Le début de saison, c’est toujours un moment assez délicat. Entre le mercato qui n’a pas encore fermé ses portes, les joueurs qui se cherchent encore et parfois une préparation éprouvante, les premiers matchs donnent lieu à des surprises, ou à des contre-performances répétées.
L’an dernier, l’ASSE se déplace à Toulouse pour son premier match à l’extérieur de la saison, après un revers à domicile contre le LOSC. Pour ce match au Stadium, le 18 août 2012, les Verts se présentent sans Brandao, qui n’est pas encore prêt physiquement, avec Romain Hamouma et Fabien Lemoine sur le banc. Les Verts finissent par s’incliner 2-1 au terme d’un match catastrophique (où Ruffier stoppa un pénalty) : les supporters remettent en cause le mercato et commencent à s’inquiéter après 2 défaites consécutives. Ça ne vous rappelle pas quelque chose dans les grandes lignes ?
Au coup d’envoi, la configuration de l’ASSE est la même que celle utilisée ce week-end à Lille : Ruffier défend les buts devant une ligne de 4 composée de Ghoulam, Mignot, Zouma et Perrin, qui jouera son dernier match en tant que défenseur latéral après avoir pris le bouillon par un certain Franck Tabanou. Galtier est un habitué du bricolage en début de saison, comme hier lorsque Tabanou est passé arrière gauche ou Corgnet ailier droit (encore). Jérémy Clément évolue en 6, tandis que Guilavogui aurait certainement dû se trouver en soutien de Cohade. L’attaque est composée de Sako et Nicolita avec en pointe Aubameyang.
Un attaquant esseulé
Pierre Emerick Aubameyang a d’ailleurs été totalement esseulé lors de ce match à Toulouse. En 90 minutes, il ne touche que 17 ballons, en gagne seulement 2 et en perd 6. Un match frustrant, comme celui de Saadi hier, qui n’a touché que 11 ballons. La différence entre les deux se fait sur le talent intrinsèque : avec 17 ballons, PEA tire 3 fois et cadre 2 fois. Ce que Saadi n’a jamais été en mesure de faire.
Si l’on regarde le match d’hier, en phase défensive comme offensive, il n’est pas facile pour Idriss Saadi de toucher un ballon exploitable. Sur l’image en phase défensive, la zone rouge représente le « no man’s land » entre la ligne de 5 du milieu et le jeune attaquant stéphanois. Imaginons que l’ailier nordiste fasse une mauvaise passe dans l’axe du terrain : aucun joueur ne pourra l’intercepter. Ce serait peut-être le rôle de Renaud Cohade de remonter un peu pour éviter la coupure qui a fait que Saadi a touché aussi peu de ballons… Sur l’autre image, en phase offensive, on voit une action assez banale, qui se finira par un ciseau un peu raté de l’attaquant stéphanois. Cohade donne un ballon vers l’avant au milieu de terrain. Guilavogui doit alors dézoner afin d’importer un minuscule soutien à l’attaque stéphanoise : un soutien de maigre importance. Comment imaginer que le jeune Idriss Saadi, qui n’a jamais marqué en Ligue 1, arrive à conclure une occasion où il se trouve seul au milieu de 7 joueurs lillois, sans aucun soutien dans un périmètre de 20 mètres. Son retourné aurait pu se finir en passe décisive, mais les joueurs stéphanois sont arrivés trop tard dans la zone de l’action.
A Toulouse l’an dernier, même symptôme, même résultat. En phase défensive, l’ASSE laisse Aubameyang désespérément seul. Au moment de l’action, qui va d’ailleurs amener le pénalty pour Toulouse (coïncidence troublante avec ce week-end !), les lignes de Galtier se mettent en place : Nicolita en réalité n’apporte pas de soutien au centre du terrain, il a perdu le ballon et s’en va défendre en sprintant tandis que l’attaquant gabonais reste désespérément seul au beau milieu de nombreux adversaires se trouvant derrière lui. Galtier reprochera d’ailleurs cette animation offensive défaillante à la fin du match. Sur l’autre image, en phase offensive, une action, là aussi banale qui mènera à une très rapide perte de balle dans le camp toulousain, par manque criant de solutions. Aubameyang vient de faire son appel en profondeur, il n’est pas servi. Il s’éloigne progressivement de Cohade et crée un énorme trou entre les lignes : l’ASSE perd le ballon. Si Gradel marque un pénalty anecdotique à la dernière minute, l’ASSE avait semblé terriblement impuissante durant tout le match.
La solution trouvée à Furiani ?
Cette ASSE inoffensive dans la ville rose a ensuite pris ses premiers points en étrillant Brest 4-0 à la maison. La rencontre qui nous intéresse se passe le week-end suivant : Bastia-ASSE. Toujours sans Brandao, les Verts vont jouer d’une manière totalement différente: Perrin passe dans l’axe, mais le principal changement n’est pas là : Jérémy Clément évolue maintenant seul en 6, au niveau des latéraux afin de se trouver entre la ligne défensive et le milieu, tandis que Lemoine et Cohade jouent maintenant sur la même ligne [alors que Guilavogui jouait entre Clément et Cohade à Toulouse]. Ce changement simple va révolutionner le jeu de l’ASSE pour toute la saison à venir. Les ailiers ne jouent pas forcément plus haut qu’à Toulouse (un peu tout de même), mais ils sont servis en permanence et par leurs dédoublements attirent les défenseurs bastiais vers le côté afin de laisser des espaces à PEA. Cette innovation tactique permet à l’ASSE de se montrer très dangereuse contre une équipe de Bastia plutôt en forme et de s’imposer 3-0 en terre Corse, provoquant enfin l’optimisme des supporters Verts.
Les problèmes de Toulouse que nous avions résolu à Bastia, nous allons les retrouver exactement dans l’infographie des positions moyennes du match à Lille ce week-end. Même si celle-ci n’est pas logique sur certains points du fait des nombreux changements au cours du match, on peut s’apercevoir d’une chose : Josuha Guilavogui a joué beaucoup trop bas, quasiment au niveau de Clément et n’a ainsi pas apporté de soutien à Cohade, qui a dû se dépêtrer seul. Les lillois l’ont vite compris, puisqu’ils ne lui ont laissé aucun espace. Si l’on avait vu un match ennuyant à Ajaccio, les Verts avaient fait preuve d’une grande rigueur tactique, et on va voir sur l’image d’en dessous que Lemoine a bien joué presque au même niveau que Cohade lors de ce match.
On remarque la grande similarité entre le schéma d’Ajaccio et celui utilisé à Bastia l’an dernier, pour le même résultat à chaque fois, une victoire. En revanche à Lille, l’ASSE a répété les erreurs faites à Toulouse l’an dernier. Un milieu désorganisé avec un Guilavogui trop bas, et de ce fait l’ASSE n’avait quasiment aucune chance de transpercer les lignes adverses…
Cette situation met donc l’ASSE dans une grande impuissance offensive. A chaque fois que le présumé «relayeur » descend au niveau du récupérateur, l’ASSE ne marque pas à moins d’un exploit individuel (car le foot est loin d’être une science exacte après tout…). Dans la cité phocéenne par exemple, ici à gauche, Guilavogui et Clément s’étaient marchés dessus, tandis que Lemoine avait joué au niveau des ailiers : ce qui donne une équipe inévitablement coupé en deux. Au Stade du Hainaut, dans un match horrible à regarder, Bodmer avait joué beaucoup trop bas, entre Cohade et Guilavogui, et les valenciennois avait facilement bloqué toute offensive de ce trident situé presque en file indienne.
Pour finir, la solution pourrait donc venir de là : l’organisation du trident au milieu de terrain, souvent dans la même configuration lors des victoires stéphanoises : un triangle dont la pointe se trouve vers la défense, en la personne du récupérateur. Dans tous les cas, vu les similarités du match entre le LOSC de cette année et de Toulouse l’an dernier, il ne faut pas tomber dans un pessimisme malvenu, l’ASSE doit encore se régler mais elle est sur la bonne voie. Pour se remonter le moral, rappelez-vous qu’après ces matchs laborieux, l’ASSE montait sur le podium fin Novembre dans la joie la plus totale.
LeForezLibre