La dernière analyse tactique de la saison 2017-18 est là, pour accompagner comme il se doit la belle prestation stéphanoise.
La fin d'une saison très particulière, la fin d'une superbe aventure et d'une impressionnante remontée au classement, la dernière apparition sous le maillot vert pour plusieurs joueurs et probablement la fin de la période Romeyer-Caïazzo. Il y a beaucoup de chapitres qui ont été fermés avec ce dernier match de la saison. Les Verts ont fini sur une belle note, dans une ambiance tout simplement magnifique, même s'il reste un léger sentiment d'amertume par rapport à l'Europe ratée à la différence de buts et un peu d'inquiétude par rapport à ce que le futur modèle de gestion amènera.
Pour revenir à la victoire contre Lille, il est difficile de faire une analyse tactique, il n'y a pas vraiment eu match. Les adversaires n'étaient pas venus pour bétonner (se prendre un but en contre, à l'extérieur, dans les 10 premières minutes, ça doit être assez rare), mais ils n'étaient pas très motivés non plus à l'idée de produire grande chose. Les Verts se sont donc baladés et leur supériorité a été plus le fruit de l'implication, que d'une approche tactique. Néanmoins, il y a quelques enseignements à tirer d'un court passage en revue des différentes tactiques aperçues pendant le match.
Schémas tactiques
Les deux systèmes de jeu sont visibles dès l'entame du match, 4-2-3-1 de chaque côté :
Pour l'ASSE, en phase défensive sur cette image, le système est beaucoup plus proche du 4-4-2, avec Hamouma et Beric en charge de contrarier la relance adverse - ils font quasiment un marquage individuel sur les deux milieux axiaux lillois.
Le plus surprenant dans cette opposition tactique a été de voir la liberté dont Selnaes et M'Vila ont bénéficié au milieu du terrain. Théoriquement ils étaient à 2 contre 3, mais côté Lillois il n'y avait aucune agressivité sur le porteur du ballon. Ainsi, les deux milieux stéphanois ont pu organiser le jeu à leur guise, Selnaes profitant pour faire des remontées balle au pied (comme sur le premier but) ou des belles passes verticales comme sur le deuxième ou le troisième. C'est ce dernier qu'on regardera de plus près, étant le seul marqué suite à une attaque construite contre un bloc défensif en place :
M'Vila joue un coup franc au milieu du terrain, en retrait avec Perrin. Hamouma et Beric sont les deux avant-centres, Bamba et KMP se trouvent à la même hauteur et plutôt vers l'axe, laissant les couloirs pour KTC (qui ne monte pas trop) et Debuchy (suivi par son adversaire direct, l'ailier gauche). Au milieu du terrain, Lille propose un triangle pointe basse, avec une sentinelle et deux milieux qui surveillent Selnaes et M'Vila. Le jeu est donc déplacé vers la droite et les deux blocs y coulissent :
Le triangle des milieux lillois reste parfaitement formé, l'ailier suit Debuchy... mais le latéral gauche ne sert pas à grande chose, Bamba ne se trouvant plus là. Selnaes reçoit le ballon de Perrin, il le donne à Bamba...
... qui combine avec Debuchy, et le ballon revient à Selnaes. Il n'y a pas de surnombre sur ce côté du terrain pour les Stéphanois, mais ils combinent sans problème. L'ailier adverse est loin de Debuchy et le triangle des milieux, toujours bien formé, ne coupe aucun angle de passe. On peut même dire que le latéral gauche et la sentinelle adverse ne servent pas à grande chose : la paire latéral-ailier de l'ASSE n'est pas prise par la paire équivalente lilloise et il n'y a pas de joueur Vert entre les lignes non plus. Si le ballon parvient à M'Vila, il est complètement libre, malgré une infériorité numérique théorique au milieu du terrain. Mais il n'y a même pas besoin d'écarter le jeu :
Il n'y a pas d'agressivité sur le porteur du ballon, Selnaes a le temps de contrôler et d'attendre les appels avant d'être serré par le triangle des milieux adverses. Et les appels sont coordonnés, Beric décroche, suivi par un défenseur central, pendant que Hamouma plonge dans cet espace créé dans son dos. Servi avec une passe millimétrée, il élimine son adversaire direct et marque son 2e but de la soirée.
Il fallait changer quelque chose côté lillois, mais ce n'est pas le milieu qui a été ajusté. Leur coach a préféré rendre officiel le positionnement défensif aperçu sur les images précédentes, passant dans une défense à 5. Le nouveau système en 5-4-1 du LOSC est visible dès l'entame de la 2MT :
Sauf que maintenant qu'il n'y a plus de sentinelle, Hamouma se place en "10", entre les lignes...
Par contre, d'un point de vue défensif, il faut souligner la belle discipline tactique des Stéphanois, avec toujours deux belles lignes de 4 :
Et peu importent les changements des joueurs, comme par exemple les entrées de Ntep et Tannane à la place de KMP et Beric (image prise juste après le 5e but)...
... ou les changements de position entre les joueurs sur le terrain, suite à un pressing ou à une action précédente :
Malgré le score, le manque d'enjeu, la faible opposition en face, les Stéphanois ont été disciplinés tactiquement. Le changement que le duo Gasset-Printamp a opéré sur ce groupe est tout simplement impressionnant...
Conclusions
Nous y sommes, c'est la fin d'une saison longue de 40 analyses tactiques (le match à Troyes en Coupe de France n'en ayant pas eu une). Ça a été une saison pas comme les autres, très hétérogène, non seulement en terme de résultats ou des émotions procurées, mais aussi tactiquement. Ces analyses ont beaucoup varié, tout comme le jeu des Verts. Il y a eu la la recherche des éléments "jeu à la Barça" en début de saison, puis la recherche d'une cohérence tactique ensuite. Il y a eu les signes de résignation, quand les Verts ne proposaient plus rien tactiquement en fin 2017, et les signes d'espoir, quand ils ont commencé à être de nouveau cohérents début 2018. Et finalement, la joie de retrouver du jeu, de la maîtrise, des combinaisons, de coups tactiques tentés, même si pas toujours payants. Bref, ça a été une longue saison, dont on se souviendra encore longtemps...
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