Ce ne sont pas les terrains du Brésil qu'écume ce jeune mastre pondéré, mais plus prosaïquement les terrains de foot du Nord-Pas de Calais. Monsieur est arbitre, et forcément, ses jugements font autorité sur le forum, dès qu'il s'agit de nuancer une décision arbitrale. Pour autant, Pitch, adepte des Goudale-parties, est stéphanois de naissance et s'épanche avec force conviction sur sa proche jeunesse Forézienne. Plus c'est long, plus c'est bon !


Pseudo : pitchdobrasil 

Localisation : Lille, mais Stéphanois de naissance.

Premier match à Geoffroy-Guichard :
Ça remonte à 90 ou 91, face à Rennes. Contrairement à pas mal de forumers, ça n'est pas mon père qui m'a emmené au stade pour la première fois. Pourtant, mon paternel (et ceux qui le connnaissent ici savent qu'il est mythique) est fan des Verts mais ne va que très, très rarement au stade : il bosse souvent le weekend et, surtout, le foot, c'est avant tout pour lui une bande de gosses d'une dizaine d'années qui se font des passes maladroites et prennent des buts casquette. Pour en revenir à ma première à GG, l'école primaire Magand de Sorbiers avait eu des places dans l'ancienne Henri-Point (juste derrière un des pilliers qu'il y avait alors) et chargé quelques gamins dans le bus qui nous servait à aller à la piscine le mardi pour le (très) court déplacement. Du match, je dois avouer que j'ai peu de souvenirs. Il me semble que le score final est de 1-1, mais j'ai un doute. Par contre, un détail très clair demeure : c'est M. Brun, directeur de l'école et maître des CM2, le patriarche de l'école en fin de carrière, assis à cheval sur deux sièges, alors qu'il était plutôt mince, pourtant.

Premier souvenir de supporter :
Je ne sais pas... J'étais déjà assez âgé quand j'ai commencé à aller régulièrement au stade. Il me revient en tête un truc marrant qui a dû arriver en 1993. C'était en août et j'étais en vacances dans les Côtes d'Armor avec toute la famille. Les Verts devaient jouer à Nantes en ce début de saison et mon père envisage très sérieusement d'emmener toute la smala voir ce match à la Beaujoire (à moins que ç'ait été encore Marcel-Saupin ?). Finalement, devant le non catégorique et maternel, on se réfugie dans la salle télé du camping équipée de Canal +. C'était encore l'époque où il n'y avait qu'un match par semaine à la télé et où Gilardi et Bietry étaient intéressants à écouter. Mais la grosse claque a été de voir le nombre de supporters des Verts dans ce tout petit camping qui braillaient en buvant des coups. De là, une certaine tendresse pour les mastres. Puis, le lendemain, mon père me montre Ouest-France et on découvre que des petits cons de Canaris avaient démoli toutes les bagnoles plaquées 42. Je pense que c'est ce jour-là que j'ai pris conscience d'une chose : on est les gentils et tous les autres sont des méchants.

Qui t'a fait découvrir ce club ?
Un peu tout le monde, en fait : de ma mère avec son écharpe verte des années 70 tricotée main qui me parle de la chevelure d'Oswaldo, à mon père qui raconte l'ambiance de France-Yougoslavie de 84 à GG, avec un triplé de Platoche, un du droit, un du gauche et un de la tête, t'aurai vu ça, fiston ! C'est aussi la cour d'école avec les panini où j'ai dû avoir 812 Primard et 432 Cyprien. Mais la vraie découverte aura été la rencontre avec Lubo au début des années 90. Il habitait Sorbiers, comme moi et par son entremise, le club avait réussi à organiser un tournoi poussins de grande envergure avec deux équipes tchécoslovaques (le Bohemians Praha et le Pivovar Olomouc). Lubo n'avait passé que quelques heures au stade, le dimanche, le temps d'un bain de foule, du tirage de la tombola et de la remise des coupes. Mais c'était la folie. Ce jour-là, j'ai décidé de devenir joueur professionnel. Mais quand on est remplaçant dans l'équipe Poussins 4 de l'ES Sorbiers, on mesure rapidement le chemin qui reste à parcourir. Au moins, à Sorbiers, je jouais en Vert, c'est tout ce qui importait.

Ceci dit, pour un Stéphanois, c’est plus qu’une évidence de supporter les Verts. Ce qui m’impressionne, c’est de compter les plaques d’immatriculation les soirs de match et de rencontrer des fans venant de partout. Lors du premier match face à Monaco lors de la deuxième remontée, j’ai assisté à la première à GG d’un pote d’un autre forum. La trentaine bien sonnée, il avait pour la première fois l’occasion de se rendre à Sainté. Et ça m’a impressionné : on aurait dit un gosse à Eurodisney ! Plus récemment, en revenant de Lille-ASSE, je croise deux jeunes à l’écharpe verte dans le métro. Evidemment, la discussion s’engage. C’était deux frères, Picards à qui leur père avait transmis le virus. Eux non plus n’ont jamais encore fait le pèlerinage à GG alors il a fallu tout leur raconter. Un grand moment ! Des instants comme ceux-là n’ont pas de prix.

Joueurs Verts préférés (toutes époques confondues) :
A partir du moment où un joueur enfile ce maillot vert, je l'aime ! Le reste, l’amour du maillot, tout ça, c’est de la littérature. Et l’important, ça n’est pas les joueurs, les entraîneurs ou les dirigeants, c’est le club, avec sa maison et sa grande famille.

Autres clubs ou joueurs favoris :
La Juve ! Mon affection pour cette équipe remonte au milieu des années 90, un peu avant l'arrivée de Zidane. A ce moment-là, l'Equipe du Dimanche, c'était énorme ! J'ai franchement vibré avec les coups-francs de Del Piero ou Di Livio. Nous sommes la génération perdue de l'ASSE : nés trop tard pour connaître les plus grandes heures et en attente depuis. La Juve, c'est une sorte d'exutoire : ceux qui gagnent toujours. Les bureaux du lycée Fauriel doivent se souvenir de mon passage et de celui de punky, parce qu’entre ses groupes de punks, mes odes à Del Piero et notre passion collégiale pour les Verts, on a gravé des tartines sur les tables… 

Ton plus grand souvenir avec l'ASSE :
J'espère qu'il est encore à venir ! Mais le but de Bridonneau, c'était quelque chose ! La tension énorme dans ce match et cette libération comme un feu d'artifice. Franchement, c'était un orgasme, une éjaculation collective, ce ciseau ! J'ai participé au Challenge Wanadoo il y a quelques années. Déjà, on en prend la pleine gueule de marquer sur cette pelouse (perso, j’ai pété les plombs en voyant punky derrière le grillage ; faut dire qu’il était beau mon but, hein ?) alors que tout le monde est assis dans les tribunes, alors j’ose même pas imaginer ce que Brido a ressenti. 

A titre personnel, j’ai arbitré les Verts pour un match d’entraînement face à une équipe des Emirats Arabes Unis en 2003-04, alors qu’Anto était encore l’entraîneur. C’est évidemment un super souvenir, même si les joueurs ont joué à cloche-pied. A 5 minutes de la fin, le score est toujours de 0-0 lorsque Dogbé bouscule légèrement un adversaire. Je laisse jouer et il marque ! Depuis, ma tête est mise à prix aux EAU (dont j’ai également sifflé l’équipe nationale en amical), mais je suis prêt à tous les sacrifices pour tenter de relancer un joueur vert. Ce match m’a aussi permis de me rendre compte qu’entendre la voix d’Anto susurrant « M. l’arbitre ? » dans son dos dans un couloir désert, c’est vraiment flippant…

 Ton match des Verts le plus marquant ?
Les plus jeunes ont déjà cité les ASSE-OM, ASSE-Chateauroux ou ASSE-Sochaux. C’est clair que c’était de grands moments. Pour faire mon intéressant, je vais parler de deux autres matches, amicaux, qui plus est, qui m’ont franchement marqué.

Le premier, c’est le match d’avant-saison face à l’Inter. Tribunes un peu dégarnies et deux équipes pas au point. C’est alors que l’instant magique est survenu avec ce but venu d’ailleurs de Chavériat. Une tête de 20 m qui lobe complètement Perruzzi. Je me souviens surtout du silence dans le stade pendant la trajectoire du ballon et l’explosion qui a suivi. C’était grand et la preuve de la simplicité et du côté génial que peut prendre le foot par instants.

L’autre match amical que je voulais évoquer est l’inénarrable rencontre entre l’ASSE et l’équipe Espoirs de la Chine, programmée juste après le Nouvel An. Ç’avait été un festival de n’importe quoi, avec des joueurs visiblement éméchés et ponctué par un 0-0 qu’on aurait pu deviner avant le début du match. Avec, pour point d’orgue, un sauvetage d’Olesen sur sa ligne, félicité par ses coéquipiers comme un joueur de foot américain venant de planter un touchdown. Un tout petit match, mais 90 minutes de pur délire avec les potes.

Enfiles-tu un maillot de Saint-Etienne quand tu vas au stade ou quand tu regardes le match à la télé ? Si oui, quel maillot ?

Rarement, parce qu’un maillot de foot, c’est fait pour jouer. Je mets plutôt le TS Poto2, mais je trouve qu’il porte un peu la poisse. J’ai osé le « Sex, Drugs & Cyril Rool » pour la venue de Nice et, au final, on gagne, malgré le but de Rool. Je vais peut-être retenter ce pari pour le retour.

Connais-tu par coeur les paroles de la chanson mythique ?
Ça fait partie du cursus normal d’un écolier stéphanois, non ? 

Carte blanche (quelque chose qui te tient à coeur ? une anecdote ? un coup de gueule ?....)
Plutôt une annonce. En fait, dans l'euphorie du tournoi international de Sorbiers susnommé, le casier à bouteilles de ma mère a décidé de demander l'asile politique en Tchécoslovaquie. Depuis, elle souhaite instamment son retour. Donc, si vous voyez un casier à bouteilles en plastique bleu errer du côté de Prague, demandez-lui de revenir ! On est prêt à lui pardonner son escapade sans condition !

Plus sérieusement, ce qui me tient vraiment à cœur, c’est ce pincement qu’on ressent tous en arrivant au stade, cette impression qu’il va se passer quelque chose et, même s’il ne se passe rien, qu’on fera le maximum depuis les tribunes pour forcer le destin. Ce sentiment qu’on peut repartir déçu du stade, mais jamais sans souvenir, sans une anecdote à raconter plus tard. Le public qui reprend le nom des joueurs dès les matches amicaux, les contre-attaques à grands coups de « Allez, allez ! », ces moments où le stade entier prend feu pour quelques corners consécutifs, où les latérales se lèvent pour un tacle de Carteron, tout ça fait qu’il y aura, à jamais, les Verts et les autres.

Désolé d’avoir été aussi bavard, mais fallait pas me donner la parole ! Je vais terminer sur un ton un peu moralisateur en parlant de l’arbitre. Je sais la frustration qu’engendre une erreur, mais sachons raison garder : dernièrement, encore, un arbitre amateur a été pris en chasse à sa sortie du stade par deux supporters. Ces deux abrutis se sont foutus au fossé. L’arbitre s’arrête pour leur porter secours, mais ça ne les a pas empêchés de lui faire une grosse tête ! Et des actes comme celui-là se produisent malheureusement tous les weekends. Les insultes du samedi soir sont les graines des coups du dimanche après-midi. 

Enfin, UN GRAND MERCI À L’ÉQUIPE DE POTEAUX CARRÉS POUR LEUR TRAVAIL ADMIRABLE !