Le supporter des Verts est un Obélix sans braies. Il est tombé dans le Chaudron quand il était petit. Il a dans sa tendre enfance ingurgité une potion magique qui depuis fait toujours effet. Mais au fait, quel effet ?


Cette potion nous procure une force surhumaine. La force de rester passionnés malgré la disette (aucun titre majeur depuis 31 ans), la force d’animer un stade mythique au point d’être désignés meilleur public de France trois saisons consécutives par la Ligue, cette Ligue qui aujourd’hui nous traite comme des délinquants multirécidivistes.

Cette ligue que vous présidez, lorsqu’elle se vend aux diffuseurs, aime à mettre en avant ses clubs historiques, la passion qu’ils génèrent, la chaleur de leur public. Vos diverses publications ont ainsi fréquemment été illustrées par des photos du public de Geoffroy Guichard…

Cette ligue, quelle cohérence !, qui, depuis le début de saison semble s’être fixée pour objectif de vider ce même stade Geoffroy Guichard en multipliant les sanctions dont la dernière tombée jeudi dernier est à la fois disproportionnée, injuste, anti-sportive, et dangereuse.


Disproportionnée

Parisien durant quinze ans, je suis venu pour des raisons professionnelles à Lyon en 2009. L’occasion pour moi de m’abonner avec mon fils de neuf ans en tribune Jean Snella. Trois années durant lesquelles j’ai assisté à près de soixante matchs, sans qu’une seule fois je ne me sois senti en danger, ni n’ai constaté de débordements, ce, malgré deux saisons sportivement catastrophiques en 2009 et 2010.
La qualité de la saison de l’ASSE a même apporté dans le chaudron un surplus de gaieté ces derniers mois.
J’ai néanmoins comme vous constaté deux ou trois gestes individuels condamnables lors des deux derbies cette saison. Outre qu’il serait pertinent de s’interroger sur le poids dans ses débordements des provocations (répétées) du président lyonnais et de l’un de ses joueurs (Bastos), il faut admettre qu’ils sont le fait de quelques individus seulement et non pas d’une tribune et qu'ils sont loins de représenter l’ambiance des dix-sept autres matchs (coupe et championnat confondus) joués à Geoffroy-Guichard.

Dès lors, au regard à la fois de leur rareté, du caractère isolé de ces actes, et des débordements qu’on a pu constater dans d’autres stades de France la sanction est clairement disproportionnée.


Injuste

Disproportionnée, la sanction est également injuste. Est-ce juridiquement acceptable de condamner plus de quatre mille supporters abonnés à s’asseoir sur trois matchs de championnat dont deux de gala (Bordeaux et Marseille) ? J’ai pour mon fils et moi dépensé près de 600€ pour avoir la garantie d’assister à ces matchs. Je n’ai depuis août dernier fait que chanter ou applaudir. Par quelle logique, au nom de quelle justice m’interdit-on d’aller voir un spectacle pour lequel j’ai payé, alors que je ne suis, comme 99% de la tribune, coupable de rien ?
Selon quelle règle, d’après quelle loi condamne-t-on des milliers de personnes pour un acte commis par moins d’une dizaine de supporters ? Garder ouvertes les deux tribunes où siègent les kops représente-t-il une menace quelconque pour la sécurité des supporters ou des joueurs ? La préfecture de la Loire, lors d’une réunion récente a signifié que non, insistant sur les efforts des groupes de supporters pour éviter les débordements. Cette sanction est donc injuste.


Antisportive

Informés d’une première sanction fin mars, les deux kops avaient décidé de manifester leur colère en ne chantant pas contre Nice le 31 mars dernier. Rare et triste spectacle que ce chaudron sans ambiance, ce dont a su profiter Nice en s’imposant 3-2, validant ainsi l’influence de Geoffroy Guichard sur le résultat d’un match. Fermer les deux kops pour les trois derniers matchs du championnat est clairement une menace contre l’équité sportive de la Ligue 1. En effet, Saint-Etienne affronte Dijon, club menacé de relégation ce samedi. Que penseront Sochaux, Nice, Caen et les autres si Dijon s’impose à Geffroy Guichard ?
Et à cinq journées de la fin d’un championnat dans lequel Saint-Etienne joue une place européenne, votre sanction pénalise le club qui -ce qui ne devrait pas vous laisser insensible- est un des rares à jouer le jeu en Europa League (pour rappel en 2009, l’ASSE a joué les 1/8èmes de finale de feu-la Coupe de l’UEFA pour un bilan de six victoires trois nuls et une seule défaite). La ligue préfère-t-elle voir Toulouse ou Rennes en Europa League ? On peut en sourire en repensant aux parcours européens de ces deux clubs ces dernières saisons…


Dangereuse

Lorsqu’une sanction paraît si injuste, elle génère de la colère. Si la colère s’est manifestée par le silence contre Nice, qu’adviendra-t-il lors des cinq dernières journées où les groupes de supporters auront tout loisir de remplir les autres tribunes de Geoffroy Guichard, et de se déplacer à Paris et à Nancy ? Comment nier que ces sanctions, sans doute destinées à être dissuasives, ne feront qu’ajouter de l’huile sur le feu ?

J’en appelle à votre sens des responsabilités, à votre sens également de l’intérêt du football français, et de celui d’un des ses plus beaux fleurons. Il est encore temps de revenir à la raison, d'éviter que le ciel ne nous tombe sur la tête...

 

Parasar