La bête noire a été domptée. Mais que ce fut dur... Quoi qu'il en soit, une prestation qui résume à merveille les possibilités et les limites du 4-2-3-1 alla Galette.
Pour Christophe Galtier, c'est un peu Noël avant l'heure. Récupérer Brandao et Perrin en même temps, il y a de quoi griller un cigare en souriant à son verre de scotch. Galette fait d'emblée un choix fort : même en présence du pivot, pas de retour au 4-3-3. Corgnet, chargé de mener les attaques vertes, commencera en soutien de l'attaquant de pointe. Dans cette configuration, le plan de jeu, on le connaît d'avance : démarrage pied au plancher, pressing haut, jeu direct. Pour le mettre en œuvre, le choix des hommes apporte une surprise : Diomandé est préféré à Clément et à Cohade dans l'entrejeu. Les autres postes correspondent à ce qui était attendu, compte tenu des absences (notamment celles d'Hamouma et Bayal).
En face, Gourcuff, qui se ruine en frais de santé pour ses joueurs blessés, bricole un bloc axial inédit. Si on sait que Lautoa et Ecuele Manga peuvent faire une charnière centrale de bonne facture, on reste circonspect devant l'association Coutadeur-Doukouré à la récupération. Les ailes en revanche, se portent bien ; et la doublette Aboubakar-Aliadière, redoutable sur le papier, est alignée pour la deuxième fois seulement cette saison.
On résume. 4-2-3-1 contre 4-4-2 (ce qui n'est pas loin d'être la même chose), pressing haut, impact physique, recherche rapide des attaquants : les deux équipes viennent avec des états d'esprit similaires sur la pelouse. L'animation n'est pourtant pas la même. Sainté s'appuie sur un pivot axial (Brandao) autour duquel tourne une ligne de trois (Tabanou, Mollo et Corgnet, le plus libre) ; par conséquent, on cherche d'abord un point de fixation dos au but avant de construire une offensive. A Lorient, on préfère miser sur des balles dans le dos des latéraux à destination des deux pointes, qui enchaîneront les courses latérales.
Démarrage en trombe
Lorient se montre le premier, mais Zouma contre la frappe d'Aboubakar (1'). C'est pourtant Sainté qui dicte le rythme du match grâce à une entame tonitruante. Dès la 3è minute, Diomandé réalise une superbe ouverture pour Clerc, dont le centre est arrêté par Audard. Ce n'est que partie remise : l'ancien niçois ouvre le score dès la 6'. Les Verts mettent une grosse pression. Sur les touches de Ghoulam dans les 25 derniers mètres, on voit même Perrin et Zouma tenter de venir mettre la caboche (10'). Le deuxième but ne tardera pas à venir (14'), et le troisième ne sera pas loin dans la foulée (action litigieuse sur Brandao dans la surface, suivi d'une tête santiniesque sur l'intérieur de la barre transversale par Corgnet).
Malgré un Perrin rayonnant, les Verts commencent à baisser physiquement. Le pressing ne se déclenche plus que dans leur propre moitié de terrain, et Lorient arrive de plus en plus à développer son jeu en deux phases (une première de jeu direct vers les attaquants ; une deuxième de jeu à la nantaise dans la zone de vérité, à base de mouvement et de passes courtes). Jouffre pose beaucoup de problème par ses dézonages dans l'axe. Pourtant, le seul embryon d'occasion est dû à une mauvaise couverture de balle de Zouma (23'), capable d'alterner interventions de très haut niveau et ratés terrorisants.
Après l'effort, l'inconfort
A l'inverse, on assiste même à une nouvelle poussée de fièvre verte : en l'espace de trois minutes, Ghoulam va envoyer une mine de 35m sur la barre, une main lorientaise se décolle sur une reprise acrobatique de Mollo, Brandao est trop altruiste alors qu'il a l'occasion de marquer et Perrin marque un but moins hors jeu que celui de Modesto. Ce regain est éphémère ; Lorient a pris la mesure du match et réussit l'exploit de marquer sans se montrer dangereux (38'). A la pause, frustration : les stéphanois auraient pu avoir tué le match en 15 minutes...
Malgré la rentrée de Bourillon à la place de l'inexpérimenté Doukouré, la deuxième période commence exactement comme la première : Aboubakar nous fait frissonner au coup d'envoi, puis les Verts écrasent tout sur leur passage. On notera surtout ce possible pénalty sur Zouma (50') et le slalom de Ghoulam ponctué d'une frappe pied droit qui y allait si un pied inopportun n'avait traîné par là (52').
Serre, Marcel, serre !
Au tournant de l'heure de jeu, le coup de mou arrive, notamment pour Corgnet et Brandao, qui disparaissent de plus en plus de la circulation. Cette fois, les Verts n'ont pas réussi à marquer d'entrée. Lorient peine à se montrer dangereux, mais Ruffier doit se montrer vigilant sur des tentatives lointaines (62', par exemple) ; Aliadière commence même à passer parfois devant Perrin. Les remplacements sont nécessaires : Gradel remplace un Tabanou déçu (65'), tandis que Cohade prend poste pour poste le relais de Corgnet (69'). Ce double coup de fouet donne un second souffle à l'ASSE : le pressing reprend de la vigueur, et Cohade sait se rendre disponible dos au but. Le troisième but (72') est la récompense de ce renouveau temporaire.
Temporaire, car les Verts vont connaître une fin de match plus qu'éprouvante. Entre fébrilité défensive (Zouma et Ruffier à la 76', se trouent sans dommages) et baisse de pied physique (Brandao et Mollo, lessivés, seront sur la fin quasiment inutiles), on se ronge les ongles. L'égalisation n'aurait pas été surprenante, mais Lorient ne trouvera la faille qu'une fois - ouf. Trois points qui font du bien à la confiance !
Les buts
1-0 Clerc, 6'
Passe en retrait pour Audard. Mollo presse le gardien. Dans 95% des cas, ça ne sert à rien. Pas cette fois : l'ailier Vert touche le ballon, qui est récupéré par Tabanou. Le centre est immédiat : Brandao est battu, mais l'ASSE bénéficie d'un corner. Brandao se montre cette fois souverain ; le but sera en revanche accordé à François Clerc qui détourne légèrement le ballon. 1 CPA, 1 but.
2-0 Corgnet, 14'
Le coup-franc est anodin. Dégagement de Ruffier, duel aérien au niveau de la ligne médiane, poussette. Clerc envoie une longue ouverture dans la boîte. Les lorientais se focalisent sur Brandao, et en oublient Corgnet. Contrôle, frappe, lucarne. Paix à ton âme, l'araignée. 2 CPA, 2 buts.
2-1 Jouffre 38'
Le but typique du jeu lorientais : pression directe sur les défenseurs adversaires par une passe longue, puis mouvement et passes courtes. Jouffre, qui n'hésite pas à s'engouffrer dans l'axe, tente sa chance. La frappe n'est pas particulièrement forte ni précise ; elle est juste soudaine. Trop pour Ruffier, qui pensait peut-être déjà à retourner aux vestiaires.
3-1 Gradel, 72'
Clerc et Cohade travaillent côté droit, et fixent la défense morbihannaise. Puis, il reviennent dans l'axe, avec Diomandé, dont l'ouverture pour Gradel côté opposé est pleine de justesse. L'ivoirien sert Ghoulam en dédoublement et se place intelligemment ; Jouffre, fatigué, ne le suit pas. Servi en retrait par Faouzi, seul dans la surface, MAG garde toute sa lucidité et marque sans trembler.
3-2 Aboubakar, 86'
C'est une action de hand, de gauche à droite le long de la surface, qui procure un corner aux Merlus. C'est une sortie grégorinienne de Ruffier. C'est une tête de l'attaquant le plus en vue en cette fin de match. C'est un motif de serrage de fesses qu'on souhaiterait ne plus revoir.