, de Paris ou d'ailleurs. Il faut dire aussi qu'à l'époque je n'avais pas encore fait ma croissance. J'étais petit et pas bien lourd. A mon âge, il y avait déjà de beaux bébés au centre de formation. A côté, je faisais pâle copie. Tous les clubs veulent avoir des résultats tout de suite, souvent on ne laisse pas le temps aux joueurs de grandir et de s'épanouir.
Gardes-tu malgré tout de bons souvenirs de toutes tes années passés sous le maillot vert ?
Je ne garde que de bons souvenirs. J'ai côtoyé pas mal de bons joueurs, mais au final, je me rends compte qu'avec Papus Camara, on est les deux seuls joueurs de 79 à avoir fait une longue carrière en pro. Dans les 80, il y a Julien Sablé et Sylvain Armand. Je me souviens bien également des éducateurs que j'ai eus là-bas : Joël Guitay en pupilles, le père de Sébastien Perez en minimes. Alain Blachon aussi, en moins de 15 ans. C'était peut-être l'un des rares formateurs qui croyaient en moi quand j'ai été invité à quitter le club. De mes vertes années, je garde bien sûr plein de souvenirs des soirs de match à Geoffroy. A chaque fois que je reviens à Geoffroy-Guichard, j'ai plein de choses qui me trottent dans la tête. J'ai des images qui me reviennent d'anciens coéquipiers, d'anciens entraîneurs. Je me souviens également quand j'étais ramasseur de balle dans le Chaudron. J'allais voir tous les matches des Verts avec mon cousin qui habitait aussi à Montreynaud un peu plus haut. On allait au stade à pied, parfois on faisait même du stop. Je vibrais dans la tribune avec mon écharpe. On allait derrière les buts, mais pas là où il y avait le plus de monde pour ne pas se faire écraser ! (rires) Y'avait déjà de sacrées ambiances, ça secouait pas mal ! Comme j'étais licencié à l'ASSE, j'avais la chance d'avoir une carte de membre actif, comme ça je pouvais entrer au stade sans payer.
Quels matchs, quels joueurs t'ont le plus marqué en tant que jeune supporter stéphanois ?
Les matches contre Lyon, Marseille, Paris, c'était chaud bouillant ! Avec mon cousin, on allait dans des coins bien cachés. Parfois à l'époque dans les tribunes il y avait des virées entre supporters. Des rassemblements entre supporters adverses. Il ne valait mieux pas être au milieu ! (rires) J'ai adoré Lubomir Moravcik et j'ai encore en tête des actions de Titi Camara, des frères Mendy, de Joseph-Antoine Bell, de Laurent Blanc... Ces joueurs-là ont fait que tout minot, j'étais fan. En plus, je pouvais les voir de très près quand j'étais ramasseur de balle ! J'adorais ça !
As-tu eu des contacts pour revenir à l'ASSE lors de ta carrière pro ?
Oui, notamment en 2004-2005, lorsque j'ai signé à Monaco. J'arrivais en fin de contrat à Rennes. J'étais revenu chez mes parents à Saint-Etienne. Pendant les fêtes, j'ai discuté avec Damien Comolli et Elie Baup d'une éventuelle signature. J'ai attendu une proposition, entre temps Monaco s'est manifesté. Ça a tardé du côté de Sainté, Monaco a été plus direct et me proposait de jouer la Ligue des Champions, c'était difficile de refuser… J'ai eu quelques années plus tard des discussions avec Roland Romeyer, on a évoqué mon éventuel retour mais à l'époque Sainté devait dégraisser, il y avait quelques gros contrats au club. Mon transfert n'a jamais pu se faire. C'est comme ça, c'est la vie, c'était écrit ! J'aurais quand même bien aimé porter les couleurs des Verts au plus haut niveau. En tant que gamin de Saint-Etienne, je ne rêvais que de ça ! J'ai toute ma famille qui est là-bas.
Es-tu resté supporter de l'ASSE ?
Bien sûr, je suis toujours fan de Saint-Etienne. Maintenant un petit peu moins car j'ai pris de la bouteille. A une époque j'en voulais à certaines personnes mais tout ça c'est terminé. Dès qu'il y a un match à la télé, je suis pour les Verts. Et le 20 avril dernier, j'étais pour Sainté. J'ai pourtant joué six ans à Rennes. Mais mon cœur est vert. Comme dirait Romeyer, "mon sang, il coule vert". Comme tout supporter des Verts, j'étais ravi que l'ASSE remporte cette Coupe de la Ligue.
Te souviens-tu des matches que t'as joués dans le Chaudron avec les pros sous tes différents maillots (Valence, Montpellier, Rennes, Evian ?)
Pas de tous mais de la plupart ! Le premier c'était avec Valence, au début de ma carrière en pro, lors de la saison 1997-1998. On avait fait 0-0. Manque de bol, j'avais été remplacé juste après la pause car l'un de mes coéquipiers avait été expulsé ! La saison d'après on a perdu, non ?
Oui, devant 30 000 spectateurs. C'était le troisième match successif des Verts à la maison en huit jours après deux victoires contre Gueugnon et à chaque fois stade était presque à guichets fermés.
Impressionnant, surtout que le club était en Ligue 2 ! Je me souviens bien des énormes ambiances de l'époque, à Geoffroy-Guichard mais aussi chez nous, à Pompidou… où le stade était aux trois quarts vert ! (rires) Sainté a vraiment un public extraordinaire, il n'y a pas beaucoup de clubs en France où l'on peut se vanter d'avoir des supporters comme ça !
Tu es ensuite revenu dans le Chaudron avec Montpellier. Un match resté dans les mémoires !
Difficile d'oublier ce match complètement fou... Ce n'est pas tous les jours que tu perds 5-4 ! (rires) On menait 2-0, à la mi-temps on perd 4-2. On en a reparlé récemment avec Cédric Barbosa. On s'est souvenu que ça avait pas mal gueulé dans le vestiaire à la mi-temps. Michel Mézy était fou, il n'arrêtait pas de taper du poing sur la table ! (rires) C'est avec Rennes que j'ai joué le plus de matches à Geoffroy-Guichard mais curieusement je garde peu de souvenirs de ces rencontres. Je me rappelle quand même qu'on avait gagné une année [ndp2 : 3-1 en février 2007]. J'ai également gagné 2-0 ici avec Evian, j'espère d'ailleurs remettre ça très prochainement ! (rires) Quoi qu'il en soit, c'est toujours un plaisir de revenir à Geoffroy-Guichard. Je sais que je joue, mes parents sont là, toute ma famille sont dans les tribunes. C'est toujours agréable de jouer dans un tel environnement. Quand je joue, je suis heureux de savoir que mes parents sont fiers.
Penses-tu que Sainté est plus fort cette saison que la saison dernière ?
Je ne sais pas, mais je sais que cette équipe est pas mal du tout ! (rires) Les Verts sont bien placés, s'ils nous battent ils seront quatrièmes. Sainté a perdu Aubameyang et Guilavogui, mais ça reste une très bonne équipe. Depuis quelques années, depuis que Christophe Galtier est là, l'ASSE fait un recrutement assez intelligent. Ils prennent de très bons joueurs du championnat de France. Tu sens que c'est réfléchi, c'est cohérent. Ils ne prennent pas pour prendre. Ils prennent des joueurs qui correspondent à des besoins bien ciblés. C'est une belle petite équipe !
Quels sont les joueurs qui te plaisent particulièrement dans cette équipe ?
J'aime bien le petit Benjamin Corgnet, d'autant plus qu'il a eu une trajectoire peu banale. Il est passé dans des petits clubs, en DH et en CFA2 avant d'éclore à Dijon. Il a continué de monter petit à petit. Ce qui me plaît moins, c'est qu'à chaque fois qu'il a joué contre nous, il nous a fait du mal. Benjamin, il faut arrêter maintenant ! (rires) En tant que Stéphanois, j'aime bien Loïc Perrin aussi, forcément ! C'est un joueur du cru, qui fait pour l'instant toute sa carrière à Saint-Etienne. C'est un battant, on n'entend jamais parler de lui en dehors du terrain. Il a eu pas mal de pépins physiques, ça l'a ralenti dans sa progression. Mais c'est un très bon joueur. Je suis avec attention les résumés des matches des Verts, il fait toujours partie des meilleurs. C'est un joueur exemplaire qui colle bien à l'image du club. Un Stéphanois formé au club qui joue au plus haut niveau avec l'ASSE, je trouve ça bien ! J'apprécie aussi Fabien Lemoine, avec qui j'ai joué à Rennes. C'est un joueur agressif, hargneux. Il ne lâche jamais. En plus c'est lui aussi un gentil garçon, c'est toujours sympa de discuter avec lui. Il fait également partie des meilleurs joueurs stéphanois cette saison. C'est mieux pour nous qu'il soit suspendu !
Penses-tu que le report du 32ème de finale de Sainté à Cannes peut impacter le match de ce mercredi ? Les Verts seront plus frais mais n'aurait-il pas mieux valu qu'ils retrouvent comme vous le rythme de la compétition dès ce week-end ?
Je répondrai à cette question après le match ! (rires) François Clerc et Fabien Lemoine auraient dû purger leur suspension contre Cannes, mais finalement ce sera contre nous. Ce n'est pas la même chose, pour eux comme pour nous. Le fait de rester sans jouer pendant une longue période, ce n'est jamais très bon. Mais ça permet un peu de couper, de prolonger un peu la trêve. Les Verts n'ont pas joué à Cannes mais ils ont dû préparer ce match sérieusement, comme un match de championnat. Ils ont fait un déplacement pour rien sur la Côte d'Azur, mais je pense qu'il en faut un peu plus pour les fatiguer (rires). Comme ils ont joué pas mal de matches depuis le début de saison, je pense que ça leur a fait du bien de recharger les batteries. Mais c'est vrai que pour eux ça doit faire bizarre de passer d'un coup de deux semaines et demi sans jouer à plein de matches à enchaîner !
Quelques heures après le report au dernier moment du match Sainté-Evian, tu as passé la nuit du 8 au 9 décembre avec de très nombreux joueurs de l'ASSE dans une boite stéphanoise. Olivier, il est temps de passer aux aveux : en fait le match était jouable mais vous souhaitiez tous garder votre énergie pour enflammer le dancefloor, c'est ça ?
Non ! (rires) Je n'avais pas prévu d'aller avec eux en fait ! Quand je reviens à Sainté, je passe souvent boire un verre au bar que tient mon cousin. Après je suis allé en boite et je suis tombé sur les Verts. On a passé une bonne soirée. C'était un peu le hasard de tomber sur eux mais en même temps à Sainté il n'y a pas cinquante endroits pour sortir, j'avais de grandes chances de tomber sur eux ! (rires)
Olivier, tu effectues ta 17ème saison avec les pros et à 34 ans tu as joué en tant que titulaire tous les matches aller d'Evian. Quel est le secret de ta longévité ?
Je n'en ai pas ! Je vis mon métier comme une passion, je suis content tous les jours d'aller m'entraîner. Ma mère te répondrait que mon secret, c'est les choco BN ! J'adore ça mais je ne sais pas si c'est un exemple à suivre. Parfois ça ne marche pas ! (rires) J'ai eu aussi la chance d'être épargné par les pépins physiques pendant toute ma carrière. Je ne me fixe pas de limite. Je ne vais pas resigner un contrat de trois ans mais je compte continuer d'année en année si je garde la forme. Je suis en fin de contrat en juin mais on va discuter prochainement d'une prolongation avec Evian.