Fan des Verts, incomprise des siens, Joséphine Asse écrit beaucoup et à tout le monde ! Elle exprime avec douleur et émois sa passion non partagée ! Toi qui chausses du 90D et qui n'a pas eu un père pour t'amener au stade, tu la comprendras ! Toi qui aimes les grosses pointures, lis-la avec empathie ! Toi qui enfin as encore oublié de descendre la poubelle, bouge toi avant que j'm'énerve !!!

Salut Erwan !

Comment vas-tu ? Tu te fais à ta vie parisienne ? Quelle question idiote... tu es breton... un breton est né pour être parisien ! Des nouvelles de ton Finistère sud ?
Je repensais à la conversation que nous avions eue sur les antinomiques concepts de liberté et de conformisme. Nous vivons dans un monde où les compromis, les pas de vagues et autres consensi (j'emploie les pluriels que j'veux !) mous nous conditionnent et contrarient notre penchant plus ou moins avoué à dire ce que nous pensons et penser ce que nous disons... et réciproquement (respire !). C'est un fait.

Quand on aime le football, comme tu me l'as dit, on s'inscrit dans une mouvance de type pensée unique. J'atténuerais ça en évoquant plutôt l'idée de ressenti unique. Je me souviens d'un ASSE-Monaco : carton rouge pour Laurent Blanc après 10 minutes de jeu. Joseph-Antoine Bell arrête le penalty et nous gagnons 2-0. Je dis bien "nous", car ce soir là, on ne jouait pas à 10 mais à 30000 contre 11 ! (du coup, le score n'est peut être pas terrible). Et crois-moi, c'était fabuleux cette osmose entre les tribunes et le terrain. Toi aussi finalement tu es politiquement correct pour un Breton puisque tu supportes en vrac Guingamp, Brest, Rennes et même Nantes ! Moi je suis politiquement correcte pour une stéphanoise, je supporte exclusivement Saint-Étienne et je déteste Lyon et Marseille. Bon, voilà des choses que nous pouvons admettre sans en faire une maladie d'anticonformistes primaires. Pas plus que ne me gêne l'idée de vibrer en choeur avec 35000 personnes. Mais nous nous sommes toujours dit entre deux bières que JAMAIS nous n'entrerions dans un groupe quel qu'il soit. Comme toi, j'ai une trouille des réducteurs de têtes...

Les groupes d'ultras ou non se sentent plus fort en étant unis que chacun dans leur coin. C'est pas faux comme dirait Perceval chez les yonnais de Kamelott. Ils font un travail remarquable et on ne peut leur reprocher leur dévotion à la cause Verte. Le groupe ça permet aussi la coordination, la cohésion. Pourtant, je refuse qu'une personne vienne me dicter ma conduite en général et ma conduite de supportrice en particulier. Vaine illusion d'une liberté sans majuscule... Mais j'y tiens ! J'ai le souvenir d'un ASSE-Lens côté Sud, ou d'un ASSE-Châteauroux côté Nord... de mauvais souvenirs où j'aurais aimé voir plus de rébellion face à cette pensée unique qui s'est alors emparée du Stade. Le boycott orchestré par les Magic Fans et adopté finalement par des dirigeants et des forces de l'ordre faisant sous eux face à un groupe déterminé ; des supporters qui se sont laissé faire... Ce soir là, j'ai chanté seule en Sud, face à un kop vide, "Allez ! Les Verts... (tournant la tête à droite et à gauche et voyant que j'étais seule debout à gueuler)... ta supportrice est là !" ça a au moins eu le mérite de faire rire quelques bêtes du vulgus pecum assis. J'ai pleuré le soir chez moi en constatant que la nature humaine était bien malléable et décevante...

Mais que faire ? Comment lutter contre le marasme ambiant ?... Et avons-nous le droit d'imposer aux autres d'être libres ?... Ce concept de "la liberté ou la mort" édicté par Rousseau notamment dans son Contrat social me fait tout autant peur que celui de la démocratie qui s'appuie sur le mépris des minorités qui n'ont qu'à penser comme la majorité.

Quelle chose complexe que cette notion de liberté...

Et puis il parait que la liberté de l'individu s'arrête là où commence celle des autres. N'empêche que ma concierge lit toujours Voici et mon voisin, toujours à la page, écoute en boucle et depuis des lustres "Roméo et Juliette" (dans sa version égrotante de crétins émasculés massacrant tout à la fois Shakespeare et Prokoviev). Et comme disait l'autre, la tolérance, y a(vait) des maisons pour ça ! C'est pas parce qu'il n'y en a plus qu'il faut continuer à me faire suer !

C'est sur ces pensées profondes et néanmoins éthylisées (bé oui ! il est 6h du mat et on vient de fêter la nouvelle victoire sur l'OM !!! Y a du mal de cheveux qui se prépare...) que je te quitte mon ami ! Au fait, si tu vois mon chéri, dis-lui que je pense à lui, même si visiblement, le fait de ne pas donner de nouvelles pendant plusieurs jours ne l'émeut pas plus que ça... Bon je te parlerai de tout ça de vive voix, y a trop à dire... je vais me coucher. Ça tangue...

Bises

Joséphine