Marqué à vie par le Chaudron, Laurent Morestin s'est confié à Poteaux Carrés depuis sa chaudronnerie avant le derby qui opposera ce dimanche soir ses deux anciens clubs dans la banlieue.


Que deviens-tu Laurent ? Que fais-tu depuis que tu as raccroché les crampons ?

Je vis à Toussieux, dans l’Ain, à proximité du Rhône, avec ma femme et mes trois enfants. À la fin de ma carrière de joueur professionnel à Gueugnon, j’avais eu quelques propositions pour jouer en National mais mes enfants devenaient grands et ma femme qui a toujours tenu à travailler était en CDI. Je me voyais mal faire bouger ma famille pour jouer six mois avec un contrat fédéral. Je me suis entraîné un temps un peu avec Villefranche-sur-Saône qui évoluait en CFA à l’époque. Mais ma volonté était d’apprendre un métier car je ne voulais plus dépendre du foot et je ne voulais plus faire bouger ma famille.

J’avais passé le brevet d’Etat premier degré et j’avais les notes susceptibles de me permettre d’aller au deuxième degré d’entraîneur mais au fond de moi je pense que ce métier n’est pas fait pour moi. Ça m’aurait amené de la précarité et ça m’aurait conduit à faire bouger ma famille pour entraîner à un certain niveau. J’ai donc fait le choix de signer fin 2008 dans un club de PHR, le FC Bords de Saône. Le président de ce club, Guy Rasper, est l’oncle de mon épouse et c’est aussi le PDG de la société dans laquelle je travaille aujourd’hui, CMN Industrie. Le deal, c’était d’apporter mon expérience de joueur professionnel dans le club et d’entrer dans son entreprise pour apprendre un métier et pouvoir en vivre jusqu’à la retraite. Quand on joue en Ligue 2, même si on a un bon salaire par rapport à la « vie normale », on ne gagne pas assez pour pouvoir en vivre sans travailler.

Quelle est l’activité de ton entreprise ? Quelles missions y exerces-tu ?

L’entreprise dans laquelle je travaille est une chaudronnerie industrielle. On fait des machines spéciales suivant les spécifications de nos clients dans différents domaines : l’agro-alimentaire, la pharma, l’énergie, la cosmétique, les échangeurs thermiques, etc. Je suis entré au départ à la comptabilité en 2010. Même si j’avais fait une petite formation dans ce domaine, j’ai beaucoup appris sur le tas.

Après on m’a orienté au bout de deux ans et demi sur les achats. Je n’étais pas forcément commercial dans l’âme ou très communicant. C’est quelque chose qui aurait pu être un petit peu rebutant au départ mais je me suis pris au jeu. Il faut dire que j’ai eu un bon professeur, un responsable achats qui avait beaucoup de vécu et qui m’a beaucoup apporté. J’ai travaillé à ses côtés pendant trois bonnes années et je lui ai succédé à son départ en retraite le 1er janvier 2016.

A la base j’avais juste un bac scientifique, j’avais ensuite attaqué un DEUG à l’UFR STAPS du temps où j’étais à l’Olympique Lyonnais mais je n’ai jamais été au bout car j’ai privilégié ma vie de footballeur professionnel. C’est sûr que ça fait mince quand tu veux espérer t’insérer plus tard dans une vie professionnelle déconnectée du foot. Je mesure la chance que j’aie eue de pouvoir apprendre un nouveau métier dans mon entreprise. Je m’y investis et je m’y sens épanoui. Je bosse dans une structure à taille humaine, on est un peu moins de cinquante.

Les achats, c’est très varié, je rencontre pas mal de monde. J’apprends chaque jour, c’est intéressant. Cela fait plus de dix ans que je suis dans l’entreprise et je n’ai pas vu le temps passer. J’espère pouvoir y travailler encore quelques années. On n’est pas dans un grand groupe, on ne saurait pas dire si l’entreprise sera encore là dans deux, cinq ou dix ans. La situation sanitaire du moment n’arrange rien. Heureusement on a la chance d’avoir des clients fidèles depuis de nombreuses années, ils ont du boulot donc ça nous permet d’avoir le volume d’affaires suffisant. Mais c’est sûr que ce reconfinement, avec toute l’incertitude qu’il y a autour, n’est pas une période propice pour les investisseurs et les gros projets. On sent quand même beaucoup d’attentisme et d’inquiétude.

As-tu gardé à côté de ça une activité en rapport avec le ballon rond ?

J’ai joué longtemps au FC Bords de Saône, j’y ai aussi entraîné. On était monté en DHR, on est redescendu une année où j’étais entraîneur, ça m’a beaucoup marqué. J’ai fait une coupure de deux ans avant de reprendre, j’avais l’objectif de remonter pour « réparer » le projet que quelque part je n’avais pas mené à bien. On a terminé deuxième, on n’est pas remonté, ça a été ma dernière année. Après j’ai repris en vétérans jusqu’à l’année dernière au CS Neuville. J’aurais dû réattaquer cette saison car j’ai beaucoup d’amis là-bas et je me sens très bien. Mais avec le virus qui est toujours là, j’ai préféré attendre et ne pas prendre de risques, pour ma famille surtout.

Pour qui battra ton cœur ce dimanche soir ?

Je pourrais te dire comme je l’avais dit à l’époque que je viens de Grenoble donc que je suis neutre ! (rires) Je garde des bons souvenirs des deux clubs. J’ai connu mes plus beaux moments de jeune joueur à l’OL car j’y ai remporté des titres, notamment en U17, en Gambardella et en CFA. Mais j’ai connu mes plus grandes joies de joueur professionnel à l’ASSE. J’ai vécu à Saint-Étienne une saison ponctuée d’une montée. Cette aventure m’a marqué et me marquera à vie. J’ai connu là-bas un groupe extraordinaire et une ferveur sans pareille. Dans l’esprit, je suis quelqu’un de travailleur, qui ne lâche rien. Ça me rapproche un petit peu plus de l’ASSE que de l’OL. Mais après, que le meilleur gagne dimanche !

T’as passé combien de temps chez les vilains ? Que retiens-tu de cette expérience en banlieue ?

J’ai rejoint le centre de formation de l’OL l’été 1990, j’avais quatorze ans et demi. J’ai fait mes classes là-bas, j’ai signé mon premier contrat pro en 1997 à vingt-et-un ans. Après j’ai été prêté à Châteauroux, où je suis resté car la Berrichonne me permettait de jouer. À l’OL j’ai fait partie d’une promotion de joueurs dont pas mal ont réussi à percer au niveau professionnel : Ludovic Giuly, David Linarès, Cédric Bardon ou encore Fabien Debec, que j’ai retrouvé plus tard à Sainté. Bizarrement, je n’ai pas le souvenir d’avoir disputé beaucoup de derbys. Je me souviens juste d’un derby très engagé en CFA. Un vrai derby. Le match s’était terminé sur un résultat nul et j’avais fini avec une fracture du péroné.

J’ai gagné plusieurs titres en jeunes avec l’OL mais je n’ai pas vraiment eu ma chance en équipe première. Je n’ai joué qu’un seul match en pro avec Lyon, contre Lens, et ce n’était pas à mon poste. J’avais joué arrière droit. Pour un défenseur central, gaucher de surcroît, ce n’était pas une mise en position évidente. Je n’ai pas eu ma chance mais peut-être que je n’ai pas su non plus la provoquer et la saisir. Peut-être que je n’étais pas assez mature à l‘époque pour pouvoir bousculer un peu la hiérarchie. J’ai préféré partir à Châteauroux pour avoir du temps de jeu, certes à un niveau moindre, mais professionnel quand même.

C’est sous le maillot de Châteauroux que tu as découvert l’ambiance du Chaudron.

Oui, j’ai un peu tout connu là-bas en termes d’ambiance comme adversaire. La première fois que j’ai joué à Geoffroy, c’était au printemps 1999. Sainté était déjà assuré de monter en L1, c’était le dernier match des Stéphanois à la maison. Malgré l’absence d’enjeu, il y avait une très grosse ambiance, le stade était plein. Les Verts étaient un peu en roue libre, on avait fait un bon 0-0.

La deuxième fois que j’ai joué avec la Berrichonne dans le Chaudron, l’ambiance était très spéciale, assez tendue. Il y avait une grève des supporters. Dans le kop nord, il y avait une banderole « un kop vide pour une équipe morbide ». On avait encore fait un match nul et vierge mais ce n’était pas très festif comme atmosphère. Heureusement c’est la seule fois que j’ai vu ça à Geoffroy.



Tu étais également le capitaine de l’équipe castelroussine qui avait écrasé les Verts 4-0 à Gaston-Petit. La Berri avait une belle petite équipe à l’époque !

Oui, Benjamin Nivet et Lilian Compan avaient d’ailleurs marqué lors de cette victoire de prestige. Les cinq saisons où j’ai joué à Châteauroux, on a toujours bien figuré. Il ne nous a pas manqué grand-chose pour pouvoir monter en Ligue 1. De mémoire on a souvent terminé entre la 6e et la 8e place. J’ai joué avec pas mal de bons joueurs là-bas. Je viens de citer Benjamin et Lilian, mais je pourrais en mentionner d’autres comme Steeve Savidan, Florent Malouda… Parmi mes meilleurs amis, il y a Ludovic Jeannel, Marc Giraudon, Hervé Bugnet également. Je les revois de temps à autre.

Tes bonnes prestations en championnat contre Sainté ont joué dans ton recrutement par l’ASSE en 2003 ?

Je pense qu’elles n’ont pas joué en ma défaveur en tout cas. Mais avant de rejoindre Sainté, j’ai vécu une dernière saison compliquée à Châteauroux. Il y avait pas mal de concurrence à mon poste de défenseur central. On a cherché à me déplacer au poste de milieu défensif. Mais quand on a fait toute sa formation et toute sa carrière défenseur central, c’est dur de se retrouver à recevoir des ballons dos au jeu et à s’introniser numéro 6. Je n’ai donc pas été tout le temps à mon avantage lors de cette dernière année. Cela a été assez difficile à supporter et à vivre car je ne m’épanouissais pas à ce poste.

J’aurais dû prolonger à Châteauroux mais au final je n’ai jamais eu d’offre. S’en est suivie une période de chômage avec un stage à l’UNFP. On a fait un match amical contre Saint-Étienne qui s’est bien passé pour moi. Je pense que c’est surtout ce match-là qui a attiré l’attention sur moi et que les décideurs stéphanois se sont dit : « Pourquoi pas Laurent peut-être ? » Quand j’ai signé, j’ai ressenti beaucoup de fierté et de soulagement. Quand t’es au chômage et que t’as une famille, ce n’est pas facile à vivre. Saint-Étienne est le club qui m’a tendu la main dans cette période difficile pour moi. C’est un club auquel je dois beaucoup et qui m’a marqué à vie.

Que gardes-tu de ta saison à Sainté ?

Je garde l’image d’un groupe de potes. Tu peux demander à tous les gens qui composaient ce groupe, beaucoup te diront ça. J’ai revu Nicolas Marin bien des années plus tard à un tournoi international U15 au CS Neuville, son fils jouait à Nice. J’ai eu l’impression d’avoir croisé Nico la veille alors que ça faisait dix ans qu’on ne s’était pas vu. Il y avait des liens forts dans ce groupe et on a obtenu de supers résultats.
Je garde aussi l’ambiance extraordinaire. On en parlait tout à l’heure, j’avais déjà joué à Geoffroy en tant qu’adversaire, mais c’était encore mieux d’y évoluer régulièrement avec le maillot vert. C’est vraiment énorme de jouer devant un tel public. Le bouquet final, ça a été ce dernier match et le titre à la dernière seconde.

Je suppose que tu gardes d’excellents souvenirs également de Frédéric Antonetti !

Il a sans doute été le meilleur entraîneur que j’ai eu dans ma carrière. Indépendamment d’être un vrai meneur d’hommes, c’était un coach très respecté, très fin tactiquement. Souvent la semaine il nous faisait travailler des phases de jeu par rapport à l’organisation de l’adversaire et on avait l’impression qu’en match le week-end ça se déroulait un peu comme dans un livre, ça se passait comme il l’avait prédit. Frédéric Antonetti avait une très bonne perception tactique de l’adversaire. Il savait mettre des choses en place pour nous motiver et pour nous permettre de gagner les matches.

Quel est le coéquipier stéphanois qui t’as le plus marqué ?

C’est dur de ressortir un individu, c’est tout le groupe qui m’a marqué. Mais en tant que défenseur central, je vais citer Vincent Hognon. Vincent m’a beaucoup impressionné par ses qualités de joueur, son sens de l’anticipation, son intelligence. Je l’appréciais beaucoup sportivement et aussi en tant que personne. Mais y’a plein d’autres joueurs que j’ai appréciés et qui m’ont marqué : Nicolas Marin, Julien Sablé, Jérémie Janot, Fabrice Jau, David Hellebuyck, Fred Mendy, Lilian Compan et j’en oublie.

Tous ceux qui composaient ce groupe en fait avaient des qualités de joueur et de cœur surtout. Tu vois, j’ai joué onze ans en pro, je n’ai jamais connu une telle osmose dans un groupe. J’adorais la mentalité de ce groupe, son état d’esprit. Je me sentais vraiment dans mon élément avec de tels coéquipiers. Je n’ai jamais eu des qualités de footballeur hors normes. Tout ce que j’ai eu, je l’ai obtenu par le travail, le courage, la persévérance. Ne rien lâcher et travailler pour l’équipe, c’est ce que j’aimais faire. C’est pour ça que j’ai tellement aimé jouer dans cette équipe. Il y avait aussi un super staff et j'en profite pour saluer Fred Emile, Hubert Largeron et Gérard Forissier.

Tu as aussi été le coéquipier de Loïc Perrin, qui a débuté sa carrière cette saison-là…

Je m’en souviens bien. Loïc n’avait que 18 ans. On l’a vu arriver dans le groupe avec Bafé Gomis. Je garde l’image de quelqu’un de bien éduqué. Loïc était un vrai bon jeune avec beaucoup de qualités. Il était à l’écoute. Il avait envie d’apprendre. Il était très respectueux de ses aînés. Il avait tout pour réussir. Il mérite amplement la carrière qu’il a eue, je lui tire un grand coup de chapeau.

Quel match t’a le plus marqué quand tu jouais à Sainté ?

Celui qui dépasse un peu tous les autres, c’est forcément le dernier. Saint-Étienne contre Châteauroux, mon ancien club. Quoi de plus beau que d’être sacré champion de France à la dernière minute sur un but d’anthologie !

Un autre match qui m’a marqué cette cette saison-là, c’est notre demi-finale de Coupe de la Ligue perdue contre Sochaux après prolongation. On menait 2-0 grâce à Patrice et Lilian. Je pense que si on ne prend pas ce but avant la mi-temps, le match est plié. On a raté le coche pour pas grand chose et je pense que l’histoire aurait pu être encore plus belle si on avait emmené le peuple vert au Stade de France. Heureusement il a eu l’occasion d’y aller neuf ans plus tard et d’assister au sacre de son équipe.



Lors de ces matches contre Sochaux et contre Châteauroux, le Chaudron était vraiment chaud bouillant…

Impressionnant ! Quand t’es sur le terrain, forcément, t’es sensible à ce qui se passe autour, ça te booste ! Après, on est quand même pas mal accaparé par le jeu, par les courses des adversaires, la position du ballon, etc. Mais c’est vrai que de temps à autres on prenait le temps de regarder admirativement les tribunes. De nombreux membres de ma famille étaient là lors du dernier match contre Châteauroux, ils pourraient m’en parler encore pendant des heures tellement l’ambiance les a marqués. Quelque part je pense que c’est tout ce public survolté qui a poussé Damien Bridonneau à tenter ce geste un peu fou. Je suis certain que dans un autre stade, sans cette ambiance, il ne l’aurait pas tenté et on n’aurait pas été champion. Ce douzième homme, c’est une grande force pour Saint-Étienne et c’est ce qui fait cruellement défaut aux Verts actuellement.



Quel bilan fais-tu à titre individuel de ta saison à l’ASSE ?

Écoute, ce que je retiens avant tout, c’est le bilan collectif, que je juge forcément excellent car on a fini champions de France. À titre individuel, j’estime que ma saison a été globalement satisfaisante. J’ai joué une trentaine de matches toutes compétitions confondues dont 24 en tant que titulaire. Avoir un tel temps de jeu dans un club qui a fini la saison par une montée, c’était inespéré pour moi, surtout que j’étais arrivé début août alors que le championnat venait de démarrer et que je sortais d’une petite période de chômage. Pendant la saison, j’ai eu des hauts et des bas. Comme j’avais enchaîné les matches avec l’UNFP pour me montrer et retrouver un club, j’ai eu un petit souci au genou donc je n’ai pas été dans une forme optimale tout le temps. On tournait avec Stéphane Hernandez et Vincent Hognon en défense centrale. C’est un trio qui fonctionnait bien malgré tout.

Pour quelle raison n’es-tu resté au club qu’une saison ?

J’avais signé un an à Saint-Étienne. La volonté de Frédéric Antonetti et de la direction, c’était de prolonger tous les joueurs qui avaient participé à l’aventure pour donner une suite d’évolution à ce groupe. Moi forcément ça aurait été mon souhait le plus cher de poursuivre l’aventure en vert dans l’élite. Mais malgré la belle saison sportive qu’on a faite, on a changé deux ou trois fois de président. C’était Henri Grange au départ, ensuite il y a eu Thomas Schmider et on a fini avec Bernard Caïazzo. C’était donc une année relativement mouvementée. Le coach a été remplacé, le club ne voulait plus garder tout le monde, j’ai fait partie des joueurs qui ont dû trouver un autre point de chute. Ça reste un regret de ne pas avoir pu découvrir la Ligue 1. Je n’avais peut-être que les qualités d’un joueur de Ligue 2. Il devait me manquer un je ne sais quoi. Peut-être quelques centimètres…

Culminant à 1m74, tu es probablement le seul défenseur central du XXIe siècle de ce gabarit à avoir fait une carrière professionnelle !

C’est vrai que mon gabarit modeste tranche avec les joueurs très athlétiques qu’on voit dans le football professionnel moderne. Bien sûr j’ai pas mal réfléchi à cette problématique de la taille. Je me dis que si j’avais eu quelques centimètres de plus, j’aurais peut-être été moins tonique, moins mobile. On a les qualités qu’on a. De toute façon, je pouvais faire ce que je voulais, je ne pouvais pas gagner des centimètres ! (rires) Je pense qu’il m’aura manqué quelque chose pour jouer en Ligue 1 mais pas forcément la taille car je compensais par un bon timing. Je suis fier et satisfait de la carrière que j’ai faite malgré tout. Joueur onze ans au niveau professionnel, ce n’est pas donné à tout le monde.

Peux-tu nous rappeler quel a été ton parcours de joueur après avoir quitté Saint-Étienne ?

J’ai joué la saison suivante dans un club que les Verts vont affronter après le derby : le Stade Brestois, entraîné à l’époque par Albert Rust. Bon, ce n'était pas Frédéric Antonetti mais chacun sa façon de manager un groupe. J'ai joué là-bas avec deux joueurs qui ont porté comme moi le maillot vert, David Grondin et Eduardo Oliveira. On avait fait une assez belle saison pour un promu. Mais Brest a fait venir Johann Charpenet. Je m’entendais très bien avec lui, on avait joué ensemble à l’OL. Mais je ne partais pas pour être titulaire donc j’ai saisi l’opportunité de jouer enfin sous les ordres de Victor Zvunka. Quand j’étais arrivé à Châteauroux, il était parti, quand j’étais parti de Châteauroux il était revenu. Il m’a donné cette chance de rebondir à Gueugnon, et ça permettait me rapprocher de la région lyonnaise d’où mon épouse est originaire. J’ai rejoint un club à taille humaine où j’ai connu de bons moments malgré le manque de moyens.

Restes-tu un observateur avisé de la Ligue 1 ? Que t’inspire le début de saison des deux clubs qui s’affronteront ce dimanche soir ?

Je suis toujours la Ligue 1 mais comme le diffuseur a changé, je n’ai pas l’occasion de suivre le championnat autant que j’aimerais tous les week-ends. À défaut de voir les matches de Sainté et de Lyon, il m’arrive de voir des résumés. L’ASSE avait très bien démarré la saison mais traverse actuellement une période vraiment compliquée avec cinq défaites de suite. Ce derby donne peut-être l’occasion aux Verts d’inverser la tendance et de relever la tête. Ce match peut arriver à point nommé pour eux.

L’OL est actuellement sur une meilleure dynamique. Les Lyonnais ne jouent pas de Coupe d’Europe cette saison mais je trouve que leur début de saison est quand même relativement intéressant. Ils ont l’air performants et bien évidemment ils n’auront pas envie de relancer Sainté. Je pense que l’ASSE aura plus à jouer et à perdre que l’OL. Un derby, ça reste particulier, la victoire ne revient pas toujours à l'équipe qui était la plus en forme juste avant. Mais pour avoir été joueur, je pense que les cinq défaites consécutives sont quand même dans les têtes des Verts.

C'est pour ça qu'à mon avis le début de match va beaucoup jouer. Les Stéphanois ne devront pas encaisser de but dans les premières minutes pour retrouver de la confiance et essayer de mettre à mal cette équipe lyonnaise. Si l’OL ouvre le score rapidement, Sainté risque de vivre un match vraiment très compliqué.

En conférence de presse, Claude Puel a déclaré que le résultat de ce derby était secondaire, le plus important pour lui étant que les joueurs se lâchent. Il dit ça pour enlever un peu de pression à ses joueurs, non ?

Oui, je comprends sa démarche et je pense qu’il est dans le vrai. Comme tu dis, il veut un peu dédramatiser le match, ne pas mette trop de pression à son groupe qui n’a pas besoin de ça. Je pense aussi qu’il a raison sur l’attitude à avoir sur ce type de match. Si les Verts restent sur cinq revers d’affilée, c’est forcément qu’il y a eu des manques au niveau du jeu et de l’attitude. Il veut que ses joueurs croient en eux et montrent une autre image en termes d’engagement et de solidarité sans pour autant se recroqueviller et se monter craintifs. Claude Puel souhaite que son équipe soit entreprenante.

Claude Puel met en place un projet où il mise beaucoup sur les jeunes, il leur donne du temps de jeu et espère les faire progresser, ce qui permettra au club de bien les revendre derrière et de s’y retrouver financièrement. C’est un projet forcément intéressant mais aussi un projet risqué car à court ou moyen terme tu peux enchaîner les mauvais résultats et te retrouver en grosses difficultés au classement. Et on sait que le football n’est pas le milieu où on donne le plus de temps à l’entraîneur quand ça ne va pas.

Que t’inspire le départ de Wesley Fofana à Leicester ?

Forcément ça me navre de voir des joueurs partir trop vite. C’est souvent l’appât du gain qui l’emporte, je pense que c’est humain. Si on te dit « je te multiplie ton salaire par cinq », qu’est-ce que tu fais ? En étant franc, je pense qu’il y a beaucoup de monde qui ne cracheraient pas dessus. Je considère que c’est aussi lié à la jeunesse d’aujourd’hui, qui veut tout et tout de suite. Je pense que les clubs de Ligue 1 n’ont pas les moyens de retenir les joueurs sollicités par les clubs étrangers.

C’est dommageable pour les clubs formateurs parce qu’ils forment des joueurs pour les revendre malgré eux. Ces joueurs-là pourraient apporter beaucoup plus et plus longtemps que ce qui se passe aujourd’hui. Le club s’y retrouve financièrement et ça montre que dans le recrutement et dans le centre de formation, ça travaille bien. Mais perdre des joueurs qu’on a formés sans les avoir vu s’épanouir au moins deux ans en équipe première, c’est quand même frustrant et dommageable pour le club.

Peux-tu nous donner ton prono pour le derby de ce dimanche ?

En général je ne suis pas un bon pronostiqueur, je suis plus chat noir qu’autre chose ! (rires) Mais je vais me concentrer cette fois. Attends, que je ne te dise pas de bêtises… Allez, je vois un match nul, 1-1. But d’Aouar pour Lyon et pour Sainté je mets une pièce sur Bouanga, en espérant qu’il soit apte à jouer. Je souhaite que ce derby permette à Saint-Étienne de relever la tête et de repartir sur une nouvelle spirale positive.

 

Merci à Laurent pour sa disponibilité