La fulgurance de sa progression sportive à Sainté n’a d’égale que sa pointe de vitesse sur le terrain. Aubameyang lesté à son arrivée au club de l’image du sprinteur qui ne sait pas jouer au ballon en part deux ans plus tard avec le statut de meilleur buteur du club depuis Platoche. Respect. Eternel.
Merci qui ? Merci Sadran !
La trajectoire d’Aubameyang est exemplaire en ce qu’elle démontre à tous les supporters bardés de certitudes (pléonasme) qu’il est parfois bon de délaisser le jugement péremptoire et définitif au profit de l’avis nuancé voire, soyons fous, de l’hésitation. Car le souvenir un peu honteux de ce soir de mai 2011 m’est souvent revenu en mémoire. Ce soir de clôture où les Verts, à l’issue d’un agaçant Sainté-PSG (1-1) qui avait vu Aubame caviarder tout ce qu’il pouvait face au but, étaient descendus à la dixième place. Ce soir, oui, il faut bien l’admettre, comme sans doute 95% des supporters, face aux millions d’euros de droit télé envolés pouir cause de pieds carrés, j’avais souhaité qu’on rende au Milan AC son sprinteur maladroit. Ce soir où il m’était alors apparu évident que, quitte à garder un attaquant physique mais manquant de réalisme (doux euphémisme), il valait mieux miser sur Manu Rivière, qui avait, lui, au moins démontré la saison précédente, qu’il pouvait parfois se montrer efficace. Ce soir où les statistiques misérables d’Aubame (2 buts à Lille, 2 buts à Monaco et donc 2 buts en 6 mois et 14 matchs à Sainté) achevaient de convaincre les derniers hurluberlus qui avaient perçu un vrai potentiel chez le joueur. Un potentiel qu’avait décelé Guy Lacombe, qui l’avait fait venir (et beaucoup jouer, 17 titularisations en une demi saison) à Monaco : « C'est un garçon que j'ai voulu avoir. C'est un joueur d'avenir qui a une grosse marge de progression » confiait-il à l’automne 2010 à Nice Matin. Ejecté du Rocher à la trêve, il n’aura pas le temps de le voir éclore et son remplaçant Laurent Banide (qu’on ne remerciera jamais assez) ne vit pas l’intérêt de le conserver. D’où ce premier prêt sans attrait à Sainté.
Et puis Toulouse et son fameux projet sportif (qu’on ne remerciera jamais assez) est passé par là, nous arrachant Rivière et laissant une place libre devant pour un attaquant rapide capable de prendre les espaces.
Merci qui ? Merci Galette !
Alors Galette (qu’on ne remerciera jamais assez) se dit, que finalement, et faute de grives, il n’était pas contre revoir PEA sur une saison pleine. En prêt de nouveau, histoire de ne prendre aucun risque avec un joueur qui ne représentait alors qu’un pari. « Ce n’est pas exclu qu’il revienne » déclarait-il ainsi dans le Progrès fin juin 2011, cachant sans peine son enthousiasme droopiesque auquel Aubame, une fois de retour, lucide sur les doutes le concernant répliquait aussitôt par un bien senti « je veux prouver aux gens que je sais aussi marquer des buts ». Tais-toi et bosse pensait-on alors au sujet de ce qui ne devait être qu’un joueur de complément.
Deux saisons plus tard, la preuve est là, et elle est aussi éclatante que la couleur de son nouveau maillot. Aubame en deux délicieuses saisons aura su doublement être un buteur d’exception : parce qu’avec ses 35 buts il est le meilleur buteur de L1 sur les deux dernières saisons devant … Gomis, 30 buts, et parce qu’outre son bilan chiffré il a su nous gratifier de quelques pions aussi géniaux qu’improbables (à Bordeaux, à Toulouse, à Sochaux, contre Montpellier…).
Buteur d’exception donc, mais tellement pas que… Si chacun se souvient avec émotion du but historique de Brandao le 20 avril dernier, comment oublier l’aussi inspiré qu’efficace centre de l’extérieur du pied droit d’Aubame depuis l’aile gauche ? Pratiquant avec succès l’alternance, on l’aura aussi beaucoup vu et tellement apprécié sur la droite dès l’instant où Brandao s’installa au centre. A l’heure de chercher à conserver ce dernier, il ne faut d’ailleurs pas oublier que s’il a tant brillé cette saison, notre Brésilien le doit aussi aux superbes offrandes de notre ex-n°7 (PSG, Nancy…).
Au-delà du choix décisif de lui tendre de nouveau la main en juillet 2011, Galette aura donc su accompagner Aubame dans sa fulgurante progression.
Merci qui ? Merci Aubame !
De misérables, les stats d’Aubame sont devenues deux ans plus tard formidables. Avec 37 buts au total en Ligue 1 sous le maillot Vert il se positionne au palmarès des trente dernières années juste derrière Tibeuf (39 buts) et Gomis (38 buts), mais loin devant eux au plus parlant ratio buts / matches joués. Depuis Platini, on n’avait pas vu un buteur aussi prolifique à Sainté, ce simple constat a de quoi donner le vertige. Vertige devant le vide que laisse le départ d’Aubame sur le front de notre attaque. Et vertige de l’amour. Cet amour qui s’est traduit par ce double sentiment de tristesse et de fierté au moment de l’officialisation de son départ pour Dortmund. Vendu 13 millions d’euros (si on en croit la communication officielle), il est bon de rappeler que PEA représente avec Gomis le plus gros transfert jamais réalisé par Sainté devant Matuidi et Payet, mais avec une plus-value largement supérieure. De ça on peut le remercier. Comme on peut le remercier du plaisir qu’il nous a procuré balle au pied. Comme on n’oubliera pas non plus de le remercier pour la fraîcheur de son état d’esprit et l’intelligence dont il a toujours su faire preuve, dans ses discours aussi humbles qu’ambitieux, et dans sa gestion de sa carrière (mariant à la perfection le respect de son club - en résistant à la tentation du melon de janvier, dimitri et piniok si vous me lisez…- et la cohérence sportive de son choix).
Mens sana in corpore sano. Vraiment. Sans doute bien aidé en cela par son entourage, en particulier son père, Aubame a parcouru depuis deux ans une trajectoire exemplaire.
Au point, que, non vacciné par le fiasco de mon pari initial le concernant (en résumé : « ce type ne restera qu’un sprinteur ») j’en ose un second : fort de son talent, de son ambition, et de son intelligence, il n’est pas interdit de penser qu’il vaudra peut-être 30 millions dans deux ans.
Car oui, il faut le redire, Aubame est un attaquant complet, capable de jouer dans l’axe ou sur l’aile, capable de marquer régulièrement. Et possédant comme tous les très grands attaquants un truc en plus, qui le distingue des autres : sa phénomènale pointe de vitesse.
Aujourd’hui quittant Sainté avec le statut du très bon joueur de Ligue 1, il sera peut-être demain une grande star du football mondial.
Quel chemin parcouru depuis ce soir de mai 2011…Et quelle belle leçon…On en viendrait presque à se dire qu’il ne faut jamais condamner un joueur, qu’on peut toujours espérer avoir de divines surprises. Yoric, Idriss, Lynel, si vous nous lisez…